lundi 9 février 2015

L'élixir du service civique


Le grand désordre de notre nation et la sécession d'une partie de la jeunesse résidant dans ce pays ont remis à la mode le service militaire. Ultime remède à l'incohésion, l'embrigadement assorti d'un savonnage des cerveaux semble être le dernier recours de la bourgeoisie régnante pour... sauver les meubles et la virginité capitalistique des héritières. On friserait la caporalisation si tout cela était pris au sérieux. Rassurons-nous, le canada dry du service aux armées est le service civique dans les MJC et autres associations de notre modèle social, utiles du berceau à la tombe. Le service civique fonctionne sur la base du volontariat, ce qui veut dire qu'il ne s'appliquera pas à ceux qui en auraient le plus besoin. Énième coup d'épée dans l'eau pour la "politique de la ville". Il ne pouvait quand même pas être question, comme le demandaient les pizzaïolos de l'UMP, de militariser l'esprit de jeunes gens réputés défavorisés, mais qui - moins empruntés que la moyenne - se prennent en charge en substituant aux tracasseries de Pôle Emploi le commerce d'hyper-proximité en pied d'immeuble.

Il est bien sûr exclu de former des combattants comme on le faisait jadis dans les compagnies de combat d'appelés, compagnies destinées à recevoir le choc des régiments du Pacte de Varsovie déferlant sur l'Europe occidentale. Jean-Dominique Merchet fait un sort au service militaire qu'il n'est pas besoin d'expliquer dès lors que plus de la moitié de la classe d'âge masculine y échappait à la fin par maints subterfuges ; se rendre sur sa page, c'est définitif. On serait très mal barrés à l'époque actuelle du Djihad si on faisait faire un stage commando aux djeunes des cités. Mais laissons cette foutaise de la conscription* aux vibrations des préaux politiques et intéressons-nous aux causes de l'effondrement de la morale sociale sur zone.

Élevons le débat et reprenons ce qu'écrivait André Bridoux (1893-1982) qui était LE prof de philo du Lycée Saint-Louis avant guerre, à propos de l'armature sociale indispensable à la morale :

« Quand les liens sociaux n'existent pas ou sont trop faibles, l'homme reste sans moralité, au niveau du Cyclope d'Homère qui n'a ni le respect, ni même la notion des droits d'autrui. S'il est une idée fausse, c'est celle de Rousseau que l'homme est né bon et que la société l'a perverti. En réalité, pour qu'un homme puisse avoir une conduite morale, surtout constamment morale, il lui faut l'encadrement des institutions et des mœurs, la conscience du contrôle permanent d'autrui, la représentation des sanctions et des organismes judiciaires [ndlr : en résumé... un État], et le secours constant de ce potentiel de civilisation qui est immanent à toute société et qui reste incorporé aux moelles de chacun par l'éducation.
Quand ces points d'appui viennent à manquer ou à fléchir, la vie morale s'altère aussitôt. On le voit bien dans les pays neufs, dans les villes où plusieurs civilisations s'usent les unes contre les autres ; en temps de révolution, de guerre, d'après-guerre ; quand les hommes sont transplantés, en séjour à l'étranger, ou seulement en voyage ».
(Que pourrait-on aujourd'hui retrancher de ce texte publié en 1945 ? Rien !)

Les bataillons de cyclopes à taille humaine qui patrouillent nos banlieues sont les produits de la carence d'État. Ils sont les marqueurs de l'impéritie des pouvoirs qui se sont succédé aux affaires depuis quarante ans, accroissant les privilèges et l'établissement des vainqueurs du jour dans la fenêtre d'opportunité de leur mandat au lieu de gouverner un monde bien trop compliqué pour leurs esprits formatés par "Jean-Jacques" et l'Ecole nationale d'administration. Que croit-on obtenir par le lancement d'un service civique comme une marque de lessive, si ce n'est l'agrandissement des fractures sociales entre ceux dont la fibre civique a besoin de confirmation et tous les autres pour qui le civisme est pure agression de leur bulle personnelle à petit rayon ! Une fois encore, le pouvoir se défausse de ses responsabilités sur un plan de communication et un arrosage budgétaire qui suffiront bien à atteindre les prochaines élections. C'est une honte !

Mais compter, même sans trop y croire, sur pareille classe politique pour réformer et durcir l'État dans son domaine exclusif est une forme de fuite, une lâcheté puisqu'il est maintenant reconnu par la plus grande majorité de ce peuple qu'ils sont en totale incapacité d'agir efficacement. Alors, le peuple qui ne dit mot contre cette absurdité est-il pourri ? Intoxiqué à la défausse ? Bovin ? Il faut le croire et remplacer le coq gaulois de nos emblèmes par la fière autruche républicaine.

Que faut-il faire, me demande-t-on dans l'oreillette. Easy ! Repartir de zéro et recoudre la chaîne (des valeurs civilisationnelles) et la trame (des lois de la république) de l'État régalien sur tout le territoire en supprimant les leurres diversitoïdes qui ne font que distraire de l'essentiel. Appliquer totalement les lois qui gouvernent nos mœurs... comme en Chine et dans cent pays qui n'imaginent même pas qu'on puisse les prendre pour des paillassons. Définir la réforme est simple, il n'y faut qu'une volonté d'application. Faudra-t-il d'autres morts pour y parvenir ? Répondre à cette question met le blogueur en péril. Ceux qui s'en chargeront devront être crédibles, dans le sens où aucun de ceux qui appartiennent aujourd'hui à la classe politique à l'embouche ne pourra être retenu dans cet emploi.

Il est malgré tout possible et certainement utile pour son éducation que la jeunesse donne un peu de son temps aux autres habitants de ce pays avant d'entrer dans sa vie professionnelle, à la manière des Peace Corps américains, mais de là à en faire un outil socio-politique... c'est n'importe quoi, et se moquer de nous surtout.

Même pas peur !


(*) on sait mon aversion de la levée en masse qui n'est qu'un budget de morts accordé au pouvoir.

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