vendredi 6 juillet 2012

Milliards, princes et chapelles


 - 1 milliard de dollars en coupures de 100 -
Cinquante milliards de dollars¹ à l'échéance d'un an, c'est ce que l'Etat doit extraire de la société française pour continuer à parler à la table européenne. Le chiffre magique est entré dans la caboche des marchés : 50 et 12 mois. A défaut, nous serons autorisés à nous taire et faire où la Prusse nous dira de faire. Il ne s'agit plus d'économies à débusquer ci et là, nous sommes venus au jour où il faut sabrer dans la dépense publique. Autant dire appliquer à la classe politique en charge des affaires la saignée des médicastres de Molière ; la dépense publique est leur sang. Le parti socialiste, grand vainqueur toutes catégories, se trouve désormais dans la situation ubuesque de devoir sacrifier ses propres positions pour que le pays lui survive. L'heure est grave et la météo économique peu engageante. Fondées sur des taux de croissance de 0,4 et 1,0% l'an prochain, les prescriptions de la Cour des Comptes sont ajustables des dérives constatées et rien ne permet de penser que les surprises à cet égard seront bonnes. Nous entrons à reculons dans le tunnel de l'austérité réglée par la rigueur germanique que M. Hollande a acceptée le 29 juin au Conseil européen de Bruxelles, en laissant croire le contraire.

Tout le long discours de politique générale du Premier ministre au parlement visait à engourdir les intelligences, il n'a aucun outil dans les mains qui dure, les assiettes fiscales sur lesquelles il fond comme la buse pourraient avoir disparu dans les sables de l'exil l'an prochain². Taxer, taxer, dans un pays surtaxé ne mène pas loin, façon de parler. On peut même partir en train tant il est mieux d'être ailleurs juste à côté, dès qu'on a fait sa pelote. Quand le gouvernement de M. Ayrault aura chipoté avec les ministères, sa politique de coiffeur cessera et il devra attaquer les grandes masses que sont la protection sanitaire, la formation professionnelle, les subventions aux bas salaires et les budgets miroirs de la fonction territoriale. Puis viendront les grilles des fonctionnaires, les subsides publics et les retraites... comme chez nos sœurs latines et grecque.

Sans être désespérée, la situation est la plus grave depuis bien longtemps en temps de paix. Mais je suis royaliste et ne m'inquiètes de rien, le prince est mon berger ; il me suffit de suivre son étoile. J'écarquille les yeux, j'éteins la lumière du balcon, scrute la nuit, pas d'étoile. Enfin pas celle que je cherche. Rien, nada ! Dans le 45ème Lien légitimiste qui vient de paraître - seize pages indispensables comme d'habitude - je perçois chez ces messieurs de la Légitimité le soupçon du begnin neglect de nos princes qui ne s'aventurent en politique que par beau temps. Le grand enfoncement de portes ouvertes des uns et des autres ne suffit plus, il faut redessiner l'épure institutionnelle, choisir un modèle social enfin viable et faire valoir le tout. Nous avons déjà parlé de cet échec ici. La béance d'idées est manifeste au niveau de l'Opinion : les princes ? connais pas. Les chapelles y suppléent-elles ? Pas vraiment. La distance qu'ils maintiennent avec les organisations royalistes, mêmes avec celles qui se réclament d'eux, est un problème, détecté par Gérard de Villèle dans ce numéro 45, qui brise l'élan des plus vaillants. Mais cette distance est réciproque, les chapelles n'obéissent pas ; nous sommes en Gaule ! Justement, reste le désordre :

La NAr veut revivifier le Conseil de la Résistance, celui-là même qui a soviétisé en 1945 les mœurs de ce pays, le parti de l'Alliance royale se cherche un repreneur, l'Action française penche vers une agit'prop au plus près du terrain avec des effectifs qui ne peuvent pas la soutenir, les cercles légitimistes sont immergés dans la commémoration et la philosophie sans risque dans une posture esthétique. Nos organisations royalistes demeurent dans le fantasme de doctrines déjà obsolètes, non par défaut de fabrication - là dessus elles sont toutes impeccables - mais du fait de leur inapplicabilité au vrai pays réel (pas au pays slogan).
Exemple : quand Portemont met à nu les vices de la démocratie chez le Conseil dans l'Espérance du Roi , il me plaît beaucoup, j'en redemande, mais je sais aussi que la démocratie est imparable³. Qu'on la réforme, la torde, la trompe, l'adapte, elle sera toujours une référence, certes abusive, de la liberté des peuples mais en même temps une mythologie avec laquelle il faut faire avec, comme le paysan des saisons. Elle est inséparable du projet royaliste.

Au moment où la solution monarchiste est la meilleure solution par temps d'orage, et au bout du compte la plus simple, nous n'avons aucun véhicule pour la promouvoir aussi largement que nécessaire à l'imposer. La faute à pas de chance sans doute, même si on y réfléchit depuis cinquante ou cent ans. La cohésion des princes et des chapelles est-elle en question ? Je dis ça, je dis rien.


(1) 7Mds€ pour 2011, 33Mds€ en 2012, au taux de 1,25$/€.
(2) Voir l'arrogance minable des rameurs socialistes à l'égard de Gérard Depardieu (clic).
(3) Sur l'argument de base de l'article nous ne sommes pas d'accord quand il affirme : « Le roi est tout et rien à la fois. Il est tout s’il règne et gouverne [...] il n’est que rien s’il règne sans gouverner ». Régner n'est pas rien et les lecteurs de ce blogue le savent. C'est peut-être même plus difficile que de gouverner, surtout en pays latin où la finesse des réglages institutionnels est enrayée par le mythe du Bateau Blanc comme chez les Papous : sur l'horizon, l'homme providentiel qui va sauver les veaux des eaux.


1 commentaire:

  1. Il semblerait ce soir que la Finlande et les Pays-Bas soient contre l'accord du 29. Ils ont fait part de leur réticence à permettre au Mécanisme européen de stabilité (MES) d'acheter des obligations sur le marché secondaire dans le cadre de l'accord intervenu la semaine dernière lors d'un sommet à Bruxelles où ont été annoncées des mesures fortes destinées à soutenir l'Espagne et l'Italie.
    Sans doute négocieront-ils des privilèges bilatéraux hors mécanisme communautaire avec ces deux pays, comme la Finlande l'a fait pour le Grèce, à commencer par l'Espagne.

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