mercredi 30 juillet 2014

Réflexions sur Bouvines-2014

crédit Jean-Marie et Régine
@ Noblesse & Royautés
Nul n'a regretté l'absence du premier ministre catalan aux commémorations de Bouvines. "Bouvines ? Épelez ?" aurait-il dit à son chef de cabinet. Ni aucune autre absence finalement. Les reportages diffusés par le CER ou la Voix du Nord qui a remarqué Louis de Bourbon, ou même l'UPR qui a bien recadré les leçons tirées de l'histoire, se sont attachés à la commémoration, renvoyant ce faisant les politiciens à leur "communication" racoleuse chassant l'émotion pour exister.

La naissance d'une nation française sur les deux-tiers nord du pays - pour le dernier tiers, il faudra attendre la chute de Toulouse en 1228 et un futur apaisement du Midi ravagé par la croisade des Albigeois - telle naissance ne pouvait émouvoir un "président de la République", chroniqueur en chef des malheurs du temps, carrément inculte (mais son prédécesseur était pire), ni même les médias nationaux affairés à vendre de la soupe en sachet sur le dos des Gazaouis et des voyageurs crashés morts. On avait l'archevêque et le roi en "attente", que pouvait le peuple venu nombreux demander de plus ?

Les royalistes, eux, ont diversement apprécié les aigreurs d'estomac du vieux prétendant d'Orléans qui, apprenant la venue en vedette de l'aîné des Capétiens, s'est fendu d'un tweet et d'un communiqué "officiel" excusant son absence pour raisons personnelles et familiales (sic, c'était pourtant Bouvines!) et réaffirmant ses droits à la couronne de France, ce qui était pathétique en pareille circonstance. On ne le privait de rien, et ne lui en demandait pas plus ! Il faudrait une bonne fois que les choses soient claires, la maison d'Orléans n'est que l'héritière de la Monarchie de Juillet et n'a aucune légitimité à revendiquer l'exclusivité de l'héritage des quarante rois qui l'ont précédée. Pour plusieurs raisons et de son propre fait.

Vous ne pouvez être héritier de quoique ce soit qu'en vertu d'une ascendance. Or il y a eu rupture de la chaîne dynastique quand le duc d'Orléans, Philippe Egalité, fit couper le cou du roi de France Louis XVI après lui avoir pourri la vie de mille manières, fomentant troubles en continu avant et pendant la révolution française. Le même ascendant déclara pour la galerie n'être que le fils du cocher Montfort attaché au Palais-Royal..., et prit pour lui et sa descendance le nom d'Egalité, reniant ses origines. Le câble dynastique a été tranché à ce moment-là. On pouvait plaider la folie ou la bêtise mais cette rupture fut confirmée de la plus sûre des façons par l'usurpation du trône réalisée par son fils le duc de Chartres, Louis-Philippe Ier, au détriment du jeune duc de Bordeaux. La chasse aux Bourbons qui s'en suivit reconfirmait la confirmation.

Philippe Egalité
La descendance de Louis-Philippe est, comment dire, surnuméraire dans ses prétentions à la couronne de France, et ce serait trop charger la barque que de continuer la revue de détails. Orléans peut marcher sur les mains à faire le tour de l'Elysée pour obtenir des légions d'honneur qu'il n'avancera pas d'un pouce sur le chemin de sa légitimité, sauf à réduire ses prétentions à l'héritage de 1848. Ce qui peut d'ailleurs rallier des nostalgiques de la république des ducs. Charles Maurras et ses amis s'en contentaient, nous aurions mauvaise grâce à en faire plus en cas de vide dynastique, ce qui n'est plus le cas.
De bons états de service des enfants d'Orléans pourraient leur obtenir la présidence de la Croix Rouge française, comme en son temps Bourbon Busset, ou quelque autre fonction de prestige. Qu'ils s'en contentent.
Ce n'est que dans l'hypothèse de l'instauration d'une nouvelle monarchie française, déliée des lois fondamentales du vieux royaume, qu'Orléans pourrait présenter ses champions à la lice du tournoi de sélection. Il y ont leur chance, n'en doutons pas, et pourquoi ne la leur souhaiterions-nous pas bonne en nous adressant à la nouvelle génération qui n'a pas démérité ? Parlons alors d'avenir justement ?

La semaine d'années qui a commencé avec l'avènement du président de Corrèze verra un changement de paradigme. La République est usée jusqu'à la corde, nous n'en ferons pas le bilan. La situation économique améliorée, seule capable de cacher l'impéritie propre à ce régime démagogique, est bloquée sur les trois déficits, social, budgétaire et commercial, mortelle trinité. L'abrutissement sur un siècle du peuple français exclut un sursaut populaire de bon sens et la décrépitude morale des partis politiques annule tout espoir de Sixième république parlementaire. Le réflexe sera l'appel à César pour nettoyer les écuries d'Augias où personne ne veut aller patauger.

Que le coup soit monté par l'oligarchie pour obtenir l'assurance d'y survivre ainsi qu'au 18-Brumaire, ou qu'il le soit par les forces vives surfiscalisées du pays, attaquées sur leur patrimoine, il est le plus probable, l'appel à l'homme providentiel étant dans les gènes populaires. A partir de là, tout est ouvert, à l'exception d'un retour à l'Ancien régime, régime condamné quatre ou cinq fois par l'histoire après les Etats Généraux de 89. Tout est ouvert, à condition de donner confiance, y compris bien sûr une monarchie constitutionnelle. Cela se jouera au mérite, il n'y aura aucun passe-droits, aucune "légitimité" autre que celle acquise par acclamation, comme au commencement, à Senlis !
J'en parle à mon cheval.

samedi 26 juillet 2014

Demain Bouvines




Communiqué du Secrétariat particulier 
de Monseigneur le duc d'Anjou
VIII° Centenaire de la victoire de Bouvines
(1214 - 2014)


Le Prince Louis de Bourbon, duc d'Anjou, aîné des descendants du Roi Philippe Auguste, a été invité par Monsieur Alain Bernard, maire de Bouvines, aux cérémonies officielles de commémoration de la bataille de Bouvines, le dimanche 27 juillet 2014.

En présence des représentants de l'Etat et de la Région, le Prince assistera à dix heures à la messe, célébrée par Monseigneur Ulrich, archevêque de Lille, en l'Église Saint Pierre de Bouvines, II se joindra ensuite à un moment de recueillement devant le monument commémoratif avant de participer à la réception prévue dans le parc du château.

Monseigneur le duc d'Anjou se rendra au concert donné l'après-midi.

Adhérents et sympathisants de l'Institut Duc d'Anjou sont invités à se joindre à cet événement.

Tous les royalistes de France sont invités à rejoindre.


samedi 5 juillet 2014

Mgr Dillon va aux États

Ceci est la relation abrégée d'un voyage en grand équipage du président-né des Etats de Languedoc à la veille de la Révolution française, comme nous la donna Lucy Dillon, sa nièce, future marquise de La Tour du Pin. L'archevêque irlandais de Narbonne, Arthur-Richard Dillon (1721-1806), était une "nature", passionné par l'administration de son fief en laquelle il brilla, bien plus que des choses surnaturelles qu'il jugeait sans doute impalpables, comparées à un canal, une route ou une faculté de sciences. Le Ciel ne lui en tint pas rigueur, qui déplaça en 2007 le cardinal Lustiger en grande pourpre à la translation de ses cendres de Saint-Pancras (Londres) à Narbonne. La notice de la Wikipedia donne l'essentiel et un peu plus. On en fera son profit.

De 1783 à 1786, Henriette Lucy Dillon suit sa grand mère aux Etats dans le train de son oncle l'archevêque. Elle a autour de 15 ans. Passionnée de chevaux dès son plus jeune âge - elle en sera plus experte pour monter une écurie que bien des maîtres de maison - elle décrit le système de transport de Paris à Montpellier. Dans son journal, elle explique par exemple que l'affaire de Varennes n'aurait peut-être pas si mal fini, si au lieu de chevaux d'escadron on avait confié la famille royale à des chevaux de poste et à des postillons habitués à mener grand train sans les fatiguer. Bon, c'est à elle maintenant :

- Berline -
Nos préparatifs de voyage, les achats, les emballages, étaient déjà pour moi une occupation et un plaisir dont j'ai eu le temps de me lasser dans la suite de ma vie agitée. Nous partions dans une grande berline à six chevaux : mon oncle et ma grand'mère assis dans le fond, moi sur le devant avec un ecclésiastique attaché à mon oncle ou un secrétaire, et deux domestiques sur le siège de devant. Ces derniers se trouvaient plus fatigués en arrivant que ceux qui allaient à cheval, car alors les sièges, au lieu de être suspendus sur les ressorts, reposaient sur deux montants en bois s'appuyant sur le lisoir (ndlr : pièce de bois transversale, qui est au-dessus de l'essieu d'un carrosse, et qui en porte les ressorts), et étaient par conséquent aussi durs qu'une charrette.
Une seconde berline, également attelée de six chevaux, contenait la femme de chambre de ma grand'mère et la mienne, Miss Beck, deux valets de chambre et, sur le siège, deux domestiques.
Une chaise de poste emmenait le maître d'hôtel et le chef de cuisine.
Il y avait aussi trois courriers, dont un en avant d'une demi-heure et les deux autres avec les voitures.
M. Combes, mon instituteur, partait quelques jours avant nous par la diligence, nommée alors la Turgotine, ou par la malle. Celle-ci ne prenait qu'un seul voyageur. C'était une sorte de charrette longue, sur brancards.
[... digression étrangère au grand équipage et conditions de route ...]

- malle-poste -
Nous courions à dix-huit chevaux, et l'ordre de l'administration des postes nous précédait de quelques jours pour que les chevaux fussent prêts. Nous faisions de longues journées. Partis à 4 heures du matin (ndlr : 6 heures en heure d'été actuelle), nous nous arrêtions pour dîner (ndlr : à midi). la chaise de poste et le premier courrier nous devançaient d'une heure (ndlr : eux démarraient donc à trois heures) . Cela permettait de trouver la table prête, le feu allumé, et quelques bons plats préparés ou améliorés par notre cuisinier. Il emportait de Paris, dans sa voiture, des bouteilles de coulis, de sauces toutes préparées, tout ce qu'il fallait pour obvier aux mauvais dîners d'auberge. La chaise de poste et le premier courrier repartaient dès que nous arrivions, et lorsque nous faisions halte pour la nuit, nous trouvions, comme le matin, tous les préparatifs terminés.
[...]
Après avoir parcouru 160 lieues (690 kilomètres) de chemins détestables et défoncés, après avoir traversé des torrents sans ponts où l'on courait risque de la vie*, on entrait, une fois le Rhône franchi, sur une route aussi belle que celle du jardin le mieux entretenu. On passait sur de superbes ponts parfaitement construits ; on traversait des villes où florissait l'industrie la plus active, des campagnes bien cultivées. Le contraste était frappant, même pour des yeux de quinze ans.
Le beau Languedoc atteint, nous arrêtons là le récit de Lucy Dillon.
Voilà la vérité de l'innocence, la description du pays et celle de la période des Etats est un régal pour le "patriote" (Chapitre III du Journal d'une femme de cinquante ans, Chapelot Paris, 1913 en ligne sur Gallica).



* ils passaient les gués de France, portes de voiture grandes ouvertes, afin que le flot la traversât sans la renverser !

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