dimanche 5 février 2006

Lisez Les Epées

C'est une revue trimestrielle royaliste dont la devise est empruntée à Pierre Boutang : "Le droit du prince naît du besoin du peuple ".
Numero 18Le numéro 18 est consacré à un dossier qui fait la couverture en barbelés et titré "Défense de la Frontière", avec MM. E. Marsala, Alain Raison, Paul-Marie Couteaux, Michel Michel, Aymeric Chauprade, Benoît de Falkenhorst et Robert Grégoire. Suivent beaucoup d'articles passionnants, dont un sur l'instrumentalisation hardie des Grecs commise par Detienne de l'Ecole Pratique ; un hommage affectueux à Vladimir Volkoff ; un éreintage mérité de Harold Pinter ; un regard d'une fine acuité sur Arthur Honneger, et des lectures critiques en nombre. On termine sur l'Empire de la mélancolie, Génie et folie en Occident (expo), rare. Le sommaire est sur le site des Epées que vous pouvez atteindre en cliquant directement sur le titre du présent article. Voilà !
Glanés sur 64 pages - typographie assez petite, on n'est pas volé - quelques extraits pour vous faire envie.

D'Antoine Foncin sur Bernard Billaud qui a commis "D'un Chirac à l'autre".
Il n'est pas question d'affirmer que par elle-même la considération d'un Bien placé dans un au-delà politique -... - puisse suffire, comme le dit Joseph de Maistre, à relever "la note tonique du système" et à le sauver. Mais supposons que ce Bien, pour une nation et à une époque donnée, soit incarné dans la permanence d'une famille vivante léguée par l'histoire. Alors s'opère comme un changement de signe, et l'énergie conquérante, remarquable à sa manière d'un Jacques Chirac, trouve son point d'appui non hors mais dans la politique, et ne s'abîme plus, ... dans les marécages inqualifiables de l'opinion et du nombre tout-puissants.

De Paul-Marie Couteaux, Eloge de la frontière, sur le partage de l'empire carolingien.
Rien plus oultre.
Toute frontière est garante d'une civilisation en ce qu'elle lui donne à la fois une permanence et peut-être un mystère, une protection et peut-être une défense, une cohérence propre et peut-être une essence. C'est à l'endroit même où se constitue la connaissance de soi que l'autre est possible, même désirable. Une illustration parfaite de cette dialectique fut donnée un beau jour de l'an 842 à Strasbourg, lorsque les deux petits-fils puînés de Charlemagne, Louis le Germanique et Charles le Chauve, se rencontrent sur la frontière du Rhin pour se jurer assistance mutuelle contre les revendications de Lothaire - Lothaire, l'homme sans frontières qui entendait recréer à son profit l'empire carolingien. Or à Strasbourg chacun des deux frères puînés s'exprime dans la langue de l'autre. Ces textes [qui forment le] Serment de Strasbourg sont emblématiques de la dialectique essence/reconnaissance de l'autre : ce jour-là, chacun des deux frères à la fois reconnaît l'autre en ce qu'il est différent de lui et simultanément le reconnaît comme n allié. C'est là peut-être la pure formule de l'alliance et sans doute la clef de toute Europe, de toute Europe des nations.

De Robert Grégoire, La différence créatrice.
Quant à l'Internet ? Dissout-il la frontière ? Tant qu'existeront les nations dans des rapports Fichtéens, et définies par Renan comme un ensemble d'éléments subjectifs, dont la langue, existeront alors des barrières linguistiques qui joueront toujours le rôle de frontières dans le domaine des communications numériques.

De Sarah Vajda, entretien avec Laurent Schang sur la critique littéraire.
Schang : A part s'épier et se copier, j'ai l'impression que nos critiques excellent surtout dans le fichage des écrivains.
Vajda : Et comment pourraient-ils faire mieux dans le contexte. Stipendiés, ils doivent feindre d'être libres. Nul n’est dupe. Rinaldi - l'un des meilleurs du jour - paraît exigeant, ennuyeux à plus d'un, d'ailleurs il quitte Le Figaro ces jours-ci ! La réussite sociale a un prix et la vie d'un écrivain, serré aux rets du Milieu, n'est qu'une longue captivité dans la cage aux singes littéraires (le mot est de Montherlant). S'il en réchappe jamais, les chiens et les flics le retrouveront, critiques en cour et universitaires, qui au fond parlent le même langage, déguisé en un mot : "nécessaire conformité à l'esprit du temps".

D'Arnaud Odier, Morand roman.
Le volume de La Pléiade nous le rappelle : diplomate, amateur d'art, ami de Marcel Proust, séducteur d'innombrables femmes, époux d'une princesse roumaine follement riche et antisémite, poète et prosateur, devenu après la guerre un moraliste amer et contempteur de son temps, Paul Morand a vécu assez pour alimenté en anecdotes piquantes et en situations romanesques plusieurs générations de nos auteurs dépressifs.

D'E. Marsala, Les montagnes magiques (sur Charles Ferdinand Ramuz.)
Portrait de l'artiste en laboureur
Le premier niveau est celui du récit. Un récit presque toujours situé dans les communautés archaïques de la montagne suisse, où de rejoue inlassablement la tragédie des passions élémentaires : l'amour, la haine, la jalousie, l'abandon, la trahison, l'enlèvement, l'humiliation, le suicide et le meurtre. Comme dans l'Iliade -...- l'universalité se réalise dans le décor modeste, presque misérable, de hameaux perdus au fond des vallées, au bord des pentes caillouteuses ou au milieu des vignobles, avec parfois, au loin, le reflet trouble du Rhône, et la minuscule griffure de la voie de chemin de fer, seul signe tangible de l'existence de la "civilisation".

De Philippe Mesnard, L'empire de la mélancolie (expo).
Notre monde tout entier s'écroule (dans la sensation exténuante d'une chute sans fin vers une "société" toujours plus amorale : "de l'enfer il ne sort / que l'éternelle soif d'une impossible mort"), et les élégants symptômes d'un sentiment qu'on cultive pour mieux le domestiquer, le brider, l'annuler, font place aux affirmations sans fards d'une déréliction, d'un abandon, d'une acédie irrémédiable (Bonnefoy). Glissement déjà médiéval entre le péché et la maladie, entre l'acédie et la mélancolie, entre le morose et le triste, entre l'humeur noire et le corrompu.

Je ne me gêne pas de vous donner le prix des abonnements :

ABONNEMENT
 Normal : 18 euros
 Structure : 30 euros
 Propagande : 40 euros (3 exemplaires reçus, un pour votre concierge qui en parlera et le troisième pour le vicaire de la paroisse pour relever le niveau des sermons)
 Soutien : 48 euros
 Fondation : 145 euros
 D'un pays étranger: 30 euros

Chèque à l'ordre de A.D.P.R adressé à :
Les Epées
4, Square de la côte Saint-Thibault
92270 Bois-Colombes

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