dimanche 27 octobre 2019

Il nous manque Mr. Lewis Alan Reed !

Deux heures et des poussières. Lou Reed au Capitol Theater Passaic en 1984, un des temples du rock aujourd'hui remplacé par un mall. La disparition de Lou Reed, il y a six ans déjà, fait un grand trou dans la raquette du temps. Pas besoin d'en faire des tonnes. Enjoy ! Au casque !


- Sweet Jane
- I'm Waiting For My Man
- Martial Law
- Down At The Arcade
- Legendary Hearts
- There She Goes Again
- Turn Out the Light
- My Red Joystick
- Average Guy
- Street Hassle
- Sally Can't Dance
- Walk On The Wild Side
- Satellite Of Love
- New Sensation
- A Gift
- Doin' The Things That We Want To
- Waves Of Fear
- I Love You Suzanne
- White Light White Heat
- Turn To Me
- Kill Your Sons
- Coney Island Baby
- Maybe (The Chantels)
- He's Gone
- People Who Died (Jim Carroll)
- Rock 'N' Roll

Y furent :
Lou Reed † - Solo et guitare
Robert Quine † - Guitare
Fernando Saunders à la basse et chant
Peter John Wood † aux ivoires
Lenny Ferraro à la batterie

Si la vidéo est bloquée au partage (ça arrive souvent),
reportez-vous sur Youtube ici :
https://youtu.be/yOoXjYppyMM
©EMI Music Publishing



Après avoir fait carrière dans le porno, le Capitol de Passaic fut un point de passage obligé de toutes les pointures du rock, même commercial. On y a vu les Rolling Stones, Bruce Springsteen, Frank Zappa, Willie Nelson, The Who, Prince et cent autres. Plutôt branché rock alternatif quoique le rock le soit par essence, on peut découvrir The Capitol Theater sur un album de R.E.M. qui passe un hommage à Lou Reed en position 2. C'est par ici !

vendredi 25 octobre 2019

La grande croix de Los Caídos


La translation des cendres du généralissime Francisco Franco le 24 octobre 2019 a été déléguée à la famille du Caudillo à ce qu'en ont voulu montrer les reportages de la presse espagnole, particulièrement celui d'El País qui a fait un direct non-stop sur l'évènement. Le gouvernement socialiste s'est contenté d'envoyer la ministre de la Justice pour surveiller l'extraction du cercueil du mausolée et son chargement sur l'hélicoptère de l'Armée de l'Air mis à disposition sur requête de la Guardia civil. Nous ne revenons pas sur cette journée très significative de l'acharnement du président Sanchez en pleine campagne électorale, significative aussi des maigres bataillons franquistes accompagnant la réinhumation dans la chapelle funéraire des Franco au cimetière communal de Mingorrubio, car ce n'est pas de cela qu'il s'agit dans ce billet.

Si l'on suit depuis un an les déclarations des leaders de la gauche espagnole, on peut déceler l'intention qui motive cette première translation (celle de Primo de Rivera, fondateur de la Phalange, est prévue sinon faite) qui n'est que la "défranquisation" du pays à l'image de ce qui s'est fait en Russie pour Staline ou en Allemagne pour Hitler. En Italie, ce fut plus cool. Un commentateur de l'évènement insistait aujourd'hui sur l'évidence que les "restes" de Franco n'étaient pas dans cette bière portée par ses descendants, mais plutôt dans tout le pays, dans des lois, des positions sociales, des monuments publics, des fortunes... Ce n'est donc pas seulement le site du Valle de Los Caídos qui est menacé mais tout l'héritage franquiste. On pense à la Fondation Franco présidée par le prince Luis-Alfonso de Borbón, entre autres.

La dénazification de l'Espagne ne pourra pas s'opérer sans heurter les convictions patriotiques ancrées profondément dans beaucoup de familles qui furent jadis du côté du manche mais surtout sans attaquer de front de puissantes positions établies de longue date. Si l'on sait que ce pays fut fondé à l'origine sur l'amalgame jamais conclu de royaumes orgueilleux, les fameuses Espagnes des titres portés par le souverain, ce pays ingouvernable aux dix millions de rois, disait Ferdinand VII, doit chercher en permanence sa cohésion. Les séparatismes basque, catalan et galicien sont là pour nous en faire souvenir. Si la désacralisation commencée du mausolée de Los Caídos n'a jusqu'ici déclenché aucun soulèvement parce que la guerre civile est finie depuis quatre-vingt ans et que les gens sont abrutis par les difficultés de la vie quotidienne, il n'est pas dit que la société espagnole ne se fracture plus encore entre partisans de l'ordre et progressistes béats si l'affaire continue. Mais pis encore pour le pouvoir, l'attaque contre les fortunes acquises pourrait lever des contestations du grand capital espagnol qui n'ira pas de main morte contre les apprentis sorciers de la Vérité à tout prix, tant ils ont de choses à cacher.

Ce que ne dit pas le PSOE mais d'autres ne s'en privent pas, c'est que dans l'héritage franquiste qui doit être purgé se trouve la dynastie des Bourbons (honnie en Catalogne). Et finalement la monarchie elle-même imposée par le Caudillo. Ce qui se joue en Espagne à échéance de cinq ans ou un peu plus, n'est pas seulement la "défranquisation" à l'européenne mais l'inversion des cartes en main lors de la victoire de 1939. C'était une guerre civile et Pedro Sanchez donne l'impression de souvent l'oublier. D'oublier aussi que dans aucun des pays qu'il prend pour modèle n'a éclaté de guerre civile sauvage comme en Espagne. Veut-il gagner la guerre perdue par ses pères ? Il pensera l'avoir gagnée quand on descendra la grande croix de Los Caídos qui menace la circulation aérienne. Peut-être que celui qui sert de pape à Rome y trouvera quelque chose à redire à défaut de lui conseiller de ne pas tenter le diable qui fait bombance de la connerie humaine.





Postscriptum du 26.10.19 : Telos fait un point très intéressant sur la situation politique espagnole à l'occasion du transfert de Franco : c'est par ici.

lundi 21 octobre 2019

Grosse fatigue démocratique


Le feu de l'émeute s'est propagé depuis les Champs-Elysées aux quatre coins de la planète. Après le combat de libération de Caracas, vint Paris, suivi d'Alger puis Hong Kong, Quito, Barcelone, Port-au-Prince, Beyrouth et maintenant Santiago du Chili. Les causes du soulèvement sont chaque fois endogènes et circonstanciées, surtout en Algérie, mais la porteuse en basse fréquence, sauf au Venezuela communiste, est partout identique : une défiance énorme vis-à-vis de la classe politique, déclarée imbécile et corrompue. C'est le principe de démocratie représentative qui est remis en cause. Sa vocation de planter des mâts de cocagne dans chaque circonscription électorale est vilipendée par les peuples qui y voient autant de course à l'enrichissement rapide, plus rapide que l'entreprenariat, bien plus encore qu'une vie de labeur. L'anti-parlementarisme n'a pas besoin de calomniateurs ou de médisants, il suffit de laisser vivre en transparence grands et même petits élus pour le voir grandir. A preuve récemment le déni total de Sylvie Goulard de l'immoralité de sa position judiciaire, confirmé par la colère du président Macron, dépité de ne pas avoir été obéi ! Mais cette posture n'est pas nouvelle. François Fillon n'a jamais compris qu'on lui cherche des poux dans la tête pour avoir nourri toute sa famille sur fonds parlementaires puisqu'il était raccord avec les textes ! Richard Ferrand constitue un patrimoine immobilier à sa compagne en détournant vers elle les débours de sa caisse mutuelle, abandonne son maroquin pour éviter les lazzis dans sa fonction, puis est adoubé au Perchoir pour plaire à l'Empereur d'Europe.

Si on remonte dans le temps (mais pas trop) on retrouve tous les scandales politiques de la IIIè République - ceux d'aujourd'hui font "petit joueur" - à ne citer que Panama, Wilson, Oustric, Stavisky. Mais le modèle étant auto-guérissable en résultat du bourrage de crâne des peuples à qui on assène que la démocratie représentative est la seule qui fonctionne, le reste, comprenez la démocratie directe, n'étant qu'anarchie et désordre des foules. Et on évite d'étudier dans le détail le fonctionnement de la Confédération suisse qui fait mentir les politologues depuis 728 ans (merci Wikipedia). Ce qui tend à prouver que l'exercice démocratique direct est jouable au sein de circonscriptions délimitées par le champ de conscience identitaire des citoyens - je me sens aveyronnais et sensible au sort des peuples en aval jusqu'à la Garonne comme des cantalous - mais qu'à l'étage national le principe est en défaut. Les élus une fois installés et grassement payés à relire les directives de Bruxelles se désintéressent de la problématique locale en s'appuyant sur l'article 27 de la Constitution qui récuse le mandat impératif à l'élu.

Laissons les autres pays vivre leur transformation démocratique et penchons-nous un instant sur le nôtre, en espérant ne pas trop rabâcher. Les six strates d'administration d'un pays moyen, qui se traverse dans une seule journée entre le lever et le coucher de soleil, sont le ferment de la fracture politique entre le peuple et ses élites : l'Europe institutionnelle avec un exécutif, un parlement, une cour de justice, des agences normatives ; l'Etat central français (le plus gros de l'OCDE rapporté à sa population d'administrés) avec deux chambres parlementaires, des tribunaux, une cour de cassation, cour des comptes, Conseil d'Etat et cent autres "organisations" dédiées à l'empreinte étatique ; des régions répliquant chacune à son niveau le modèle d'Etat central avec exécutif, parlement, organisations de gestion et contrôle etc ; des départements répliquant l'organisation des régions avec son exécutif, parlement etc... jusqu'à la DDE (trous en formation) ; les communautés urbaines répliquant les fonctions exécutives départementales sur leur zone d'intérêt avec des services dédiés et une assemblée d'élus municipaux ; la commune, le plus souvent dépouillée de pouvoirs, mais qui reste la seule structure au contact du citoyen pour lui répondre que "ce n'est plus de son ressort". Et dans les trois métropoles françaises, cette strate basse est divisée entre mairie centrale et mairies d'arrondissement ! Tout ce barnum pour "gérer" soixante cinq millions d'habitants ? Quand le citoyen imagine le poids qu'il porte sur la tête au seul prétexte de le gouverner il est pris de vertiges, met un gilet jaune et va au rond-point en discuter avec d'autres comme lui. Puis la fermentation démarre et la classe politique prend peur. Mais de l'avis d'un vieil anarchiste de droite, La Casta n'a pas encore assez peur pour remettre en cause la pyramide des prébendes qu'elle a construite.

In cauda, chacun peut observer que les tyrannies modernes sont le plus souvent issues de processus démocratiques. Et je prends le pari que le nouveau président de Tunisie se regarde dans la glace à se demander si une petite moustache avec des lunettes à la Jaruzelski ne seraient pas préférables pour développer ses prérogatives.

lundi 14 octobre 2019

Hong Kong face au trou noir

La situation dégénère à Hong Kong et la population, déjà divisée entre le soutien à la marionette de Pékin (ça ne se discute même plus même dans son camp) et la compréhension d'une jeunesse qui joue là son avenir avant que d'émigrer si elle y est forcée, la population donc juge la violente répression policière source de désordre. Et beaucoup qui comprenaient les remontrances de Pékin n'accepteront pas le massacre de leurs jeunes. Une révolte des estates où la vie est très dure, ainsi qu'on appelle les cités de Hong Kong, déclencherait des émeutes en vraie grandeur à la chinoise, c'est à dire sans frein ! La SAR n'y survivrait pas et des répliques continentales ne seraient pas à exclure non plus.

Il me revient aussi que le pouvoir central serait divisé sur la question entre Xi Jinping, Li Keqiang, Wang Qishan d'une part et la coterie Jiang Zemin de l'autre (lui-même a 93 ans) groupe d'influence qui fait son affaire de la conduite des opérations à Hong Kong. Ainsi comprend-t-on que les menaces explicites de Xi Jinping d'écraser l'appel à sécession "dans le sang et les os broyés" ne soient suivies d'aucun effet, mises à part les brutalités policières. Ce sont des Shanghaïens à la manœuvre et ils ont une inclination naturelle envers les hubs maritimes de Chine, sans oublier que ce sont des Shanghaïens exilés qui ont fait la fortune de Hong Kong après la prise de Shanghaï par l'Armée populaire de Libération en 1949. Les Anglais n'ont fourni que... la liberté d'entreprendre et réussir ; ce que beaucoup de pays en difficulté devraient méditer. Je pense à la Tunisie qui, aux mains des Chinois, serait déjà le Singapour méditerranéen.

Les Shanghaïens ont sans nul doute pouffé de rire à voir constitutionnaliser la "pensée" du nouveau timonier Xi, un fils de prince dont l'hystérie militaire engloutit d'énormes crédits qui seraient mieux employés ailleurs. Mais cela ne profitera pas beaucoup à Hong Kong qui n'est pas une Nouvelle Calédonie détachable. Les insurgés attendent tout des émeutes fomentées, mais ils ne pourront obtenir au maximum que des élections libres désignant un gouvernement adoubé par le Central, et la mise à pied de Carrie Lam qui, en bon fonctionnaire Playmobil, a montré toutes les limites de son tempérament louiseizième, jamais en avance sur les évènements.

Voici le reportage de Florence de Changy de Radio France internationale à Hong Kong ce week-end, avec permission de republier :



vendredi 11 octobre 2019

La France malade de son État

Fresque de Goin à Grenoble

Auditionné au Parlement après l'attaque meurtrière à la Préfecture de Police de Paris, le ministre de l'Intérieur Castaner ne cherchera ni responsable ni coupable en l'affaire, et il rejette d'emblée le criblage de l'Administration pour détecter les déviants, faute d'un logiciel adapté (sic). Répondant aux questions qui apparemment le dépassent, il s'applique et fait du mieux qu'il peut, peu ! Le secteur du Renseignement ne pouvant être désossé en place publique, le Sénat abandonne la commission d'enquête et remet une pièce dans la machine DPR (Délégation parlementaire au renseignement) qui travaille à huis clos et caviarde généreusement ses rapports pour ne pas interférer dans le travail des Services. Ce travail de la DPR vise à corriger ou éditer des lois et règles améliorant l'institution, ce n'est pas un balcon médiatique, tant mieux ! Parce que failles et dysfonctionnements divers sont le quotidien de la Police parisienne, gouvernée par un petit préfet aussi ridicule sous sa grande casquette qu'arrogant, et seul un travail en profondeur peut déblayer le terrain des incapables venus là faire carrière avant tout. «C'est un vrai sujet !» dirait monsieur Castaner. Allons au fond des choses en ce qui concerne l'État.

Nous avons trois États :

(1) l'Etat provisoire que représente l'exécutif avec ses ministres, sous-ministres, conseils et cabinets ministériels. Il est issu indirectement des élections démocratiques et ses mandats sont limités dans le temps.

(2) L'Etat profond ou permanent, formé de la haute fonction publique issue des corps de surveillance et de conseil. C'est ici que se recrute la noblesse d'Etat qui, depuis la Libération, a une vision à long terme de l'administration du pays. C'est notre caste des Brahmanes. Ils ne mangent pas dans nos couverts et font carrière tracée.

(3) L'Etat d'exécution formé par tous les services centraux et publics qui rémunère six millions de fonctionnaires quand la moyenne OCDE appliquée à la France serait de quatre. Il y a aussi les Etats dans l'Etat mais ce serait trop long. Si on dit SNCF, EDF, arsenaux, chacun comprend de quoi nous ne parlerons pas.





L'Etat d'exécution (3) obéit à plusieurs maîtres. Une partie dépend des services centraux, en région, des préfectures, parquets, DDASS et rectorats, c'est l'Etat national. A côté de lui prolifère l'Etat territorial qui dépend des satrapies locales. C'est le secteur en inflation à mesure des dévolutions consenties par le pouvoir central dans le cadre de la décentralisation, souvent faute d'argent. C'est évidemment l'Etat au contact de l'usager qui, à travers lui, juge l'Etat dans sa totalité, privilèges et horaires compris !

L'Etat profond (2) est rarement exempt d'orgueil. Ses membres partagent la certitude de tenir le pays debout en dépit des errements électoralistes de l'Etat provisoire qui lui est supérieur hiérarchiquement. Son recrutement remonte parfois à l'Ancien régime et un certain niveau de qualité est généralement la règle, même si Maurice Rheims croisait parfois des "cons terribles" chez les conseillers-maîtres. C'est contre cet Etat permanent et sûr de lui que se rebiffent les politiques. Ceux-là l'accusent de détourner leur prérogative législative dans la rédaction des décrets d'application des lois, leur differement, leur dénaturation. La strate est en outre infiltrée par la franc-maçonnerie dans laquelle cherchent à pénétrer les intermittents du pouvoir que sont les politiques, dans le but de s'établir socialement comme il est dit plus bas.

L'Etat provisoire (1) est le royaume impermanent des ambitions dévorantes où circule ce que les Italiens appellent "La Casta". Entrepreneurs en extraction de voix, rares sont les élus de convictions, ancrés au pays réel. C'est la république des bavards et des habiles, en un mot des démagogues, mais c'est le régime démocratique d'étage national qui veut ça. Il y est plus souvent question d'accéder à un statut social plus élevé qu'avant la campagne sur la seule durée du mandat électif que de contrôler l'exécutif. Le top est de pouvoir à la fin entrer dans l'Etat profond et sécuriser ainsi l'avenir de sa famille.

Et ça ne marche pas !

A preuve s'il en faut, le discours mardi dernier de monsieur Macron dans la cour de la Préfecture de Police de Paris appelant toute la nation à se substituer à l'Etat dans le contrôle de la radicalisation islamique. Ahurissant ! Julien Suaudeau note à juste titre dans Slate que « l'État, s'il conserve en théorie le monopole de la violence physique légitime, reconnaît qu'il n'a plus les moyens pratiques de l'exercer efficacement pour nous protéger ». En d'autres circonstances, on aurait formé des milices citoyennes, avec sectionnaires et patrouilles nocturnes. Mais que s'est-il passé pour que le Chef de cet Etat désavoue publiquement sa haute administration ? On a déjà ouï des reproches réitérés du pouvoir contre l'Etat profond qui bloque réformes et évolutions. Les gnomes de l'Elysée ont même caressé l'idée de dépouilles à l'américaine qui purgerait les directions après chaque élection présidentielle afin que l'impétrant puisse gouverner sans se battre contre les "permanents". En fait c'est une crise de régime que ce pays affronte.

L'Etat permanent, à qui est remis par l'Etat provisoire le contrôle de toute la société d'al brès a la toumbo est maintenant jugé incapable d'aboutir dans le cas précis de la guerre au terrorisme, paralysé par le nouveau concept bloquant d'islamophobie. Ce désaveu est partagé par tout l'exécutif et le parlement. Visée, la haute administration est retranchée derrière ses statuts, et quand retombe l'écume législative, règne en maître. En fait, on en revient à l'organisation pragmatique de l'Ancien régime où les parlements servaient de cour d'appel, émettaient des vœux voire des remontrances, mais pénétraient peu dans le quotidien de la vie sociale et laissaient les Intendants agir. Mais cet Etat permanent est infiltré par les idées nouvelles comme l'était jadis l'Etat de Louis XVI. Il subit donc les préventions, précautions et timidités à la mode du temps que lui injecte l'Etat provisoire.

A défaut d'être saisi de grandes causes le plus souvent déportées au niveau des institutions européennes, l'hubris sociétal du parlement d'aujourd'hui est jugé ridicule ou malfaisant par la haute administration en ce qu'il valorise chaque minorité visible pour lesquelles naissent des droits, en sus du clivage provoqué par toute discrimination positive. Pourtant c'est bien dans la vocation d'un parlement démocratique d'écraser son opposition et de survaloriser ses clients. Le modèle est naturellement diviseur, comme l'avait jugé le Poméranien depuis son hôtel particulier de l'Avenue de Villeneuve-l'Etang à Versailles quand la délégation française était venu en 1870 quérir ses volontés quant au régime devant succéder au Second empire : "Qu'on leur foute la République, c'est ce qui les divisera le plus !". Ça n'a jamais raté, sauf en Quatorze mais c'était spécial ! Depuis vingt ans, les pouvoirs publics séparent et traitent à part les musulmans, même et surtout quand ils s'en défendent. C'est la voie de la communautarisation à l'anglaise avec des corpus de lois adaptées. Nous n'y sommes pas encore mais nous y allons ; c'est dans la logique du clientélisme. Et parfois c'est à se demander si des communautés réglées selon leurs lois ne seraient pas plus pacifiques au lieu des provocations permanentes actuelles et de tout bord. Mais c'est un autre sujet qui croise à angle droit la définition républicaine du "peuple" français.


Pro domo

Ce monde ingérable qu'est devenu l'Etat ne peut plus continuer. En fait l'Etat, censé gérer la société, ne se gère plus lui-même tant il a enflé comme la baleine crevée sur la plage. Il est plus que temps de faire la part du feu et débander tout le domaine qui n'est pas régalien, le plus mal loti budgétairement pour distraire des crédits clients vers l'électorat vainqueur. L'Etat non-régalien doit être remis au peuple qui en conservera les secteurs utiles et les confiera à qui il voudra, région par région (par exemple). Rappelons le périmètre régalien : la Justice haute, la sécurité (police et gendarmerie), la guerre (ou la défense), la diplomatie et la parité monétaire. S'y agrègent des domaines cousins qui pourraient être éventuellement remplacés par des organismes régionaux ou privés : la santé, l'instruction publique, opéra et ballets. Tout le reste et à remettre dans les mains des collectivités locales et régionales représentant les peuples de France, avec la capacité d'y adosser les taxes locales correspondantes.

Et c'est là qu'apparaît le monarque souverain qui préside dans la continuité de sa fonction la haute administration permanente, l'arbitre, la règle et la commande ! La fonction est évidemment utile, elle appartient au domaine régalien, par essence continue. Sa pertinence se démontre parce qu'elle est la seule réponse aux dérives paralysantes que nous rencontrons. Par définition, les gens du roi ne sont pas intéressés par le mât de cocagne des élections, ils gèrent en leur âme et conscience le pays et n'en rapportent qu'au souverain. Au nom du roi et pas du petit marquis intermittent en vogue, tant de choses deviennent possibles car justifiées par le bien commun et non plus par les fameuses promesses de campagne. Chacun des trois Etats précités occupera dès lors la totalité de son domaine sans compétition pour la domination des deux autres puisque la place en haut est prise. A chacun la sienne, enfin !

mercredi 2 octobre 2019

Des travaux et des jours sans lune



Boris Johnson persiste et signe : ils partent ! Le 31 octobre à minuit GMT ! Quoi qu'exigera ou dira la Commission européenne, le Royaume uni, qui a déjà dédoublé ses amarres, déhalera de sa position critique en tirant sur l'Irlande. Pas sur l'Éire ou l'Ulster, mais sur tout l'île d'Irlande. Avouons que c'est assez rusé. Il claque la porte, mais sans pêne ni gâche, elle battra sur son dormant comme une double porte de saloon. Plus exactement, il ferme le lourd portail devant et ouvre en grand la porte de derrière.

Pas question de revenir sur les accords du Vendredi saint et de rallumer la guerre de religion par des postes de douane entre les deux irlandes. C'est toute l'Irlande (pas encore réunifiée) qui dès lors devient un sas de décompression douanière, le contrôle physique des mouvements, gens et denrées, ne pouvant se faire que par des brigades volantes autour de Belfast ou Larne, et par des contrôles à l'embarquement sur les ferries anglais de la mer d'Irlande, au sein du royaume donc. Ce qui aboutira à laisser l'administration anglaise maîtresse de tous les flux circulant vers et dans l'archipel britannique. La contrebande sera totale. Ce joyeux bordel sera inacceptable pour l'Europe sérieuse mais l'Europe rieuse, dont nous faisons désormais partie avec nos cent pour cent de dette, rira !

Restera à faire payer les milliards que doit le royaume à ses partenaires continentaux. A part de déclencher une guerre, que ces salauds ont l'habitude de gagner, nul ne voit comment l'y contraindre. Nous anticipons que si cet "arrangement" n'est pas une solution pérenne, il peut éloigner les calamités et retarder la prise d'indépendance de la nation écossaise qui verra les inconvénients du Brexit moins sévères qu'annoncés et s'y adaptera.



Un mot sur la crise institutionnelle américaine. Donald Trump a mis plusieurs jours à comprendre que cette fois les Démocrates voulaient sa mort. Nancy Pelosi qui bloquait jusqu'ici toute procédure de révocation pour battre Trump à la loyale, dans les urnes, a consenti à ouvrir la boîte de Pandore de l'impeachment, à la condition que l'affaire progresse au pas de charge chez les Représentants, sans compter les week-ends, les délais de courtoisie, les atermoiements pour convenances personnelles eu égard aux personnes convoquées. Trump comptait sur des délais pour se retourner et retourner l'opinion contre le parlement, il n'en a pas. Même si les inélégances dont on l'accuse risquent de ne pas suffire pour arracher un vote au Sénat, la pression du temps peut lui laisser tweeter une énormité qui l'achèvera. Est-ce sur son caractère impétueux que compte Pelosi pour le tuer ? Pour l'instant il tourne comme un canard sans tête et les rats pointent leur museau aux dalots.



Le troisième (et dernier) mot concerne Hong Kong à l'heure du 70ème anniversaire de la République populaire de Chine. Nul ne pouvait prédire, lors de l'anniversaire des trente ans du massacre de Tian An Men, que le territoire se soulèverait contre le pouvoir communiste à la première occasion. Il faut dire que le procédé chinois consistant à stériliser un par un et dans le temps les effets du traité sino-britannique de restitution du comptoir colonial, a accumulé tant de contraintes que la main de fer a fini par percer le gant de velours. Les hauts fonctionnaires capables d'analyser la situation ont été mis sur la touche et leurs très obéissants remplaçants boivent les paroles du grand président Xi, voire les devinent au lieu de réfléchir. Pas plus qu'en 1989 à Pékin, les cadres supérieurs du Parti communiste chinois ne sauront dénouer adroitement l'affaire de Hong Kong et il est à prévoir qu'un embrasement, spontané ou provoqué, ne soit le motif d'horreurs définitives... que le monde de la finance internationale oubliera vite avec regrets. Je suis très pessimiste.

Voilà ! Pas plus aujourd'hui. Si, on commémore aujourd'hui la division de Jamal Khashoggi au consulat séoudien d'Istanbul.

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