mercredi 26 juillet 2023

Codex DLXII

jeunes policiers sortant de l'école
C'est le code du service restreint de la police exprimé en chiffres difficiles pour feinter la NSA, des fois que ! Blague à part, le mouvement de protestation qui s'étend dans les quinze cents zones de chalandise des "cités d'autre droit" coupe à l'équerre la séparation mythologique des pouvoirs, la cible étant tout simplement la Justice. La Justice réputée laxiste dans ce pays où seuls les fous lui feraient confiance. Certes, elle a ses raisons, essentiellement la pénurie de lits pénitentiaires et la promotion d'une société en conquête permanente de ses droits bafoués par le grand capital. La Justice fait de la Politique. Le Syndicat de la magistrature en est l'archétype, le Mur des cons son expression. L'indépendance constitutionnelle l'a transformée en Casta ; inamovibles, inexpugnables, les juges d'instruction sont en conscience les hommes les plus puissants de l'Etat. Les autres font bloc dans un corporatisme soudé.

On pourrait parler de sous-investissements, de sous-traitements indiciaires, de surcharge excessive des greffes, de délais aussi dissuasifs qu'extravagants mais en fait, tout ce désordre tient dans la revanche de l'élu locataire à bail précaire de la République contre l'Etat dit profond, l'Etat permanent. Tant Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy que François Hollande ont construit leur mandat en ponctionnant les moyens nécessaires à leur politique clientéliste (ou démocratique autrement dit) sur les ministères essentiels quoi qu'ils en aient dit par la suite. Justice, Police, Diplomatie, Armées ont été deshabillées au bénéfice des bras-cassés du Hamac national à tel point que, la haute fonction publique mise à part, nos fonctionnaires du quotidien sont parmi les plus mal payés d'Europe occidentale. Peut-être faut-il moins s'étonner de certaines dérives constatées dans le feu de l'action par des fonctionnaires psychologiquement déstabilisés par le spectacle des remises en libertés systématiques pratiquées par certains juges. La presse propose ses analyses et nous n'y viendrons pas, mais profitons de cette actualité pour demander au fin fond du désert que le domaine régalien soit un jour prochain sanctuarisé et mis hors de portée des griffes de politiciens de rencontre comme nous en avons eus.

Il serait peut-être avisé de créer un corps de fonctionnaires régaliens des cinq domaines (les quatre précités plus le Fisc/Trésor) séparé des autres corps de la fonction publique, Etat général, enseignants, hospitaliers, territoriaux. Concernant les capacités pénitentiaires, il serait temps d'évacuer les prévenus étrangers par relégation ou expulsion et les condamnés étrangers en appliquant un régime de peine au pays comme expliqué dans Le Nonagone-Hexo. Comme les places libérées seront presque immédiatement réoccupées par les malfaisants qu'on rechigne à y mettre aujourd'hui, il faudra construire des centres de détention dans des zones de foncier pas cher (friches industrielles).

Restera à maintenir vraiment l'ordre dans la rue et en finir une bonne fois avec les casseurs professionnels que sont devenus black-blocs et autres antifas ; les petits voyous de pissotière y regarderont alors à deux fois, et une police de proximité pourra être réinstallée où nécessaire sinon partout.

dimanche 23 juillet 2023

Chiadez vos épitaphes !

Le titre académique original était celui-ci : "De la diagonale du fou à la verticale du vide" ; mais il sentait la sous-préfecture et je lui ai préféré la queue de trajectoire du présent billet.

En travaillant un peu, on pourrait faire vingt pages d'une écriture serrée pour analyser et comprendre la métamorphose du pouvoir russe, certes mal né, mais ayant compris au départ les attentes de sa population. Faire le choix de rétablir la souveraineté de la Fédération de Russie et de se faire craindre à nouveau était légitime, mais l'exercice d'un pouvoir en perpétuelle mutation a dérivé vers quelque chose qui s'apparente maintenant au règne le plus brutal de la Bêtise aveugle et sourde !
Si la reconstruction d'un Etat s'avérait nécessaire après le mandat éthylique de Boris Eltsine - on se souvient du développement phénoménal de l'industrie du rapt à la libanaise - on s'interrogeait déjà sur l'absence de plan pour transformer à long terme une économie de rente à la katangaise en une économie industrielle puissante, adossée aux richesses minérales inépuisables du pays. Les libéraux mis de côté, priorité fut donnée au réarmement naval et balistique, défensif d'abord puis menaçant ensuite, et à l'exportation d'hydrocarbures extraits et valorisés par les pétroliers occidentaux. La Russie s'installa sur une trajectoire de monopolisation de la fourniture de gaz à prix d'ami à l'Europe, s'assurant un débouché sur le marché le plus solvable du monde. La société de consommation fit dès lors son nid dans les grandes villes, sans jamais en sortir. Et tout le monde crut qu'elle entrait dans le club des nations raisonnables.

Harcelé sans doute par les théoriciens de la Sainte Russie éternelle et asiate menacée de partout, le petit csar, insuffisamment affranchi des réalités plus subtiles de l'époque, se mit à craindre que la fuite rapide des nations libérées de l'emprise soviétique vers le pacte atlantique de sécurité n'aboutisse finalement à un front d'hostilité grandissante à son endroit, et quand la "peste" s'étendit à l'Ukraine - nation-sœur qui n'en est pas une - il décréta la magouille hybride de 2014 vers le Donbass russophone et la Crimée de Catherine II. Génial mais pas autant que nécessaire, il y consacrera dès lors tout son temps, confortant ses décisions au sein d'un cercle de courtisans admirateurs du maître aux échecs. En effet, la réaction internationale qu'il avait bien jugée au gré de ses rencontres avec ses alter ego, fut modérée et d'ailleurs, le nouveau pouvoir élu à Kiev n'en fera plus tard pas un casus belli aux discussions d'Istanbul en mars 2022 où les deux républiques-croupions tiraient leur épingle du jeu, sans parler de la Crimée dont le sort était renvoyé aux calendes grecques. Gonflé d'orgueil et sous les applaudissements, le petit csar étala ses dons de stratège dans ce que nous pouvons appeler la "diagonale du fou". Un an et demi après la guerre-éclair du 24 février 2022 qui n'en finira jamais à l'en croire, s'il continue certes de détenir quinze pour cent du territoire ukrainien reconnu par les instances internationales, il voit désormais l'OTAN doté d'armes meilleures bondir vers lui, les deux pays clés de la Mer baltique orientale basculer chez l'adversaire, Gazprom perdre ses meilleurs clients, le réseau bancaire russe tricard du monde libre, l'industrie russe de consommation retourner au système D, la compagnie aérienne nationale survivre en canibalisant ses avions, et il faudrait dix lignes de plus pour convaincre notre distingué lectorat que les sanctions internationales sont une peste bien plus redoutable que la démocratie en marche sur le limes impérial, démocratie avec laquelle on peut toujours ruser sous condition d'influence en sous-main. Mais depuis le début de l'été, la diagonale n'est plus en action. Le fou semble usé.

Ville de Marioupol depuis l'espace
- Marioupol russifiée -

Par la destruction stupide du grand barrage hydroélectrique sur le Dniepr (le canal de Crimée est à sec), le bombardement hystérique des quartiers d'habitations dans les villes d'Ukraine et maintenant le chantage aux grains, s'ouvre le vide sidéral de la contre-stratégie, les abysses de l'intelligence disparue, la connerie parfaite de Vladimir Vladimirovitch. Est-il besoin d'épiloguer ? La réplique à ses délires n'a plus de "ligne rouge", de quoi renforcer les critiques acerbes des blogueurs patriotes comme Guirkine, et la Crimée devient une obsession balistique de laquelle le Kremlin se croyait prémuni. Un dépôt y saute chaque jour et le Pont Poutine ne tient qu'à un fil. A quoi le Hun réplique par le bombardement des quais de chargement des docks céréaliers d'Odessa visant directement la boulangerie africaine. Mais le vide d'intelligence descend plus loin que sa verticale apparente, à cause de cette idée géniale que fut la déportation massive de gosses blonds dont manque la Russie slave. Expliquons ça :

L'absence du petit csar au sommet des BRICS, provoquée par le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale de La Haye, enclenche une mécanique extrêmement dangereuse. On ne vous l'explique nulle part ailleurs.
La charpente anti-occidentale en construction s'appuie sur la poutre eurasienne constituée de trois puissances économiques et nucléaires que sont la Chine populaire, l'Inde et la Fédération de Russie. Or l'absence du leader boréal affaiblit l'influence russe dans le triumvirat de fait. Même si le ministre Lavrov fera des pieds et des mains pour faire adopter les consignes du Kremlin et maintenir son rang, il manquera toujours les échanges de civilités, les discussions de couloir entre quat'zieux, les promesses cachées, les invitations discrètes, au final un déclassement de la Russie dont le chef d'Etat ne sera pas là pour accueillir les nouveaux membres qui devaient renforcer son aura.

Le plus sûr moyen de stopper ce déclassement presque inévitable, et périlleux pour l'extrême-orient russe, est de stopper cette guerre d'Ukraine rapidement, en débloquant ce faisant le grain que le tiers-monde attend pour confirmer son soutien à la politique anticoloniale du grand frère russe et en régorganisant les services de contrôle intérieur d'un Etat russe fragmenté. Aparté : le volet "anticolonial" relève du gag hilarant sachant que les nations non slaves fédérées sous la houlette du Kremlin sont toutes des colonies qui le détestent. Ceci dit, l'impasse Poutine n'est pas qu'une vue de blogueur occidenté. Des penseurs influents comme Sergueï Karaganov (clic) analysent toutes les contraintes que la guerre fait peser sur la Russie qui, même victorieuse, n'en sortira pas sans mal ; et après moult convulsions sémantiques, ils aboutissent à la nécessité d'une action définitive, même difficile à décider et à gérer, une frappe atomique à laquelle l'Occident ne répondra que par des proclamations outragées. En cause, les Etats-Unis qui feront un refus à l'obstacle et laissent déjà fuiter une certaine responsabilisation de l'Europe dans la continuation du soutien à l'Ukraine.
Mais le choc atomique aurait, à notre avis à nous, un autre effet : celui de rehausser la position de la Russie actuellement minorée dans le triumvirat précité. Cette décision indiquerait à Pékin que la conciliation demandée pour en finir dans l'affaire d'Ukraine n'ira pas plus loin que les intérêts fondamentaux de l'empire russe revenu sur ses terres historiques, outre le fait de montrer que la Russie demeure LE membre viril de la troïka avec le plus gros pouvoir de nuisance ! Pékin fera la gueule, mais les intérêts bien pesés de la coopération sino-russe et l'absence d'alternative auront raison de toute réaction précipitée. Il ne faut pas avoir fait Saint-Cyr pour deviner que le Kremlin, bientôt agoni d'injures, déroulerait alors un plan de coréanisation de l'Etat russe devenu un Etat-paria surarmé et financé par ses rentes minières dont le monde ne peut longtemps se passer. Un destin peu enviable pour les peuples de la Fédération, mais qui s'en soucie, même chez nous ? Pour sûr, une sortie du monde civilisé.
Cinq conséquences d'un strike atomique qui rebattrait toutes les cartes diplomatiques :
  • le seuil d'emploi de l'arme nucléaire serait abaissé et descendrait de l'étage stratégique à l'étage opérationnel ; qu'en penserait le Pakistan au Cachemire ?
  • le tabou d'une attaque nucléaire d'un pays non doté par un pays doté serait annulé ; des imitateurs ? Kim Jong Un ?
  • la Chine populaire entrerait dans la tenaille d'incertitude entre deux Etats foutraques, la Russie au nord et la Corée du nord à l'est ; il serait alors temps de parler de bascule stratégique pour le PCC, débordé sur la partie utile de l'empire (Dongbei) et défié à l'opposé par l'Inde sur le versant himalayen ;
  • un parapluie nucléaire deviendrait l'obsession permanente de tous les primo-accédants à l'atome, à commencer par l'Iran ; puis le Brésil, l'Afrique du Sud, l'Algérie dit-on etc.
  • la teneur de la réaction des Etats-Unis sera le juge de paix de leur protectorat d'Europe occidentale. On se souvient d'Obama en Syrie, on peut craindre un grand trou noir qui obligerait les Etats européens à sabrer dans les comptes sociaux pour réarmer à vitesse accélérée afin de sauver quoi ? mais la Pologne bien sûr, c'est Poutine qui le dit.

Combien de temps une Russie érémitique pourrait-elle tenir ? Aussi longtemps que le petit csar et son successeur pourront asservir les autres nations et leurs richesses à travers onze fuseaux horaires et que l'apathie légendaire du Russe persistera. Une redistribution des revenus d'exportation sera sans doute améliorée pour tenir tout le monde au sec mais l'aventure civilisatrice européenne, amorcée par Pierre le Grand, sera terminée pour plusieurs générations et le vide de tout destin deviendra monnaie commune tel qu'il en va dans la nuit communiste.


Liens en clair de cet article :

- Déclic : https://www.msn.com/fr-fr/actualite/monde/de-la-verticale-impitoyable-au-vide-abyssal-la-m%C3%A9tamorphose-du-pouvoir-russe/ar-AA1e9O68?ocid=msedgdhp&pc=U531&cvid=3a435d6d75b149c0b986d5b34c80e9c5&ei=79

- Karaganov : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sergue%C3%AF_Karaganov

- Nucléarisation de la Biélorussie : https://charter97.org/en/news/2023/7/22/556808/

jeudi 20 juillet 2023

CMRDS 2023

Communiqué AF - « La France est en crise. On nous le répète année après année. Mais il ne sert à rien de le déplorer, de se lamenter sur le déclin de la culture, sur les fêlures du vivre-ensemble, sur la baisse de la croissance, sur l’illégitimité de nos représentants, sur la dégradation de l’environnement ou sur les guerres qui déciment les peuples.
Ces crises existent, certes, et il est important d’en renouveler le diagnostic, mais il faut surtout leur apporter des réponses. Or la réponse devra être, d’abord, politique.
Loin de guetter un sauveur providentiel ou un Grand Soir improbable, loin d’exiger un retour en arrière impossible ou un homme nouveau fantasmatique, le projet capétien, tradition vivante et critique, s’appuie sur le passé pour mieux bâtir l’avenir. »

Le Camp Maxime Real del Sarte 2023 se tiendra du 20 au 27 août en pays bourbonnais près de Moulins (Allier) dans un mois.
Les premiers détails et le tarif sur le site AF-RN.
Programme des conférenciers à suivre.
Astiquez vos machines !

un enfant passe le jet sur son vélo

lundi 17 juillet 2023

Emile et le loup

les estives du Vernet

Le drame du Haut-Vernet a convoqué en commentaires tout ce que la république compte de canaux de presse, et bien au-delà, puisque on a vu des journaux de haute tenue comme le Guardian de Manchester mettre son écot au pot commun. C'est terrible à dire, mais le malheur fait plus d'audience que le bonheur et les tarifs publicitaires des chaînes s'en ressentent tellement qu'il faut entretenir la flamme jusqu'à la dernière extrémité, quand elle vacille et diminue jusqu'au désintérêt du public, soufflée par un malheur plus grand ou la mort du dalaï lama.

Malgré la meilleure volonté des autorités compétentes et la sincérité pétrie de bon sens du maire de la commune, on ne put rien donner de plus que "rien" en pâture à la presse avide de sensations communicables ; jusqu'au jour où le maire, redoutant les camping cars et les pique-niques du crime dans les prairies du hameau, ne décide de barrer la route par arrêté municipal pour le week-end. C'est à ce moment que les chaînes d'information en continu pétèrent un câble pour continuer à nourrir le moloch de la Pub.

On sut alors que le père de l'enfant était "autoritaire et directif" en battue, dirigeant les autres (c'était son gosse quand même !), certainement d'Action française, et pire si possible, du bastion social dissous à Marseille par Christophe Castaner en avril 2019. Qui pis est, le mec s'était inscrit sur une liste électorale de soutien à Zemmour. Pour bien enfoncer le clou, la famille était présentée comme fermée (sectaire), nombreuse et, circonstance aggravante, pratiquante à la mode traditionnelle. Messe à la chapelle du hameau, messe dominicale à l'église paroissiale. Deux messes, rendez-vous compte ? Les témoignages positifs des voisins infirmant cette dérive n'étaient pas pris en compte parce que moins vendeurs. Et s'il n'y avait que ça ? Pensez donc que la mère avait invoqué Benoîte Rencurel, la voyante du Laus tout proche pour qu'elle lui ramène son petit. La maison des grand-parents était remplie par la parentèle - ce qui en creux nous signale que c'est le meilleur moment pour un gamin de disparaître. Qu'y faisaient-ils tous ? Des prières ? Et là, le maire ferme la route aux connards :
« Que nous cache-t-on ? Que se dit-il maintenant derrière les volets clos de ce hameau si chargé de mystères ?» (Dominique Rizet - BFMTV)

On n'a pas osé ressortir le crash de l'A320 de la Germanwings à proximité en 2015. Les fouille-merde auront tout essayé, jusqu'à la Bête du Gévaudan ou la louve qui aurait capturé le petit Remus pour remplacer l'un des siens (penser aussi à L'enfant-loup de l'Aveyron ici) ; sauf que les saint-hubert ne l'ont pas sentie. Alors c'était un aigle, un grand aigle royal, de ceux qui enlèvent un jeune chamois jusqu'à l'aire, ce qui expliquerait l'absence de piste olfactive et d'indices matériels. Mais la quête circulaire d'un aigle se voit en campagne ou en montagne comme le nez au milieu de la figure. Et nul ne l'a vu. N'en déplaise aux journalistes, il n'y a aucune nouvelle à mâcher, le "scandale identitaire" a fait pschit, et les hypothèses les plus diverses sont confinées à l'intérieur du cercle des enquêteurs.

Alors, on est bien obligé de laisser sa chance à l'hypothèse du tiers extérieur, même si le Haut-Vernet est un cul-de-sac. La même disparition s'est produite à Ganagobie en 1989 avec la même absence de conclusion. Le gosse s'appelait Yanis et ce village est à une heure de route du Vernet. On sent la réplique (le copycat comme on dit dans les séries américaines), on ne l'explique pas. Par chance, une canicule atroce attaque le sud et en son for intérieur M. Macron a dans la main la pelotte de chamboule-tout ! Schiappa ? Ndiaye ? Borne ? On commençait à s'emm...

Normalement, le billet devrait se terminer par un vœu. J'adresse aux parents de l'enfant l'expression la plus sincère de tout mon soutien jusqu'à bonne conclusion de ce drame terrible. Malgré les insinuations délétères de la presse à fric, qu'ils sachent qu'ils ne sont pas seuls.

mercredi 12 juillet 2023

Quatre clés pour comprendre Vilnius

logo OTAN VIlnius 2023
La quasi-automaticité (mais tout dépend de la grandeur du "quasi") de l'article 5 du Traité de l'Atlantique nord interdit d'accepter au sein de l'Alliance comme membre à part entière tout Etat en guerre ouverte avec un autre pays. Pour la raison de bon sens que cela reviendrait à entrer en guerre quasi-automatiquement avec le dit-pays tiers.
Donc la colère un peu surjouée de Zélensky avait un autre but que l'inscription aux agendas à suivre d'une adhésion à l'OTAN. L'Ukraine dispose depuis son indépendance d'un conseil spécialisé dans un quartier général européen OTAN et se trouve de facto dans la situation de partenaire stratégique comme le sont les ANZAC. Et dans la pratique le bénéfice est grand puisque de nombreux membres de l'Alliance épuisent leurs stocks stratégiques à soutenir les opérations militaires de Kyiv.
L'intention la plus probable du président Zélensky, qui connaît très bien ce raisonnement pour avoir exclu cette adhésion lors des négociations de mars 2022 à Istanbul (clic), est de consolider ses requêtes de munitions et d'appui aérien à la prochaine réunion du Ramstein Group (UDCG).

Le communiqué assez faisandé, publié par le secrétariat de l'OTAN en fin de journée (le lire ici), est du style "if and when" et vise à ne lier les mains de personne dans le futur, mais signale une évidence subliminale : l'inclusion d'un agenda d'adhésion déclenché par la constatation d'un état de paix entre l'Ukraine et la Russie, pourrait provoquer de la part du Kremlin une procrastination indéfinie pour barrer l'entrée de l'Ukraine dans le dispositif que Poutine redoute le plus. Et l'OTAN déteste caler son action sur un évènement qu'elle ne maîtrise pas, comme la paix entre deux pays tiers.

Il ne manque dans ce communiqué que la demande aux Nations-Unies de foutre dehors la palanquée de peigne-culs russes qui font office de diplomates dans la grande tour de New York et violent en permanence les engagements de la Charte onusienne avec un aplomb et un culot dont se privent même les Nord-Coréens.

Deuxième clé : le strike d'Erdogan. Sa réélection à l'arraché du modèle courant (ballotage et petite marge) qui le maintient dans le club des démocraties, a boosté son action diplomatique en donnant des gages à l'Ukraine (1) et en troquant la permission à la Suède d'adhérer à l'OTAN contre la réouverture du process d'adhésion à l'Union européenne demandée directement à Charles Michel, et contre la fourniture des kits d'augmentation de leurs F-16 demandée à Joe Biden. On a pu croire un moment que la Turquie de l'AKP caressait le rêve d'un empire ottoman revenu sur son empreinte turcique, mais l'enthousiasme mesuré des satrapes de la steppe à repasser sous le chasse-mouche de la Sublime Porte joint à la détestation ouverte des voisins balkanniques, a convaincu le vieux sultan de se recentrer sur l'essentiel, la Mer noire et les Détroits qui la ferment. Face à la menace de quelques centaines d'ogives nucléaires russes à dynamiter la porte du Bosphore, la réponse fondamentale demeure le soutien américain à travers l'OTAN. D'où la bonne volonté affichée publiquement par le Turc, même si je pense que les relations n'ont jamais été mauvaises avec le Pentagone.
(1) Erdogan transfère une usine de drones Baykar en Ukraine ; il fait sortir la marine turque en protection des convois de grains chargés en Ukraine ; il libère publiquement les commandants du bataillon Azov capturés à Marioupol et détenus en Turquie au grand dam du Kremlin, lequel se sent si faible qu'il communique le lendemain sur une future coopération russo-turque avantageuse pour les deux parties.


Troisième clé : l'annonce du pré-positionnement de trois cent mille hommes à la frontière NATO-russe, intègre l'incorporation de plein droit désormais de l'armée finlandaise dans le déploiement. Ça aide à gonfler les chiffres. Bien que l'alliance se revendique d'une posture unique de défense, il ne fait aucun doute dans les esprits paranoïaques de l'élite russe que la Fédération est maintenant menacée en permanence depuis la Mer de Barents jusqu'à la Mer noire. Le dispositif russe devra être étiré bien au-delà des capacités promises par le ministre russe de la défense. Quant à la Mer baltique, elle devient un lac atlantique avec l'entrée de la Suède et de l'île stratégique de Gotland dans le dispositif OTAN !
Même si les Etats-Unis n'ont aucun projet sur l'enclave de Kaliningrad, une prospective géopolitique raisonnable annonce que les jours russes de la Poméranie orientale sont comptés. Le différentiel de développement déjà flagrant va devenir tel dans les années futures, que la population va prendre en grippe le joug d'autorités lointaines qui se la pètent dans des palais de voleurs, mais qui sont incapables de développer l'enclave comme elle le voit faire chez les pays voisins. Poutine et sa clique de branques ont bien mérité de l'Occident !

Quatrième clé : il n'est un secret pour personne que l'approche méthodique et progressive des Américains du conflit russo-ukrainien vise à ne pas précipiter la destruction de la Fédération de Russie. Cette précaution relève de deux stratégies, déjà anciennes :
- le pouvoir en place à Moscou fut et demeure toujours de second choix, menteur et non-fiable ; mais il commande à lui seul un espace immense de Brest à Vladivostok doté d'ogives nucléaires, autorisant ce faisant l'unicité de l'analyse géostratégique. Si la Fédération éclatait - et nul n'en connaît tous les morceaux - les difficultés d'analyse seraient multipliées exponentiellement et la synthèse très difficile, voire impossible avec l'entrée en jeu de la Chine populaire sur son extrême-orient proche. Pour faire simple, les agences américaines et le Pentagone ne sont pas outillées pour gérer le bordel post-soviétique sur onze fuseaux horaires.

Second point qui nous concerne : Après l'éclatement de la Yougoslavie, les chicayas greco-turcs en Méditerranée orientale et maintenant la guerre ouverte en Mer noire, les Etats-Unis considèrent être impliqués plus qu'à leur tour dans des affaires européennes (ne parlons pas de la Syrie et du Liban) tandis que les pays européens de l'Alliance se les roulent dans des systèmes de protection sociale bien plus avantageux que ceux dont disposent les Etats américains. Il ne fait pas de doute que le transfert de la charge de défense sur les épaules européennes est imminent et qu'il se manifestera dans la campagne présidentielle américaine qui s'approche.
Théoriquement nos prestations sociales vont être contractées et la dépense publique réorientée vers le réarmement. Nécessité fait loi.

dimanche 9 juillet 2023

Esquisse d'une reconstituante

François Hollande
Sollicité de son commentaire sur les émeutes parties de Nanterre, M. Hollande, ancien président de la République qu'on va finir par regretter, a jugé que le problème n'était pas dans l'immigration mais dans l'inégalité de destins. Il a raison et ça me troue le c*l d'en convenir. Bien sûr l'immigration à la française est un problème en soi mais demeure à la périphérie de l'émeute comme le papier peint qui tapisse une chambre ; un décor ! Si elle était la cause première des maux endurés par la république, il suffirait de la stopper pour qu'à échéance rapprochée les feux de la révolte des quartiers s'éteignent et que du lait coule des fontaines. Même si depuis quarante ans, la population d'origine extérieure a toujours été sur-représentée parmi les émeutiers, la tension latente des "cités" n'est pas due à l'immigration actuelle. Le bouton "on-off" n'agira pas, c'est trop tard ; les naturalisations en masse sont passées par là. Et M. Hollande de renchérir au micro de Radio-France : « La grande affaire des quartiers, c'est de savoir si les enfants pourront être encadrés, instruits et capables de trouver leur destin dans des conditions qui soient équivalentes ou, au moins, moins inégalitaires que ce que l'on connaît aujourd'hui.» Après quoi on pourrait commencer à travailler sur des solutions, neuves !

Pendant le temps d'élaboration d'un nouveau paradigme social, la réforme de l'application d'une autorité légitime devra aller au bout des dysfonctionnements constatées plusieurs fois dans le contrôle des villes, qui nourrissent le discours de l'anarchie payée au mois comme celui des singes savants des préaux médiatiques. Et le même de continuer : « Donner une espérance commune tout en étant extrêmement clairs sur l'autorité. L'autorité, ce n'est pas un mot qui doit heurter. Elle doit être légitime et assumée. Elle doit être sans doute respectueuse mais respectée. Et ce, c'est la question de l'autorité qui est forcément posée. Mais pour qu'il y ait de l'autorité, il faut qu'il y ait de la justice et de l'égalité. C'est ainsi qu'elle trouve toute sa force.» Je pense qu'il a tout dit, même s'il aurait pu insister sur l'inapplication aujourd'hui du principe fondateur des sociétés modernes : Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Et non, pas chez nous, selon que vous serez blanc, noir, riche ou misérable, le baqueux dégainera ou pas.
Ne serait-il pas utile d'expédier déjà aux quatre coins du monde des enquêteurs capables d'appréhender l'organisation sociale de pays comparables au nôtre, en débarrassant leur esprit de toutes les foutaises sociologiques qui ont abouti à ce que l'on voit. Comment font déjà tous nos grands voisins ; puis plus largement, les pays compliqués bien plus grands que le nôtre ? Peut-être briserons-nous le carcan des idées toutes faites qui n'arrivent nulle part !

Si depuis l'émeute, la Gauche a pris le beau rôle de la distribution de la pièce (égalité, fraternité et vivre ensemble patin-couffin), la Droite n'a pas manqué de prendre le pire comme à l'accoutumée. Il se résume en un slogan éculé : la présomption d'innocence. Pas de chance pour les soutiers de l'Ordre, on a cette fois côté parties civiles, deux vidéos, une prise de son et deux témoins oculaires du moment fatidique. Le policier a déjà l'arme de service à la main alors qu'il n'y a aucun péril imminent à stopper et contrôler le véhicule en fuite ; il met en joue à un demi-mètre de sa tête le conducteur en infraction. Et le doigt étant déjà sur la queue de détente (c'est anormal), le coup part sur mouvement de la voiture. Fin de Nahel Merzouk.

La séquence violente est connue de tous dès le lendemain du drame, ce qui n'empêche pas le directeur narcissique de l'Institut Apollon de lancer illico une cagnotte pour secourir la famille du mis en cause, comme on le fit jadis du boxeur-gitan de Massy qui avait tenu tête à des gendarmes excédant leur pouvoir sur la passerelle Léopold-Sédar-Senghor en janvier 2019. Obscène est le mot. Plus obscène est la déclaration de l'avocat du prévenu à qui la Justice a refusé une mise en liberté, niant tout fait de délinquance de la part de son client présumé innocent, alors qu'il a tué un gosse à bout portant et sans raison (selon le Parquet) quelques jours avant ! Je ne me suis pas levé ce matin pour faire le procès du policier qui fait un métier ingrat, mais j'ai noté la circonstance aggravante de son passage par le 35è RI de Belfort qui l'avait familiarisé avec les armes, d'autant qu'il était parti avec lui en Afghanistan. Est-ce son passage dans des unités de police réputées toxiques qui a modifié sa perception de l'instant présent ? Son historique judiciaire interroge aussi (16 citations comme victime). Sa réaction fébrile n'est pas celle d'un Gaillard du 35. Houston ? on a un problème avec le brigadier Florian.

En attendant la fin des bouchons sur la route des vacances, on pourrait faire la liste des mesures nécessaires à établir progressivement une paix civile, laissant à d'autres son classement par priorités. Ces deux blocs s'ajoutent à la description du pays réel criblé de dettes, proposé dans l'article de la Bavure (ici).
En vrac :

- Destruction rock-bottom du ministère de l'Education nationale. Dispersion des agents sur toute la ZEE et transformation des locaux en internats d'excellence tous niveaux avec plateaux de sport intégrés - Autonomisation des établissements scolaires de métropole et d'outremer, et renforcement des rectorats pour les questions de discipline et de cohésion dans un conseil des recteurs - Contrôle physique (ou par portiques) des frontières y compris en montagne - Enseignement de deux langues vivantes de la sixième à la terminale assuré par des locuteurs étrangers d'origine (anglais, espagnol, mandarin, arabe littéral) - Restauration de l'apprentissage des langues structurantes au collège en commençant en ZEP (voir le Nonagone de RA) - Construction de commissariats permanents en zone d'autre droit et déploiement d'une police de proximité partout, pas seulement en cité (voir avec les polices municipales) - Restauration des brigades cantonales de gendarmerie en zone gendarmerie et réaffectation de l'arme au ministère des Armées - Suppression du juge d'application des peines et transfert de la fonction en préfecture - Suppression des unités spéciales de police de la voie publique à l'exception des BACs de nuit - Suppression des possibilités de sursis dans les condamnations touchant le personnel politique dans l'exercice de ses fonctions - Assèchement des "fours à came" par la criminalisation des clients par publicité ou par la légalisation des produits, au choix - Suppression des syndicats de magistrats pour implémenter la séparation des pouvoirs - Suppression du droit de grève pour tous les fonctionnaires du domaine régalien (comme dans des pays voisins) - Interdiction aux fonctionnaires d'Etat de candidater aux élections politiques (tous niveaux) avant d'avoir démissionné - Restauration du CPE simplifiant drastiquement l'embauche des jeunes - Rapporter la loi de regroupement familial - Rétablissement de l'expulsion des criminels étrangers en fin de peine - Externalisation des peines judiciaires dans les pays d'origine (voir le Nonagone de RA) - Régularisation des étrangers travaillant à plein temps - STO agricole des abrutis du RSA - Etablissement de statistiques démographiques à l'haplogroupe des habitants de la République - Destruction du système d'enregistrement des créations d'entreprise (faire le voyage de Rotterdam pour comprendre qu'une simple déclaration à la chambre de commerce du coin doit suffire) - Refonte du système de formation professionnelle (30 mds€ par an) avec ou en dehors des partenaires sociaux habituels et destruction des bureaux-suceurs - Revalorisation des emplois délaissés nécessaires au pays - Réécriture de la carte sanitaire en adéquation besoins/ressources, en commençant par l'outremer. Remonter un réseau national de dispensaires gratuits - Interdiction stricte d'artificialisation des sols pour éviter l'extension indéfinie du zonage - Salaire des élèves des lycées professionnels (un demi-smic à prendre sur la formation professionnelle) - Salaire étudiant adossé au succès du parcours (ditto à deux-tiers) - Salaire de base des médecins généralistes s'installant dans des cantons désertés - à votre idée...

Financements (au hasard) :
- Réduction drastique du train de vie de l'Etat (l'énumération ferait vingt pages) à commencer pour l'exemple par le train de vie des anciens présidents de la République et des premiers ministres qui retomberaient au SMIC - Lutte à mort contre la fraude aux prestations sociales sous le principe que "dans le doute, on coupe" - Lutte à mort contre la fraude fiscale (d'abord la TVA d'importation avant l'externalisation des bénéfices) - Suppression des allocations de confort qui font monter le prix des services dont elles facilitent l'accès (typique de l'allocation logement qui fait mécaniquement monter les loyers) - Révision de l'AME sur les pathologies lourdes ou dangereuses - Retourner à la retraite à 65 ans (modifiée par Mitterrand) - Suppression de toutes les aides publiques à la presse - Remise à l'équilibre de la Sécurité Sociale par interruption des versements au jour du premier déficit - Suppression des subventions culturelles sauf aux institutions emblématiques - Fermeture des agences d'aides à la création d'activité, avec déploiement d'une seule banque publique de lancement ou développement des projets d'entreprise - Cessation des subventions aux syndicats professionnels ou salariés à financer sur cotisations obligatoires (comme en Allemagne) - Cessation des subventions aux fromages de la République (agences, fondations, instituts, bureaux, hauts-commissariats, postes réservés...) - Réduction drastique du personnel ministériel par concentration des ministères et défaisance des domaines inutiles accaparés par l'Etat - Suppression des doublons ou triplons de connivence dans l'administration du pays et des régions - Autonomisation financière et fiscale des régions pour contraindre à la détaxation de la décentralisation - Retour à l'IRPP universel au premier franc - à votre idée...

Pour terminer "classe", nous finissons sur cette citation du Dr Robert Lascaux :
« Si la Terreur n'est pas un système normal de gouvernement (le docteur Lascaux n'était pas un comique), elle est le fatal aboutissement d'un Etat faible tel celui de Louis XVI, qui laisse partis et factions se dresser contre son autorité. Et c'est pourquoi un Etat, s'il ne veut pas être balayé un jour et ses membres martyrisés, a le devoir de rester rigoureusement souverain.» (Biologie..., Ed. Revue mondiale p.286)
Depuis la mort de Georges Pompidou, le régime actuel est dans la même situation que le royaume de Louis XVI alors que les communautés résidentes exigent de l'Etat qu'il mette son autorité à leur service pour combattre les autres, d'ordre et pour compte. Aussi longtemps qu'il résistera à cette exigence, la situation sera stable, pourrie mais stable. Quand il inclinera vers l'un des partis pressé d'en découdre, les prodromes de l'insurrection générale seront sûrs. La "cagnotte" chez GoFundMe parle d'elle-même.

samedi 8 juillet 2023

RIP Gautier Léon

Léon Gautier en 1942
Léon Gautier du Commando Kieffer est mort centenaire. Le 7 juillet 2023, la prise d'armes en son honneur, à Sword Beach sur cette plage magnifique de Riva Bella, fut émouvante, digne, sans fausse note et l'hommage du président de la République, mesuré et sincère.
La vie de Léon Gautier est très bien décrite dans le site DDay (*). Dès son plus jeune âge et jusqu'à la fin de sa vie active, il fut un homme d'ailleurs, à l'aventure, au grand air. Normal qu'il se soit entendu avec Philippe Kieffer (**) qui était natif d'Haïti et avait passablement roulé sa bosse avant de s'engager dans la Marine à la déclaration de guerre, mais lui avait quarante ans. Personne d'autre que le dernier des Commandos Kieffer n'a cent soixante seize copains qui l'attendent derrière la porte du paradis. Donnez-vous la peine, Monsieur Gautier, nous avions failli attendre !

Le "héros" bien qu'il s'en soit défendu, restera jusqu'à la fin dans l'empreinte du Décalogue quand il déclarait l'an dernier encore, que "la plus mauvaise chose qu'on puisse voir, c'est une guerre. Parce qu'on tue des gens en face qui n'ont jamais rien fait, qui ont une famille, des enfants. Tout ça pour arriver à quoi ?"
Il faut visiter les grands cimetières militaires et la Normandie en est très fournie. Ces milliers de corps sous des croix blanches ou noires sont ceux de gens qui n'avaient aucune raison de se détester. Ce sont les dirigeants des nations qui par calcul les ont jetées les unes sur les autres en attisant par tout moyen une haine d'autrui encourageant le massacre. C'est la fameuse mécanique de la levée en masse qui automatise l'assaut.
Léon Gautier dit n'avoir jamais eu peur sans pouvoir se l'expliquer ; ses camarades de combat, non plus. Sans doute est-ce le produit d'une préparation réflexive intense libérant l'esprit de toute méditation afin que le cerveau soit tout entier disponible pour l'exécution de la tâche commandée. Léon Gautier a parlé plus que d'autres de ses années de guerre mais la plupart des anciens combattants revenus du front voulaient d'abord se taire tant ils avaient les yeux emplis d'horreurs. Ce fut pareil pour les rescapés des camps d'extermination nazis. Fort heureusement, des vétérans dont le métier était d'écrire, racontèrent la guerre au quotidien avant de s'effacer devant les historiens de l'université qui nous ont expliqué tout ça dans des sommes impressionnantes. Aux témoignages succèdent les thèses...

couronne de fleurs tricolore

A part l'oppression par l'apartheid comme la vivent de nos jours les Palestiniens, le labeur des hommes ne prédispose pas les peuples à partir à la guerre de leur propre élan. Dit plus brièvement encore, la guerre est le plus souvent la conséquence d'une fabrication. Et cette fabrication est entreprise et achevée par des gens qui ne la feront jamais personnellement. Léon Gautier s'est levé parce qu'un type qui ne le connaissait pas avait entrepris de l'asservir pour satisfaire sa vision extatique d'une puissance invincible. Qu'il s'appelle Adolf Poutine ou Vladimir Hitler n'a aucun intérêt finalement, le problème est que les peuples les suivent et que les Léon Gautier ne sont pas si nombreux que cela. Méfions-nous donc de la fibre populaire des tribuns qui lèvent en masse les foules enthousiastes et rêvent de les jeter sur celles qui le sont moins à leur endroit.
La réflexion d'un professionnel du gouvernement des hommes sera toujours supérieure dans ses projets à l'hubris du locataire à bail précaire qui se prend pour le premier et cherche à s'éterniser en cajolant ses électeurs. Faisons confiance en ce domaine de la défense du pays à un permanent, un roi par exemple, ou une reine, quoiqu'elles soient parfois plus va-t-en-guerre que les rois. Et si un intrus dans le champ de l'intelligence nous menace par le fer et le feu, faisons face avec la seule intention de le détruire dans l'honneur. C'est plus radical que de seulement l'humilier et ça se plaide facilement au Jugement dernier en s'appuyant sur l'Ancien Testament et les livres de Josué, Samuel et Esther qui célébrent le génocide des primo-occupants de la Terre promise.
Et la guerre russe d'Ukraine a passé cinq cents jours !

vendredi 7 juillet 2023

La bavure et l'émeute

bouteille d'essence catapultée

Dans un article ravageur du Figaro qu'on lira ici, Jean-Loup Bonnamy (normalien, agrégé de philo) fait la liste des émeutes de banlieue (nous l'avons un peu complétée) :
- La Grappinière de Vaulx-en-Velin en 1979 - il y a 44 ans ;
- Le Mas du Taureau à Vaulx-en-Velin en 1980 ;
- Les Minguettes de Venissieux et "les rodéos de la colère" en 1981 ;
- La Noé de Chanteloup-les-Vignes et Achères en 1990 ;
- Vaulx-en-Velin bis-repetita en 1990 ;
- Les Indes de Sartrouville en 1991 ;
- Garges-lès-Gonesse et Aulnay-sous-Bois en 1991 ;
- Le Val Fourré de Mantes-la-Jolie en 1991 ;
- Insurrection des banlieues de 2005 partie de Clichy-sous-Bois (trois semaines) ;
- Villiers-le-Bel, Sarcelles et Garges-les-Gonesses en 2007 ;
- Insurrection générale de juin 2023 partie de Nanterre ;
Le plus souvent le déclencheur est un mort parmi les populations concernées.

La Marche des Beurs, née à Monmousseau, arrive triomphalement à Paris en 1983.
Le film La Haine de Kassovitz écrit après la séquence d'émeutes de 1991 comme une autopsie des quartiers, sort en 1995 !
Tout ceci pour dire que la problématique des banlieues chaudes n'est pas une question récente. La fréquence porteuse qui les relie toutes, c'est l'ostracisation des bronzés les moins doués. La réponse des autorités (en 1979 on est sous Giscard d'Estaing et en 1981 sous Mitterrand... puis Chirac etc) est la réhabilitation de l'habitat. Or, tous les insurgés d'alors le confirment aujourd'hui : « Ce n’était pas ce que nous demandions. Nous voulions simplement être traités comme n’importe quel citoyen. Marcel Houël (le maire jadis de Venissieux) a vécu ces violences comme une attaque personnelle ; d’ailleurs, notre principal interlocuteur, c’était son premier adjoint, Guy Fischer, et pas le maire lui-même, que l’on a peu rencontré.» (dixit Mokrane Kessi, actuellement conseiller municipal de Venissieux). Depuis lors, on n'a pas avancé d'un mètre !

Paradoxalement, les pouvoirs publics ont une excuse qui les accuse : ils ont été submergés par leur propre laxisme dans la gestion des flux d'immigration, à commencer par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 sur la circulation et l'établissement des ressortissants de l'ancienne colonie, et pour faire bon poids, le regroupement familial de Giscard d'Estaing en 1976, sans l'encadrer dans les capacités d'accueil. Comme le décrit très bien Jean-Loup Bonnamy, la pression migratoire a interdit toute décompression des problèmes endurés par les cités, les mesures arrivant toujours après et trop tard, en situation de crise permanente.

Qui veut réfléchir à une solution, forcément incomplète ?
Pas de chance, j'ai piscine justement ; mais je suggère qu'on mette un peu plus d'intelligence dans l'analyse fouillée du vrai pays réel. Et cette *jeunesse* en fait indéniablement partie, que ça nous plaise ou non. Voyant que l'inondation des ZUP par les crédits de la politique de la ville comme la répression policière n'aboutissent pas, il faudra remettre à plat tout le modèle socio-politique de la République française, tout absolument jusques et y compris la nuée fumeuse de la sainte laïcité, avant de passer à autre chose. Les Français devraient s'y coller une bonne fois sans idées préconçues mais à l'aune des réalités constatées. Ce serait par exemple une convention citoyenne, utile certainement si on en barre l'accès aux professionnels et sociologues de l'excuse et à ceux de l'intolérance-réflexe, surtout les "patriotes" qui ont soigneusement évité leur service militaire avant de battre l'estrade. Un Grenelle du bon sens en fait, sans les politocards habitués des plateaux qui ont presque tous échoué.

Pour s'y préparer sérieusement et bien comprendre la mécanique de l'émeute afin de la séparer du modèle social à rechercher, relire absolument La bavure et l’émeute - Genèse d’un signe déclencheur type dans le Rhône (1979-2000) d'Alessio Motta, paru dans la Revue française de science politique 2016/6 (Vol. 66) en cliquant ici, et en commençant par cet avertissement de l'auteur : « La recherche sur les émeutes de banlieue en France est traversée par un paradoxe qui a survécu aux nombreux travaux publiés dans le sillage de l’automne 2005. Elle est généralement une "sociologie des émeutes" qui ignore lesdites émeutes et leurs logiques propres (leur déroulement en venant parfois à apparaître comme un objet) préférant y voir un symptôme des problèmes des banlieues et des relations tendues entre jeunes et police, ou encore une occasion d’étudier la construction de catégories d’action publique ou de stratégies politiques.» On y trouve aussi, avant même la généralisation des chaînes d'info en continu, une stigmatisation de la presse, oscillant comme à son habitude entre panique et hystérie, qui fait monter la sauce alors qu'il ne se passe rien. Il dit : « Parmi les crimes évoqués plus haut, on trouve ceux de nombreux « tireurs fous » ayant abattu de jeunes voisins dans diverses cités de France pendant l’été 1983. Cette année-là et plus généralement au milieu des années 1980, comme dans le reste du pays, on observe plusieurs fois dans l’Est lyonnais des "maladresses" policières ou des tirs meurtriers commis par des voisins, suivis du même paradoxe dans la presse : aucun fait de violence particulier n’est relaté dans les jours qui suivent, sauf dans certains cas où les actes se limitent à des représailles ciblées contre le meurtrier évacué par la police, contre son logement ou sa voiture, quelques projectiles jetés d’une fenêtre, une fois des échauffourées dans un bar entre quelques jeunes et des CRS. Pourtant, l’imaginaire d’un "climat d’émeutes" est inspiré des "émeutes" passées du département du Rhône qui étaient sans rapport avec un décès, et de précédents étrangers comme celui de décembre 1982 à la suite d’une bavure policière en Floride ; est entretenue une rhétorique sensationnelle sur la "grande tension" et les risques omniprésents que les choses tournent à l’explosion. Notons que cela ne signifie pas que les "tensions" sont forcément une invention journalistique pure. L’expression s’accompagne généralement d’un défaut de description de faits concrets, mais ces tensions peuvent recouvrir selon les cas des échanges d’insultes entre des jeunes et des agents de police postés sur place, éventuellement le jet de quelques projectiles, parfois seulement des plaisanteries.» Le reste est passionnant, les complications de la montre sont toutes démontées et on comprend comment prend la mayonnaise de l'émeute ; à lire crayon en main (appareil critique de 82 notes), et c'est bien écrit.

Pour terminer, qu'est-ce donc ce "vrai pays réel" dans le champ socio-politique ? En deux mots ?
* Un pays qui déjà ne fournit pas suffisamment de travail à sa population active, mais qui importe encore des bras ! Les talents, passe encore !
* Un pays qui redistribue plus que la richesse produite disponible et emprunte donc à l'étranger pour faire l'échéance des prestations sociales (tout patron agissant de la sorte va en prison).
* Un pays fourvoyé dans l'égalitarisme et l'uniformisation qui stérilisent une grande partie de la créativité des courageux ou des capables.
* Un système à la Ponzi qui reporte la charge des crédits sociaux sur les générations futures dès lors que les générations bénéficiaires refusent de ponter (retraites...) et en demandent toujours plus.
* Un régime politique qui marche aux slogans (les fameuses valeurs républicaines) et les piétine comme une république soviétique.

Qu'en resterait-il à la fin de ce Grenelle du bon sens ? Pas grand chose sans doute. Verra-t-on dans la prochaine décennie l'insurrection générale des jeunes actifs contre les rentiers du hamac national d'aujourd'hui qui bouffent tout le capital du pays ? On ne parlera plus des "djeunes" parce qu'alors la révolte sera organisée et menée par des gens intelligents et capables d'aboutir. Bon, je suis en retard pour la piscine.


Liens de cet articles en clair :
- Cairn : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2016-6-page-937.htm
- Bonnamy : https://www.jesuisfrancais.blog/2023/07/01/actualite-insurrectionnelle-ou-le-philosophe-jean-loup-bonnamy-tente-de-poser-un-diagnostic-global-du-mal-qui-frappe-la-france-le-vrai-probleme-nest-pas-dans-les-cites-il-est-en-nous/?fbclid=IwAR2RxeYYzkeuKYv7avJ3rmknBhynwnQtM2aEULH8zE_YXPQsjwGlmH2L3KU
- Accord franco-algérien : https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Europe-et-International/Les-accords-bilateraux/Les-accords-bilateraux-en-matiere-de-circulation-de-sejour-et-d-emploi/L-accord-franco-algerien

dimanche 2 juillet 2023

Tectonique de l'insurrection

L'insurrection des banlieues (pour faire court) ressemble furieusement à la détente d'une faille en tension comme la Californie en connaît avec la San Andreas. Mais ce n'est pas encore le Big One annoncé par Gérard Collomb en 2018 : « après le côte-à-côte, le face-à-face !»

émeute à Saint-Denis (93)

Ce pays ne s'aime pas. Les secousses prémonitoires ont été nombreuses depuis la Manif-pour-tous en 2013, la mobilisation contre les lois sur le Travail en 2016, les gilets jaunes de 2018 et leurs suites hebdomadaires, les manifestations contre la réforme des retraites cette année et aujourd'hui les exaspérations de tous bords. La répression étatique, parfois sadique (police de Valls ou de Castaner) n'a rien réglé : l'étendue des dégâts constatée ce matin nous économise un long exposé. C'est proprement ahurissant. Et contrairement à la tectonique des plaques, il n'est pas sûr que l'explosion de colère termine la tension constatée jusqu'au meurtre de Nahel Merzouk. Peut-on parler des plaques ?

Le Piéton du roi en voit trois :

- la plaque de la globalisation des niveaux de vie ;
- la plaque de la mondialisation des spécialisations productives ;
- la plaque du déclassement relatif à la démographie.
La France les refuse toutes.

Mais s'y ajoute un ferment de révolte émané de nos élites en charge, le forçage d'une idéologie allogène dans les réflexions et les mœurs d'un peuple qui la refuse d'instinct. Le mariage pour tous est typique de cette obstination d'une caste allumée qui veut transformer de force la morale commune (un million de manifestants à Paris le 24 mars 2013) pour complaire à sa philosophie des sociétés humaines. Quand on pense que de grands ténors de la gauche gay, comme Pierre Bergé, refusaient la mascarade du mariage homosexuel, symbole éminemment bourgeois et décadent, on mesure l'entêtement de la pie Taubira à se faire un nom dans les livres d'histoire. Maintenant c'est le wokisme. Revenons à nos "plaques".

(1) La globalisation des niveaux de vie portée par l'universalité de l'information sur les conditions d'existence dans toutes les parties du monde, nourrit des comparaisons parfaitement légitimes qui sont le moteur très puissant des migrations Sud-Nord. Ce moteur ne s'essouflera que lorsque le gap sera moins grand que la peine exigée pour le franchir. En français facile, que vaudront les soucis et le prix d'un voyage d'exil pour obtenir juste une amélioration des conditions de vie si celles vécues au moment du choix sont quand même acceptables ? Tous les Kashmiris qui ont fini au fond de la mer au large de la Grèce avaient jugé que le jeu en valait la chandelle tant la misère est grande chez eux. Le problème crucial est dont le défi de l'EMIGRATION. Il ne peut se régler et progressivement que par une certaine entropie des niveaux de vie sur la planète. Les spécialistes chiffreront quel sera le gap acceptable quand remontera le niveau des moins dotés.
Jusque là, le "nord" doit gérer les migrations en fonction des capacités d'embauche et des conditions de résidence des populations déplacées par la globalisation. Et on ne parle pas encore des réfugiés climatiques. Le gouvernement français, encombré d'idées toutes plus fumeuses les unes que les autres, ne fait rien de concret, sauf à exprimer de temps en temps ses préférences auxquelles personne ne croit. Les Français ne perçoivent pas l'axe officiel de réflexion, les nouveaux arrivants non plus. Les conséquences sont fantasmées et les fomenteurs de troubles ont un boulevard.

(2) La mondialisation des spécialités productives n'est pas un concept récent. Les empires thalassocratiques occidentaux appliquèrent cette organisation de la production à l'intérieur de chacun. Mais le commerce mondial décrété par l'Occident a pris par surprise les vieilles autarcies protégées comme la France, quand les pays habitués au commerce extérieur en tirèrent bénéfice. Gouvernés par des profs de fac comme Raymond Barre, nous y avons perdu notre industrie, carrément. Nos voisins, gérés par une caste industrielle puissante comme l'Allemagne ou par des familles d'industriels qui avaient la fibre nationale comme l'Italie, ont sauvé la leur. Nous faisons des efforts pour nous rétablir et "rapporter du travail à la maison" mais la mentalité industrielle n'est pas encore revenue et nous ne rapatrierons rien de durable en industrie tant que vous n'aurons pas capté les débouchés de notre production. Le marché et l'usine vont de conserve. Cette agonie a détruit beaucoup de valeur ajoutée et de revenus, précarisant les acteurs de la production, sans toucher aux inactifs mais penseurs qui s'arrogent le droit de les gouverner. D'où le clash des gilets jaunes, entre autres.

(3) Le déclassement relatif à la démographie est inéluctable tant que la perception de la vie humaine reste en l'état dans certains pays du Sud global. Aussi longtemps que ce vecteur de puissance immédiate ne sera pas maîtrisé, il y aura une pression très forte à l'équilibre des fluides, le trop-plein d'ici cherchant à compenser le déficit là, parfois même par aspiration comme le fit longtemps l'industrie française rétive à automatiser ses chaînes. Le mouvement créé par la confrontation surpression-dépression doit être obligatoirement contrôlé (à la danoise), ce qui semble impossible en France tant que les allées du pouvoir seront en libre accès aux idées de la gauche généreuse et irresponsable. C'est donc un combat politique, qui doit être gagné absolument, sauf à voir le plus beau pays du monde se dissoudre en une magnifique réserve d'indiens. Mais qui sont ceux qui mènent ici ce combat ? Bizarrement, des Français de papier. Comme si la race n'avait pas survécu à deux guerres mondiales. On y reviendra.
cul de lampe diviseur
Après avoir défini les plaques en tension, il faut parler maintenant de la gestion nationale des catastrophes de rue. Alain Bauer disait récemment que les pouvoirs français ne savaient pas choisir entre l'intégration des nouveaux venus et leur précarisation en attente de retour à meilleure fortune chez eux. Il a raison. Il ne suffira jamais de déverser des milliards de remise en peinture des quartiers défavorisés pour avoir la paix. Il faudra intégrer les communautés allogènes en révisant l'empreinte de l'Etat sur tout le territoire, sans se départir d'une gestion à poigne de l'ordre quotidien. Comment ? En appliquant le droit existant aux acteurs du désordre comme aux fauteurs de troubles. On en revient à la judiciarisation du défi pour comprendre qu'il faut commencer par là. Reprendre en main la Justice et pour que la sacro-sainte séparation ne soit pas violée, le faire faire par l'institution elle-même. Quand mettra-t-on au gnouf les magistrats du "mur des cons" ?
Sans doute à ce moment commencera-t-on à comprendre qu'il faut extraire le domaine régalien de la dispute démocratique, si on veut avancer vers quelque chose de pérenne, en extirpant la politique politicienne de cet espace primordial.
C'est mon Projet... comme dirait l'autre.

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