vendredi 22 avril 2011

Auto Shanghai 2011

Ce billet a été publié dans l'Action Française 2000 du 21 avril. Il entre en archives RA.
Le Grand Prix de Formule 1 disputé à Shanghaï dimanche dernier ouvrait en quelque sorte la quinzaine automobile de l'Empire. Le Salon 2011 de la mégapole maritime accueille du 21 au 28 avril quatrevingt-quatre constructeurs chinois et étrangers qui se disputent le nouveau premier marché du monde. Comme au salon le plus huppé de la planète, Genève, les concept-cars de rêve en seront les vedettes, ce qui prouve la maturité de la manifestation, et celle des usines locales.


Le clou de l’exposition pourrait être la Luxgen Neora, un concept de berline électrique longue et basse très élégante. Cette voiture formosane est susceptible d’entrer en production aux usines Dongfeng de Hangzhou à côté des SUV et MPV Luxgen qui vont sortir à la cadence de 120.000 unités par an chez les soixante-cinq concessionnaires de la nouvelle marque.

On parle beaucoup du concept Mercedes-Benz Classe A mais plus encore de l’Audi Q3, marque bavaroise qui récolte les fruits d’une entrée réussie de Volkswagen sur le marché de la production nationale, il y a vingt-cinq ans. La Qualité allemande made in China était le slogan publicitaire pour la Santana shanghaienne.


Les marques Peugeot et Citroën seront en vue car elles font partie du paysage industriel local et produisent de la qualité dans leurs usines de Wuhan. PSA a aussi une fonderie de moteurs à Xiangyang. La 3008 a été élue « Crossover¹ de l’année 2010 », ce qui n’est pas un mince succès. Les modèles des stands PSA sont emblématiques, comme la grosse 508 qui devient le vaisseau amiral du fauve de Sochaux, et un concept hybride développé par leur China Tech Center de Shanghaï, celui-là même où fut produit la Metropolis de Matthias Hossan pour l’Exposition universelle de 2010. Un projet de voiture présidentielle développé sur cette base serait d’ailleurs dans les cartons pour remonter les Champs-Elysées en mai 2012. Le toit aux places arrière n’est pas trop bas, dit-on.
Citroën, intelligemment démarquée au sein de la galaxie PSA, va montrer sa DS5 en avant-première mondiale. C’est un crossover¹ à moteur hybride alliant style et technologie pointue dans la lignée prestigieuse des DS mythiques. Pour l’instant la nouvelle gamme DS est un sans-faute.

Les chiffres de production des Peugeot-Citroën en Chine sont éloquents et sanctionnent une politique prudente mais volontaire, depuis l’époque difficile d’acclimatation « psychologique » apportée par l’usine de breaks 505 et pick-up 504 de Canton (!), reprise depuis par Honda, jusqu’au succès de la coproduction avec la Dongfeng Motors de Wuhan. En 2010, ce sont 376.000 unités qui sont tombées des chaînes et ont été vendues, soit une hausse de 38%. Mais les parts de marché du Groupe en Asie sont encore trop justes pour amortir les coûts locaux de développement produits et le réseau de concessionnaires. Pour atteindre une taille critique et stabiliser son aventure chinoise pour qu’elle n’en soit plus une, PSA privilégie une croissance organique par le lancement de nouveaux modèles technologiques. Au China Tech Center travaillent 450 ingénieurs et stylistes. L’objectif est d’atteindre 8% de part de marché au cours du quinquennat 2015-2020, ce qui n’est pas rien dans un grand marché en constante progression. Aussi le groupe a-t-il doublé la mise dans un accord paritaire passé avec le groupe Chang’An qui fabriquera en 2012 la série² DS chez Harbin Hafei à Shenzhen. Mais il manque encore la signature politique. Il se dit qu’une voiture low cost y serait produite également mais sous un nom de marque inédit ; le projet interfère peut-être avec l’autre «Aventure Peugeot» à Bombay.


Reste Renault ! Le moteur RS27 de Viry-Châtillon a de nouveau brillé sur le podium du Grand Prix de Formule 1 dans les voitures Red Bull qui continuent aux avant-postes. Mais cette gloire ne participera pas de la promotion du losange en Chine où monsieur Ghosn ne produit rien.
Pour les autorités chinoises, qui n’avaient pas spécialement favorisé les projets de Louis Schweitzer, les accords « Nissan 2002 » valent pour tout le groupe qui devra s’y limiter. Monsieur Ghosn en tirera avantage pour sa casquette de patron japonais et devra donc s’en contenter puisque ce ne sont pas les dénonciations calomnieuses du staff Renault à l’endroit des espions chinois qui peuvent améliorer la collaboration sous la seconde casquette. Si les Chinois ne sur-réagissent pas à cette mascarade, comme ils le font d’ordinaire, c’est au simple motif que l’entreprise est toujours pour eux une entreprise publique, donc… pardonnable. Renault a un stand d’importation au salon (hall E3).
A côté de Nissan, Renault n’est quand même pas absent d’Asie, avec une grosse usine à Madras (Inde) qui va produire les modèles Fluence et le 4x4 Koleos, et la belle usine Samsung de Busan (Corée) qui fabrique la Latitude, haut de gamme Renault du moment.


Mais au final, le défi automobile chinois réside moins dans la construction d’usines-champignons robotisées que dans le rationnement énergétique qui menace le pays.
C’est une autre question.

Note (1): Crossover : néologisme international qui désigne des voitures multi-usage nées du croisement d’un véhicule utilitaire sport (SUV) et d’une berline (4 portes) voire un coupé (2 portes) ou encore un monospace, dans le but de profiter des avantages qu'offrent chacun des univers ainsi croisés. Au résultat, c’est un véhicule résistant au stress de la conduite en ville.
Note (2): Présentation officielle DS5

Bonus RA : Etude de texte

L'article a fait l'objet d'une étude de texte français en classe de première au lycée Owen de Sainz de Lamotte-Beuvron (Loir et Cher). La meilleure copie a été celle d'Aïssatou M. dont nous reproduisons ci-dessous le corps de critique :
L'article est orienté objet, ce qui est assez peu courant dans un journal d'opinion aussi braqué que l'AF. Un lecteur averti aura noté plusieurs non-dits :
La voiture vedette est formosane (Taïwan) mais pour tous là-bas elle est 100% chinoise, ce confirmant l'impérialité de l'île nationaliste.
Tous les accords de production industrielle en Chine sont politiques : Volkswagen a naturalisé la qualité légendaire allemande ; M. Louis Schweitzer ne pouvait cajoler le Japon (Nissan) et la Chine ensemble ; Peugeot attend un trait de stylo pour basculer son compteur électrique de Shenzhen sur ON ; La bévue énorme de Renault dans ses réactions à l'escroquerie de son service de défense passive ne l'handicape pas vraiment car le pouvoir central chinois ne l'a pas décidé.
Plus intéressant, les marges de progression de l'industrie automobile sont à l'évidence ailleurs qu'en Europe, ce qui drainera sur zone la recherche & développement. Le centre technique PSA de Shanghai a un effectif d'au moins mille salariés en comptant tous les services qui gravitent autour du coeur de projet (450 ingénieurs). Le travail en col blanc suit le travail en col bleu.

1 commentaire:

  1. Volvo Cars du groupe chinois Geely annonce de gros bénéfices au premier trimestre 2011, un an juste après son entrée dans le groupe.
    En cause, un essor des ventes d'automobiles au Brésil, en Chine et en Inde.
    (source)

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