samedi 25 février 2006

Adeline raconte Marie-Antoinette

couverture du livreYves-Marie Adeline publie un ouvrage sur la reine méconnue, Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine, décapitée par la Convention le 16 octobre 1793 à l'âge de 37 ans.
En cinq actes inspirés des propos de Marie-Antoinette notamment pendant sa détention, l'auteur nous fait partager l’intimité d’une reine demeurée digne et lucide jusque dans la mort. Une vraie leçon de courage et de maintien dont l’intensité dramatique anéantit la légende dorée révolutionnaire.

Marie-Antoinette
Yves-Marie Adeline
Éditions de Paris
18€


L'école de la République s'est efforcée de noircir le portrait pour se faire pardonner le crime abominable de son exécution. Politiquement la monarchie était à bas quand Louis XVI dut monter à l'échafaud le 21 janvier 1793. Qu'était-il besoin de s'en prendre à la reine, n'avait-elle pas expié ses péchés dans les tourments de sa captivité ? Pour apaiser la populace ? On n'apaise la populace qu'en chargeant à mitraille. La dignité qu'elle montrera jusqu'au dernier jour sera la meilleure plaidoirie en sa faveur. Ces gens n'étaient pas du même monde et ne pouvaient se comprendre. La République s'est souillée à jamais par ses torrents de sang.

La quatrième fille de l'impératrice d'Allemagne arrive à 14 ans à la cour de Versailles en 1770 pour épouser le timide et très instruit dauphin Louis Auguste qui n'en a que 16. Versailles est presque le contraire de Schönbrunn, c'est encore un théâtre grandiose. Sa mère lui adresse ses recommandations, le 4 mai 1770.
« Vous voilà donc où la Providence vous a destinée de vivre. Si on ne s'arrête que sur le grand établissement, vous êtes la plus heureuse de vos soeurs et de toutes les princesses... Du dauphin je ne vous dis rien ; vous connaissez ma délicatesse sur ce point ; la femme est soumise en tout à son mari et ne doit avoir aucune occupation que de lui plaire et de faire ses volontés. Le seul vrai bonheur dans ce monde est un heureux mariage ; j'en peux parler. Tout dépend de la femme, si elle est complaisante, douce et amusante».

L'épousée prend l'appartement de la Reine et se soumet à l'étiquette royale pour laquelle à son âge on ne peut avoir tant de goût. Elevée en famille chez Marie-Thérèse de Habsbourg, elle n'aura de cesse de rechercher l'intimité de sa propre cour qui deviendra vite une coterie. Est-elle délaissée par son époux, pas exactement, mais pour des raisons cliniques qui ne sont de son fait, elle devra attendre onze ans avant d'accoucher. Ces difficultés matrimoniales et sa quasi-rupture d'avec la "grande" Cour la laisseront exposée aux fermentations dynastiques qui empestent l'atmosphère, et les libelles pires que des mazarinades viendront bientôt courir les cabinets où l'on glousse. Provence s'en réjouit, s'il n'en fut pas l'originateur, et il est dommage pour sa trace dans l'histoire, que le futur Louis XVIII, roi intelligent, se soit prêté à ces vilenies. Du duc d'Orléans qui s'y mit aussi, on n’attendait pas moins. Il poursuivra son entreprise de destruction de la monarchie absolue jusqu'à accabler sa descendance d'une tache indélébile.
« Nous sommes, écrit-elle en 1775, dans une épidémie de chansons satiriques. On en a fait sur toutes les personnes de la Cour, hommes et femmes, et la légèreté française s'est même étendue sur le Roi. Pour moi, je n’ai pas été épargnée. On m’a très libéralement prêté les deux goûts, celui des femmes et celui des amants ». La naissance du premier dauphin en 1781 déchaînera la pire haine, qui éclaboussera à dessein le comte d'Artois, jeune frère de Louis XVI.

Louis XVI se passionnera pour ses mécaniques et la géographie. La reine en gardera une certaine prévention à l'égard de l'éducation trop poussée pour écrire un jour à la marquise de Tourvel :
« On a toujours accoutumé mes enfants à avoir grande confiance en moi et, quand ils ont eu des torts, à me le dire eux-mêmes. Cela fait qu’en grondant, j’ai l’air plus peinée et affligée que fâchée. Je les ai accoutumés à ce qu’un oui ou un non prononcé par moi est irrévocable ; mais je leur donne toujours une raison à la portée de leur âge… Mon fils ne sait pas lire et apprend fort mal, mais il est trop étourdi pour s’appliquer. Il n’a aucune idée de hauteur dans la tête, et je désire fort que cela continue: nos enfants apprennent toujours assez tôt ce qu’ils sont ».

Marie-Antoinette à 29 ansLa reine qui oublie trop souvent qu'elle est La Reine, vivra entre ses Cabinets, Hameau et Petit Trianon parmi ses amis. Remarquable épistolière, elle laissera une volumineuse correspondance qui nous fait comprendre qu'elle avait reçu une excellente éducation classique et française à Schönbrunn. Sa mère lui fait ses remontrances qu'elle ignore, bien qu'elle l'assure en retour de son affectueuse obéissance. Ceci dévoile aussi un caractère dissimulé et intrigant qui lui portera tort.

L'affaire tourne mal comme on sait. Mais elle écrira jusqu'au bout, et la cruauté des situations exacerbera sa frénésie de plume jusqu'à se plaindre à la fin, que la Convention lui ait retiré plume et papier.

Des Tuileries elle écrit "politique" à son ami le comte Axel de Fersen.
« 19 avril 1792,
Les ministres et les jacobins font déclarer demain au roi la guerre à la maison d'Autriche, sous prétexte que par ses traités de l'année dernière elle a manqué à celui d'alliance de cinquante-six, et qu'elle n'a pas répondu catégoriquement à la dernière dépêche. Les ministres espèrent que cette démarche fera peur fera peur et qu'on négociera dans trois semaines. Dieu veuille que cela ne soit point et qu'enfin on se venge de tous les outrages qu'on reçoit dans ce pays-ci ! Dans ce qui sera dit-on se plaint beaucoup des procédés de la Prusse, mais on ne l'attaque pas.
»

Après l'envahissement des Tuileries par les Sans-Culottes, encore à Fersen.
« 21 juin 1792,
J'existe encore, mais la journée du 20 a été affreuse. Ce n'est plus à moi qu'on en veut le plus, c'est à la vie même de mon mari. Ils ne s'en cachent plus. Il a montré une fermeté et une force qui en a imposé pour le moment, mais les dangers peuvent se reproduire à tout moment. J'espère que vous recevez de nos nouvelles. Adieu. Ménagez-vous pour nous, et ne vous inquiétez pas sur nous.
»

Dans l'adversité, elle se bat avec énergie, désordre et imprudence quand son époux, accablé, passe au stade d'une contemplation de sa dignité dans l'au-delà. Le testament de la Noël 92 est un d'abord plaidoyer du roi destiné au concierge du Ciel. Elle, redeviendra une épouse pieuse conservant jusqu'au bout ce soupçon de frivolité et d'impertinence qui faisait à la fois son charme et nourrissait l'agacement de ses adversaires. Elle tiendra tête au procureur qui la somme de répondre à l'accusation d'inceste. « «Si je n'ai pas répondu, c'est que la nature se refuse à une pareille inculpation faite à une mère». Et se tournant vers le public, la réplique fameuse :
«J'en appelle à toutes celles qui peuvent se trouver ici ».
Les tricoteuses en seront remuées; pas assez cependant pour la sauver de l'épilogue tragique.

mardi 21 février 2006

Les Droits (10 à 17)

Le faisceau des Droits 10 à 17 de la Déclaration de 1789 forme un corpus pré-législatif de niveau constitutionnel. Etant rédigé par une assemblée constituante, le contraire serait surprenant. C'est peut-être cette partie qui a le plus vieilli. Les droits énoncés pour l'épanouissement naturel de l'être humain en société, auraient dû être complétés des devoirs de cette société nouvelle à l'endroit de la Nation, pour satisfaire aux besoins divers et multiples de chacun, et des devoirs de chacun au maintien de la Société. Sans doute l'homme "naturellement" bon n'avait-il à l'époque aucun besoin autre que l'admiration de ses droits.
Il est utile cette fois d'évoquer le motif de chacun de ces articles.

Article 10 - Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.

L'article vise essentiellement à banaliser l'expression de la foi des Réformés. C'est le complément de l'égalité de traitement qui depuis la révocation de l'Edit de Nantes a disparu. Les opinons évoquées ne sont précisées finalement que pour les croyances religieuses. On ne parle pas d'opinions politiques, philosophiques ou scientifiques, on le devine, c'est tout. On arrive vite à "l'ordre public".
De nos jours c'est le motif le plus fréquemment invoqué pour interdire une manifestation publique d'opinion. Et cet article fonde plus la répression des idées dès lors qu'elles sont diffusées, que la liberté. Cet article est obsolète, il doit être réécrit. Belle empoignade en perspective.

Article 11 - La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

Cet article est le prolongement de l’article 10. Il abolit d'abord la censure et proclame la liberté des idées et de leur diffusion, sous la contrainte expresse qu'elles soient conformes aux idées admises par le pouvoir politique au sens large. Cet article fonde parfaitement les lois de prêt-à-penser qui ont fleuri ces dernières années. Il y a matière à réécriture du texte à la lumière du modèle social que la monarchie voudrait retenir. Le droit de penser est inaliénable. La manipulation des esprits est condamnable. On bute sur un choix car la libre communication doit s'équilibrer de la protection des valeurs humaines fondamentales, et des besoins intrinsèques de l'espèce. De longs débats à attendre.

Article 12 - La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée.

Ce texte précèdera la création de la Garde Nationale par le marquis de La Fayette sous la forme d'une milice populaire. Elle se distingue ainsi des forces armées proprement dites qui sont professionnelles et destinées à la protection de la nation aux frontières du pays. Il n'y rien à retrancher de nos jours, il s'agit des forces de police et de gendarmerie.

Article 13 - Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable; elle doit être également répartie entre les citoyens, en raison de leurs facultés.

On crée dès maintenant une imposition universelle au pourcentage des revenus pour payer les soldes des forces de l'ordre. Les privilèges abolis le 4 août précédent ne sauraient ressurgir. De nos jours ce texte devrait être englobé dans un article de citoyenneté fiscale. Les exemptions que le clientélisme républicain a distribué au fur et à mesure des vociférations catégorielles entament largement l'universalité de cette nécessaire contribution, au point que les classes dites défavorisées peuvent ressentir tout affrontement avec les forces de l'ordre comme celui du bas peuple contre les milices bourgeoises, vu que ces catégories ne sont pas imposables. Le rejet d'une partie des citoyens de la communauté fiscale est peut-être une des pires inégalités modernes; elle les "déclasse". L'article est bon, il doit être de pleine application.

Article 14 - Les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

C'est la tradition fiscale républicaine qui est instaurée par ce texte. Le citoyen consent l'impôt dans une enveloppe budgétaire et veille à son utilisation. De nos jours il y a loin de la coupe aux lèvres. Outre que l'impôt n'est pas universellement réparti (cf. supra), le citoyen par sa représentation ne décide quasiment plus rien et n'en contrôle pas plus, même si certains progrès ont été faits pour les grands comptes sociaux. Le pouvoir exécutif a tout en main. Quand ont été reconduits d'autorité les dépenses de fonctionnement et le service de la Dette, il ne reste aux députés que quelques miettes à disputer pour la galerie des badauds. L'exécution des budgets est analysée par la Cour des Comptes et son rapport annuel est publié. Il n'est pas contraignant. Et la représentation nationale dans laquelle on puise les responsables de l'exécutif n'a que peu de courage ou de facilité pour contraindre ceux qui exécutent les budgets à s'y tenir. La bureaucratie a dévoré la liberté budgétaire des citoyens. L'article doit être adapté, en l'état il est trop loin du fonctionnement réel de l'Etat moderne.

Article 15 - La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

Cet article détruit le sentiment d'impunité naturelle du bureaucrate protégé derrière le mur des "règles". Ce texte doit être gravé en lettre d'or derrière chaque guichet de nos administrations. On peut sourire à l'urgence de lutter contre la concussion qu'ont montré les rédacteurs de 1789.

Article 16 - Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution.

C'est l'article de Montesquieu. Les moeurs politiques de l'époque laisse penser qu'on évoque la séparation de l'exécutif et du législatif. L'entité garante des droits n'est pas finalisée. Il s'agit surtout pour l'Assemblée de contrôler l'exécutif. Le texte ne voulant pas dire plus, et faisant bel effet, il reste en l'état.

Article 17 - La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

Il est amusant de voir la protection des propriétaires, le plus souvent bourgeois, arriver en queue de la Déclaration, comme un codicille. Il faut dire que la notion de propriété était âprement discutée sous l'Ancien régime dans l'enchevêtrement du droit romain emphytéotique et de la loi barbare des fiefs, tenures, etc. Source de disputes parfois sanglantes, on met à plat la relation de l'homme au sol sur la base du droit sacré à posséder. Le droit de l'occupant originel. L'inviolabilité condamne de saisir des terres par la force. Ce tout nouveau principe fonde le droit que nous utilisons aujourd'hui, après l'éclipse des élucubrations communistes qui heurtaient l'atavisme naturel à posséder.
Le droit inviolable et sacré est tout de même limité par l'intérêt général. C'est l'expropriation d'utilité publique, bien connue aujourd'hui. L'article est à conserver tel quel.


Dix-sept articles et pas une fois n'ont été évoqués les besoins essentiels de l'homme et ses devoirs primaires, qui seraient la contrepartie que la Société et l'Etat qui l'organise doivent à l'individu en contrepartie de son acceptation du moule social défini par ces droits, d'une part ; et de l'autre, les devoirs de chacun pour maintenir fraîche et pimpante la Société qui l'accueille.

Le premier besoin est celui de la satisfaction des besoins initiaux de l'espèce humaine. Manger et dormir à couvert.

C'est très bref. On voit les ravages de la misère, sans se douter de l'ampleur qu'ils peuvent prendre si une crise mondiale nous frappait. Or ces besoins ne sont nullement assurés ; l'Etat et la Société peinent à subvenir aux besoins de quelques milliers de pauvres déshérités, et les associations caritatives de tous ordres aussi. Des lois contraignantes doivent être édictées en application de ce besoin fondamental. La liberté de mourir au ruisseau n'est pas une liberté comme les autres.

Le deuxième est celui de la sécurité du citoyen.

L'article 2, le seul qui parle du droit de sûreté, autorise à se constituer en association politique pour la conserver; pas plus.
L'Etat a le devoir non seulement de veiller à la sécurité des citoyens mais de la garantir. Si la sécurité des frontières est facile à appréhender, la sécurité quotidienne est plus floue. Cette exigence de garantie est un peu étrangère aux soucis des forces de l'ordre qui n'acceptent de contrainte que l'obligation de moyens. Ce devoir de sûreté s'il était prééminent aux lois de circonstances, obligerait le législateur à s'interroger au moins sur l'augmentation ou la diminution de sûreté qu'entraînent les dispositions qu'il crée.

On laissera de côté le besoin de prospérité que certains voudraient avantager. Pour notre part, elle ressortit du domaine privé car elle doit être le résultat d'un effort. A la Société de ne pas la punir en exagérant sa mise à contribution.

Le troisième est un devoir de "chaîne et trame" du tissu social.

Celui de maintenir au meilleur niveau économique et moral la cellule sociale de base que tout citoyen peut choisir de fonder dans cette Société, qui compte réellement sur cette cellule irremplaçable pour y déléguer ses ambitions d'éducation, et de protection. C'est la famille. La destruction de la famille devrait être condamnée.

Le quatrième est un devoir de solidarité.

Celui pour tout citoyen de concourir à la sûreté générale de la Nation. Les modes de concours peuvent être divers et surtout complémentaires. Si des lois ont été édictées en ce sens dans un passé plus guerrier qu'aujourd'hui, il est convenable que cette solidarité due à tous les autres sont gravée dans le marbre constitutionnel.
Il est inadmissible qu'une fraction importante des habitants du pays se déclare hostile à la nation elle-même. Ceux-là n'y ont pas leur place. Du moins devraient-ils s'attendre à ce qu'ils soient privés de leur citoyenneté et des droits qu'y attachent la Déclaration et les lois de protection sociale.


Epilogue
Les penseurs politiques comme Maurras refusaient cette Théologie des Droits. "Il est impossible qu'un animal aussi sensible, aussi triste, aussi vulnérable que l'homme, une fois placé sur l'autel intérieur que lui érige la dogmatique libérale, ne se croie pas, neuf fois sur dix, le créancier de ses semblables et de l'univers, au lieu que le plus misérable est au contraire leur débiteur à l'infini ! Cette illusion de la créance sur la société ne peut être qu'encouragée par l'absurde métaphysique des Droits."

Ne nous disputons pas, la revendication annoncée est certaine. Mais qui oserait en 2006 démonter la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, article par article ? A l'impossible nul n'est tenu, fut-il le roi ! D'ailleurs Louis XVI en avait bien compris l'inéluctabilité. Contentons-nous de la compléter de l'essentiel.

lundi 20 février 2006

La raison et le coeur

un transept de calcaireLe millénaire capétien (1987) et la résurgence du mouvement légitimiste en la distinguée personne du prince Alphonse de Bourbon et de son jeune fils, Louis-Alphonse, rencontra un écho véritable dans la Nation au point que bien des édiles soutenus même par la Présidence, déclarèrent une sincère affection à l'endroit de la tradition capétienne. Cette réaction inattendue des milieux politiques surprit même par son ampleur la "contre-révolution" littéraire, mais conduisit à une exacerbation des antagonismes entre les maisons rivales. Quelle pitié en ces temps propices à la communion ! Au milieu des réactions les moins prévisibles, pour prévenir d'autres avanies, et le schisme définitif, un "pur" se leva des ruines de Fontevraud tel un nouveau Bernard l'Ermite, pour prêcher l'union et la croisade sous toutes bannières. Il aurait dû prévoir une année sans guerre chaque trois ans, comme on le fit au Moyen Âge, d'un jour par semaine sans étripage. Il édicta une charte en forme de protocole de paix des mousquetaires. Les rouges d'Orléans, les blancs d'Anjou, les bleus de Parme, les verts de Deux-Siciles, et puis les jaunes de la Providence, les pourpres de Berry et les noirs du connétable du bout du monde. Le texte en est très beau. Il est dommage qu'il ne s'applique qu'aux troupes et pas aux princes eux-mêmes. Mais a-t'il in petto l'ambition d'y parvenir, l'avenir nous le dira.
Charte de Fontevrault Fidélité-Unité royale
Parce qu'il faut prier comme si tout dépendait de Dieu et agir comme si tout dépendait de nous (Lyautey); Parce que ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous sépare; Parce que le temps passé par les royalistes à se déchirer les uns les autres est du temps gaspillé qui pourrait être mieux consacré. Les signataires de la Charte s'engagent : 1- à rester fidèles au service du prince et de sa descendance qu'ils ont choisi en leur âme et conscience ; 2- à s'abstenir de toute querelle dynastique qui ne saurait qu'être préjudiciable à la restauration monarchique en France ; 3 - à mettre en valeur, au besoin en les suscitant, les actions communes entreprises par tous les royalistes soucieux de l'avenir du trône de France ; Pour ce faire, les signataires présents et à venir de cette Charte se réuniront le plus souvent qu'il leur sera possible au coeur du jardin de la France, à l'ombre de l'abbaye royale de Fontevraud. Lors de cette réunion, d'où toute discussion dynastique sera bannie, nous apprendrons à vivre ensemble et à faire de nos différences des richesses. Il n'y a qu'un seul but, mais il y a plusieurs chemins : Fontevrault est l'image du but unique, nos fidélités différentes mais complémentaires sont les chemins qui nous y conduiront. La Charte de Fontevrault est héritière, au même titre que les autres mouvements royalistes, de la tradition royale, parce que chrétienne, de la Monarchie française. Pour son compte, elle entend assumer, avec une volonté farouche, cet héritage : D'où l'appel qu'elle lance aux royalistes d'avoir, avant toutes choses, à se comporter en chrétiens en mettant en application dans leur vie politique ces deux commandements issus du Pater : a) pardonner les offenses faites par les militants qui servent un autre Prince que le nôtre, b) s'en remettre à Dieu du point de savoir qui doit régner sur le trône de France; Que la Volonté de Dieu soit faite sur le trône comme au Ciel. le 25 août 1988, en l'abbaye royale de Fontevraud Ce sont les engagements 1 et 2 (cf. supra) qui coincent. Que le prince veuille la querelle pour en finir au nom du bien de la France, et le conjuré est parjure. La charte serait d'application si les maisons royales avaient elles-mêmes passé un protocole d'accord sur la préséance du mieux placé au moment d'une imminente restauration/instauration avec quelques règles décidées à froid, à la fois pour juger du meilleur placement, et pour organiser le lendemain afin que ne sourde aucune revanche. On me fait signe que c'est beaucoup demander. Au lieu de quoi, ..., nous en resterons là de nos aigreurs. L'engagement troisième est obligatoire dans ce modèle d'exercice mais incite plutôt à la contemplation. Normal dans une abbaye. On ne peut invoquer que trois principes pour réclamer "la préséance".
Le Doigt de Dieu ; La Loi des Hommes ; La Force du Nombre.
Seule l'absence de choix dynastique dispenserait de passer en revue ces trois principes. Laissons Dieu se gratter le menton du doigt. Il s'interroge dans doute aucun, et son vicaire plus encore qui est maintenant si proche de nous. La Loi a le grand défaut d'être multiple et formée - que nos saints rois me pardonnent - de bric et de broc, tant qu'il suffit de mettre tel aspect ou coutume dans l'ombre et au moment d'avancer tel autre dans la lumière, pour tout changer du résultat. C'est un ouvrage humain. Comme il n'est pas correct de convoquer notre Père céleste trop attentif à fumer ses havanes, à décider pour nous du jour et de l'heure matutinale où son élu doit réchapper d'un duel dans les formes, sur une contre-allée du parc de Saint-Cloud, je ne vois d'autre solution que la préséance par acclamations, nourries par l'enthousiasme. Un contributeur rémanent de l'excellent site de textes Vexilla Regis - cliquez sur ce nom dans la colonne de droite - a dit quelque chose de très juste et un peu ahurissant. Voici la partie "utile" de son texte, qu'il me pardonne de zapper toute la partie "flirt" : "Je ne crois pas que le retour nécessaire de la monarchie puisse se faire ni par la raison, ni par le droit, ni par quoique ce soit de rationnel. Je crois qu'il n'est possible que par le cœur. Le Prince doit séduire, c'est sa seule arme. Il doit séduire ceux qui auront quarante ans dans une ou deux décennies". (Paul Turbier - 9.12.00) Dans la préparation d'un tract pour une commémoration unioniste du 21 janvier en 2006, votre serviteur avait tenté de forcer un texte privilégiant la recherche de l'amour du peuple pour son souverain, dans un paragraphe militant qui aurait pu s'intituler "le roi meilleur bouclier du peuple". La phrase exacte était de mémoire : "un roi, nous aurions au moins quelqu'un à aimer". C'est la souvenance ancienne d'un cri des Halles que mon père avait entendu lors d'une manifestation de l'AF d'avant-guerre et qu'il m'avait transmis. Il traduisait l'élan affectif, irraisonnable, du soutien à la personne du roi. Au cours de l'histoire, il s'est souvent manifesté. Resurrexit ! Ainsi rejoignant M. Turbier, s'il n'a pas changé d'avis depuis, je m'autorise à porter certaine limite à l'influence de la doctrine raisonnée aussi impeccable soit-elle dans sa philosophie, et met sous le boisseau mais sans les brûler, nos chères lois fondamentales, et propose aux princes de CONVAINCRE. Pas nous, archi-convaincus, malades de convictions, au seuil de la frustration. Convaincre les autres. Tous ceux qui ne savent pas mais déjà ne croient plus dans le régime de fous qui descend le toboggan de notre déclin dans la joie et la bonne humeur. Ceux-là, je peux bien sûr leur décliner les avantages de ma monarchie capétienne, ils en conviendront vite, dès qu'ils auront évacué les préjugés les plus courants, mais je n'aurais pénétré que leur esprit. Et l'homme n'est pas fait que de cela; on dirait presque "de moins en moins". Mais si apparaît de temps en temps comme une éclipse, un prince qui leur parle, les comprend, les réconforte et leur passe la certitude qu'il les aime, alors mon intervention mécanique raisonnée sera formidablement "boostée". Ce prince doit aussi, mais pas dès les premières fois, leur montrer l'avenir vers lequel on les conduit, et proposer des axes, voire des solutions, mais dans le souci constant d'une bonne assimilation du message. Alors naîtra l'intérêt, croîtra l'envie de voir, viendra l'enthousiasme, et celui qui l'aura suscité, aura la préséance. Définitivement. Les défis sont assez énormes si l'on est éveillé. Sommes-nous au seuil de quelque bouleversement qui déjà nous dépasse ? Personne ne sait, tout le monde le sent ! Un peu comme les éléphants du Siam qui "entendent" dans leurs pieds le craquement d'un lointain séisme. Si les princes doivent parler, c'est maintenant, tout de suite et plus souvent.

vendredi 17 février 2006

Les Droits (1 à 9)

Les Droits de l’homme sont décriés dans une partie de l’opinion au motif qu’ils n’insistent pas autant que nécessaire sur les Devoirs qui devraient les équilibrer, et pour quelques-uns parce qu’ils font l’impasse sur les Droits divins.

Il est intéressant de les lire à la lumière du Projet monarchique et de dire en quoi ils doivent être ou ne pas être amendés ; les supprimer serait impossible sauf à contrevenir à la charte des Nations Unies, ce qui nous est impossible avec l’unique porte-avions dont nous disposons l’été. Voici les articles 1 à 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, acceptés par le roi.

déclaration de 1789
Le préambule qui fonde l’autorité de la jeune Assemblée nationale et constate l’existence de droits naturels inaliénables n’a qu’une valeur historique. Son évocation de l’Etre Suprême a des relents maçonniques qui font aujourd’hui sourire, et plus encore depuis la loi de séparation des églises et de l’état. Les droits n’ont besoin d’aucune béquille, les appuyer sur la constitution ou les opposer aux pouvoirs exécutif et législatif est superfétatoire dès lors qu’ils sont fondamentaux et prédisposés. Pour le sérieux de ce qui suit, il conviendrait de s’en défaire puisqu’il n’est nul besoin d’annoncer les Droits.

Article premier - Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

C’est la seconde phrase qui est un peu énigmatique. Si ce n’est plus la naissance qui fait le rang social, on conçoit qu’il soit préférable de laisser le pouvoir entre les mains de personnes cultivées et formées à cet effet. La porte étant entrouverte au despotisme éclairé des élites, laissons cet article en l’état.

Article 2 - Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression.

L’article 2 légitime toute construction partisane de défense des quatre droits fondamentaux, énumérés précisément. Le corpus législatif est fait pour encadrer ces droits des devoirs réciproques, on y revient plus bas ; laissons cet article en l’état.

Article 3 - Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.

L’article 3 énonce la primauté de la Nation, collectivité indivisible et perpétuelle. Cet article pose le principe de droit public de désignation du titulaire de la souveraineté publique. C’est la démocratie. La conséquence pourrait être qu’aucune personne ne puisse exercer le pouvoir sans avoir été expressément mandatée par la Nation. Ceci souffre déjà d’innombrables exceptions, la plus évidente étant l’indépendance arrogante de la bureaucratie qui a pris le pouvoir en France au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour sauver de la déconfiture un Etat autrement livré aux caprices d’un pouvoir exécutif-législatif en pleine débandade.
Cet article devrait donc être « actualisé » afin de bien distinguer l’étage de souveraineté, et ceux de subrogation sans qu’il soit nécessaire de les préciser.

Article 4 - La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui: ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi.

Autrement dit, la liberté de chacun s’arrête où celle des autres commence. Des limites sont posées à chacun dans le respect d’autrui. La chose est entendue, même si elle est d’application délicate. Acceptons ces billevesées et conservons l’article.

Article 5 - La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

Cet article annonce les limites des contraintes que l’on peut légalement imposer aux citoyens. En ce sens c’est L’Article fondateur de la liberté individuelle. Mais il déclasse aussi les us et coutumes et tous interdits traditionnels au rang de curiosités historiques, ce qui n’est pas inutile dans une époque de brassage des traditions qui voit la Nation par endroit subvertie de mœurs allogènes. C’est un bon article.

Article 6 - La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.


On sent dans les trois premières phrases un fumet de démocratie directe qui a dû enchanter nos amis suisses quand le général Brune est venu le leur vendre en 1798 (en fait ils attendront leur constitution de 1848 pour avoir le referendum). A noter que les dispositions de cet article s’adressent au citoyen et pas à l’ensemble de la population. Un citoyen est déjà à jour de ses impôts. Il en faudrait peu pour que l’article devienne répressif. Par ailleurs si l’on veut bien considérer que la démocratie directe est le régime le plus juste et honnête dans les circonscriptions de conscience du citoyen, cet article est d’application obligatoire à ce niveau de choix politique. L’accès universel aux emplois et dignités n’est pas nouveau, même si les guérillas républicaines conduisent à la construction de réseaux en tous genre qui édictent leurs propres règles de succession, en infraction avec le principe énoncé. L’article doit être de complète application.

Article 7 - Nul homme ne peut être accusé, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l'instant; il se rend coupable par la résistance.

L’article annonce un code pénal et un code d’écrou. On aperçoit déjà quelques devoirs du citoyen, le moindre n’étant pas d’obtempérer. L’article par les « ordres arbitraires » condamne aussi les services privés de police à compétence publique, les polices parallèles, les milices, comme on les voit foisonner par moment pour s’éteindre au premier scandale sanglant. Cet article est conservé. C’est le code pénal qu’il faut lire.

Article 8 - La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.


Cet article vise l’utilité sociale et la proportionnalité des peines. Il vise aussi les juges et leurs convictions ; aussi intimes et sûres soient-elles, elles ne peuvent justifier de condamnations autres que celles prévues dans les textes. C’est un bon article.

Article 9 - Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.

Ici on fonde le principe de la présomption d’innocence. La détention préventive n’est pas un châtiment arbitraire et anticipé comme l’exige trop souvent la vindicte publique. Il est à notre sens dommage que l’Habeas Corpus ne puisse carrément remplacer cet article.

Nous reviendrons plus tard sur les articles 10 à 17 qui peuvent être considérés comme les principes fondamentaux.

(à suivre)

mardi 14 février 2006

Confrontation : régimes ou civilisations

En route pour trente ans de réaction
par Jacques Bainville

obusier autrichien« Le propre d'évènements aussi grandioses que ceux dont l'Orient est en ce moment le théâtre (ndlr : première guerre balkanique qui va ébranler l'Empire ottoman et faire éclore les nationalités qui vont à leur tour s'entre-dévorer dès 1913, cause imminente du déclenchement de la Grande Guerre), n'est pas seulement de bouleverser l'ordre et l'agencement des positions diplomatiques. C'est aussi, c'est même peut-être surtout, d'alimenter des courants d'opinion, de créer de nouveaux états d'esprit politique. La guerre est une formidable accoucheuse d'idées. La victoire fixe les jugements des hommes. Après l'expérience décisive de Kirk-Kilissé (prise de la ville forte du même nom par les Bulgares) et de Lule-Bourgas (bataille où les Bulgares enfoncent les lignes ottomanes jusqu'à 30 km de Constantinople), la cause des révolutions est perdue, celle de la monarchie autoritaire est gagnée dans une vaste partie de l'Europe.
On conçoit que les Républicains s'en alarment ! Et puis quand ils ne sont pas tout à fait ignorants de l'histoire, ils comprennent que nous voilà revenus à la période et à la politique des partages, que la parole appartient à des nations jeunes ou rajeunies, à des dynasties qui, anciennes ou nouvelles, se serviront, pour leur grandeur, des méthodes dont Catherine et Frédéric usaient déjà. Ils comprennent qu'en aucun cas, les idées du libéralisme et de la démocratie ne peuvent intervenir dans cette compétition impitoyable, sinon pour se faire exploiter et pour se laisser battre. Par contagion ou par développement de la vitesse acquise, l'avenir qui s'ouvre à l'Europe est réactionnaire. Pendant au moins un âge d'hommes, les peuples vont "réagir". Ils réagiront contre les principes de l'insuccès qui sont ceux de l'anarchie, c'est à dire de la démocratie libérale et parlementaire. Et gare aux peuples qui s'attarderont ! L'Europe est en route pour trente années de réaction et les traînards sont condamnés d'avance. » (J.B., 2 novembre 1912)

Journée Jacques BAINVILLE
A l’occasion du 70ème anniversaire de sa mort

Samedi 25 Février 2006
Centre Charlier
70, Boulevard Saint Germain – 75005 Paris


1912 + 30 = 1942 = Stalingrad + tant de millions de morts en Europe et ailleurs ! Les monarchies autoritaires périront toutes, à l'exception notable du pseudo-empire soviétique qui demandera quarante-cinq ans de plus pour s'éteindre dans le ridicule de son implosion. Alors les idéologies vont dès la fin de la seconde guerre se livrer une nouvelle guerre, celle des idées, parfois brandies très dangereusement, mais toujours soutenues par un impérialisme hégémonique inassouvi. Les systèmes monarchiques expulsés des territoires de la pensée politique moderne seront ringardisés et le triomphe de "la liberté éclairant le monde" annoncé pour durer mille ans, autant que prétendait durer le dernier Reich.
Malgré tout, les revers que subit aujourd'hui dans sa marche vers l'Est, l'empire américain, indiquent que certaines limites sont atteintes. Démocratie outrée, marchandisation forcée des cultures, droits de l'homme, droit des nationalités à disposer de soi, toutes idées "bien de chez nous", affrontent une contestation de plus en plus ouverte du monde dit-tiers qui ne se paie pas simplement d'idées, car il n'en a pas les moyens.

Jusques à quand les peuples d'Europe accepteront-ils de se laisser gouverner par des idées abstraites. Par des idéologies. Elles ne marchent plus chez eux, elles ne marchent pas non plus à l'exportation. Quelle mouche a piqué l'intelligence humaine pour forcer une décision collective en faisant converger sur elle le nombre le plus grand de soutiens, et quelles que soient les oppositions quand bien même additionnées, surpasseraient-elles le nombre homogène le plus grand, elles seraient considérées comme battues et disqualifiées de toute légitimité dans leurs entreprises. Notre beau pays est gouverné par un socle d’opinion plus ou moins homogène représentant tout au plus un cinquième des choix exprimés. Combien de temps cela peut-il durer ? On est en train d’en voir le bout. Mais le plus grave est de faire métastaser ce principe pervers chez des peuples qui le prennent au premier degré, comptant bien si leur faction ressort victorieuse du processus "démocratique", imposer légalement (ils connaissaient déjà) et maintenant légitimement, leur dictature. Les radicaux iraniens minoritaires tirent le rideau noir de la dernière séance libérale très légitimement, le Hamas palestinien surgi tel la "divine surprise", va taxer les dhimmis sur tous les Territoires comme il le fait déjà dans ses municipalités, en toute légitimité, le parti islamo-démocrate turc minoritaire hors des campagnes, verrouille tous les compartiments de la société qu'il peut extirper de l'influence de l'armée laïque (jusqu'à quand ?), parce qu'il revendique la disposition d’un soutien populaire, analphabétique.

Et pendant qu'on se goberge de "démocratie" à Paris, Strasbourg, Rome ou Bruxelles, des empires puissants d’un genre inédit se sont constitués sur les décombres de nos valeurs mercantiles en les sublimant au niveau d'un gouvernement mondial, du moins c'est le but. Leur champ de manoeuvre c'est le globe, leur centre de pouvoir n'est pas géographiquement circonscrit mais il réunit tous ceux qui décident réellement; ils ne sont pas si nombreux qu'on puisse les voir tous ensemble à Davos. Le parlementarisme qu'ils souhaitent universel, précipitant une certaine médiocrité et affaissant les capacités de réactions des nations dans d'interminables joutes oratoires ordonnées autour d'une arithmétique politicienne de l'instant, est le meilleur terreau d'ensemencement de leur légitimité supérieure dès lors qu'ils se positionnent en recours arbitral des incapacités subalternes. Que ne demande-t'on pas à Davos, qui au même moment sera ôté de la sphère décisionnelle des nations !

Un seul pays de référence ne joue pas le jeu ! C'est une monarchie autoritaire d'un genre adapté : La Chine. Elle refuse clairement le gouvernement mondial et officieusement la démocratie. Ceci ne la prive de rien de ce que les autres puissances peuvent lui donner de confiance, de termes d'échanges, voire d'estime. Elle prouve à sa façon que la démocratie parlementaire n'est pas inéluctable pour progresser, s'enrichir, créer des classes moyennes, et parvenir sans doute au premier rang des nations qui parlent sans être interrompues. Elle n'affronte pas plus de risques que les tenants du système approuvé, bien qu'on lui en fasse une liste longue comme un jour sans pain. C'est un vieil empire, jamais aboli.

A l'escroquerie intellectuelle démocratique, s'ajoute l'escroquerie morale des Droits de l'homme, valeur également d'obligatoire exportation. Non pas qu'il faille récuser l'énoncé des droits fondamentaux de chaque être humain, mis à part le fait que les deux pays en pointe sur le chapitre de leur propagande, ne soient pas les moins critiqués pour les enfreindre gaillardement. Les droits individuels de l'homme sont inaliénables et le premier article de la Déclaration devrait s'apprendre par coeur dès le cours préparatoire : "Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune (modèle du 26 août 1789)". Connaît-on vraiment les seize autres articles ? On y trouve bizarrement aussi des "droits et devoirs réciproques" qui ne sont jamais mis en avant. Mais cette analyse sera poursuivie une autre fois.

Dans le package occidental du "prêt-à-croître", droits et démocratie sont donc larrons en foire. Mais comme les deux compères de Pinocchio, le goupil et le chat, ils ne termineront pas l'histoire parce que l'Histoire n'a plus besoin d’eux. Certains pays pourraient nous étonner d'avancer la prétention de leurs propres "devoirs", en codicille à nos 17 articles de "droits". Ceux-là vont-ils se fracasser sur les dogmes intangibles de l'existentiel, de l'agnosticisme, de l'introspection freudienne et de la "réalisation de soi"; pas du tout ! Nos dogmes vont être fracassés par ces "devoirs" exotiques, le plus souvent collectifs qui pis est.
Le plus dérangeant d'entre eux est le devoir d'assistance aux vieux en communauté familiale. Il contrevient au schéma de libération des générations, à la liberté de l'égoïsme total, aux systèmes des fonds de pensions et au développement de la climatisation.
Il en est d'autres, comme le respect intégral dû aux rites religieux. Notre franc-maçonnerie, qui a créé les siens propres pour accueillir la Lumière en ses loges à l'orient de Vesoul, ne peut que s'offusquer de ces antiquités provenant pourtant de la même source. La laïcité est en train de prendre des coups dont elle pourrait bien ne pas se relever.
Et l'on ne peut s'en aller du sujet sans parler des rites sociaux qui restent en Orient de véritables tabous de cohésion nécessaire à une société entassée.
Quelle résistance inexpugnable au progrès des Esprits !

Le choc des régimes, autoritaire contre parlementaire, comme le prévoyait Bainville, devient aux jours du village global, un choc de civilisations. Pas vraiment entre les peuples d'Occident et ceux du Croissant Vert qui ont bien des traits communs, mais entre leurs élites de pensée. Plutôt même entre d'une part, l'esprit des Lumières, corrompu à l'envi par un parlementarisme effréné, un cosmopolitisme arrogant et par toutes ces tricheries politiques qui se sont cachées derrière eux ; et face à lui, le jugement pondéré de civilisations anciennes et de masse, qui éprouvent chaque jour le bien-fondé et la modernité de leur socle traditionnel. Les empires émergents dont on parle avec crainte, y parviennent "sans nous". Nous n'avons plus de socle traditionnel, et au moindre choc nous courrons aux principes idéologiques qui nous apparaissent au moment … évanouis. L'épiphénomène des caricatures du prophète a bien montré l'inconfort philosophique de nos sociétés qui ne peuvent pas trancher une situation relativement simple.

Les "monarchies" et pseudo-monarchies autoritaires ont-elles à nouveau le vent en poupe ? C'est moins un choix de l’organisation de l'Etat et la définition d'un processus de gestion des alternatives politiques qui vont compter dans le rallye des peuples du XXI siècle, que le retour à des valeurs "basiques" de notre vieux genre humain. La "réaction" annoncée n'est pas exactement bainvillienne, mais elle est y ressemble. Les peuples vont-il "réagir"? Nous reste-t'il de quoi rebâtir ? On peut en douter. Mais souvenons-nous que notre socle traditionnel est monarchique. On nous le répète tous les jours en république pour s'en plaindre ! En vrai, une monarchie éclairée qui obéissait à des lois de paix et de sagesse pour la préservation du bien commun de la nation et de la nation elle-même.

"Réagissons !"

mercredi 8 février 2006

Le Choc, et après ?

L'affaire des caricatures du prophète Mahomet conforte l'avertissement des tenants de la Quatrième Guerre mondiale qui "voient" dans la boule de leurs puissantes analyses, l'inéluctable Choc des Civilisations. Et les pisse-copies de la nomenklatura éditoriale d'embrayer l'un, Max Gallo, sur le courage nécessaire à l'affrontement quelle que soit l'orgie d'imbécillité et de sang qui peut en couler, l'autre, Frédéric Lenoir, sur la compréhension nécessaire à l'apaisement que l'on doit dans le respect intégral des croyances, dussions-nous en voiler nos épouses un jour.

Istanbul
En fait le vrai Choc fut déclenché par le désastre de Manzikert. Le 19 août 1071, les Turcs seldjoukides viennent de plier l'armée de l'empereur byzantin Diogène qui s'était porté à leur rencontre sur le lac Van. Les Turcs ont déjà pris la Mésopotamie aux Arabes, et à Bagdad la magnifique, ont abandonné Alan Goa et les déesses de la steppe pour se faire musulmans. La marée turque ne cessera dès lors d'avancer jusqu'à la fin du XVIII siècle.
Au retour de Diogène, le pape Grégoire VII a compris le danger. Il alerte les Francs d'Occident durs d'oreille, et vingt-cinq ans plus tard Pierre l'Ermite sur les incitations du nouveau pape Urbain 2, prêche la levée en masse. Ce sera la première croisade. A partir de ce moment l'Islam et la Chrétienté seront au contact pour toujours. Les valeurs "tierces", celles des Vikings, des Varègues, des Ogres, des Bougres, les valeurs séléniennes de Sîn, celles des néo-platoniciens et même les nombreuses résurgences païennes des pays froids, seront écrasées entre celles que profèrent ces deux forces immenses, qui ont décidé de ne se battre pour leur dieu, puisqu'il n'y a de dieu à chacune que le leur !

Pour mémoire, il est considéré que la conquête maure de l'Espagne wisigothique (711-1492) ne participe que de l'expansion nord-africaine de l'Islam, la frontière de ce continent se situant au premier obstacle naturel, la chaîne des Pyrénées. D'accord, Louis XIV ne savait pas qu'il envoyait le duc d'Anjou en Afrique, par contre Napoléon en revint convaincu, ce qui prévint plus tard Hitler de l'imiter. C'était la seconde de décompression.


Toute l'histoire de l'Occident sera dominée par cette confrontation qui finit dans ce que les historiens appelèrent pour la clore, la Question d'Orient. Les réponses impériales des alliés franco-anglais, renforcés bien vite des Américains dès que le sable se mouilla de noir, crurent un moment la régler. Il n'en était rien. Le monde musulman est comme un volcan, ses éruptions sont imprévisibles. Il est besoin de sismologues d'expérience.
Il serait à ce propos intelligent peut-être, d'imiter la politique orientale de feue la monarchie et de sortir de la Question par le haut.
Si les relations plutôt bonnes de la monarchie française et de la Sublime Porte ont été d'abord vues comme une alliance de revers contre le saint Empire bouillonnant et arrogant, on oublie que le royaume chrétien de Palestine établit par les Croisades s'obligea à une cohabitation avec les nations arabes et turques, et que bien souvent leurs moeurs, leurs arts, leur philosophie et leurs sciences furent jugées bien supérieures par les chevaliers et leurs gens, au point qu'ils ensemencèrent tout le Moyen-Age de l'Occident de leurs importations. Nos précis actuels de jardinage égrennent les "découvertes" qui furent rapportées de si loin. La liste des contributions de l'Orient à notre civilisation est infinie et ne sera jamais close. Il y eut donc assez tôt une ... empathie entre Chrétiens et Musulmans, même si la critique nécessaire de certaines ambiguïtés d'ordre religieux ne pouvaient être levées que par des esprits avertis et suffisamment curieux. On se doute que ce rapprochement ne pouvait être le fait du bon peuple, emmuré dans sa foi de charbonnier. Il suffit déjà de convoquer au débat la sauvagerie des guerres françaises de religion et pire encore, celle de la croisade des Albigeois pour éliminer déjà la participation du commun à une démarche "antichoc".

Derrière les cuistres salafistes, wahhabites, l'Islam cache des élites d'une grande finesse et pénétration de raisonnement, qui perpétuent la tradition de l'Orient excellent d'intelligence. Ici, nous pouvons nous flatter d'avoir conservé des esprits profonds et très avertis de toutes les nuances de la Oumma, professeurs et philosophes arabisants et même des hommes de qualité très versés sur la Question. N'est-il pas temps de favoriser une Conférence de La Bonne Foi quelque part en Europe ou dans une ville libre du Proche Orient, qui réunirait ces esprits supérieurs en les priant d'échafauder les conditions de notre coexistence, pour seulement le siècle commencé.
Il serait sage d'abandonner à leurs travaux quotidiens les hommes politiques même éminents dès lors que nous savons qu'ils sont génétiquement tiraillés d'ambitions précaires, ligotés de préjugés médiatiques et finalement à la remorque du Nombre. On doit rechercher une réflexion de longue haleine que pourrait difficilement soutenir les gouvernements alternés et adverses de divers pays, pas nécessairement en phase. Oublions pour le moment les masses hurlantes, les imans analphabètes, les laïques voltairiens, les catholiques fondamentalistes et les télévangélistes de la Nouvelle croisade, manifester et contre-manifester, ils se lasseraient si les médias voulaient bien débrancher.

De notre bord, de hautes autorités morales ayant le sens du Temps seraient les mieux à même de sceller une nouvelle alliance entre Orient et Occident. Qu'ils viennent des vieilles familles qui ont traité ces questions durant des siècles serait une garantie d'aboutissement. Convoquons les Otto de Habsbourg-Lorraine, Henri d'Orléans, Siméon de Saxe Cobourg Gotha, Michel de Roumanie, Victor-Emmanuel de Savoie-Carignan, Jean de Luxembourg et quelques autres que nous oublierons ce soir afin qu'ils n'envoient pas leur mot d'excuse.
Et que les héritiers du Calife conduisent la délégation islamique. Et qu'il soit demandé en premier lieu à la République turque de revenir sur ses ambitions européennes, qui lui ont été vendues par la propagande effrénée des mercantis du libre-échange illimité, mais qui sont une alliance perverse et redoutée des peuples de chaque bord.
Que l'on décide dans cette instance de coopérer à la seule fin de battre la misère matérielle, morale et intellectuelle des habitants de ce demi-monde pour retrouver la munificence artistique et scientifique des temps anciens.
Afin qu'après le pétrole, la civilisation des bergers, l'inquisition identitaire des nouveaux francs, le Choc de Hutington, vienne la paix des intelligences ! Le Protocole qui en sortira aura suffisamment d'autorité pour qu'il soit proclamé d'application universelle par une instance supranationale acceptée, reconnue et défendue par les nations impliquées. Et la Quatrième Guerre Mondiale sera étouffée dans l'oeuf.
ange à genou
Si Jérusalem pouvait accueillir le sommet des sages ... le Protocole aurait un sens qui en écraserait définitivement un autre qui sent le salpêtre et que l'on réédite de nos jours.

mardi 7 février 2006

Actualisation des Lois


Hier, nous avons construit un "codex royal" individuel et portatif des sept lois.
Partant du postulat que la monarchie est le meilleur des régimes pour les raisons suivantes, nous allons déconstruire aujourd'hui notre codex, une règle après l'autre tant que nous ne portons pas atteinte à l'efficacité, d'autre diraient la perfection, du régime monarchique dans son essence. C'est manière d'approcher la pierre de touche du principe ; ce qui subsistera sera le vrai pour demain.

La monarchie de principe capétien assure la professionnalisation et la pérennité du chef de l'état. La nation a un destin, le roi dans sa fonction permanente a un dessein. Il est le secrétaire perpétuel de la nation, qu'il libère du souci d'organiser les pouvoirs régaliens indispensables : sécurité et sûreté de la nation, à l'intérieur (justice, police) comme à l'extérieur (armée, diplomatie) avec en contrepartie, ce qu'il faut de contributions fiscales de la nation pour assurer sa sûreté.

Secondement, le roi veille à ce que la liberté laissée au peuple ne favorise la jungle où les plus forts dévorent les plus faibles. Il établit et défend les règles du jeu, au pénal, au civil et au consulaire. Il est la main suprême de justice.

Il est pressenti que l'administration royale puisse fonctionner régulièrement avec un effectif sans rapport avec les services pléthoriques actuels qui ont envahi toutes les cases de la société, et que l'Etat au final soit beaucoup moins coûteux. Ce qui permettra de commencer à combler la Dette qui est devenu le vrai cancer de la nation.

Nous allons maintenant disputer la pertinence des lois fondamentales pour une monarchie dont on n'exalterait que les principes ci-dessus, et éprouver ce faisant la solidité de l'édifice.

Loi de dévolution :
L'automaticité de la succession de père en fils (le mort saisi le vif) participe directement de la "professionnalisation" du titulaire par l'éducation précoce du dauphin. Et c'est le fondement de l'immanence du pouvoir. S'y ajoute le rajeunissement naturel des esprits au plus haut niveau, accompagnant l'évolution du monde.

Loi salique :
Le mariage de la fille du roi avec son ennemi ressortit d'une époque passée. Le ciment européen, malgré certaines dérives qui seront corrigées bientôt, rend cette précaution désuète. De plus l'égalité des sexes ne reconnaît plus de différence intellectuelle, et à la guerre, les femmes ont depuis longtemps montré leurs capacités, du plus loin , Jeanne d'Arc, au plus près, Margaret Thatcher. La loi salique, dès l'instant où la loi de catholicité est préservée, peut être abandonnée.

Loi d'indisponibilité :
Elle renforce la loi de dévolution en ce qu'elle superpose l'intangibilité du principe. Même si elle peut se trouver combattue par certains prétendants, elle est essentielle pour exclure de la succession "le choix".

Loi de souveraineté :
La contemption du saint Empire romain germanique est légèrement obsolète. Le droit international moderne y supplée largement et dans le détail. La souveraineté nationale, quels que soient les pouvoirs économiques dévolus à une entité constituée pour faire front aux autres empires économiques du monde, n'est pas amoindrie si l'on se dispense de cette loi fondamentale.

Loi de catholicité :
Elle n'est utile que pour autant le symbole du Sacre soit revivifié. La supprimer ne touche rien de l'édifice politique. Par contre le Sacre mythifie la fonction et apporte le respect du peuple. A défaut de faire déteindre la catholicité sur les institutions de la Nation, on la réservera au prince et à sa maison.

Loi de légitimité :
Elle devient une loi d'ordre car elle privilégie la famille et le mariage. Deux institutions qui vont retrouver un certain lustre pour parer au désordre des moeurs. Par contre la légitimation des conjoints par le roi serait certainement jugée "d'ancien régime". A ceci près, elle est utile au principe monarchique.

Loi de nationalité :
Les familles royales sont de nous jours, au plus étroit, européennes. La pratique des langues, la connaissance du monde et l'acclimatation utile à des coutumes diverses, militent en faveur d'un abandon de la loi de nationalité. Mais le peuple gaulois étant chatouilleux sur la nationalité, il sera plus sage de la laisser dans un tiroir sans officiellement s'en séparer. La pratique des alliances montrera la sagesse du prince devant les attentes de son peuple.


Le raisonnement est iconoclaste, mais il est résolument tourné vers l’avenir. Du passé il n’est pas fait table rase, mais nombre de dispositions vétustes sont à remiser sur les étagères des commémorations. C’est du salut du pays dont on parle. Pas de celui de la monarchie qui n’existe plus.
Celle-ci est l’outil le plus perfectionné pour la résurrection de la France et pour qu’elle conserve le rang nécessaire à la protection des peuples qui l’habitent. Elle y atteindra par l’excellence de son administration et aussi par le respect que lui assurera la remise en vigueur d’un système prestigieux. Mais la monarchie ne saurait être un aboutissement.

C’est la Nation le vrai souci ! Les Lois s'adaptent.

lundi 6 février 2006

Les Sept Lois

Les sept piliers de la sagesse nationale ou les Lois fondamentales du royaume.

le roi PharamondLoi de dévolution
Loi salique
Loi d'indisponibilité
Loi de souveraineté
Loi de catholicité
Loi de légitimité
Loi de nationalité


Ces lois s'imposent à tous, maison royale, corps constitués, états de la nation, et priment toutes décisions du monarque. Elles sont réputées intangibles, surtout par lui. Ses lois ont été forgées au fil des siècles, à partir de textes fondateurs rédigeant des coutumes antérieures, d'édits royaux, de testaments et recommandations royales, et d'une jurisprudence parlementaire abondante. L'ensemble s'étirant sur quinze siècles.

Il est d'immenses analyses qui courent les étagères de nos bibliothèques et servent de plaidoyers pour telle ou telle situation particulière du moment. Ces travaux de Chicane rémunérant sans doute leurs auteurs au poids, il nous a paru utile de ramasser les règles à l'essentiel à l'intention des jeunes royalistes et de ceux plus avancés qui découvrent la construction monarchique de l'état. Que les légistes dinstingués nous pardonnent, mais mon fils de treize ans m'a demandé de lui faire court.
Voici donc un vade-mecum de ce corpus juridique ramené au squelette.
Les maximes retenues ne sont pas les titres de ces lois, mais ont été choisies pour mémoriser les principes énoncés. Les titres sont délibérément simplifiés pour leur mémorisation. Nous avons divisé le codex royal en sept lois pour sacrifier au mythe biblique. On pourrait en faire cinq ou neuf.

Loi de dévolution ou de successibilité automatique
"Le roi est mort, vive le roi"

Dès le dernier souffle du roi, son successeur est le roi. Les lois le désignent, jamais les hommes.
Pour sacrifier à certaines circonstances graves, des lois oubliées ont été exhumées pour satisfaire à ce principe et ne pas tomber dans le travers de la cooptation ou de l'élection. Ainsi l'état perdure sans rupture d'aucune sorte, et normalement sans surprises.

Loi salique
"Les lis ne filent pas"

Selon le code barbare des Francs saliens « De terra salica nulla portio hereditatis mulieri veniat, sed ad virilem sexum tota terrae hereditas perveniat ». Le successeur du roi défunt est son fils survivant dans l'ordre de primogéniture. Le roi est un mâle. S'il advenait après un désastre ou disons - pour conjurer le sort - après désintégration du noyau atomique, que la Maison royale soit anéantie, le peuple recouvrerait le droit inaliénable de réinstaurer une monarchie. Ceci en application de l'Edit de 1717 du Conseil de régence, confirmé par Louis XV dans un édit de 1723.
La dénomination "loi salique" est quelque peu abusive. La Loi salique rédigée vers 500 est un code beaucoup plus large que la seule règle des successions de propriétés foncières sur les terres franques.
La loi primitive a été complétée de la règle de "planche et pont" qui interdit au fils de la seule reine de régner s'il n'est aussi celui du roi légitime.

Loi d'indisponibilité
"Le Dauphin n'hérite pas du Roi"

Il naît avec cette disposition héréditaire pour lui succéder, et ce n'est pas le sacre qui le fait roi, mais sa seule venue au monde.
La règle d'indisponibilité de la couronne qui s'articule aussi avec l'inaliénabilité du domaine, annule par avance toutes dispositions testamentaires touchant la succession, ainsi que les effets de toute abdication, transport ou annulation de droits dynastiques.

Loi de souveraineté absolue
"Le roi de France est empereur en son royaume"

Il ne répond à personne sur terre, à nul empire, à nul pontife. Il n'a de jugement à craindre que celui de Dieu. C'est la règle de transcendance.
Si elle ne fut jamais contestée par les monarques qui se succédèrent sur le trône du saint Empire, elle créera bien des disputes avec le pouvoir papal.
Elle serait évidemment discutée en notre présente époque de dévolution européenne.

Loi de catholicité
"France, fille aînée de l'Eglise"

Le roi est lieutenant du Seigneur sur terre. A l'époque de la Réforme, la monarchie a choisi de rester dans l'Eglise catholique, et ce principe demeure, du moins pour le roi et la Maison royale. La loi de catholicité ne porte rien qui puisse faire de la religion catholique romaine, la religion d'état. Elle s'applique au roi, pas à la nation. Il doit au minimum obéir dans sa vie aux règles du droit canon.

Loi de légitimité
"Les princes du sang ne se marient pas sans le consentement du roi"

La règle vise à se prémunir d'alliances néfastes autant qu'elle exalte la vertu.
En exigeant que les enfants dynastes soient issus de mariages légitimes approuvés, elle exclut les bâtards, même légitimés ou les revendications lointaines. Cette disposition ne leur retire pas la qualité de "princes du sang". Il vaut mieux pour eux qu'ils l'exercent à la guerre qu'au Conseil. Cette disposition vise aussi à la paix de la famille royale que pourrait miner certaines incertitudes d'antériorité. C'est aussi un hommage implicite à la reine, un minimum sur une terre de chevalerie.

Loi de nationalité
"Le roi est français sur des terres françaises"

Depuis le Serment de Strasbourg qui partagea l'empire carolingien entre Charles le Chauve et Louis le Germanique, les Français ont vocation à régner sur toute la rive gauche du Rhin. Après mille ans de brassage des maisons royales d'Europe, il serait plus sûr de parler d'une règle européenne, la nationalité de nos jours et plus encore demain, devenant d'abord la résidence du guichet social et fiscal formant l'état duquel ressortit le titulaire.


Terminons sur un sourire provocateur puisé dans le dictionnaire philosophique de Voltaire.
"" La loi fondamentale de tout pays est qu’on sème du blé si l’on veut avoir du pain; qu’on cultive le lin et le chanvre si on veut avoir de la toile; que chacun soit le maître dans son champ, soit que ce champ appartienne à un garçon ou à une fille; que le Gaulois demi-barbare tue tout autant de Francs entièrement barbares, qui viendront, des bords du Main qu’ils ne savent pas cultiver, ravir ses moissons et ses troupeaux, sans quoi le Gaulois deviendra serf du Franc, ou sera assassiné par lui.""

En médaillon, Pharamond, présumé premier roi des Francs, qui édicta le code civil que Clovis fera plus tard rédiger.

dimanche 5 février 2006

Lisez Les Epées

C'est une revue trimestrielle royaliste dont la devise est empruntée à Pierre Boutang : "Le droit du prince naît du besoin du peuple ".
Numero 18Le numéro 18 est consacré à un dossier qui fait la couverture en barbelés et titré "Défense de la Frontière", avec MM. E. Marsala, Alain Raison, Paul-Marie Couteaux, Michel Michel, Aymeric Chauprade, Benoît de Falkenhorst et Robert Grégoire. Suivent beaucoup d'articles passionnants, dont un sur l'instrumentalisation hardie des Grecs commise par Detienne de l'Ecole Pratique ; un hommage affectueux à Vladimir Volkoff ; un éreintage mérité de Harold Pinter ; un regard d'une fine acuité sur Arthur Honneger, et des lectures critiques en nombre. On termine sur l'Empire de la mélancolie, Génie et folie en Occident (expo), rare. Le sommaire est sur le site des Epées que vous pouvez atteindre en cliquant directement sur le titre du présent article. Voilà !
Glanés sur 64 pages - typographie assez petite, on n'est pas volé - quelques extraits pour vous faire envie.

D'Antoine Foncin sur Bernard Billaud qui a commis "D'un Chirac à l'autre".
Il n'est pas question d'affirmer que par elle-même la considération d'un Bien placé dans un au-delà politique -... - puisse suffire, comme le dit Joseph de Maistre, à relever "la note tonique du système" et à le sauver. Mais supposons que ce Bien, pour une nation et à une époque donnée, soit incarné dans la permanence d'une famille vivante léguée par l'histoire. Alors s'opère comme un changement de signe, et l'énergie conquérante, remarquable à sa manière d'un Jacques Chirac, trouve son point d'appui non hors mais dans la politique, et ne s'abîme plus, ... dans les marécages inqualifiables de l'opinion et du nombre tout-puissants.

De Paul-Marie Couteaux, Eloge de la frontière, sur le partage de l'empire carolingien.
Rien plus oultre.
Toute frontière est garante d'une civilisation en ce qu'elle lui donne à la fois une permanence et peut-être un mystère, une protection et peut-être une défense, une cohérence propre et peut-être une essence. C'est à l'endroit même où se constitue la connaissance de soi que l'autre est possible, même désirable. Une illustration parfaite de cette dialectique fut donnée un beau jour de l'an 842 à Strasbourg, lorsque les deux petits-fils puînés de Charlemagne, Louis le Germanique et Charles le Chauve, se rencontrent sur la frontière du Rhin pour se jurer assistance mutuelle contre les revendications de Lothaire - Lothaire, l'homme sans frontières qui entendait recréer à son profit l'empire carolingien. Or à Strasbourg chacun des deux frères puînés s'exprime dans la langue de l'autre. Ces textes [qui forment le] Serment de Strasbourg sont emblématiques de la dialectique essence/reconnaissance de l'autre : ce jour-là, chacun des deux frères à la fois reconnaît l'autre en ce qu'il est différent de lui et simultanément le reconnaît comme n allié. C'est là peut-être la pure formule de l'alliance et sans doute la clef de toute Europe, de toute Europe des nations.

De Robert Grégoire, La différence créatrice.
Quant à l'Internet ? Dissout-il la frontière ? Tant qu'existeront les nations dans des rapports Fichtéens, et définies par Renan comme un ensemble d'éléments subjectifs, dont la langue, existeront alors des barrières linguistiques qui joueront toujours le rôle de frontières dans le domaine des communications numériques.

De Sarah Vajda, entretien avec Laurent Schang sur la critique littéraire.
Schang : A part s'épier et se copier, j'ai l'impression que nos critiques excellent surtout dans le fichage des écrivains.
Vajda : Et comment pourraient-ils faire mieux dans le contexte. Stipendiés, ils doivent feindre d'être libres. Nul n’est dupe. Rinaldi - l'un des meilleurs du jour - paraît exigeant, ennuyeux à plus d'un, d'ailleurs il quitte Le Figaro ces jours-ci ! La réussite sociale a un prix et la vie d'un écrivain, serré aux rets du Milieu, n'est qu'une longue captivité dans la cage aux singes littéraires (le mot est de Montherlant). S'il en réchappe jamais, les chiens et les flics le retrouveront, critiques en cour et universitaires, qui au fond parlent le même langage, déguisé en un mot : "nécessaire conformité à l'esprit du temps".

D'Arnaud Odier, Morand roman.
Le volume de La Pléiade nous le rappelle : diplomate, amateur d'art, ami de Marcel Proust, séducteur d'innombrables femmes, époux d'une princesse roumaine follement riche et antisémite, poète et prosateur, devenu après la guerre un moraliste amer et contempteur de son temps, Paul Morand a vécu assez pour alimenté en anecdotes piquantes et en situations romanesques plusieurs générations de nos auteurs dépressifs.

D'E. Marsala, Les montagnes magiques (sur Charles Ferdinand Ramuz.)
Portrait de l'artiste en laboureur
Le premier niveau est celui du récit. Un récit presque toujours situé dans les communautés archaïques de la montagne suisse, où de rejoue inlassablement la tragédie des passions élémentaires : l'amour, la haine, la jalousie, l'abandon, la trahison, l'enlèvement, l'humiliation, le suicide et le meurtre. Comme dans l'Iliade -...- l'universalité se réalise dans le décor modeste, presque misérable, de hameaux perdus au fond des vallées, au bord des pentes caillouteuses ou au milieu des vignobles, avec parfois, au loin, le reflet trouble du Rhône, et la minuscule griffure de la voie de chemin de fer, seul signe tangible de l'existence de la "civilisation".

De Philippe Mesnard, L'empire de la mélancolie (expo).
Notre monde tout entier s'écroule (dans la sensation exténuante d'une chute sans fin vers une "société" toujours plus amorale : "de l'enfer il ne sort / que l'éternelle soif d'une impossible mort"), et les élégants symptômes d'un sentiment qu'on cultive pour mieux le domestiquer, le brider, l'annuler, font place aux affirmations sans fards d'une déréliction, d'un abandon, d'une acédie irrémédiable (Bonnefoy). Glissement déjà médiéval entre le péché et la maladie, entre l'acédie et la mélancolie, entre le morose et le triste, entre l'humeur noire et le corrompu.

Je ne me gêne pas de vous donner le prix des abonnements :

ABONNEMENT
 Normal : 18 euros
 Structure : 30 euros
 Propagande : 40 euros (3 exemplaires reçus, un pour votre concierge qui en parlera et le troisième pour le vicaire de la paroisse pour relever le niveau des sermons)
 Soutien : 48 euros
 Fondation : 145 euros
 D'un pays étranger: 30 euros

Chèque à l'ordre de A.D.P.R adressé à :
Les Epées
4, Square de la côte Saint-Thibault
92270 Bois-Colombes

vendredi 3 février 2006

Les Trois Voeux du Prince

Vous retrouverez le texte intégral des voeux 2006 de Mgr le comte de Paris en cliquant sur le titre de cet article.

Blason de l'IMRF

"La lutte des classes est dépassée, notre monde est à la veille d’un tournant de l’Histoire alors que nous subissons une lutte de civilisation. C’est vital. C’est passionnant... Si tu ne veux pas te battre, tu n’as rien à faire sur la terre de tes pères."

C'est un appel au courage. C'est aussi une convocation à l'assaut du monde pour sa libération. La vocation de la France éternelle est réaffirmée, dans une tradition de l'honneur chevaleresque, qui avouons-le, paraît avoir disparu des allées du pouvoir depuis si longtemps que nous en sommes choqués. On attendait du souffle, on a la dénonciation du déclin et le refus de la gouvernance médiocre "enseignée dans les temples du savoir national administratif".
Il fait fort Henri de France.

Et de conjurer d'abord le choc des civilisations qui s'annonce, par l'oecuménisme des trois grandes religions monothéistes issues d'Abraham, et leur apprentissage dès l'école pour mieux fonder le socle d'une civilisation méditerranéenne et occidentale nourrie à coeur de ces influences. Voeux pieux mais incontournable puisque le pays ne se relèvera que dans la paix du monde. En guerre, il disparaîtra.

Et le prince de formuler trois voeux.

Premier voeu:
Que le cœur des Français demeure toujours aussi vaste, généreux et courageux.

La fracture sociale appelle à la redistribution, et malgré la ponction éhontée jusqu'ici des classes laborieuses, il faudra mettre encore à contribution la générosité française pour combler les failles dangereuses de la Nation. La seule question que l'on oserait poser à Monseigneur est sur la solidité du tissu national actuel. Est-il réparable ?

Deuxième voeu:
Que nos gouvernants aient le courage d’une politique volontariste pour promouvoir le travail, pour le protéger d’une fiscalité ubuesque, en inventant un nouveau « colbertisme » intelligent et ponctuel.

La reprise en main de l'économie au milieu des tempêtes de la mondialisation est une idée séduisante. L'autorité peut-elle combattre "le « pouvoir gris » - projection et parade inventée par les intellectuels de l’époque, issus des grandes écoles, qui a engendré les rencontres de Davos - et les OPA sauvages qui s’en suivirent, ont propulsé un train fou que personne, si ce n’est une poignée de décideurs à l’échelon de la planète, ne sait et ne peut contrôler, si ce n’est à leur profit inéluctable pour leur propre survie; mais de toute façon, (qu')ils ne peuvent plus arrêter."

Si la solidité du tissu national est questionnable, celle du tissu économique ne l'est pas. Il n'y a plus rien de conséquent qui soit encore national, sauf l'artisanat et les services de proximité. Les moyens d'une politique colbertiste n'existent plus. Faire accaparer par l'Etat des secteurs que l'on jugera stratégiques, est une chimère en soi au stade actuel d'interpénétration des industries du monde, et parfaitement impraticable dans l'état de décrépitude avancée des finances publiques.
Même convoquer l'épargne privée à la mise en oeuvre de cette utopie, n'y suffirait pas. Le citoyen le plus généreux est déjà trop échaudé par ces grands machins impotents et ruineux qu'on a essayé de lui vendre dans le passé avec ses propres impôts.
Le seul étage possible de résistance, sans pour autant y prédire un succès certain, serait l'Europe fédérale durcie à coeur. Est-elle dans le schéma princier, j'en doute.

Troisième voeu :
La vraie politique ne peut se développer, croître et embellir que si elle prend en considération l’Homme dans la plénitude de sa dignité et dans toutes les composantes qui concernent sa diversité.

"Dans toute construction politico-économique l’impasse faite sur l’être humain n’amène que malheur, or notre humanité a une juste aspiration au bonheur. De nos jours nous devons nous battre pour que soit reconnue notre dignité, pour que chaque individu, chaque famille puisse avoir sa place au soleil." ... "Toutes les grandes civilisations ont disparu lorsque pouvoir et argent ont supplanté la nécessité vitale de la transcendance de chacun."

Si la place de chacun doit comporter son entièreté, allons-nous au communautarisme anglo-saxon ? Pourquoi pas s'il est prouvé être moins pire que le modèle assimilationniste français qui est planté. Mais que devient dès lors la Nation, dont le prince en conclusion exalte la mission; et nous lui laisserons comme il sied à sa qualité, le dernier mot :

Henri de FranceConscients des mutations nécessaires et inéluctables de notre époque, souhaitons que les Français aient le courage d’inverser les énergies de l’absurde. La France a une mission à accomplir en ce début de nouveau millénaire. Au fil des siècles, des hommes et des femmes illustres ont surgi pour arracher notre pays à toutes sortes de périls. Que la Providence continue de veiller sur la France.

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