dimanche 20 janvier 2019

Louis Auguste de France (1754-1793)

Pourquoi commémorer ce week-end la mort du roi Louis XVI ? C'est un moment capital dans l'histoire de notre pays. Elle coupe le continuum français entre un avant et un après. Cesse le 21 janvier 1793 la vieille monarchie de droit davidique qui remontait aux rois chevelus. Triomphe le désordre du Nombre souverain. Nous y sommes encore, à la réserve près que le peuple n'est désormais souverain que dans les compartiments laissés libres par les élites interconnectées dans le grand jeu de la mondialisation. Le modèle actuel est fragile mais régénéré en permanence par la démagogie. Plus grave, il est en défaut sur la stratégie à long terme d'une nation aussi compliquée que la nation française. En fait nous descendons les marches par saccades depuis juin 40, avec parfois quelques paliers d'accumulation de capitaux qui redonnent espoir jusqu'à ce qu'ils soient dévorés dans les périodes de libération populaire. Ce pays irraisonnable vit au rythme des élections, presque au jour le jour. Il s'auto-détruit (dette, déficits, abandons) et ne veut rien comprendre à ses voisins qui s'en sortent bien mieux tant l'orgueil le gouverne.... L'ancien régime des vieux rois, comme disait Sarkozy, fut-il meilleur ? A la fin pas vraiment, il se détruisit lui-même, comme arrivé au bout d'un cycle.

Avant cette rupture de 1793 nous avions été régis pendant plus de mille ans par un système féodal de complications extrêmes qui, foisonnant d'injustices, s'avéra irréformable à la fin. Les remontrances incessantes d'esprits éclairés ne parvinrent jamais à décider la Cour et le roi à redessiner l'épure institutionnelle et fiscale du pays, même en leur montrant les lueurs d'un avenir funeste. Vauban, Boisguilbert, Quesnay, Gournay, Turgot et bien d'autres avaient analysé le grand foutoir qu'était devenu le royaume et préconisaient des remèdes drastiques. On ne le dira jamais assez, les grandes réformes de la Constituante étaient dans les tiroirs de la monarchie. La vue basse des trois derniers rois de plein exercice finit par embourber le char de l'Etat qui à la fin fut immobilisé sur bris d'essieux, ce fameux tiers-état qui portait les deux autres. Certes Louis XV, parvenu à l'andropause, avait commencé à réformer, mais son règne s'achevait et son successeur s'empressa de plaire aux mécontents en défaisant un travail qui avait demandé beaucoup d'efforts. On pense à la bataille parlementaire de Maupeou. Les contempteurs de la couronne eurent gain de cause avec un Louis XVI trop sensible aux acclamations, et la guerre d'Amérique, si elle humilia l'Angleterre, précarisa les finances royales, obligeant le roi à convoquer les Etats Généraux pour les rétablir ; etc... on sait la suite.

Le système féodal ayant été éradiqué lors de la fameuse nuit du Quatre-août, le roi en charge de la reconversion (il était l'exécutif) aurait dû prendre à bras le corps la conduite de la réforme du pays. Au lieu de quoi, il persista à mettre une certaine distance entre lui et la chose politique, et s'abandonna aux influences d'un entourage qui ne voyait que les privilèges perdus. Le désintérêt voire l'incompétence du titulaire sont la véritable origine de la ruine de la monarchie capétienne, bien plus que la fuite à Varennes, réaction tout à fait bourgeoise aux menaces du temps.

L'Ancien régime ne pouvait être réformé que d'en haut tant il fallait produire d'autorité pour vaincre le désordre des privilèges et passe-droits dans toutes les classes sociales. La sélection des lois fondamentales est à ce stade mise en cause, tout au moins le défaut d'éducation dans l'emploi qui est le premier pilier de la monarchie. Ce jeune roi n'en fut pas un. Bon père de famille, très instruit et adroit de ses mains, il préférait la chasse aux conseils et la chère à la chair. Le principe qu'il incarnait n'y résista pas ! C'est le régime césarien et brutal de Napoléon Bonaparte qui, profitant du spectacle de l'échec capétien, se chargera d'aboutir et laissera à sa chute un pays convenablement administré que ses successeurs eurent la sagesse de continuer.

Demain, Louis XVI sera tué pour la 227ème fois. C'était cher payé, mais la fonction de roi n'était pas une position ordinaire. Le verdict de son procès se chargea de le lui rappeler. Il est mort à 38 ans, à l'âge où notre Emmanuel Macron s'est lancé à la conquête du pouvoir. Il repose en paix. Pas nous...



Des messes sont dites partout en France pour le roi Louis XVI (cliquer sur la gerbe)


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