samedi 23 avril 2005

Les armes bavardes de Benoît XVI

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Armes cardinalices de S.E. Ratzinger

Les armoiries de l’archevêque de Munchen u. Freising Ratzinger passent à Benoît XVI. Que nous disent-elles ?

Le Noir couronné, certains le disent Maure, d’autres Nubien, d’autres Ethiopien, est apposé sur les armes des évêques de Freising depuis le Xème siècle. La signification de ce symbole choisi par des princes-évêques bavarois est obscure, surtout avec les cinq signes que sont respectivement le profil européen noir, la couronne royale de rubis, les boucles d’oreille assorties, les lèvres fardées, le col rouge. Il est probable que l’origine de ce symbole quintuple soit perdue. En reprenant les armoiries du comté de Freising, on retrouve cette tête mieux dessinée avec les cinq détails ci-dessus plus une chevelure nettement féminine. Le Maure des armoiries serait-il finalement une belle reine noire ? Nous cherchons encore.

L’ours bâté évoque une légende que l’on prête à saint Corbinien de Freising qui fut le fondateur en 716 d'une église à Freising qu'il renforça par un monastère bénédictin érigé sur une colline proche : un ours dévora le mulet du saint évêque en route pour Rome au passage des Alpes (ou des Abruzzes). L’ours fut dompté par le saint homme et dut porter le bât du mulet contre son gré. Mais arrivé à Rome l’évêque le libéra. Moralité, ne restez pas à Rome avec votre esclave.

Reste la coquille mouillée. Elle raccorde Benoît XVI à saint Augustin. Méditant sur le mystère de la Sainte Trinité, la légende dit qu’il vit un enfant sur la plage jouer avec un coquillage, à l’aide duquel il essayait de puiser l’eau de la mer pour remplir un trou de sable. « Il est plus difficile à ton intelligence de saisir le mystère de Dieu que de transvaser toute la mer dans ce petit trou ». On ne dit pas si le gamin haussa les épaules et continua. Mais Mgr Ratzinger choisit ce symbole pèlerin dans son itinéraire théologique.

Benoît XVI, coopérateur de la vérité.
Tout un programme.


Discussion de la tête de Maure (suite)

La tête de maure portée sur les armes de Benoît XVI provient, nous l'avons dit, des armoiries du diocèse de Freising, mais plus encore des vastes possessions de la goupille (Hochstift) de Freising, leur fief, en ce sens que la tête se retrouve dans les armoiries des villes en apanage comme Skofja Loka en Slovénie, Innichen au Sud Tyrol italien, Wörth, Garmisch-Partenkirchen, et bien d’autres en Bavière.

en Bavière actuelle Posted by Hello



en Slovénie actuelle Posted by Hello



Il est admis en Allemagne que cette tête représente saint Corbinianus, le fondateur du diocèse de Freising. Avec d’autres plus savants, nous en doutons.

Corbinianus naquit à Paris vers 680 sous le règne de Thierry III, de Waldekisus son père et Corbiniana sa mère. Baptisé du nom de son père, pourquoi prit-il le nom de sa mère plus tard est un mystère de plus ? Sa vie est magique et pleine d’aventures, d’ermitages et de fondations, et sa foi clouée au fer dans son coeur le portera vers la canonisation sans souci. Mais nul n’a jamais remarqué jusqu’à l’écrire quelque part, qu’il était noir ! Peut-être qu’en ces temps bénis à la hache, la couleur de la peau importait si peu qu’on ne la mentionnait pas. Les brassages de l’empire romain avait-il fait flotter le bois d’ébène jusqu’au coeur de l’Europe. Sans doute puisque bien des "Africains" eurent des positions éminentes dans l'empire. Si ce n’est pas Corbinianus nous y revenons ci-dessous.

Que fait la couronne sur sa tête? Son bâton de maréchal ne fut que l’épiscopat et sa canonisation ne pouvait lui apporter de couronne. Il semblerait que les princes-évêques de Freising aient surtout voulu mettre une couronne dans leurs armoiries pour bien signifier que leur Hochstift relevait directement de l’empereur et pas une minute du duc de Bavière. D’ailleurs le diocèse de Freising n’intègrera la Bavière qu’en 1803, trois ans avant la chute du Saint Empire.

Les hypothèses suivantes ne sont pas départagées :

1. La tête serait celle du roi-mage Gaspard. Des trois rois accourus, Gaspard représente l'Asie. Il est noir, jeune, imberbe, et apporte de l'encens qui a une valeur divine. Mais que ferait Gaspard dans les Préalpes bavaroises ?

2. Ce serait une représentation de saint Mauritius, dont le nom dérive du latin maurus et qu’à défaut de pouvoir nommer en héraldique, on a décidé de noircir le visage pour faire parler l’image auprès des âmes simples. Saint Maurice ne semble pas avoir laissé de traces indélébiles à Freising. Mais il fut massacré à la tête de la légion des Thébéens d’extraction chrétienne, non loin de là, en 286 par l’empereur Maximilien Hercule, brute balkanique redoutée, dont il refusa l’ordre de massacrer les chrétiens du lac Léman. 6600 hommes périrent dans cette affaire à Solodorum, château fort sur les rives de l'Arula non loin du Rhin. Le tumulte a très bien pu traverser les siècles dans les Alpes. Les Thébéens venaient d’Asie, comme Gaspard le roi-mage noir. Etait-il noir aussi, peut-être bien !

3. Pourquoi pas saint Zeno, évêque de Vérone martyrisé en 380, représenté le plus souvent en maure parce qu’il venait d’Afrique. Mais on n’établit pas le lien avec le versant nord des Alpes. Il n''est jamais cité dans la Vie des saints au chapitre de Corbinianus.

4. Saint Sigismund (+525), roi vandale de Bourgogne, violent et pieux jusqu'à se faire moine, et plus tard assassiné en sainteté. Ce roi fut d’une certaine importance pour que Charles IV d’Autriche transfère ses reliques à Prague. Il est représenté sur un bois gravé polychrome non daté en compagnie de saint Corbinianus, au pied duquel on aperçoit l’ours de la légende et le blason du maure. Le lien existe donc quelque part bien qu'ils n'aient pu se connaître à cause de l'écart de temps, mais l’énigme du maure demeure.

l'évêque, la Vierge et le roi
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5. Avant-dernière hypothèse : la tête de maure représenterait saint Mauritius que Corbinianus aurait mis sur ses armes épiscopales. Elle serait passée à la postérité, et l’image, plutôt exotique en Bavière, aurait été identifiée avec le saint évêque jusqu’à devenir la sienne propre. La scène du bois polychrome ne dirait pas autre chose, Corbinianus, le teint frais à la droite de la Vierge Marie, pose en mitre d'évêque crossé, son écu à tête de maure déposé à ses pieds pour l'identifier.

6. La dernière hypothèse est tout aussi tirée par les cheveux. Le Moyen Age utilisait largement le visuel dans la catéchèse depuis qu’on sait que les églises étaient décorées de scènes bibliques ou catholiques de couleurs vives. Pourquoi n’aurait-on pas décidé un jour de noircir le profil de Corbinianus sur les armoiries de tout le Hochsfit de Freising en associant l’image à la racine latine du nom du saint homme, qui est noire comme le corbeau, Corvus, Corvinus, Corvinianus.

Sur les armes du cardinal-archevêque de Munchen u. Freising actuel, Mgr Friedrich Wetter, le maure est toujours là, mais bien éclairci. Il ne reste plus qu'à soumettre l'énigme au titulaire de la charge ! Votre serviteur pencherait pour la cinquième hypothèse.

Au final, le souverain pontife a simplifié ses armes cardinalices, la coquille est sèche - est-ce un signe ? - et il y a ajouté les clefs vaticanes et le pallium.

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mardi 19 avril 2005

J'entends un panzer sur la place

Alors qu'aux dires de la presse en ébullition, la bataille fit rage entre les fondamentalistes et les aggiornamentistes, il nous a paru utile de donner au distingué lecteur l'intégralité de l'homélie d'ouverture du conclave prononcée par le "phare" doctrinal du sacré collège. Etait-ce son programme ? Quelque part un peu, l'esprit libre et clair avant que l'Esprit saint ne le charge des lourdes chaînes du pontificat !

L'Esprit saint a choisi le meilleur Posted by Hello

Homélie du cardinal Joseph Ratzinger, doyen du Collège des cardinaux, lors de la messe « pro eligendo Romano Pontifice » en la basilique Saint-Pierre, le lundi 18 avril 2005
(traduite de l'italien par la rédaction de La Croix, lissage et sous-titres de Royal-Artillerie)

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E n cette heure de grande responsabilité, nous écoutons avec une attention particulière ce que le Seigneur nous dit avec ses propres mots. Des trois lectures, je voudrais choisir seulement quelques passages, qui nous concernent directement dans un moment comme celui-ci.

Proclamer la miséricorde de Dieu
L a première lecture nous propose un portrait prophétique de la figure du Messie – un portrait qui trouve toute sa signification à partir du moment où Jésus lit ce texte dans la synagogue de Nazareth, lorsqu’il dit : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture » (Lc 4, 21). Au centre du texte prophétique, nous trouvons une parole qui – au moins à première vue – apparaît contradictoire. Le Messie, parlant de lui, dit être envoyé « annoncer une année de grâce de la part du Seigneur, un jour de vengeance pour notre Dieu » (Is 61, 2). Ecoutons, avec joie, l’annonce de l’année de miséricorde : la miséricorde divine place une limite au mal, nous a dit le Saint-Père. Jésus-Christ est la miséricorde divine en personne : rencontrer le Christ signifie rencontrer la miséricorde de Dieu. Le mandat du Christ est devenu le nôtre à travers l’onction sacerdotale ; nous sommes appelés à proclamer, pas seulement par des paroles mais par notre vie, et avec les signes efficaces des sacrements, « l’année de miséricorde du Seigneur ». Mais que veut dire Isaïe lorsqu’il annonce le « un jour de vengeance pour notre Dieu » ? Jésus, à Nazareth, dans sa lecture du texte prophétique, n’a pas prononcé ces mots, il a conclu en annonçant l’année de la miséricorde. Est-ce la raison du scandale qu’a produit ensuite sa prédication ? Nous ne le savons pas. En tout cas, le Seigneur a offert son commentaire authentique de ces paroles par sa mort en croix. « Il a porté nos péchés dans son corps sur le bois de la croix », dit saint Pierre (1 P 2, 24). Et saint Paul écrit aux Galates : « Le Christ nous a rachetés de cette malédiction de la loi, devenu lui-même malédiction pour nous, car il est écrit : maudit soit celui qui pend au gibet, afin qu’aux païens passe dans le Christ Jésus la bénédiction d’Abraham et que par la foi nous recevions l’Esprit de la promesse » (Ga 3, 13s).
L a miséricorde de Dieu n’est pas une grâce à bon marché, elle ne suppose pas la banalisation du mal. Christ porte dans son corps et dans son âme tout le poids du mal, toute sa force destructrice. Il brûle et transforme le mal dans la souffrance, dans le feu de son amour souffrant. Le jour de la vengeance et l’année de la miséricorde coïncident dans le mystère pascal, dans le Christ mort et ressuscité. Telle est la vengeance de Dieu : lui-même, dans la personne du Fils, souffre pour nous. Plus nous sommes touchés par la miséricorde du Seigneur, plus nous entrons en solidarité avec sa souffrance et devenons prêts à accomplir dans notre chair « ce qui manquera aux épreuves du Christ » (Col 1, 24) .

Vérité et charité
P assons à la deuxième lecture, à la lettre aux Ephésiens. Là, il s’agit, en substance, de trois choses : en premier lieu, des ministères et des charismes dans l’Eglise, comme don du Seigneur ressuscité et monté au ciel ; donc, de la maturation de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, comme condition et contenu de l’unité dans le corps du Christ ; et, enfin, de la participation commune à la croissance du corps du Christ, c’est-à-dire de la transformation du monde dans la communion avec le Seigneur.
Arrêtons-nous seulement sur deux points. Le premier est le chemin vers « la maturité du Christ », comme le dit, un peu en simplifiant, le texte italien. Plus précisément nous devrions, selon le texte grec, parler de la « mesure de la plénitude du Christ », à laquelle nous sommes appelés à parvenir pour être réellement adultes dans la foi. Nous ne devrions pas rester des enfants dans la foi, comme des mineurs. En quoi consiste être adulte dans la foi ? Saint Paul répond que cela signifie être « ballotté et emporté à tout vent de la doctrine » (Ep 4, 14). Description très actuelle !
C ombien de vents de doctrines avons-nous connu au cours de ces dernières décennies, combien de courants idéologiques, de modes de pensée… La petite barque de la pensée de nombreux chrétiens, bien souvent, a été agitée par ces vagues, jetée d’un extrême à l’autre : du marxisme au libéralisme, jusqu’au libertinisme ; du collectivisme à l’individualisme radical ; de l’athéisme à un vague mysticisme religieux ; de l’agnosticisme au syncrétisme et ainsi de suite. Chaque jour, naissent de nouvelle sectes, réalisant ce que disait saint Paul sur l’imposture des hommes, sur l’astuce qui entraîne dans l’erreur (cf Ep 4, 14). Avoir une foi claire, selon le Credo de l’Eglise, est souvent étiqueté comme fondamentalisme. Tandis que le relativisme, c’est-à-dire se laisser porter « à tout vent de la doctrine », apparaît comme l’unique attitude digne de notre époque. Une dictature du relativisme est en train de se constituer qui ne reconnaît rien comme définitif et qui retient comme ultime critère que son propre ego et ses désirs .
N ous, en revanche, nous avons une autre mesure : le Fils de Dieu, l’homme véritable. C’est lui la mesure du véritable humanisme. Une foi qui suit les vagues de la mode n’est pas « adulte ». Une foi adulte et mûre est profondément enracinée dans l’amitié avec le Christ. C’est cette amitié qui nous ouvre à tout ce qui est bon et nous donne le critère pour discerner entre le vrai et le faux, entre l’imposture et la vérité. C’est cette foi adulte que nous devons faire mûrir, c’est vers cette foi que nous devons guider le troupeau du Christ. Et c’est cette foi – seulement la foi – qui crée l’unité et se réalise dans la charité. Saint Paul nous offre à ce propos – en opposition aux péripéties continuelles de ceux qui sont comme des enfants ballottés par les vagues – une belle parole : faire la vérité dans la charité, comme formule fondamentale de la vie chrétienne. En Christ, la vérité et la charité coïncident. Dans la mesure où nous nous approchons du Christ, y compris dans notre vie, vérité et charité se mêlent. La charité sans vérité serait aveugle ; la vérité sans charité serait comme « une cymbale qui retentit » (1 Co,13, 1).

Amis du Christ
V enons maintenant à l’Evangile. De sa richesse je voudrais seulement extraire deux petites observations. Le Seigneur nous adresse ces merveilleuses paroles : « Je ne vous appelle plus serviteurs ... Mais je vous appelle amis » (Jn 15,15). Nous nous sentons seulement, et si souvent, des serviteurs inutiles ; et cela est vrai (cf. Lc 17, 10). Malgré cela, le Seigneur nous appelle amis, il fait de nous ses amis, il nous donne son amitié.
Le Seigneur définit l’amitié de deux manières. Il n’y a pas de secrets entre amis : le Christ dit tout ce qu’il entend du Père ; il nous donne sa pleine confiance, et, avec la confiance, il nous donne aussi la connaissance. Il nous révèle son visage, son coeur. Cela nous montre sa tendresse pour nous, son amour passionné qui va jusqu’à la folie de la croix. Il s’en remet à nous, il nous donne le pouvoir de parler avec son être intime : « ceci est mon corps... », « je t’absous »... Il nous confie son corps, l’Eglise. Il confie sa vérité à nos esprits faibles et à nos mains fragiles - le mystère de Dieu Père, Fils et Esprit saint, le mystère de Dieu qui « a tant aimé le monde qu’il lui a donné son fils unique » (Jn, 3, 16). Il nous élevé au rang d’amis - et nous, comment répondons-nous ?
L e second élément par lequel Jésus définit l’amitié, est la communion des volontés. « Idem velle - idem nolle » était aussi pour les romains la définition de l’amitié. « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande » (Jn 15, 14). L’amitié avec le Christ correspond à ce qui est exprimé dans la troisième demande du notre Père : « Que ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ». A l’heure de Gethsémani, Jésus a transformé notre volonté humaine rebelle en une volonté conforme à la volonté divine et unie à elle. Il a souffert tout le drame de notre autonomie - et, c’est justement en portant notre volonté dans les mains de Dieu, qu’il nous donne la vraie liberté : « Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux » (Mt 21,39). Notre rédemption se réalise dans cette communion des volontés : être ami de Jésus, devenir amis de Dieu. Plus nous aimons Jésus, plus nous le connaissons, plus notre vraie liberté grandit et plus croît la joie d’être sauvé. Merci Jésus pour ton amitié !

Le mandat messianique
L ’autre élément de l’Evangile, que je voulais souligner, est le discours de Jésus sur le fait de porter du fruit : « Je vous ai institué pour que alliez, que vous portiez du fruit et un fruit qui demeure » (Jn 15, 16). C’est ici qu’apparaît le dynamisme de l’existence du chrétien et de l’apôtre : je vous ai institué pour que vous alliez... Nous devons être animé d’une sainte inquiétude : l’inquiétude de porter à tous le don de la foi et de l’amitié avec le Christ. En vérité, l’amour, l’amitié de Dieu nous a été donné pour qu’il parvienne aussi aux autres. Nous avons reçu la foi pour la donner aux autres - nous sommes prêtres pour servir les autres. Et nous devons porter un fruit qui demeure. Tous les hommes veulent laisser une trace qui demeure. Mais que reste-t-il ? Ce n’est pas l’argent. Ce ne sont pas les bâtiments et encore moins les livres. Toutes ces choses disparaissent après un certain temps, plus ou moins long. La seule chose qui subsiste dans l’éternité, c’est l’âme humaine, l’homme créé par Dieu pour l’éternité. C’est ainsi que le fruit qui demeure est celui que nous avons semé dans l’âme humaine - l’amour, la connaissance ; le geste apte à toucher le coeur ; la parole qui ouvre l’âme à la joie du Seigneur. Alors, allons et prions le Seigneur, pour qu’il nous aide à porter du fruit, un fruit qui demeure. C’est seulement ainsi que la terre, de vallées de larmes, sera transformée en jardin de Dieu.

R evenons enfin, et encore une fois, à la lettre aux Ephésiens. La lettre dit - avec les paroles du psaume 68 - que le Christ, en montant au ciel « a distribué ses dons aux hommes » (Eph. 4, 8). Le vainqueur distribue des dons. Et ces dons sont apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et maîtres. Notre ministère est un don du Christ aux hommes, pour construire son corps - le monde nouveau. Vivons notre ministère comme cela, comme don du Christ aux hommes ! Mais, en cette heure, prions surtout avec insistance le Seigneur, pour qu’après le grand don du pape Jean-Paul II, il nous donne à nouveau un pasteur selon son coeur, un pasteur qui nous guide à la connaissance du Christ, à son amour, à la vraie joie. Amen.

***

C'est, vous l'avez remarqué, le passage que nous titrons "vérité et charité" qui ensanglante les soirées cardinalices parce qu'il jette aux orties les "modernisations sociétales incontournables" des Martini ou Policarpo... ou le tourisme théologique du bon Tettamanzi. Ces questions sont les seules qui agitent la presse parce qu'elles font vendre du papier. Royal-Artillerie, blogue dédié à sainte Barbe, a de la poudre autant qu'il en faut pour pulvériser les questions.
Il est d'abord troublant d'adhérer à une église aussi datée que l'église catholique et de vouloir "l'adapter" au temps. En effet, le message messianique est selon le dogme, envoyé sur terre par le Dieu des Hébreux en la personne de son propre fils sous le règne de l'empereur Auguste et de Hérode Antipas . La prédication du Fils, appuyée sur les Prophètes de la bible judaïque, restera la base du dogme. Celui-ci sera expliqué en détail par certains apôtres et par saint Paul, analysé et synthétisé par les Pères de l'Eglise parmi lesquels ceux qui restent dans nos mémoires sont les combattants de l'hérésie multiforme qui assaille l'Eglise depuis le 2ème siècle.
Hors tout n'est qu'un discours avec Dieu. Dieu est immobile ! Son Fils est le référent, immobile, de nos actions, réactions et pensées. Tout a été dit. Il n'y a pas d'historicité du dogme. Les ajouts tardifs pourraient à l'extrême devenir discutables. L'infallibilité pontificale ne devrait pas avoir à s'exercer, l'immaculée conception découle des Ecritures et n'a pas à être proclamée.

Il n'en va pas de même dans les religions sans dieu, où chacun doit arracher de lui-même le bouddha dissimulé dans la gangue durcie de son coeur imparfait. Tout est ajustable, modernisable, l'homme est "mobile", il transporte son bouddha avec lui, son bouddha est mobile.

Que ceux qui réclament l'aggiornamento, croyant quelque part conquérir les âmes en quantités, regardent bien le fond des choses. C'est des âmes qu'il s'agit, pas des ventres ! Si l'écoute et l'humanitaire sont les seules vertus qui vaillent dans ce bas monde, qu'ils décampent et créent alors Evêques-Sans-Frontières où ils pourront à loisir faire le bien en pleine concurrence avec toutes les sectes humanitaires qui mangent sur la misère et quelques structures de purs et de fous de l'Homme avec lesquels vite ils se disputeront. Mais qu'ils laissent l'Eglise à son orthodoxie, sauf à la vouloir périe ! (à suivre)
Vérité et charité.Vérité d'abord.
Vive Benoit XVI.

vendredi 15 avril 2005

N u n c a m a s !

Histoire d'une restauration avortée (traduction lissée de Royal-Artillerie)
(Chivalric Orders est dans nos liens ci-contre)


la parole est à la France et l'heure est à Dieu

Le comte de Chambord a été généralement blâmé pour avoir refusé obstinément le drapeau tricolore, et gâché de ce fait la dernière chance d'une restauration. Cependant ce jugement n'est pas confirmé par les faits, car il semblerait y avoir eu manœuvres de la part de quelques orléanistes, espérant provoquer ainsi l’abdication du comte de Chambord en faveur du comte de Paris (à son insu peut-être), ce qui finalement aboutit à la renonciation du comte de Chambord à la couronne.

Le but poursuivi par le comte de Chambord dans sa réconciliation avec le comte de Paris n'est pas non plus entièrement clair. Les orléanistes prétendent que Chambord avait l’intention de désigner le comte de Paris comme son héritier définitif, mais les preuves directes de cette époque sont minces. Des minutes ont été enregistrées par le marquis de Flers le 5 mars 1873, quand le comte de Paris eut sa deuxième réunion avec le comte de Chambord, après qu’il eut déclaré que lui-même et le comte de Chambord avaient des divergences politiques, à quoi Chambord répondit : "Croyez, mon cousin, que je trouve tout naturel que vous conserviez les opinions politiques dans lesquelles vous avez été élevé ; l'hériter du trône peut avoir ses idées comme le roi a les siennes."

La demande du comte de Paris d'être reçu à Frohsdorf fut acceptée par le comte de Chambord, mais aux conditions strictes ci-après : "Les intérêts les plus chers de la France exigent d’une manière impérieuse que la visite faite, dans la situation présente, par S.A.R. le comte de Paris à M. le comte de Chambord, ne puisse donner lieu à aucune interprétation erronée ; M. le comte de Chambord demande que M. le comte de Paris déclare qu’il ne vient pas seulement saluer le chef de la Maison de Bourbon, mais bien reconnaître le principe dont M. le comte de Chambord est le représentant, avec l’intention de reprendre sa place dans la famille. Frohsdorf, le 3 août 1873." Le comte de Paris répondit :
"Je désire porter le plus tôt possible mes respectueux hommages au chef de ma famille".

Cependant ce n'était pas assez pour le comte de Chambord qui lui demanda « une signification plus accentuée, les relations de famille ne pouvant être utilement renouées qu’avec la reconnaissance du principe dont il est le représentant." (ndlr : pour les jeunes lecteurs, rappelons que le comte de Paris était le petit-fils de Louis-Philippe Ier, usurpateur du trône de France pour les Bourbon).
Le comte de Paris alors déclara : "Mon grand-père a brisé l’anneau ; je veux renouer la chaîne des traditions. J’ai certaines idées, mon cousin a les siennes. Les miennes sont personnelles. Ce n’est que par un accord avec la nation qu’il peut faire prévaloir ou modifier les siennes ; je n’ai pas plus à les examiner qu’il ne saurait me demander d’abdiquer les miennes". Sa déclaration écrite stipule ensuite : "M. le comte de Paris pense, comme M. le comte de Chambord, qu’il faut que la visite projetée ne donne lieu à aucune interprétation erronée. Il est prêt, en abordant M. le comte de Chambord, à lui déclarer que son intention n’est pas seulement de saluer le chef de la Maison de Bourbon mais de reconnaître le principe dont M. le comte de Chambord est le représentant. Il souhaite que la France cherche son salut dans le retour à ce principe et vient auprès de M. le comte de Chambord pour lui donner l’assurance qu’il ne rencontrera aucun compétiteur parmi les membres de sa famille."

La fameuse rencontre eut lieu le 5 août, où le comte de Chambord fit sa remarque sur les avis politiques du comte de Paris. Cependant le rapport qui s’ensuivit, énonça clairement qu'il n'y avait eu aucune discussion concernant les circonstances qui mèneraient à une restauration monarchique, qui restait dans la compétence exclusive de l'Assemblée nationale. Mais il fut établi par cette visite que les princes d’Orléans ne feraient plus obstacle à la réconciliation de la France et du prince qui représentait la monarchie traditionnelle.

Le drapeau blanc ne fut pas le vrai obstacle qui empêcha le comte de Chambord de revenir.
Le problème constitutionnel résidait en fait dans l'interprétation des pouvoirs du roi, qui s'il y avait confrontation immédiate avec l'Assemblée, aurait amené une crise constitutionnelle; mais ce furent manifestement les divisions politiques parmi les royalistes qui empêchèrent d'aboutir à un compromis. Ce compromis aurait pu être trouvé parce que le comte de Chambord comprenait que l'armée ne puisse accepter l'abandon du drapeau tricolore, et n'importe quelle proposition de rétablir plus tard le drapeau blanc aurait pu être différée au moins jusqu'à ce que le nouveau roi ait trouvé la manière de persuader l'armée d'accepter une solution réaliste.
Ce compromis éventuel fut cependant saboté à la dernière minute par deux orléanistes, le vicomte d'Haussonville et le duc Decazes (ce dernier par l’entremise de M. Savaray). Leur espoir était que leurs actions provoquent l’abdication du comte de Chambord en faveur du comte de Paris; à preuve la déclaration d’Haussonville qui «préférerait une république au retour de Chambord ».

Le comte de Chambord fut persuadé d'accepter le compromis que nous reprenons ci-dessous, par M. Charles Chesnelong, envoyé à lui par les députés monarchistes, et qui avait cherché une solution acceptable pour la droite et le centre, composantes majoritaires de l'Assemblée (14 octobre 1873). Voici le texte :

(1) « M. le comte de Chambord ne demande pas que quoique ce soit soit changé au drapeau national avant qu’il ait pris possession du pouvoir. » Réponse de Chambord : « Soit ! J’accepte cela. Je ne demande pas que l’assemblée prenne l’initiative d’un changement dans le drapeau et je n’ai pas l’intention de la prendre moi-même avant d’être monté sur le trône. Je n’ai donc aucune objection à ce que vous disiez, en mon nom, que je ne demande pas que quoique ce soit soit changé au drapeau avant que j’aie pris possession du pouvoir."
(2) « Monseigneur se réserve de présenter au pays, à l’heure qu’il jugera convenable, et se fait fort d’obtenir de lui, par ses représentants, une solution compatible avec son honneur et qu’il croit de nature à satisfaire l’assemblée et la nation. »
Réponse de Chambord : « J’accepte que la seconde déclaration que vous ferez en mon nom, soit formulée ainsi que vous venez de le dire. »
(3) « M. le comte de Chambord accepte que la question du drapeau, après avoir été posée par le roi, soit résolue avec l’accord du roi et de l’Assemblée. » Ceci n'était pas aussi facile pour le comte de Chambord, parce qu'il permettait ainsi à l'Assemblée de rejeter tout changement, même si Chesnelong considérait cela découlant du « 2 » et pas en conflit avec lui. La réponse de Chambord à cette condition « 3 » fut :
« J'entends bien présenter la solution de cela à l'Assemblée ». Ce qui n’était pas exactement ce qu’aurait voulu Chesnelong, mais il considéra que c'était une prolongation normale de la condition deuxième, et qu'il n'y avait donc aucun conflit.
Cependant, quand les conditions et leurs réponses furent rédigées par écrit, le comte de Chambord hésita, et dit à Blacas que la " La troisième me met trop à la merci de l’Assemblée; je vous demande de la supprimer " et Blacas demanda donc à Chesnelong ne pas inclure la troisième condition. Chesnelong repartit pour Paris.
Si confiant était le comte de Chambord dans l’acceptation de ses demandes qu’il chargea Chesnelong de porter au duc de Broglie le message qu'il le confirmerait comme premier ministre. Selon Chiappe, ce que Comte de Chambord espérait faire, au cas où l'Assemblée nationale refuserait, était de dissoudre l'Assemblée et de poser la question directement au peuple - une solution très bonapartiste; mais les pouvoirs proposés au roi n’incluaient pas celui de dissoudre l'Assemblée.

Chambord n'était pas l'ultraréactionnaire qu'on a dépeint, car antérieurement il avait indiqué clairement (19 septembre 1873) qu’il rejetait "le fantôme de la dîme, les droits féodaux, l’intolérance religieuse, la persécution contre nos frères séparés,… le gouvernement des prêtres, la prédominance des classes privilégiées", allégations menées contre lui par les républicains derrière Gambetta et Thiers. Il se considérait au-dessus de la mêlée, sauf que son acte de réconciliation avec le comte de Paris avait permis "de rendre à la France son rang, et dans les plus chers intérêts de sa prospérité, de sa gloire et de sa grandeur."

Néanmoins il n'avait pas entièrement compris la réalité des divisions entre les groupes différents qui, à certaines ou à d'autres conditions, avaient été préparés pour soutenir la restauration. Peut-être était-ce pourquoi, le 14 octobre, il ne reçut pas les députés qui avaient accompagné Chesnelong. La position de l'Eglise était également incertaine; certains prélats à l’extrême droite, avaient exigé vigoureusement que le comte de Chambord rejette le drapeau tricolore parce qu'il symbolisait la souveraineté du peuple ; pourtant le pape, dans une audience accordée au député royaliste Keller lui dit que "la couleur du pavillon n’a pas une grande importance ; c’est avec le drapeau tricolore que les Français m’avaient rétabli à Rome ; vous voyez qu’avec ce drapeau on peut faire de bonnes choses, mais M. le comte de Chambord n’a pas voulu me croire".

La solution offerte par Chesnelong fut immédiatement mise en discussion; le duc d'Audiffret-Pasquier, chef du centre droit et orléaniste, put craindre que si la proposition du roi était rejetée il y aurait une crise immédiatement après la restauration. L'armée avait indiqué clairement qu'elle n'accepterait rien moins que le drapeau tricolore; certains parmi les orléanistes espéraient une solution qui provoquerait l'abdication rapide du comte de Chambord en faveur du comte de Paris, qui lui, aurait immédiatement transigé sur cette question. Les historiens orléanistes considèrent que le comte de Paris ignorait ces manoeuvres, mais il était certainement au courant de la distribution de fortes sommes aux députés pour les persuader d'accepter le compromis proposé par Chesnelong – sommes estimées entre six et quarante millions de francs.
Chesnelong présenta les deux clauses par lesquelles le comte de Chambord marquait son accord avec l'Assemblée, dans un discours passionné du 18 octobre qui fut reçu par une ovation debout. Il indiqua clairement que ces deux déclarations étaient tout ce qu'il avait été chargé de transmettre, déclarant que "le prince n’usera de son initiative qu’après avoir pris possession du pouvoir; mais usera-t-il de son initiative après son élévation au trône? J’en suis convaincu. Sera-ce dès le lendemain de son avènement ou plus tard ? Je l’ignore. Quelle solution présentera-t-il ? Il ne me l’a pas indiqué. Voilà tout ce que je puis dire."
Un texte fut alors soumis au vote par Audiffret-Pasquier, et fut accepté à une large majorité.
D’après ces propositions, « la monarchie serait rétablie, toutes les libertés civiles, politiques et religieuses qui constituent le droit public de la France seraient garanties ; le drapeau tricolore serait maintenu et des modifications ne pourraient y être apportées, l’initiative royale restant d’ailleurs intacte, que par accord du Roi et de la Représentation nationale ; les réunions que ces bureaux représentent seront immédiatement convoquées. »

Malheureusement il était nécessaire d’aboutir à un accord clair entre la droite et le centre droit, ce qui fut délibérément saboté par les ultra-orléanistes Decazes et d’Haussonville. Haussonville et le protégé de Decazes, Savaray, étaient secrétaires de session du centre droit, et le premier usa de sa position pour altérer la rédaction de Chesnelong, qui déclarait que «le Roi est disposé par avance à la plus complète harmonie de sentiments avec la majorité royaliste» par «… à la plus complète harmonie avec les membres les plus libéraux de l’Assemblée et du pays» et «solution compatible avec son honneur» par «transaction compatible avec son honneur». Savaray se permit un changement encore plus insigne, remplaçant les mots rapportés comme ayant été dit par le comte de Chambord à Chesnelong “L’accord est complet entre le Comte de Chambord et la majorité royaliste sur les questions constitutionnelles” par “L’accord est donc complet, absolu, entre les idées de M. le comte de Chambord et de la France libérale”, mots qu’il était impossible de penser qu’ils aient été prononcés à Frohsdorf. Ce fut ensuite le communiqué à la presse, et naturellement immédiatement porté à la connaissance du comte de Chambord en Autriche.

Les orléanistes soutiennent qu’on ne peut contester que le chef de la branche cadette ait été trop subtil et trop honnête pour tremper dans de pareilles intrigues. Ceci peut bien avoir été le cas, mais il est difficile de comprendre pourquoi il ne se dissocia pas immédiatement lui-même de celles-là, et n’ordonna pas à Decazes et à d’Haussonville, tous les deux amis proches et confidents, de retirer le faux et d’enregistrer le texte réellement accepté. Certainement Decazes et d’Haussonville espéraient-ils que le comte de Chambord abdiquât sans délai en faveur du comte de Paris, en réalisant ainsi la restauration orléaniste qu’ils avaient toujours recherchée. Le comte de Paris lui-même ne dit rien face à ce coup désastreux pour la réconciliation et la restauration. Que Audiffret-Pasquier soit au courant de ces intrigues est incertain, ces apologistes affirment qu’il tenta de stopper la publication des minutes de ces délibérations, mais trop tard.

Le comte de Chambord était maintenant mis en face d’un choix fatidique, et tout à fait conscient de la réalité des divisions politiques parmi les monarchistes eux-mêmes, malgré le geste du comte de Paris. Il décida de rejeter le compromis douteux. Sa lettre fut transmise directement à Chesnelong mais il s’assura qu’une copie arriverait simultanément au Syndicat des publications. Après avoir remercié le député de ses efforts, il continua ainsi :
On me demande aujourd’hui le sacrifice de mon honneur. Que puis-je répondre ? Sinon que je ne rétracte rien, que je ne retranche rien de mes précédentes déclarations. Les prétentions de la veille me donnent la mesure des exigences du lendemain et je ne puis consentir à inaugurer un règne réparateur et fort par un acte de faiblesse.

Savait-il que ceci signifiait la fin de toutes ses espérances et celles des monarchistes français ? Il semble bien que non puisqu’il continua son projet de retour en France. La presse elle, le comprit. Les journaux du centre et de droite prirent cela pour une acte d’honneur, Le Gaulois commenta : « Il a préféré le suicide au déshonneur. La France aura pour lui le respect commandé par une si noble attitude ». L’Ordre : « Le prince est sorti avec honneur et dignité de l’intrigue dans laquelle on l’avait indiscrètement mêlé. Des honneurs tels que lui peuvent se passer de la couronne ». Le Pays : « Cette lettre enlève à la France un roi, mais lui laisser un honnête homme ». Des sentiments aussi généreux ne furent pas exprimés par les journaux de gauche, tous ridiculisant le comte de Chambord. Il est un peu triste de penser que ne reste dans la mémoire collective que son obstination réactionnaire supposée.

Chambord arriva in France le 5 novembre, allant directement à Versailles (L'Assemblée nationale siégeait alors à Versailles), où il établit sa résidence rue Saint Louis. Il pensait alors à une réunion avec le président, le duc de Magenta, dont l’épouse était une légitimiste fervente. Chambord espérait qu’une réunion impromptue pourrait être arrangée, et son aide de camp, le comte Stanislas de Blacas, suggéra cela à la maréchale duchesse de Magenta qui estima la chose impossible, mais que Monseigneur appelle plutôt le président. Chambord et ses conseillers ne considérèrent pas cela adéquat pour le futur roi. Blacas alla voir alors le président en personne et lui demanda de présenter le comte de Chambord à l’Assemblée Nationale ; mais Magenta ne pouvait rendre ce service et montra son inquiétude quant à la réaction de l’Armée. Informé de sa réponse Chambord fit cette remarque : « Je croyais avoir affaire à un connétable de France, je n’ai trouvé qu’un capitaine de gendarmerie ». Il s’était pourtant préparé ; l’uniforme de Lieutenant-Général avec le Grand Cordon de la Légion d’Honneur et au centre de l’étoile les fleurs de lis, avait été préféré au cordon du Saint Esprit, trop ancien régime ; mais l’appel ne vint pas.

Malgré tout, le projet de restauration fut soumis au vote, et échoua par 378 voix contre 310. La République était préservée et Mac Mahon assurerait la présidence jusqu’au 20 novembre 1880. Chambord quitta la France pour l’Autriche; il ne voulait pas vivre là où il ne pouvait régner.

Il y eut encore un espoir de restauration mais les légitimistes n’acceptèrent pas d’établir le comte de Paris comme roi, ainsi que le souhaitaient d’Haussonville et Decazes. Le gouvernement gardait de fortes inclinations monarchiques puisque le premier ministre fut le duc de Broglie, tandis que Decases prit les Affaires étrangères. Le duc de la Rochefoucauld-Bisaccia, député, mais aussi ambassadeur à Londres, proposa une nouvelle loi par laquelle...
«(1) Le gouvernement de la France est la monarchie; le trône appartient au chef de la Maison de France; (2) Le maréchal de Mac-Mahon [duc de Magenta] prend le titre de lieutenant général du royaume ; (3) Les institutions politiques de la France seront réglées par l’accord du Roi et de la représentation nationale.»
Le projet n’arriva pas à réunir une majorité et ce fut la dernière tentative sérieuse de restauration de la monarchie à l’Assemblée.

A l’hiver 1874, la reine d’Espagne en exil à Paris, Isabelle II, arriva à Vienne et reçut un représentant de Chambord, auquel elle soumit l’étonnante suggestion que le comte adoptât le prince impérial comme son héritier, en critiquant la “tentative de fusion, comme de gravir les marches du trône pour en ouvrir le chemin aux princes d’Orléans”. A la surprise de son représentant, M. de Monti, le comte de Chambord loin d’être scandalisé par cette suggestion répondit : “Cela pourrait sans doute faire le bonheur de la France, et, tout en gardant ma dignité, je pourrais un jour faire passer l’héritage de mes pères en des mains jeunes où s’allieraient deux conceptions qui s’entrechoquent encore. Mais je suis trop vieux et on ne me comprendrait pas». Cela suggérait-il que la réconciliation familiale du comte de Chambord n’était qu'affaire de famille, et affaire politique seulement dans le but de servir les intérêts monarchiques du moment ? Considérait-il peut-être que, dernier de sa lignée, la position dynastique de son successeur avait moins d’importance que l’exercice du gouvernement ? Chambord était en fait en excellents termes avec l’impératrice Eugénie, une légitimiste de cœur, tandis qu’il était lui-même fasciné par la gloire militaire de Bonaparte. Lorsque le prince impérial fut tué en 1878, Chambord adressa à sa mère une lettre émue de condoléances, professant son admiration pour ce jeune et brave Français.

Il est quelque part surprenant que les orléanistes n’aient prêté que peu d’attention à l’exilé de Frohsdorf et le comte de Paris lui-même n'ait pas fait plus grand cas de la réconciliation, rencontrant une seule fois encore le comte de Chambord, quand il était sur son lit d’agonie. Ce manquement fut-il simplement l’aveu qu’il n’y avait aucun gain politique encore possible ? Après 1881, il y eut l’excuse légitime des menaces gouvernementales de fermer la frontière aux Orléans, qui avaient été déjà renvoyés de l’Armée. Mais pendant les sept années qui suivirent le départ de France de Chambord, il est difficile de comprendre pourquoi il n’y eut aucun contact.
Lorsqu’il eut lieu, le comte de Chambord pardonna immédiatement, accueillant le comte de Paris et les ducs de Nemours et d’Alençon, les embrassant et pressant même la tête du comte de Paris sur son cœur. Il y eut un court échange, de dix-sept minutes seulement, qui se termina par le comte de Chambord prenant la main du comte de Paris en lui disant : « Quand vous rentrez en France, dites bien à tous que c’est pour ma chère France qu’il faut prier et non pour moi. Mon seul regret est de n’avoir pu la servir et mourir pour elle comme l’a toujours désiré mon coeur. Soyez plus heureux que moi, c’est tout ce que je désire ». Juste avant leur départ, le duc d’Alençon prit la main du mourant et lui dit : « Vous êtes mon roi et je voudrais mourir pour vous ». Ceux parmi les légitimistes qui soutinrent ensuite les revendications d’Orléans blâmèrent la comtesse de Chambord pour les relations médiocres entre son mari et les princes de la branche cadette pendant ses dernières années ; ils lui imputèrent une influence néfaste autant qu'antagoniste à leur endroit.

En France les sentiments légitimistes étaient encore vivaces; quinze bateaux avaient été affrétés, chacun pour mille royalistes, afin de célébrer la Saint-Henri le 15 juillet à Brighton. Etait-ce parce que Brighton était la résidence du comte de Montemolin, futur chef de la maison de Bourbon ? Les réjouissances furent annulées à cause de la gravité de la santé de leur prince. Chambord restait alité, ses forces se dissipant graduellement jusqu’au 23 août quand en présence de son épouse, de celle de la comtesse de Bardi (épouse du frère du duc de Parme et soeur de François II des Deux-Siciles), de la duchesse de Madrid (fille de la sœur de Chambord, la duchesse douairière de Parme), de la grande duchesse de Toscane (demi-soeur de la duchesse de Berry, mère de Chambord), il reçu les derniers sacrements de l’Eglise. Etaient aussi présents au château, son demi-frère, le duc della Grazia, son aide de camp, le comte de Monti et sa femme, la marquise de Foresta, le général de Charette (son demi-neveu par les relations de son père avec Amy Brown), et messieurs de Chevigné, de Raincourt, de Champeaux-Verneuil, Joseph du Bourg ; la plupart d’entre eux se rallieront plus tard au duc de Madrid. Après avoir répété plusieurs fois le mot « France », le comte de Chambord mourut à 7h27 au matin du 24 août 1883.

La comtesse de Chambord annonça que les obsèques seraient “privés” et remis la responsabilité du protocole à Emmanuel Bocher et au comte Stanislas de Blacas. Après le représentant de l’empereur François Joseph, l’archiduc Louis-Charles, les trois premières places furent réservées au duc de Madrid, au duc de Parme et au comte de Bardi, François II, roi des Deux- Siciles étant assis juste derrière eux. Le comte de Paris y assista, en acceptant que ce ne soit qu’une cérémonie de famille mais en informant ses partisans qu’une seconde messe mortuaire à la cathédrale de Goritz serait la cérémonie officielle qu’il présiderait. Il fit diffuser une déclaration aux souverains d’Europe en ces termes : «Sire, j’ai la douleur de vous faire part de la perte cruelle que la Maison de France vient d’éprouver dans la personne de son chef, Monseigneur Henri Charles Ferdinand Dieudonné d’Artois, duc de Bordeaux, comte de Chambord, décédé à Frohsdorf, le 24 août 1884. Je prie Votre Majesté de vouloir bien accorder dans cette circonstance à la Maison de France sa haute sympathie. Philippe, Comte de Paris.» C’est un texte curieux ; de sa vie, les partisans de Chambord se référaient à lui – Blacas par exemple quand il parlait au maréchal Mac Mahon – comme “le roi” ou “Henri V”; maintenant il était ramené à son surnom d'Artois et à son titre de duc de Bordeaux qu’il n’avait plus utilisé depuis trente sept ans ; le comte de Paris lui-même amputa son nom de Louis, prénom donné pourtant en l'honneur de son grand-père, et signa du simple nom de Philippe.

Le second service funèbre, plus imposant, fut organisé en la cathédrale de Goritz ; l’empereur était cette fois représenté par le prince de Thurn & Taxis. Les questions de préséance surgirent à nouveau, et maintenant le comte de Mun demandait au confesseur de feu le comte de Chambord, Frère Boll, d’expliquer aux ducs de Madrid et de Parme que leurs opinions dans le placement étaient erronées et que le comte de Paris prendrait la première place. A la surprise évidente de Mun, le frère Boll répondit que non, au contraire, le comte de Paris n’avait aucun droit d’être placé le premier, ni par la famille, ni par l’héritage, et le prêtre continua : « Vous n’avez aucune raison de soutenir le comte de Paris; il n’a pas le droit pour lui. Les légitimistes d’aujourd’hui ont oublié cela ; il y a cinquante ans, on le disait tout haut ; M. de Genoude, M. Coquille plus tard, ont publiquement soutenu cette thèse historique. En 1791, à l’Assemblée constituante, Mirabeau, lui-même, a déclaré qu’il fallait réserver les droits éventuels de la branche d’Espagne. Le traité d’Utrecht a imposé la renonciation à qui ? au roi d’Espagne. Don Carlos est lié à cette clause parce qu’il a revendiqué ses droits, qu’il a fait acte de prétendance. Son père, don Juan, peut être considéré comme lié aussi, parce qu’il les a fait valoir autrefois ; son fils également parce qu’il est son héritier ; mais son frère Alphonse [plus tard Alphonse Charles, Duc de San Jaime, dernier prétendant carliste] n’est pas lié et c’est là qu’est l’hérédité.» Le pauvre Mun tenta d’insister, que tout le monde connaissait le Comte de Paris, et personne cet Alphonse, et que même ces monarchistes qui soutenaient la branche aîné ne le soutenaient pas lui, mais son père, don Juan.
Ce fut finalement don Juan qui présida les funérailles à Goritz, et les Orléans dans l’impossibilité d’obtenir la place qu’ils considéraient comme la leur, s’abstinrent de participer.

Le comte de Chambord, dans son testament du 5 juillet 1883, avait nommé son neveu le duc de Parme, son légataire universel sous réserve des droits de jouissance de sa veuve, et avait fait divers dons individuels à d’autres membres de la famille, dont le duc de Madrid auquel furent légués les colliers des Ordres. Il fut prétendu par les orléanistes qu’il avait laissé une autre testament, politique, mais aucune trace ni preuve ne furent trouvées. Chiappe affirme qu’il n’a jamais soutenu les droits des Bourbon d’Espagne, et qu’après la rupture de 1873 il n’a pas eu l’intention de soutenir ceux d’Orléans non plus.

Immédiatement après sa mort, le 26 août, toutes les organisations légitimistes furent dissoutes; ceci pour entraver les desseins du comte de Paris (ce qui fonctionna).

Bien que tout ceci se soit passé il y a 120 à 130 ans, ça semble provenir d’une mémoire encore plus lointaine parce que pour beaucoup, toute possibilité pour les Bourbons s’était éteinte en 1830. Et pourtant ! Il y avait encore un domestique à Frohsdorf dans les années 60 dont les parents avaient servi le comte de Chambord ; le duc de San Jaime mourut en 1936, mais son héritier politique comme prétendant carliste, le prince François-Xavier de Bourbon-Parme ne mourut pas avant la fin des années 70 – il avait très bien connu le dernier duc de Madrid.

Le château de Chambord reste une relique historique du dernier espoir de restauration - il y a de nombreuses toiles et objets rappelant le comte de Chambord. Son dernier propriétaire, Elie, duc de Parme, vendit le château, son contenu et le parc à la IIIè République. (en 1932 ndlr)

130 ans plus tard, n'est-il pas venu le temps de mettre bon ordre en la Maison de France ?

jeudi 14 avril 2005

Nouvelles des Maisons (2)

Mgr Louis Alphonse de Bourbon, vingtième du nom si Dieu se penche au bord de son nuage, a tenu à assister aux obsèques de SS le pape Jean Paul II à Rome.
Cinq places dans le carré diplomatique ayant été réservées à la maison de Bourbon, pas moins qu’à la République française, Monseigneur honora l’invitation du saint siège accompagné de son épouse Marie Marguerite, du duc de Clermont Tonnerre et de MM. Chiaradia Bousquet (FAO) et Pinot.

Après la cérémonie, le couple princier s’est entretenu avec le vice-président du sénat français Gaudin qui avait fait le voyage dans la délégation des Quarante.
Vite reconnus par des pèlerins français massés sur la place Saint Pierre, le jeune duc d’Anjou et Marie, ont fait bonne et simple figure en distrayant quelques minutes de leur temps pour parler avec leurs « fidèles ».
La France, émue au plus profond de son cœur, a donc été représentée à Rome ce 8 avril au plus haut niveau.
Louis et Marie Posted by Hello


Dès le lendemain le couple a repris l’avion pour le Vénézuéla après avoir fait ses adieux à leur meilleur ambassadeur à Rome, Emmanuelle de Dampierre, duchesse douairière d’Anjou et Ségovie, grand-mère du prince, et toujours en pleine forme malgré ses 91 ans.

Mais il ne suffit pas de se réjouir de la présence de l’aîné des Capétiens aux plus grandes funérailles qu’un pape ait jamais convoquées. Il faut déplorer, non l’absence de la maison de France – la situation précaire du prétendant Henri d’Orléans au plan du droit canon le lui interdisait - mais le doublonnage de ces familles issues de la même dynastie qui convoitent une charge unique.
Les mérites comparés des branches espagnole et française restent source inépuisable de livres, libelles et colères, les partisans respectifs se toisant avec morgue, les maisons concourant chacune à l’abaissement de l’autre. Le dernier épisode de cette guerre des lis est bien sûr la titulature récente de Charles Philippe d’Orléans comme duc d’Anjou de la quatrième lignée !

Que dire aux jeunes royalistes qui veulent absolument en ce monde d’image mettre un visage sur un principe ? Allez au plus simple, prenez Jean de France et oubliez le reste. Oui mais le « reste » est lourd de conséquences puisque c’est la chaîne des quarante rois de France qu’il s’agit de remonter.

Conseillerais-je – si j’osais – à Louis Alphonse de Bourbon d’abandonner ses prétentions et de poursuivre dans ce rôle représentatif d’aîné des Capétiens qui lui va si bien et qui, ma foi, nous donne une image de virile santé des Bourbon ? La banque au pays de Hugo Chavez finira par le lasser, l’Ordre Souverain de Malte dont il est bailli grand-croix d’honneur, pourrait l’appeler à de hautes fonctions où il saurait se réaliser pleinement. Ce geste pacificateur du "prétendant capétien" montrerait son ardente volonté de voir renaître le royaume de France au-delà de lui, mais pour sa plus grande gloire. Quelle classe ! Quelle leçon d'histoire ce serait ! Quel signe "divin" enverrait-il au prétendant dès lors exclusif à la lourde charge de roi !

En face, chez nous, il conviendrait désormais de se mettre en capacité de conquérir, et que l’héritier-prétendant - je ne pense qu'au duc de Vendôme - muscle un peu son discours politique, en le tirant vers le haut pour faire honneur au bon peuple supposé le recevoir, et abandonne le refrain souverainiste du moins dans les termes populistes que, je pense, il n’a pas délibérément choisi. A défaut de volonté d'assaut, qu'il se retire ?
Les voyages provinciaux du comte de Paris et du duc de Vendôme contribuent à réinjecter dans l’opinion l’alternative possible entre un état républicain hypertrophié dont cinquante pour cent des citoyens se désintéressent, et un état royal en esquisse qui pourrait résoudre beaucoup des problèmes auxquels la France de 2005 est confrontée. Du moins au fil des mois, l'offre monarchiste devient-elle moins "exotique".
Encore faut-il présenter de manière lisible par les Français, cet état de replacement, son environnement légal, son organisation territoriale. En évitant sans doute, hors du cercle des mouvements royalistes, les références même probantes des régimes monarchiques défunts. La question, une des questions, n’est-elle pas de transporter le citoyen devant quelque écran où lui sera montrée la France de 2015 par exemple, dans le monde qui l’entourera ?
Ex abrupto ! Finie la litanie des gloires enterrées, des péchés capitaux, des semaines d’années d’expiation ! Finie la critique de la Révolution, des Lumières, des droits de l’homme, de la laïcité, toutes choses reçues en héritage par les Français d’aujourd’hui ! On veut du neuf, en clair !

- Quels pouvoirs sont délégués ou repris à Bruxelles après la victoire du non au référendum-plébiscite du 29 mai ?
- Quel périmètre de responsabilités pour l’état, droits régaliens, droits dévolus, architecture du pouvoir.
- Quelle organisation territoriale de l’état ? Strates pléthoriques, régions, provinces, départements, arrondissements, cantons, districts, communes …
- Quelle représentation démocratique nécessaire ? Modes d’élection.
- Quel système économique sera privilégié ou souhaité par le pouvoir ? Théorie du circuit.
- Défense et sûreté du pays.
- Le rôle du roi.

On n’image pas la possibilité d’un tsunami politique après le 29 mai. Si Chirac est désavoué, le régime vacillera. Le pays intérieur, déjà très malade financièrement et moralement, peut imploser sous la pression de facteurs extérieurs qui se déclencheront aussitôt pour confirmer la main levée française sur la politique européenne. En clair, soyons-le aussi, les pays nombreux qui sont irrités de l’arrogance française à vouloir tout régenter dans l’Union sans jamais se plier aux contraintes qu’elle exige des autres, ceux-là vont s’agglomérer comme des billes de mercure pour nous laisser avec joie dans le fossé à nos vomissements, pays jadis francophones de l’Est en tête !
Les répercutions politiques intérieures tourneront à la chasse aux sorcières républicaines et souverainistes, et comme elles sont dans les deux camps, les partis, vides de sens et de programme, imploseront.
L’offre politique monarchiste est-elle prête ?

mercredi 6 avril 2005

Etat royal et Religion, esquisse

Dans les sociétés modernes qui doivent tenir compte du brassage mondial des ethnies il est sage que l’Etat, universel par essence, se déclare laïc. Il peut dès lors, soit se désintéresser complètement de l’orientation religieuse de ses citoyens comme il devrait en être pareillement de leurs moeurs, soit prêter une oreille distraite à leurs réclamations et négocier des consensus, soit encore administrer les cultes dans un souci d’équité et de protection des églises défavorisées.
L’Etat français veut réussir le tour de force de faire les trois à la fois. Et chaque fois il se prend les doigts dans la porte laïque. Il n’est pas besoin de textes nouveaux pour régler ces choses, seulement du bon sens, et écouter la nation, tant qu’elle existe encore.

Or la nation n’est pas laïque !
Au-delà du je-m’en-foutisme épidermique français, la nation est chrétienne dans ses racines, ses usages, son décorum et jusqu’à in fine ses angoisses métaphysiques. Les libres penseurs et autres rationalistes, tout à fait respectables – sont très minoritaires malgré deux cents ans de vaccination à la Lumière, et dans ce nouveau siècle de chocs des civilisations qui tourne à la Croisade contre le Djihad, on ne les entend pas. Pas plus que les anti-cléricaux, race typiquement endogène chez nous. On se souvient du tollé provoqué par Plateforme de Houllebeck (1998) qui s’était permis de dire « Et la religion la plus con, c’est quand même l’islam ; quand on lit le Coran, on est effondré… effondré ! La Bible, au moins, c’est très beau, parce que les Juifs ont un sacré talent littéraire… ce qui peut excuser bien des choses » ! Depuis lors, il y a eu la déclaration de guerre terroriste d’Al Qaïda, la croisade de Bush II, sa réélection enlevée à la hussarde par les églises réformées américaines, et pourtant, silence radio de l’anticléricalisme qui avait pourtant un boulevard médiatique devant lui. Le concept n’est sans doute plus rémunérateur.

Le pouvoir vient de se rendre compte que la nation française à laquelle on ne parle que de naturaliser l’islam exogène, réagit en chrétienne dès qu’elle est touchée par la pierre philosophale d’un souverain pontife au destin tragique comme Jean Paul II. L’archevêque de Paris ouvre Notre Dame en pleine nuit pour y recevoir les fidèles « ameutés » par la mort du pape ; l’aumônier de la batellerie de Conflans doit sortir de son lit quand on frappe à la porte de sa péniche-église pour qu’il célèbre une messe des défunts. Le temps de se vêtir et d’allumer les lustres, la péniche est pleine à onze heures du soir.

Les autres dignitaires religieux du pays ne s’y sont pas trompés qui dès le matin ont couru aux dévotions dans les lieux catholiques. L’Etat omnipotent pouvait-il être absent ? Dans sa décrépitude présente et dévoré depuis peu par la décentralisation, il ne pouvait prendre ce risque, même si certains le soupçonnent de surveiller les sondages électoraux en toutes circonstances.

Il est intéressant d’imaginer l’attitude d’un état royal confronté au même événement, aujourd’hui.
- Attendu que la monarchie capétienne est absolue (indépendante);
- Attendu que la monarchie capétienne est de droit divin et que le vicaire de Dieu sur terre est le saint père ;
- Attendu que Rome a baptisé la France, fille aînée de l’Eglise ;
Il devrait exister des liens plus étroits que maintenant entre l’état central et l’Eglise catholique, à supposer que le clergé catholique se rallie, ou que la conférence des évêques de France ne se cabre pas contre ce qu’ils considèreront comme une résurgence d’un ancien régime qu’ils n’ont peut-être pas tout à fait compris et qu’ils décident de suivre plutôt leur bas clergé droit-de-l’hommiste qui ne souhaite que de tomber dans le happening charismatique afin de concurrencer les églises évangélistes en pleine chasse au cotisant.

Supposons la quadrature résolue.
L’état royal doit être juste avant tout, c’est la première exigence. Le sceptre sans la main de justice est une marque de force ; c’est beaucoup, mais beaucoup moins que dans le passé, et précaire. Sur l’exercice de la justice, il sera jugé !

Le décès du vicaire du Christ toucherait directement le roi, dépositaire de la charge que le sacre de Reims aurait mis sur ses épaules. Les dispositions que prendrait le roi à la manifestation de ses condoléances ne sauraient peser sur l’état royal qui est établi pour tous, agnostiques, fidèles du Livre, sectateurs de Mahomet, bouddhistes, animistes et superstitieux folkloriques.
Le choix du détail de cette manifestation lui reviendrait personnellement, et dans le calendrier, et dans l’organisation minutieuse, et dans les frais qu’il engagerait. Le roi de France rendrait hommage au souverain pontife défunt sur sa cassette. Et personne n’y trouverait rien à redire, au contraire même, emporterait-il l’affection des Français par la sagesse de son gouvernement.

D’accord, nous sommes loin de la théocratie qu’attendent, menton levé, les catholiques traditionalistes et quelques autres mouvements nationaux religieux, qui s’ébrouent dans des microstructures sur des concepts terriblement datés, du moins tant que le changement de régime n’est pas en perspective. A l’avènement de la monarchie, la priorité de ses promoteurs sera de contenir les exaltations de cette minorité, faute de quoi l’ouvrage sera ruiné à peine fondé car du désastre géniteur sortiront puissantes les cohortes de la résistance à l’oppression des moeurs et des esprits que ces « fous de Dieu » annonceraient.

Il conviendra donc de bien marquer dans les esprits l’architecture d’un nouveau royaume de France, reconstruit à partir de trois forces permanentes :
- la nation multiple, active, diverse et peut-être communautarisée suivant ses inclinations;
- l’état garant des références de justice et de protection de la nation ;
- le roi, principe moteur de cet état, garant de sa pérennité, tenant son pouvoir personnel de Dieu pour le relier à la source originelle du principe capétien ; car il faut bien un « fil » avec les Quarante.

Dans la situation présente, les gens du pouvoir, pour commencer par le plus éminent d’entre eux, n’envisagent pas une minute de régler les débours encourus par leur sincère affliction autrement que sur les deniers publics. La République française serait très convenablement représentée à Rome par deux des trois légimités politiques de l’état permanent, le président, le président du sénat ou le président de l’assemblée nationale, dans un compartiment de TGV. Qu’est-il besoin d’amener au frais de la marquise la moitié des corps constitués et les épouses, et l'aide de camp, l'attaché de ci et l'attaché de ça, puisqu’il ne s’agit que d’un chagrin de l’âme par définition. Mais la prébende est intrinsèque à l’appel à gouverner que la république lance aux citoyens ordinaires que sont ces messieurs. On la motive facilement, la prébende, en exhaussant en permanence des responsabilités qui n’existent pas, sauf en filigrane.
Le Vatican est un état en droit international pour le distinguer du pays hôte et faciliter sa gérance et sa communication terrestre. Mais c'est une monarchie virtuelle car céleste, posée sur un "pays" immatériel.

Il serait formidable d’avoir un jour ici un chef honnête avec lui-même et qui oserait dire "j'aimais ce pape, c'était un colosse de la foi que je partage avec lui; je vais de grand coeur à ses funérailles !". Plutôt que de se cacher derrière la "disparition d'un chef d'état étranger avec lequel nous entretenons des relations de proximité". Miserere ... il est de plus en plus petit notre grand homme à nous !


samedi 2 avril 2005

Eripe me Domine

Le bouclier brisé nous laisse à découvert, cernés et vulnérables

Alors qu'il monte vers Toi, ne me laisse pas Seigneur aux mains de mes ennemis. Eripe me Domine, eripe me.


Cliquez sur le bouton "Chuuut" ci-dessus avant de lancer la console Media Player pour écouter le Eripe me grégorien.
<a href=" http://www.fuyama.net/musique/eripe-me.wpl">Cliquez-ici</a>

Eripe me, Domine, de inimicis meis
doce me facere voluntatem tuam
liberator meus, Domine, de gentibus iracundis
ab insurgentibus in me exaltabis me
a viro iniquo eripies me.*

*Arrache-moi, Seigneur, de mes ennemis,
Apprends moi à faire Ta volonté,
Tu es mon sauveur, Seigneur, des nations en colère,
Tu m’élèveras au-dessus d’elles qui montent contre moi,
A l’homme injuste Tu m'arracheras.




Psaume 58 de David
Posted by Hello

2 Eripe me de inimicis meis deus meus\ et ab insurgentibus in me libera me.
3 Eripe me de operantibus iniquitatem; et de viris\ sanguinum salva me.
4 Quoniam ecce ceperunt\ animam meam; irruerunt in me fortes.
5 Neque ini\quitas mea neque peccatum meum domine; si\ne iniquitate cucurri et direxi.
6 Exurge in\ occursum meum et vide; et tu domine deus virtu\tum deus Israel. Intende ad visitandas om\nes gentes; non miserearis omnibus qui operan\tur iniquitatem.
7 Convertantur ad vesperam\ et famem pacientur ut canes; et circuibunt\ civitatem.
8 Ecce loquentur in ore suo et gla\dius in labiis eorum; quoniam quis audivit.

9 Et tu domine deridebis eos; et ad nichilum\ deduces omnes gentes.
10 Fortitudinem meam ad\ te custodiam; quia deus susceptor meus
11 deus\ meus misericordia eius preveniet me.
12 Deus osten\dit michi super inimicos meos ne occidas eos; ne\quando obliviscantur populi mei. Disperge\ illos in virtute tua; et depone eos protector\ meus domine.
13 Delictum oris eorum sermonum [sermonem]\ labiorum ipsorum; et comprehendantur in superbia\ sua. Et de execracione et mendacio; annun\ciabuntur
14 in consummacione. In ira consum\macionis et non erunt; et scient quia deus do\minabitur Iacob, et finium terre.
15 Converten\tur ad vesperam et famem pacientur ut canes\ et circuibunt civitatem.
16 Ipsi dispergentur ad\ manducandum; si vero non fuerint saturati\ et murmurabunt.
17 Ego autem cantabo for\titudinem meam [tuam]; et exaltabo mane misericordiam tuam.\ Quia factus es susceptor meus et refugium\ meum; in die tribulacionis mee.
18 Adiutor\ meus tibi psallam; quia deus susceptor me\us deus meus misericordia mea.


Cela fait si longtemps, Wojtyla, qu'Il t'attend, une rose à la main ...

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Christus factus est pro nobis obediens
Usque ad mortem, mortem autem crucis.
Propter quod et Deus exaltavit illum
Et dedit illi nomen,
Quod est super omne nomen.

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