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IV° Pouvoir

Abandonnée par un précédent occupant, la livraison¹ du Monde dépité par la censure marocaine gisait sur la table du salon au milieu de prospectus estivaux vantant la réserve d'indiens qu'est devenue mon pays natal. Sans cette coïncidence je n'aurai rien su du typhon antidémocratique, ayant barré la presse de ma villégiature. La petite Beaugé ne peut avaler qu'on lui claque la porte au nez du royaume chérifien, et l'éditorial de Fottorino de se vautrer dans la confusion classique entre "démocratisation" et "libéralisation".
Par principe, la monarchie ne peut être mise en équation populaire. Damned ! Le postulat contrevient à la liberté inusable de la presse qui juge, tranche et coupe comme le font les tribunaux d'exception, sans possibilité d'appel bien sûr, la moindre manifestation de contrariété des "sujets observés" provoquant une furia médiatique à laquelle peu survivent.

Qui ose décréter le huis-clos et prive le juge Fottorino de publier sa sentence démocrassique au sein de la population étudiée ? Un ministre de m... pas même élu ? Alors on fera du buzz, beaucoup de buzz, puisque la reprise du sondage de Tel Quel avait d'abord l'ambition légitime de vendre. On en fera autant par l'interdiction illégitime de "vendre" ! Ça vend pareil.

Sur le fond, Le Monde persiste dans cet amalgame entre libertés individuelles et régime démocratique, qui lui profite dès lors qu'il sous-tend la fameuse liberté de la presse de faire et de défaire : surnage ainsi ce quatrième pouvoir, complètement illégitime, lui, mais ô combien puissant ! Ne voit-on pas notre gouvernement agir à 99% en fonction de l'actualité ou de la notoriété médiatique d'une cause voire d'un simple fait divers ? Français de l'étranger mis en difficulté par une administration locale au mauvais ou au bon motif, n'appelez pas le consulat, il n'en peut mais ; trouvez plutôt un journaliste et actionnez des relais en métropole pour surenchérir sur son action ; vous aurez une chance de ne pas mourir dans les geôles exotiques car "Je-Suis-Partout" volera à votre secours, pourvu qu'une caméra soit disponible. Et c'est sans doute cette disponibilité qui sera pour les vôtres la difficulté cachée.

Ainsi devrait-on marquer plus soigneusement le pouvoir exorbitant des journaux dans le match politique, plus peut-être que de marquer nos adversaires politiques directs (que je ne citerai pas aujourd'hui), en démontant les montages et fabrications d'opinions, en stigmatisant les effets de ce que l'on a convenu d'appeler la "campagne de presse". D'aucuns en moururent ; souvenez-vous !
Cette escroquerie de faire passer le wagon de la liberté de la presse dans le train des libertés individuelles ne cessera pas dans le monde d'images où nous sommes arrivés. Aussi est-il vain de s'en offusquer et vaut-il mieux entrer dans le gras et dénoncer la manip. Les groupes de presse majeurs ont des agendas politiques. Les groupes anglo-saxons affichent les leurs sans complexe ; les groupes français n'en ont pas moins - quoique, gérés par des jean-foutre, ils soient obsédés surtout par leur propre survie - mais se planquent derrière les grands principes universels pour préserver leur intégrité morale aux yeux des consommateurs. Quelle blague !

manif France Télévisions

Note (1): datée du 4 août 2009



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