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Un "six-février" en 2012 ?


La République des concussionnaires faillit mourir au sixième jour de février 34. Le hasard, les circonstances, lui accordèrent un sursis à exécution de six ans. Liquéfiée à terme, elle disparut à l'égout, dont on tira cinq ans plus tard la même mouture recyclée prenant le numéro suivant. Pour seulement treize ans. Au bout desquels elle rendit les clefs à son fondateur qui, un numéro plus loin, en fit sa chose. Celle-ci va fêter ses 53 ans le 13 mai prochain si on compte le premier jour de la V° République au putsch d'Alger. C'est beaucoup pour une République. La déliquescence de ce régime césarien exacerbé par le quinquennat, est conduite par l'impéritie d'héritiers sans talents ; annonce-telle un saut de numéro ? Si ça vous amuse ! répondrait le président Mitterrand !

La question du jour ne peut-elle être : un 6-février bientôt ?
Y a-t-il des analogies ? Oui et non. Si la crise économique est bien là et que la crise sociale induite pointe l'oreille, il n'y a pas de ressentiment profond contre la classe politique, bien que des affaires comme Karachi, Taïwan puissent y suppléer. Le "tous pourris" est un agacement populaire qui peut dégénérer au pire en entartage ! Il n'y a pas non plus de structuration du peuple en ligues comme autrefois, pas plus d'ailleurs qu'une vision structurée¹ de la société, laissée à la satisfaction de ses besoins et loisirs. Disparue aujourd'hui l'éthique fasciste de Drieu La Rochelle, souvent appariée à l'esthétique de Robert Brasillach* dont la gravité fait sourire de nos jours : « Le facisme n'était pas pour nous une doctrine politique, écrit ce dernier en 1941. Il n'était pas davantage une doctrine économique... Le fascisme c'est un esprit » (Notre Avant-guerre). Drieu était plus lyrique encore quand il affirmait dans L'Emancipation Nationale que « c'est le mouvement politique qui va le plus franchement, le plus radicalement dans le sens de la restauration du corps - santé, dignité, plénitude, héroïsme - dans le sens de la défense de l'homme contre la grande ville et contre la machine ». Que l'on puisse appliquer la devise, juste coupée après "homme", aux jeunes russes du Komsomol n'étonnera personne d'informé. «Qui possède la jeunesse, possède l'avenir» disait-on à l'Est, et son encadrement allait de soi. Les temps étaient à l'exaltation d'une jeunesse saine et généreuse, printemps du monde nouveau. Normalement on devrait incruster ici le MP3 de la Giovinezza italienne pour planter un piton.
Nous sommes loin de tout ça. Discobole mal en phase avec son futur, Drieu La Rochelle interrompra sa "marche au soleil" en 1945, non sans avoir exploré l'écho marxiste de son fascisme bucolique. L'esprit² de 34 avait vécu, écrasé sous ses propres bombes. L'éthique naturelle qu'on ne disait plus fasciste sera reprise par d'autres tout au long de la reconstruction européenne dans des mouvements anodins virilisants sous la rosée matutinale, jusqu'au jour de l'étouffement mercanti, ordonné par la société de consommation et de jouissance à crédit. Les fumées de shit ont remplacé l'air pur de la cambrousse. Il n'y a plus d'idéal, il n'y a que des besoins.
* messe du souvenir pour Brasillach, fusillé le 6 février 1945, pour sa sœur Suzanne (†2005) et son époux Maurice Bardèche (†1998), ce lundi 6 à 10h à Saint-Jacques du Haut-Pas à Paris.

Si le fascisme est passé de mode, si le naturalisme fleuri qui fit les beaux-jours des peace&love s'est éteint dans le caporalisme écologiste, si le Sens de l'histoire a curieusement disparu à la chute du Mur et laisse tourner en rond la générosité de la jeunesse, une rébellion molto strano n'en gronde pas moins. Chez nous les experts la situent dans "la France invisible" et d'une rébellion épisodique à la révolte générale il y a peu à franchir. N'attendons pas l'Insurrection qui vient portée par les maigres effectifs d'un prolétariat en fuite vers le tiers-monde - quoique mille Black Blocs puissent faire des dégâts -, pas plus une révolte altermondialiste confisquée par des professionnels de l'agitation payée au mois ; mais une révolte complètement démocratique de la jeunesse - au sens péjoratif grec - abusée par la gérontocratie en place.
Palliant le mutisme du Ministère de l'Intérieur, la Fédération des pompiers décompte 30.000 voitures brûlées en 2011, sans compter la statistique Paris et Couronne en cours ! Los indignados s'amalgameront-ils avec les incendiaires des cités ? Quand ? Faudra-t-il lancer sur nos places Tahrir de faux révoltés pour les vaincre par absorption ? Les digéreront-ils ? Que les officiers de pont du Titanic se rassurent, les insurgés disparaîtront probablement de fatigue tous seuls au bout de quelques mois, mais notre société se sera échouée, ils auront noyé la salle des machines, le poumon d'acier de l'Etat en réanimation, cet Etat impotent qui prend son oxygène de la confiance des prêteurs étrangers qui le perfusent. Il sera à terre, sans le sou, à la merci des usuriers qui dépèceront le pays. Ça a commencé. Les investisseurs arrivent.


Que penser du grand foutage de gueule quand on a vingt ans ! Le mois finit le vingt si l'on a un travail, on se loge par miracle, par copains, par maman, les remarques les mieux fondées, même civiques, se brisent sur le mur des guichets qui ne sont jamais responsables, la force a toujours raison, la couleur de peau fait le suspect, tout ira mieux demain, les politiciens s'occupent des futilités nécessaires, le parlementarisme joue à chat avec un exécutif d'annonces, et chacun de s'abonner au syndicat des sortants car l'échéance du bail approche. Pas d'idées neuves, pas de courage politique, des mots, des slogans usés, de la com, des spin doctors par wagon complet, des plateaux télé, des tweets, de bons jeux de mots et des mauvais ! A la fin rien ne bouge, un peu de presse, un peu d'écume c'est tout. Non ! Des millions de chômeurs.


La jeunesse est manipulée, surtout par ceux qui s'en disent proches ; mais elle le sait. L'élan des "indignés" a pris naissance dans l'opuscule d'un vieillard scandaleux, Hessel, posture et imposture, organisateur avec d'autres à la Libération, de l'Etat invasif baptisé social-démocratie. Devenu Providence par inclination naturelle des gens à l'indolence, cet Etat en faillite ferme aujourd'hui les fenêtres de l'esprit et de la contestation pour jouir des derniers remugles de son pouvoir sur la nation dont il tire toute substance et rémunération. Au-delà du débat philosophique entre l'histoire faite et l'histoire en perpétuelle construction, toute l'affaire des lois mémorielles d'obligation³, les lois de contrôle des libertés internétiques, celles réglant les comportements sociaux et calibrant les moeurs acceptables, les interdits de la nouvelle coutume éditée par les ligues morales, tout converge à la contrainte au moule pour mille choses du quotidien. La fabrication de l'homme nouveau n'a jamais été aussi avancée et insupportable littéralement. Qu'il est loin cet homme nouveau en chemise d'uniforme brune ou noire ! C'est son cerveau qui est maintenant vêtu par l'Etat, sous l'uniforme de la pensée unique.

Y a-t-il des analogies ?
Peut-être ben qu'oui ! Reste à observer où s'allumera la mèche d'un prochain "six-février". J'attends.



(1) Voir les leçons de l'échec tirées par Maurice Pujo.
(2) On peut creuser la question en ligne avec Persée qui publie les notes de Raoul Girardet sur l'esprit d'un fascisme français de 34 à 39.
(3) Au débat du 23 janvier dernier pour le vote au Sénat de la loi anti-turque, le sénateur corse radical Alfonsi s'exclamait au micro en des termes approchant ceci : "Tout le monde est contre cette loi ubuesque en commission mais une majorité sera trouvée en séance pour la voter !" Les clients du jour étaient les franco-arméniens. Que vendra-t-on demain aux franco-turcs, franco-machins ou franco-trucs pour ramasser cent mille voix au râteau croupier ? La classe politique se défend chaque jour de vouloir créer le puzzle communautariste dans ses intentions ciblées, mais par ses lois de conjonctures, ses interprétations douteuses des textes, elle s'y emploie avec application dès les sunlights éteints. L'antiparlementarisme ne peut être que primaire pour la majorité silencieuse, comme en 34.

Commentaires

  1. Hommage de l'Action Française à ses morts, lundi 6 février au Pont de la Concorde à 19 heures.

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  2. Le 6 février 34 fut un rassemblement hétéroclite d'anciens combattants écœurés, majoritairement catholiques. Mais il y eut même des communistes. La Roque,dont le légalisme n'était pas de circonstance, face aux tirs policiers, pesa plus lourd que Maurras, et ce fut dommage.
    Honneur aux morts !

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  3. J'ai une étude sur les partis de droite en Aveyron des années 30 qui confirme la forte participation à toutes manifestations publiques et le manque d'imprégnation de l'électorat puisque ces partis furent régulièrement battus !
    Il faut que je retrouve la source.

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  4. Un point rarement traité est le comportement général des forces de l'ordre dans une émeute de cette ampleur. Moins d'un vingtaine de morts en tout. Ce chiffre laisse rêveur quand on voit les scores exorbitants des répressions de foules de nos jours autour du bassin méditerranéen !

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  5. Oui certes, en gros ! Mais les morts par balle sont tous du même côté, celui des manifestants.

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  6. Compte-rendu de la Concorde :
    http://www.actionfrancaise.net/craf/?PRESENTS-6-fevrier-1934-6-fevrier

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