La bombe persique n'est pas encore assemblée que l'onde de choc atteint nos rivages franciliens. Dans la plus parfaite légalité démocratique des pays peuvent accéder au seuil de l'enfer. Que leur opposera le champion mondial des libertés à outrance ? Georges Bush a-t'il pressenti la perversité de son dispositif démocratique forcé quand il a lancé son plan du Grand Moyen Orient ? La démocratie est le gouvernement de la vertu. La faire partager par tout un chacun est un long combat contre la nature humaine, mais il mérite d'être mené pour l'expression (de première main) de ses besoins essentiels.
Jean-Philippe Chauvin décortique cela.
Contradictions démocratiques... proposition monarchique.
L'élection présidentielle en Iran a vu la victoire d'un islamiste dur, qualifié par les médias occidentaux d'ultraconservateur ("conservateur, un mot qui commence mal" disait le duc d'Orléans au début du XXème siécle) et de "populiste", terme utilisé de plus en plus souvent sans discernement.
Ce candidat, M. Ahmadinejad (premier laïque élu depuis la révolution islamique de 1979), a été élu à une large majorité (plus de 60% des suffrages exprimés) contre environ 35% au candidat donné favori par la presse occidentale, encore une fois bien imprudente (sondage n'est pas suffrage...).
La République islamique d'Iran n'est certes pas une démocratie au sens où nous l'entendons ordinairement en Occident, mais il semble bien que le score élevé d'Ahmadinejad ait été obtenu sans fraude majeure (même si la participation est limitée, moins de la moitié des électeurs inscrits). En tout cas, ce résultat présidentiel n'est guère rassurant car il montre que l'islamisme, annoncé moribond, est encore capable de mobiliser une grande partie de la population et de remporter les élections.
Ainsi, par le jeu démocratique des institutions, "le pire peut aussi arriver" comme s'en inquiétait un commentateur politique hier à la radio.
Vox populi, vox dei clamaient jadis les orateurs et les théoriciens de la démocratie: cette formule est aujourd'hui presqu'oubliée, même dans les manuels d'éducation civique, et la "légitimité des urnes" est de plus en plus contestée, certains Etats n'acceptant plus désormais que la "démocratie représentative" et déniant toute légitimité, voire légalité, à la "démocratie directe" (sous la forme d'un référendum ou d'une présidentielle au suffrage universel direct).
Ce débat sur les dangers supposés de la démocratie directe, relancé d'ailleurs en France depuis 2002 et, dernièrement, lors de la campagne référendaire (cf. les propos de Frits Bolkestein lors de sa venue à Paris en avril dernier et les réactions agacées de Serge July et d'Olivier Duhamel aux résultats du 29 mai), ne doit pas se figer en un dilemme où une formule exclurait l'autre sans rémission.
Il ne s'agit pas en effet de simplement "repenser la démocratie" mais de "penser la politique" et de chercher le meilleur moyen (qui n'est qu'un moyen et non une finalité absolue, mais un moyen nécessaire) d'accorder les libertés électorales et l'intérêt de la nation et de l'Etat, en particulier à l'heure où la globalisation inquiète (il y a des raisons fort concrètes à cette inquiétude...) et où les dangers géopolitiques obscurcissent l'horizon mondial, dans le Golfe persique comme ailleurs.
La Monarchie active, régime qui préserve l'Etat en son sommet des fluctuations électorales et des crispations populistes, et qui garantit l'exercice des libertés électorales dans le cadre de la représentation (politique et socioprofessionnelle) et de la subsidiarité (ce qui laisse la possibilité entière d'une participation citoyenne par le biais du "référendum d'initiative locale" ou d'autres pratiques), cette forme de Monarchie, nouvelle dans ses applications, me semble, pour la France, le moyen le moins mauvais et le plus nécessaire pour éviter le blocage institutionnel et la restriction électorale.
Tract pour la 13è des Hauts de Seine
Aparté sur la démocratie convenable pour l'Europe :
Dans la campagne de ratification du traité constitutionnel européen, une dizaine de référenda était prévue. A ce jour, trois ont eu lieu: en Espagne, en France et aux Pays-Bas. Un autre est prévu le 10 juillet chez nos voisins du Grand Duché du Luxembourg.
Mais ceux qui étaient annoncés au Royaume-Uni, au Danemark, en Irlande, au Portugal... sont (provisoirement?) décommandés! Il est vrai que, dans ces quatre pays, les sondages prévoyaient tous la victoire du "Non": une bonne raison, semble-t-il pour les gouvernants, de retarder (provisoirement, bis?) ces scrutins.
C'est une désagréable impression qui se dégage de ces reports car, dans tous les cas, les gouvernements (qui défendent logiquement le "Oui") semblent juste vouloir éviter le désaveu électoral déjà survenu en France et aux Pays-Bas.
Ces manoeuvres n'ont, en soi, rien d'illégal, mais elles démontrent, s'il en était besoin, que la démocratie n'est pas aussi "transparente" qu'elle prétend l'être dans les pays d'Europe.
Quant à la "crise" de l'Union Européenne, que M. Giscard d'Estaing reproche amèrement à la France et à sa majorité "noniste", elle est aussi et surtout la preuve de l'échec des européistes à raisonner au-delà de leurs propres schémas idéologiques et administratifs. Pourtant, cette crise doit donner l'occasion aux Français, et en particulier à ceux qui s'intéressent à la politique, "d'imaginer autre chose que ce qui ne fonctionne pas".
En ces temps de "sinistrose médiatique", voici ce qui me semble une bonne nouvelle...
Etre royaliste, c'est aussi cultiver l'espérance, pour la France, et pour le monde...
(Jean-Philippe Chauvin)
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