lundi 31 mars 2008

RAP 3

Kery James
En attendant que les Sarkozy s'inquiètent du sort peu reluisant des Français (j'allais dire leurs concitoyens) qui au 1er juillet prochain seront la risée de l'Europe, parce que banqueroutiers de leur modèle social, lisez du rap d'entrepreneur !
Instructif sur l'état d'esprit des banlieues et complètement français !

Seconde et dernière piqure de rappel : Kery James.
Extrait de son nouvel album dans les bacs aujourd'hui sous le titre : Banlieusards :
L'écran page suivante ...



Partition de Kery James

Son site officiel en cliquant ici

On n'est pas condamné à l'échec,
Voilà le chant des combattants,
Banlieusard et fier de l'être, j'ai écrit l'hymne des battants,
Ceux qui ne font pas toujours ce qu'on attend d'eux,
Qui ne disent pas toujours ce que l'on veut entendre d'eux,
Parce que la vie est un combat
pour ceux d'en haut comme pour ceux d'en bas.
Si tu n'acceptes pas ça c'est que t'es qu'un lâche,
Ecoute ce morceau, lève toi et marche.

C'est 1) pour les miens, arabes et noirs pour la plupart
Et pour mes babtous (blancs), prolétaires et banlieusards.
Le 2) ce sera pour ceux qui rêvent d'une France unifiée
Parce qu'à ce jour y'a deux France, qui peut le nier ?
Et moi je serai de la 2ème France, celle de l'insécurité
Des terroristes potentiels, des assistés.
C'est ce qu'ils attendent de nous, mais j'ai d'autres projets, qu'ils retiennent ça,
Je ne suis pas une victime mais un soldat,
Regarde moi, je suis noir et fier de l'être,
Je manie la langue de Molière, j'en maîtrise les lettres,
Français parce que la France a colonisé mes ancêtres,
Mais mon esprit est libre et mon Afrique n'a aucune dette.

Je suis parti de rien, les pieds entravés.
Le système ne m'a rien donné, j'ai dû le braver.
Depuis la ligne de départ, ils ont piégé ma course
Pendant que les keufs me coursaient, eux investissaient en bourse.
J'étais sensé échouer, finir écroué,
La peau trouée, et si j'en parle la gorge nouée,
C'est que j'ai nagé dans des eaux profondes sans bouée.
J'ai le ghetto tatoué, dans la peau, j'suis Rebel comme ekoué
Mais l'espoir ne m'a jamais quitté
En attendant des jours meilleurs, j'ai résisté
Et je continue encore.

Je suis le capitaine dans le bateau de mes efforts
Je n’attends rien du système, je suis indépendant.
J'aspire à être un gagnant donné perdant,
Parce qu'on vient de la banlieue, c'est vrai, qu'on a grandi, non
Les yeux dans les bleus mais des bleus dans les yeux.
Pourquoi nous, dans les ghettos, eux à L'ENA,
Nous derrière les barreaux, eux au Sénat,
Ils défendent leurs intérêts, éludent nos problèmes,
Mais une question reste en suspens : qu'a-t-on fait pour nous même ?
Qu'a-t-on fait pour protéger les nôtres
des mêmes erreurs que les nôtres ?
Regarde ce que deviennent nos petits frères :
D'abord c'est l'échec scolaire, l'exclusion donc la colère,
La violence et les civières, la prison ou le cimetière,
On n'est pas condamnés à l'échec.

Pour nous c'est dur, mais ça ne doit pas devenir un prétexte
Par honneur pour ce qu'ont accompli nos parents
On n'peut pas baisser les bras.
Malgré les déceptions et les dépressions
Suite à la pression, que chacun d'entre nous ressent,
Malgré la répression et les oppressions
Les discriminations, puis les arrestations,
Malgré les provocations, les incarcérations,
Le manque de compréhension, les peurs et les pulsions,
Leur désir, de nous maintenir la tête sous l'eau
Transcende ma motivation,
Nourrit mon ambition.

Il est temps que la 2ème France s'éveille.
J'ai envie d'être plus direct, il est temps qu'on fasse de l'oseille (argent)
Ce que la France ne nous donne pas on va lui prendre.
Je veux pas brûler des voitures, mais en construire, puis en vendre
Si on est livré à nous même, le combat faut qu'on le livre nous même
Il ne suffit pas de chanter, « regarde comme il nous malmène »
Il faut que tu apprennes, que tu comprennes et que t'entreprennes.
Avant de crier « c'est pas la peine ! quoi qu'il advienne, le système nous freine ! »
A toi de voir ! T'es un lâche ou un soldat ?
Brandis l'épée du courage, entreprends et bats toi !

Banlieusard et fier de l'être,
On n'est pas condamné à l'échec, diplômés, éclairés ou paumés
En 4x4 en tromé (métro), gentils ou chantmé (méchant)
La banlieue a trop chômé, je sais ce que la France promet
Mais que c'est un crime contre notre avenir que la France commet
C'est pour les discriminés, souvent incriminés,
Les innocents, qu'ils traîtent comme de vrais criminels.
On a l'image des prédateurs, mais on n’est que des proies
Capables mais coupables et exclus de l'emploi.

Si je rugis comme un lion c'est que je n’compte pas me laisser faire,
Je n'suis pas un mendiant, je suis venu prendre ce qu'ils m'ont promis hier,
Même s'il me faut 2 fois plus de courage, 2 fois plus de rage,
Car il y a 2 fois plus d'obstacles et 2 fois moins d'avantages,
Et alors ?! Ma victoire aura 2 fois plus de goût.
Avant de pouvoir la savourer, j'prendrai 2 fois plus de coups,
Les pièges sont nombreux, il faut que je sois 2 fois plus attentif,
2 fois plus qualifié et 2 fois plus motivé.

Si t'aimes pleurer sur ton sort, reste pas à côté de moi
Je te le répète, je n'suis pas une victime mais un soldat,
Banlieusard et fier de l'être
On n'est pas condamné à l'échec !

On est condamné à réussir,
A franchir les barrières, construire des carrières.
Regarde ce qu'ont accompli nos parents,
Ce qu'ils ont subi pour qu'on accède à l'éducation.
Où serait-on sans leurs sacrifices ?
Comme Mahmoud pour Thays.....
Bien sûr que le travail a du mérite
Ô combien j'admire nos pères,
Manutentionnaires mais fiers,
Si on gâche tout, où est le respect ?
Si on échoue, où est le progrès ?
Chaque fils d'immigré est en mission,
Chaque fils de pauvre doit avoir de l'ambition,
Tu peux pas laisser s'évaporer tes rêves en fumée
Dans un hall enfumé,
A fumer des substances qui brisent ta volonté,
Anesthésient tes désirs et noient tes capacités.
Arrête, on vaut mieux que ça !
Rien n'arrête un banlieusard qui se bat.
On est jeunes, forts et nos sœurs sont belles,
Immense est le talent qu'elles portent en elle.
Vois-tu des faibles ici ?
Je ne vois que des hommes qui portent le glaive ici.
Banlieusards et fiers de l’être,
On est pas condamné à l’échec !

Ce texte je vous le devais,
Même si je l’écris le cœur serré,
Et si tu pleures, pleure des larmes de détermination,
Car ceci n'est pas une plainte, c'est une révolution !

[choral]

Kery James


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mercredi 26 mars 2008

Mammon contre Bouddha

fillette thibetaineLes Hans sont entrés au Tibet, province impériale aux marches du monde chinois, en 1950. Mus par l'idéologie communiste qui procède de la connerie en bottes-de-fer et consomme ses opposants comme du bois de poêle, les Chinois ont non seulement voulu recouvrer leur souveraineté himalayenne mais imposer aussi leur propre gestion matérialiste de la cité et des âmes qui s'y terraient. Les révoltes se succédèrent dès 1956 jusqu'au soulèvement de Lhassa en 1959 qui fit fuir le 14è Dalaï Lama aux Indes. Plus de 200 manifestations d'ampleur éclatèrent ensuite. La dernière ce mois-ci.

Soixante ans après l'arrivée des armées chinoises, on constate que Lhassa a pris le train-fantôme du développement échevelé - surtout depuis l'ouverture de la ligne de chemin de fer - et dispose de tous les éléments du progrès, cafés-Internet à foison, 240 dancings et karaokés, 650 maisons de passes ; et le Potala, "Résidence des dieux", est entouré d'un beau parc d'attractions. Deux habitants sur trois sont désormais chinois. Rien n'arrête le rouleau compresseur han. La seule voie permise à la survie de la civilisation tibétaine est celle de la conversion des pieds-noirs hans au bouddhisme, ce qui n'est pas impossible, vu l'intensité de leur superstition.
Mais leur faire admettre la souveraineté d'un dalaï lama est hors de question, le Han, sel de la Terre et fils du Ciel, ne supporte que l'empereur.

monts enneigés
Le Tibet, royaume ermite gouverné autrefois par une théocratie plutôt cruelle, entra dans l'empire du Milieu à la fin du XVIII° siècle de notre ère quand Lhassa fut attaquée par les Gurkhas népalais. Les Chinois appelés au secours n'en firent qu'une bouchée et s'installèrent. La décrépitude de l'empire des Grands Tsing au XIX° siècle invita au Tibet la confrontation des empires britannique et russe qui cherchaient une position stratégique dominante. Pour régler cette question, le colonel Francis Younghusband monta des Indes en 1904 et écrasa dans le sang la défense tibétaine. Le roi Edouard VII régnait dès lors au Tibet, les Britanniques imposèrent leurs conditions et arrachèrent privilèges commerciaux et diplomatiques. Le pays étant très inhospitalier, les troupes indo-britanniques redescendirent aux Indes en 1908, et la Chine remonta prendre le contrôle du Toit du Monde quand la place fut libre.
Le Dalaï Lama (n°13) saisit l'occasion de l'avènement de la République de Chine en 1912 pour proclamer l'indépendance et expulser les troupes Tsing.
Aussi loin de tout que vous soyez et aussi difficile à atteindre sous un climat exécrable pour la manoeuvre militaire, il faut quand même une bonne armée pour maintenir son indépendance au flanc de l'empire céleste. Les maigres ressources naturelles du Tibet ne lui permettaient pas ce que réussirent les Tonkinois en 1979 qui repoussèrent avec pertes et fracas l'Armée Populaire chinoise venue lui infliger une correction.

Le Tibet est aujourd'hui une province autonome - c-à-d. son gouverneur chinois a les pleins pouvoirs - soumise à la colonisation de masse. Nos petits-enfants n'en entendront plus parler. Quelles que soient les conséquences, et à cause d'autres forces centrifuges qui se manifestent au Xinkiang voisin et ailleurs, la Chine ne baissera pas le ton aujourd'hui tant que sa province himalayenne ne sera pas pacifiée. Un pacificateur efficace fut le résident général Hu Jintao qui gagna le surnom de "boucher de Lhassa" en 1989, aujourd'hui président de la République populaire. A son tour de menacer les menaçants à la table des grands de ce monde. On ne joue pas au chat et à la souris avec un empire d'un milliard trois cent millions d'hommes qui accumule un matelas impressionnant de bons du Trésor américain et achète trains et centrales nucléaires à la pelle. Les Occidentaux et leurs alliés asiatiques observent prudemment en multipliant les déclarations à l'intention de leurs opinions domestiques. Le Tibet indépendant ne fut jamais reconnu par la communauté internationale. C'est le motif avancé par les chancelleries.
Les Tibétains sont cuits, Mammon écrase Bouddha. Partout !

le Potala ciel rouge
- - - PUB !

Bientôt New Thibetland, une société du groupe Disney cotée à la bourse de Shenzhen : 80$ le ticket adulte, 40$ enfant, réductions de groupes, prix valable pour une journée entière comprenant un moulin à prières souvenir, la course des yaks le matin, le cheeseburger-Coca à midi au réfectoire des moines, le concert des trompes himalayennes, la danse des rosières au ruban, une séance de Tintin au Tibet en 3D avec l'abominable homme des neiges, et la grande procession des Cymbales d'or en clôture. Chaque dimanche, élection du Panchem lama. Charters depuis Londres, Dubaï, New Delhi, Beijing, Sydney, Los Angeles, Chicago, NewYork. Frequentflyer miles acceptés.
Chez toutes les bonnes agences de voyage.


PS: Magnifiques photographies du Tibet sur le site de Wang Jian Shuo.
PPS: On peut lire aussi les deux relations du fakir chrétien Sundar Singh (1889-1929) sur le Tibet en cliquant sur les deux titres ci-dessous :
- Au Tibet ;
- Encore le Tibet.



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mardi 25 mars 2008

Bataille de l'intelligence

BPO indienS'il est un "truc" français aussi reconnu dans le monde que le Chanel 5 c'est bien l'intelligence, l'esprit, la culture insondable et la suffisance qui va avec. Normal ! Jusques aux derniers jours du siècle fini, ces capacités étaient un outil entre les mains de nos chercheurs et de certains de nos dirigeants, trop peu nombreux. Ils concouraient à la prise d'avantages nationaux ou particuliers avec leurs homologues du monde entier, et ne se trouvaient en pleine possession de leurs moyens que seuls. D'ailleurs la coopération bilatérale fut toujours réputée comme un encrassement de notre génie propre. C'était hier. Et nous ne parlons pas de coopération internationale maintenant, mais de l'Inde, où M. Guy Nègre est parti faire fabriquer sa voiture à air comprimé que personne ne veut ici. Aucun rapport avec la suite.

Le second empire émergent est bien moins présent dans nos soucis que son aîné chinois parce qu'il n'inonde pas les gondoles de nos hypermarchés de biens manufacturés Made in India. Moins présent mais bien plus dangereux car il vise la tête ! C'est son irruption sur le marché informatique de la gestion à distance créé par les anglo-saxons qui a révélé au monde l'importance de la ressource cérébrale indienne. BPO, Business Process Outsourcing, est une délocalisation, celle de l'intelligence, au même titre et pour les mêmes raisons que celle du labeur. L'Inde a capté un quart du marché mondial du BPO dès l'ouverture des autoroutes mondiales de l'information et elle continue d'accroître sa part. Détrompez-vous, ce ne sont plus les listings comptables ou les call-centers qui sont traités en Inde mais les études de marché, l'analyse économique et boursière, les procédures de dépôt de brevets, plus généralement la recherche et développement. L'Inde est en passe de capter les deux tiers de la croissance de ce dernier secteur.

Trois motifs à ce succès, l'esprit délié d'une vieille civilisation, la langue maternelle anglaise, le décalage horaire par rapport au Nouveau Monde dans le travail à flux tendu. Quand Wall Street dort, l'Indien analyse sa cible et produit sa conclusion prête à appliquer à l'ouverture. Ce décalage permet aussi de travailler globalement 24h sur 24 dans n'importe quel domaine.

Kolkata (Inde)
La ressource en talents est immense. Le système d'enseignement supérieur, fondé sur 220 universités et un nombre incalculable d'écoles professionnelles, produit trois millions de "Bac+3" par an. Un dixième sont des ingénieurs et des informaticiens courtisés par toutes les multinationales. Il y a plus d'indiens sur les campus universitaires occidentaux que de chinois. L'Inde espère devenir le premier centre mondial de services sous quinze ans, et prévoit de créer dans ce secteur seul quarante millions d'emplois. Le français Cap Gemini étoffe son réseau indien pour le porter à 40.000 postes d'ici deux ans. IBM va investir 5 milliards $ sur trois ans. Les grands de l'électronique n'ont pas attendu. Le pays se câble à la fibre optique à grande vitesse pour mettre en réseau toutes ses intelligences.
Le plus grand défi de l'Orient à l'Occident est sans doute neuronal.

Si nous avons perdu la bataille de l'industrie pour cent raisons sur lesquelles nous ne reviendrons pas, nous ne pouvons nous permettre de perdre la bataille de l'intelligence. Parce qu'après elle, il ne nous restera plus que la "réserve d'indiens, le luxe et la gastronomie" comme activités nationales. Très insuffisant pour un pays de 60 millions d'habitants, même si certains ne jurent que par le "traditionnel". La Fabrique de l'intelligence française est la première en cause, et puisque la République a pris ce domaine sous sa coupe, l'Education Nationale est sous le feu de la critique, très naturellement. Les constats d'échec se succèdent depuis trente ans à peu d'effets. Le premier plan de rénovation fut celui de Lionel Jospin de 1990. Il passa un deal avec les syndicats de professeurs. Une seule des parties au contrat le respecta, l'Etat. L'autre consolida le bétonnage de ses positions. Depuis, les plans se succèdent, et curieusement se résument toujours à un affrontement syndical, parfois dur. La profession n'est jamais d'accord mais n'évolue pas non plus, du moins ses structures corporatistes semblent elles l'en empêcher. Que dit Jacques Attali - je choisis celui-ci puisqu'il est le dernier à avoir parlé sur le sujet :
Jacques AttaliDans son rapport sur la République des Imbéciles - que peu de gens de droite ont lu par principe mais qu'on peut télécharger en cliquant ici - la Commission pour la libération de la croissance française ouvre son chapitre 1 par le titre "Au commencement, le savoir". Allez page 31 (la table des matières est à la fin) et voici ce qu'elle dit de notre université :
« La première mission des universités et des grandes écoles n'est plus le recrutement des fonctionnaires mais celle de donner à chacun directement, quel que soit son milieu d'origine, de trouver son domaine d'excellence, de se préparer aux métiers d'après-demain et de faire progresser le savoir ».

Pour mémoire, nos universités ont quasiment disparu des classements internationaux et il faut faire beaucoup d'acrobaties aux responsables français pour les y faire apparaître. Les critères qu'on nous applique ne sont pas les bons, défavorables, malintentionnés, nous sommes visés par l'Amérique, l'Allemagne et la Papouasie, tous réunis au complot. Tant pis, la Commission Attali prend le taureau par les cornes et y croit. Dirigée par un ancien major de Polytechnique, elle s'intéresse beaucoup aux universités dans l'optique libertarienne du savoir conquis par une démarche d'assimilation volontaire préférée au gavage. C'est aussi la règle dans le reste du Monde.

Six objectifs déclinés en 22 décisions très précises (n°11 à 32) :
I.- Accompagner les étudiants dès leurs premières années universitaires
II.- Aider les étudiants à concilier leurs études avec leur emploi
III.- Investir davantage dans l'enseignement supérieur
IV.- Faire émerger sur le territoire 10 grands pôles universitaires et de recherche de niveau mondial
   On complètera la lecture de celle du rapport ad hoc de l'Institut Montaigne qui donne entre autres choses les tailles critiques de ces pôles en cliquant ici.
V.- Ouvrir l'enseignement supérieur à l'international
VI.- Rendre notre recherche plus compétitive (dans le cadre de la stratégie de Lisbonne 2000)


Il n'est pas très grave que le Charles-De-Gaulle reste en cale sèche faute d'argent ou qu'il nous manque quinze Mirages nucléaires sous abri ; mais si nous ne reconstruisons pas nos universités, les générations montantes seront les nègres de demain, qui recevront leur emploi du temps et les schémas dictés au jour le jour, depuis Bombay, Bangalore ou Hyderâbâd.

Le présent gouvernement devrait être jugé sur ce dossier capital, malheureusement laissé entre des mains inexpertes à la merci de corporations intéressées à son insuccès. La bataille de l'intelligence est une affaire très sérieuse.
M. Sarkozy dépassera-t-il son horizon électoral ?


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samedi 22 mars 2008

La faible force du droit

président Ma de taiwanMa Ying-jeou est élu président de Taiwan. Après sa victoire aux législatives du 12 janvier, le Kuomintang de Tchang Kaï-chek († 1975) reprend donc les rênes de l'île chinoise. On sait maintenant que la reconnaissance de la Chine populaire par le président Nixon en 1972 aurait été le bon moment pour proclamer l'indépendance de Taiwan, les communistes d'alors n'avaient aucun moyen de passer le détroit et de débarquer. Mais le mythe de la reconquête nationaliste aveuglait les dirigeants de l'île. Depuis, les forces continentales ont fait des progrès, et même si leurs capacités amphibies restent douteuses, celles de bombardement sont sérieuses. La sécession de Taiwan est remisée sur les étagères de l'uchronie au motif d'une seule Chine. Dommage, en cette année de toutes les amputations, celle-ci aurait fait l'évènement avec une belle guerre derrière ! On se contentera de brûler les postes de douane du Kosovo nouveau.

Ici, la résistance à l'albanisation de l'ex-Yougoslavie se fonde exclusivement sur le droit international qui interdit ce type de dépeçage. Elle est donc vouée à l'échec, le droit international n'étant qu'un des attendus en tête de décrets ou traités signés sous la contrainte.

église MitroviçaLe vieux chancelier Bismarck avait proclamé "la force prime le droit". On y a vu toute la brutalité tudesque mais ne voulait-il pas dire simplement que le droit est conséquent des résultats acquis par la force. A l'évidence, et encore tout récemment dans la guerre de liquidation de la Yougoslavie communiste, les "rectifications" de territoires n'ont jamais été négociées entre partenaires de bonne volonté. Même le Canada montre les crocs et sort ses frégates quand les Etats Unis s'avisent de redessiner leur frontière maritime alaskienne sur le passage du Nord-Ouest que le réchauffement de la planète va ouvrir.
Ceux qui brandissent le précédent kosovar pour annoncer de grands désordres au Caucase, au Tibet, au Turkestan chinois, au Sri Lanka et en Bosnie-Herzégovine, pour faire court, s'appuient sur le droit international pour certains cas, et sur la jurisprudence créée par sa violation pour d'autres. C'est pain béni pour les exégètes de la Chicane.
Seule l'Ecosse semblerait pouvoir larguer les amarres à l'amiable vers ses champs pétroliers, encore que le marchandage ne fasse que commencer ; mais Gordon Brown est écossais et l'histoire ne repasse pas les plats.

Hormis l'Ecosse, c'est bien la force qui compte, pas le droit.
- La Serbie a perdu sa guerre. L'eut-elle gagnée comme sa préparation poussée pouvait le laisser croire, qu'elle n'aurait pas été inquiétée longtemps, la Russie aurait bloqué toute revanche occidentale. Mais voilà, la patrie de la DOT a plié. Elle le paie ! C'est un rapport de force. A voir la photo du camp américain Bondsteel au Kosovo en dit long. Les mauvaises langues l'appellent le Guantanamo balkanique. D'autres insistent sur les futures fonctions de sécurisation du pipeline transbalkans du camp qui sera rétrocédé à Messrs. Kellogg Brown & Root après le départ des boys. La Serbie est hors-jeu.

monastère de Shigatse
- Le Tibet n'est pas une menace militaire. Il ne bénéficie d'aucun appui de cette sorte, et la colonisation chinoise a mis ses habitants en minorité. Les pieds-noirs sont plus nombreux et riches que les aborigènes. C'est cuit ! A voir d'ailleurs le peu d'empressement des chancelleries donneuses de leçons de droit, on devine que les analyses diplomatiques convergent. Le Tibet est perdu. L'Empire règne.

- Taiwan, qui dans dix ans aura décroché du niveau de défense exigé par sa situation stratégique, vient de rentrer au bercail aujourd'hui. Soixante ans d'indépendance morale, physique et politique ne sont pas reconnus par le droit international ! La VII° Flotte ne viendra pas - c'est une déclaration officielle - si le gouvernement de l'île provoque le gouvernement continental ou le nargue. La déclaration ne présage en rien la vraie réaction américaine à une tentative de débarquement de l'Armée rouge, - il y aura cent motifs de faire le contraire - mais les plans taiwanais de défense doivent en tenir compte, et un comportement "responsable" du président a été plébiscité par les peuples formosans aujourd'hui. Ils jettent l'éponge !

La République serbe de Bosnie, combien de bataillons ? Le Kosovo-nord derrière la rivière Ibar, combien de bataillons ? Au-delà des grandes effusions dans les stades ou de quelques émeutes dans les rues, il ne semble pas que les Serbes puissent mobiliser leurs propres nationaux. Ils l'auraient déjà fait. Se retrancher derrière le droit international pour assigner les pays ayant reconnu le Kosovo albanais est, pour moi, le signe qu'ils acceptent le fait accompli, faute de puissance disponible.

camp US Bondsteel
Le Monde dès lors devrait être ouvertement régi par la Force qui dirait, elle, le Droit, comme il en toujours été. Rien de nouveau sous le soleil.

En aparté, ce blogue milite depuis le début pour une démarche de puissance de la France, et dénonce l'agitation souverainiste purement formelle. Les souverainistes se fourvoient entre lanternes et vessies. Nos moyens doivent être dirigés par toutes voies sans restriction aucune - même par le biais de l'Europe - vers la puissance économique qui crée la puissance militaire durable ; le reste est guignolesque.
L'affaire du Kosovo nous dessillera-t-elle les yeux ?


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mercredi 19 mars 2008

Une affaire d'honneur

Vepee Dick CheneyDick Cheney fait ces jours-ci la tournée des popotes pétrolières au Moyen Orient. La presse s’accorde à y voir une tentative de desserrer l’étau dans lequel l’OPEP tient les boules de l’Occident et de ses fournisseurs orientaux. Mais il est un motif non développé.
Oussama bin Laden, le phénix fou, rescapé de la vitrification des Monts Tora Bora, nargue toujours le maître du monde. Georges Walker "Texas Ranger" Bush ne peut quitter la Maison Blanche laissant le bon Dr NO enfouillé dans les cavernes du Waziristân après qu’on lui ait plié deux tours à Manhattan et le Pentagone. C'est une question d'honneur de ranchero ! Ranchero avec la vraie ceinture à boucle Long Horn, santiags pointues turlututu ...

Nous devrions donc assister au redéploiement des OPS américains sur l'Afghanistan oriental, à charge des pays de l'OTAN de flytoxer les provinces centrales et méridionales de cette contrée mythique aux effluves irréelles. Manque de chance, les Européens ne veulent pas mourir pour l'honneur du Texas et l'ont fait savoir, non en ces termes, en aucun terme d'ailleurs. Ils ne veulent pas faire plus que la garde aux passages cloutés à la sortie des écoles. Que ce pays de guerriers indomptables s’organise afin de chasser les freux de l’islam dévoyé ! Et que les Yankees se vengent une bonne et dernière fois ! L'honneur de la maison Bush serait-il en péril ?

Hollywood Tora Bora
Le vice-président Dick Cheney passera donc en Arabie Saoudite pour cent bonnes raisons à commencer par celle que vous devinez : couper les vivres au grand malfaisan. Et accessoirement accroître le débit aux postes de l'ARAMCO car à 110$ le baril, les pigeons de contribuables vont bientôt s'apercevoir que ce sont toujours les mêmes qui encaissent. La maison de Saoud est, on le sait, partagée sur l'empathie à l'endroit du fils prodigue en sourates explosives ; mais on ne peut refuser l'honneur à la famille Bush qui a organisé les charters saoudiens du 11 Septembre après le bouquet final, et les imans devront pousser leur serviette à carreaux dans la gueule de la pieuvre jusqu'à l'étouffer un moment.
Prendre Oussama tarira-t’il le fleuve des soldats terroristes qui se répand sur le monde occidental et déborde largement sur tout le Croissant vert ? Ils abandonnent le treillis, les brelages et la barbe même, se vêtiront en Armani et RayBan miroirs, et appuieront sur le contact du portable avec leur ongle manucuré. Al Qaïda est devenu une marque de luxe comme Dior, Chanel ou Hermès. Ces créateurs sont morts mais la légende leur survit. Le génie des commandants alqaïdistes du Waziristân fut de franchiser le concept. Ainsi a-t-on vu Al Qaïda ouvrir boutique en Irak sunnite et le succursaliste al-Zarqawi recevoir ses lettres de créance. Elles ne lui ont pas porté chance longtemps mais il a beaucoup tué en sainteté ! C’est la même chose au Maghreb où le Groupe salafiste pour la prédication et le combat a acheté l'enseigne prestigieuse et se rembourse des royalties sur le dos de l'Autriche aujourd'hui, et tout autre réservoir de touristes demain. Mais ceux-là ne sont pas les plus dangereux, ils trafiquent dans les leads & lags de la lutte islamiste intérieure, comme en Algérie. Ce sont les nôtres le vrai danger puisqu'ils sont devenus comme nous, à l’image des islamistes britanniques, ou d’Abou Dheim qui a tué huit élèves de l’école talmudique de Jérusalem, le jeudi soir du 6 mars.
L’assaillant était un fils de bourgeois palestiniens de Jérusalem-Est, décrit par sa fiancée comme un garçon gentil, apolitique et pieu. Au signal – le Hamas endurait les représailles israéliennes à ses tirs de roquettes sur Sderot – il a mis dans un carton de téléviseur son fusil automatique, deux pistolets et des chargeurs, a téléphoné à sa copine pour une journée shopping le lendemain, puis a pris le volant vers le fameux institut Mercaz Harav du centre-ville. Il y a retrouvé son équipier (selon les premiers témoignages) et ils ont rafalé les jeunes sans mollir.

drapeau d'al-Qaïda
Il est intéressant de savoir les motivations qui emportent la décision d’entrer dans les brigades Ezzedine Al-Qassam du Hamas, ou dans une franchise Al-Qaïda quelque part dans le monde. Des études ont été menées aux Etats-Unis, peut-être à Guantanamo. Il en ressort que la misère, la superstition et l’illettrisme ne sont pas les fourriers du terrorisme islamique. Problème ! Il ne suffit pas d’apporter l’American Way Of Life aux pouilleux pour dormir tranquilles. Les djihadistes cherchent d’abord un but à leur vie, l’excitation d’une activité risquée et un statut dominant dans le milieu intégriste qu’ils ont pénétré. Notre société de consommation génère un ennui mortel pour les âmes embrasées qui ne peuvent s'accomplir dans le management à stock-options.

Plus intéressant pour nous est de savoir ensuite quelles sont les causes personnelles de leur défection. Car beaucoup quittent le schmilblick terroriste avant d’avoir connu les cent vierges à la fraîche fontaine murmurante. Le motif le plus courant de désertion est le décalage entre la vie fantasmée du chevalier sans peur et sans reproches et la réalité du quotidien militaire. Si l’exaltation survit au camp de formation – le programme est fait pour cela – elle périt sous les affres de l’anxiété jusqu’à la dépression quand le conscrit est remis en section de combat sur la zone d’effort. Les déserteurs enrobent cette vérité derrière des invocations coraniques qui interdiraient de tuer n’importe qui, ou une relecture des hadiths du Prophète. En réalité ils se dégonflent et c’est tant mieux.
Cet aspect nouveau du profil « djihadiste » a conduit une douzaine de pays* à mettre en route des « programmes de déradicalisation » pour leurs prisonniers afin de renforcer leur désenchantement, en commençant par une véritable instruction religieuse destinée à creuser le fossé entre le dogme et sa traduction terroriste. Le programme est complété d’une resocialisation professionnelle.

Les résultats sont mitigés car on s’aperçoit que les esprits ne sont pas tout à fait normalisés mais le pourcentage de récidivistes – ceux que l’on capture une nouvelle fois – est inférieur à 50%, démontrant que le pas est devenu difficile à franchir pour l’autre moitié qui a réalisé sa chance d’en avoir réchappé.

émeutes en FranceLes services occidentaux n’ont jamais pensé que les alqaïdistes montent à l’assaut à visage découvert. Si la queue de trajectoire est la guerre sainte généralisée pour aboutir au califat, l'analyse primaire voudrait qu'ils se noient parmi les masses musulmanes, jusqu’à ce que l'opinion publique des pays hôtes n’oblige les gouvernements à pénétrer ces communautés pour en extirper le mal, parfois brutalement, jusqu’à retourner l’ensemble des « croyants » contre Al-Qaïda. Ce serait le signal. Aussi craint-on que la jeunesse arabe désoeuvrée des cités ne soit utilisée comme supplétifs inorganisés dans l’affrontement permanent avec les forces de l’ordre, comme incendiaires ou tueurs, afin de désorganiser le semblant de défense passive que l’on tente de mettre en place, comme en France. A mon avis c'est le leurre. Je dirais même que c'est le leurre involontaire, celui que nous avons nous-mêmes créé dans nos obsessions sécuritaires simplistes.

Al-Qaïda est autrement averti pour ne pas s'embourber dans la fréquentation de « gangsters de pissotières », tous fichés. S’ils doivent sortir de leurs tranchées, ils viendront des tours de La Défense et non pas des tours des Quatre Mille ! Espion lève-toi ! A la sanctification du martyr succèdera l’appétit du pouvoir. Peut-être Jérôme Kerviel leur a-t-il donné des idées de destructions massives ?
Réagir ! Un coup d'avance pour l’Occident ? Commençons par mettre de l’ordre.
La résolution pleine et entière du plan de paix au Proche Orient dans les semaines qui viennent est incontournable. Dick Cheney ne peut faire l’impasse, car cette guerre sourde est la mère de toutes les guerres asymétriques du moment. Israël et l’Administration palestinienne avec un Hamas réintégré, doivent partager maintenant le territoire équitablement. Chacun chez soi. Chacun pour soi. La coopération économique indispensable aux deux états se fera toute seule au niveau des individus et des entreprises, sans qu’il soit nécessaire de protocoler des accords spéciaux.
Gaza bombardéeLe cirque sémitique a assez duré. Le monde est las de ces foutaises bibliques, le Hébreux, les Philistins, les Bédouins, les Arabes, et pourquoi pas les Hittites. Ces gens ont incapables de dépasser leurs antagonismes et offrir un avenir normal à leurs enfants. L'eau doit être partagée par une Agence de Bassin indépendante sous contrôle onusien, voire turc. Il faudra aussi vider les colonies juives et laisser le temps au temps pour une réinstallation pacifique des Juifs en Cisjordanie dans deux ou trois générations selon les intérêts particuliers des uns et des autres. C'est la même souche abrahamique si personne ne ment.
Pour sûr, il faudra forcer la paix.
A défaut de quoi, l'honneur de la maison Bush sera perdu.

Nota * : parmi ces pays, l’Indonésie, Singapour, l’Egypte, l’Arabie Saoudite, le Yémen, la Grande Bretagne et les Etats-Unis en Irak.





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samedi 15 mars 2008

Démocratie sincère

le Rieutord à SumèneLe scrutin municipal est sans doute le plus vieux de France. Si l'urbanisation romaine suscita l'émergence d'une classe de patriciens des provinces qui décidaient entre eux, c'est la création des communautés* (villes et bourgs) au sein des paroisses médiévales (territoire plus large alors qu'aujourd'hui qui découpait l'espace comme nos cantons ruraux actuels) qui recréa la démocratie locale. Et ceci dès l'octroi des Franchises Municipales arrachées au Seigneur Justicier entre le onzième et le treizième siècle.
Nota * : Les "communautés", héritières des "universités", devinrent des "municipalités".

Sous l'Ancien régime, on votait plus souvent qu'aujourd'hui dans les villes, pour une raison toute simple déjà : les syndics, plus tard consuls, étaient renouvelés chaque année. Sans entrer dans le détail de l'organisation municipale, voyons en quelques traits le fonctionnement démocratique d'alors, sur la base de la paroisse de Sumène en baronnie d'Hièrle.

Corps électoral : tout chef de famille résidant et propriétaire avait droit de vote sans distinction de sa position sociale ou de son sexe. En fait, les électeurs étaient dans leur grande majorité taillables, capitulés et frappés de la dîme, plus les indirectes ; aussi se sentaient-ils concernés par la chose publique.
Seul le Seigneur Justicier, même résident, et ses officiers, ne votaient pas. Mais ses biens roturiers dans la commune participaient à l'assiette fiscale de la communauté.

Votation : le corps électoral était convoqué au son de la cloche sur la place publique. Quand on estimait le quorum de la plus grande partie possible des habitants atteint, on procédait à l'élection de deux magistrats municipaux à main levée. C'étaient les Syndics qui devinrent plus tard Consuls. Pourquoi deux ? On en prenait un en agglomération (syndic de la ville), l'autre en campagne (syndic de la paroisse).
Au soir du régime, la procédure s'était raffinée. Sumène avait opté pour un Conseil Général de la Communauté dont les membres, ainsi que l'adjectif l'indique, étaient tous élus par les habitants et les manants. Il s'occupait de renouveler les consuls chaque année selon la procédure de "conseil politique" sur laquelle nous reviendrons un jour.
Intéressant : ces fonctions de consuls étaient obligatoires, et les biens des titulaires hypothéqués au profit de la communauté ! Imaginons une seconde le tollé général dans le landerneau politique des coeurs purs d'aujourd'hui !

Dimanche prochain, toutes les communes de France et d'outremer auront renouvelé leur conseil municipal. Les habitants convoqués un ou deux jours chaque six ans, auront choisi leurs édiles sur des listes mâtinées d'idéologies qui auront porté dans leurs villes des confrontations partisanes, souvent éloignées des enjeux locaux. La fenêtre démocratique se refermera ensuite, à moins de considérer les comités d'usagers ou de quartiers comme décisionnaires, ce qu'ils ne sont nullement. Ce sont des alibis consultatifs. Tous les partis en créent ; ça fait ... "peuple".

Cette démocratie locale n'est en rien sincère du moment qu'elle ne s'exerce que 2 jours sur 2191 et qu'elle est discutée par le pouvoir qui la modèle au gré de ses intérêts partisans, puisque issu par définition d'une fraction de la Nation. Ainsi à l'usage, son principe s'est-il avéré inefficace assez, pour qu'on promulgue une loi de fabrication du conseil municipal qui s'affranchisse du vote simple. Seuils de "représentativité", classes de recensement, deux tours pour valider les ententes et les combines aussi ; plus une prime exorbitante au premier arrivé, afin de lui garantir la mainmise indiscutable sur le gouvernement de la localité. La démocratie c'est bien, mais en abuser peut conduire à la foire d'empoigne ou à la banqueroute, surtout avec des citoyens maintenus dans une puberté politique par tous moyens, surtout médiatiques.
Le résultat du scrutin au suffrage universel est donc interprété d'autorité : la moitié des sièges va à la liste gagnante quelque soit son résultat, et celle-ci prend aussi le nombre de sièges dans la seconde moitié correspondant au pourcentage de voix obtenu. Pour coller à la réalité de la "politique", les règles changent au-dessus de 2500 habitants, puis de 3500 habitants, et changent encore pour Paris, Lyon et Marseille dont les conseils d'arrondissements députent au Conseil municipal de la grande ville.

Ennemi du caporalisme napoléonien par le souci d'une saine anarchie, ces disparités ne me gênent pas, sauf quand elles sont organisées par le pouvoir central au lieu de refléter le génie local.
Qu'est-ce une vraie démocratie sincère ?

Celle où l'on remet le choix politique entre les mains de ceux qui subissent le poids des décisions ; celle où l'on considère que le citoyen est parvenu au stade adulte pour oser agréger aux premiers également ceux qui en profitent. Celle où lorsque un blocage apparaît dans l'expression d'un choix par les édiles, il soit naturel sans grandes déclamations de préaux de faire trancher le différent par le peuple assemblé ou par référendum. Celle où la responsabilité du corps électoral soit au moins aussi grande que celle des édiles temporaires, jusqu'à faire remontrance aux uns comme aux autres. Celle où l'on consulte souvent. Démocratie directe ? Oui. Pagaille ! Pourquoi ? Education civique ? Certainement.

Le corollaire immédiat de la démocratie sincère est la nécessaire primauté du corps électoral sur l'administration. Celle-là capte naturellement le pouvoir par mille canaux de son fonctionnement quotidien. Elle est pire encore si elle est étrangère à la communauté et bénéficie d'un statut d'inexpugnabilité. C'est en 1692 que le roi vint s'immiscer dans les affaires communales en y créant d'autorité dans un but fiscal des charges vénales de maire, assesseur et procureur. Ce faisant, il pourrit le débat politique de premier échelon. Au niveau de suffisance dans l'insuffisance atteint ensuite par l'administration communale et d'échelon - on pourrait parler de tsarisation de la bureaucratie - il ne peut s'agir maintenant que d'abaisser son pouvoir, progressivement, pour laisser vivre la démocratie locale. Les rouages sociaux ne doivent pas l'emporter sur le moteur de la société qui leur permet de tourner, j'entends la production au sens le plus large. Qui sera assez fort pour mettre au pas les employés du corps électoral ?

mairie en campagne de haute Garonne
Maître Isidore Boiffils de Massanne, à la fin d’une longue vie d'observation des moeurs politiques de la nation concluait ainsi sur la fonction publique, sous Napoléon III :

« Les dignités, places et emplois publics ont été jusqu'ici la plaie de la France ; leur nombre et leurs avantages doivent être réduits au strict nécessaire tellement qu'ils ne puissent tenter la capacité de personne ; ce sera un travail occupant le moins possible de citoyens avec une rétribution juste mais modique. »
Que ne fut-il entendu alors, nous n'aurions pas le poids du mammouth étatique sur la poitrine des coeurs vaillants, ni une dette trillionaire qui prive les jeunes générations d'avenir.
Ce point est essentiel car le premier obstacle à la démocratie directe sont les "bureaux" que nous dénoncions dans un billet précédent.

Démocratie locale directe et sincère, voilà ce que le retour du roi doit promettre. Les "libertés en bas" ne doit pas être un slogan creux qui équilibre "l'autorité en haut", dans l'esprit de celui qui le proclame.
Si nous ne retrouvons pas nos libertés essentielles, à quoi bon ?


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mercredi 12 mars 2008

Bucintoro

pavillon dogal1798. Avaient déferlé sur l'Europe les hordes françaises de la Révolution apportant la Lumière. La ville natale de Don Juan n'en voyait pas l'usage ; mal lui en prit. Elle ouvrit l'année nouvelle en payant le prix fort pour les Pâques Véronaises (17 avril 1797) qui furent un soulèvement de résistance du peuple vénitien enragé, conduit par ses chefs naturels. Bien que vaincus une fois, ils ne s'étaient pas laissés impressionner par le "pirate génois", aussi talentueux à la guerre qu'il fut, et se mirent debout ! La résistance écrasée, l'aristocratie vénitienne détruite, le traité de Campo-Formio signé en octobre 97, des trains de mules à millier remontèrent vers la France les trésors artistiques de la République la plus prestigieuse du monde.
Trente-cinq mètres de long, 7 de large et 8 de haut, le Bucentaure n'était pas transportable ! Pour enfoncer dans le crâne rebelle des Vénitiens la marque indélébile de leur soumission, on le dépeça le 9 janvier 1798 de toutes ses ornementations qui furent mises en pièces pour les fondre sur l'île de San Giorgio Maggiore. Le feu dura trois jours pendant lesquels le peuple de Venise vit l'épaisse colonne de fumée emporter son prestige tout autant que le dogme révolutionnaire. "Ils" avaient brûlé le Bucintoro ! Avec lui l'Europe perdait sa dernière galère de parade. Venise ne serait désormais plus la Venise des doges.
Le 4 juin 1798 mourait Casanova ...

Sa carène fut abandonnée à la putréfaction, et, un temps armée de quatre canons pour défendre le Lido, moisit et disparut en 1824, démantelée à l'arsenal.

le retour du Bucintoro
Des sacs de ville l'histoire en connut beaucoup, et la France, tous régimes confondus, perpétra les siens. On a retenu comme notre dernier celui du Palais d'Eté de l'impératrice Tseu-Hi, qui fournit la "mise de premier équipement" en chinoiseries de toute la corporation d'antiquaires de Londres et de Paris après 1860. Fut-il réellement le dernier ?

Il est loin certes le temps de la chevalerie. On se bat toujours comme des chiens et "La Guerre Totale" de Ludendorff (1936) traîne encore sur les tables de chevet des cadets. La guerre est sans doute le domaine de l'activité humaine où il n'y a aucun autre progrès que celui d'accroître la létalité des moyens mis en oeuvre. L'esprit reste au niveau du Hun. Après ce point d'humeur, nous signalons au lecteur-contribuable que Venise vient d'envoyer sa facture.

Courrier International (copiez l'article car il va passer payant) nous apprend que la Sérénissime reconstruit le Bucentaure et serait honorée de notre mécénat en guise de repentir. On peut dauber sur la repentance, et je ne m'en prive pas, mais avec l'Italie notre compte est très débiteur, surtout si nous considérons cette nation comme notre mère :
Nous commençâmes avec Brennus en 390 avant JC et nous en rapportèrent le foie gras d'oie. Jusqu'à Napoléon, nous n'eûmes de cesse de puiser dans leurs musées pour équiper les nôtres. Les "échanges" furent permanents et durent encore : après les Médicis, la première dame de France du jour est encore italienne et bellissima ? La femme du commissaire Cordier aussi. Celle de Vincent Cassel pareillement. A choisir, Venise a finalement envoyé son courrier à Monsieur et Madame Sarkozy, à l'enseigne du Coq, avenue Gabriel, Paris 8è !

Le Bucentaure
La Fondazione Bucintoro nous apprend que le dernier Bucentaure était une haute galère dorée de 100 pieds de long sur 21 pieds de bau, deux ponts, armée d'une chiourme basse de 168 rameurs et de 40 hommes d'équipage. Commandée par un amiral, elle célébrait chaque année à l'Ascension le Mariage à la Mer où le doge en fonction jetait l'anneau nuptial au bout d'une remorque de soie dans l'Adriatique : «Desponsamus te mare, in signum veri perpetuique domini». La dernière fois ce fut en 1796. Le grand pavillon dogal au lion de saint Marc fut quant à lui enterré cérémonieusement le 23 août 1797.

la maquette d'or
Le Bucintoro sera reconstruit à l'identique à l'arsenal de Venise et lancé.
Après la renaissance de La Fenice incendiée, le Sérénissime renoue avec son prestige millénaire.
Qu'attend donc Marseille pour refaire une des neuf Réale produites par l'Arsenal du roi ? La chiourme barbaresque est déjà sur place en ressource innombrable. L'ami Gaudin en aurait bien besoin !

La Fête à Venise
Dix tableaux de Francesco Guardi sont accrochés au Louvre, évoquant les solennités organisées en 1763 lors de l'élection du doge Alvise IV Mocenigo qui est peut-être à l'origine de la commande, et font partie d'une série de douze. Guardi peindra les cérémonies du mois de mai 1763, ainsi que les fêtes qui suivront à différents moments de l'année. La série sera sans doute exécutée entre 1775 et 1780, d'après des gravures de Giambattista Brustolon (1712-1796) réalisées à partir de 1776 sur des dessins de Canaletto. Un aperçu en cliquant ici. Les deux tableaux manquants, le doge à San Marco et le doge sur la place San Marco, sont respectivement conservés aux musées de Bruxelles et de Grenoble depuis 1802.
Les touristes italiens feront un beau voyage.

La Réale de France


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lundi 10 mars 2008

Françafrique

Sgt PolinJean-Philippe Chauvin publie un billet intitulé Afrique appelant à continuer la Françafrique au motif de perpétuer la mission historique de stabilisation post-coloniale de la France envers le continent noir. Il a raison.
Charles De Gaulle, fondateur de la Françafrique, à défaut d'avoir pu continuer la Communauté Française, avait laissé ce message quand il quitta le pouvoir :
« Surtout, n'oubliez pas l'Afrique ! »
Il fut certes entendu de ses successeurs, qui au lieu d'assainir les relations douteuses tricotées par le commis Foccart entre la métropole et ses anciennes colonies, y cherchèrent leur avantage, au moins pour ce qui concerne Giscard d'Estaing qui bénéficiait des travaux et des jours de son père dans les mines et de ses cousins dans les banques, en plus d'une stupide relation cynégétique avec l'empereur Bokassa qui lui coûtera sa réélection, même si le mensonge était sous-jacent dans l'affaire des diamants ...

Mitterrand fit plus simple, et missionna son propre fils Gilbert comme son représentant et celui de la Françafrique en AEF. Il était connu sous le sobriquet de Papamadi - les Africains ont un humour acide - jusque dans les milieux pétroliers que j'ai fréquentés alors où certains ignoraient jusqu'à son prénom. Il a des dossiers chez les juges à Paris.
Le tricot ne cessa de se défaire quand Mitterrand prit le parti de la gouvernance démocratique, comme critère d'évaluation des transferts liés aux ajustements structurels.
Pour sauver les meubles, l'Elysée se mit à faire de la diplomatie au troisième degré inversé, à la limite du chantage, et finit sous la présidence de M. Chirac par trahir les accords passés (Côte d'Ivoire). Cela continue avec M. Sarkozy. A tel point que si les subventions au développement se tarissaient, les pays d'Afrique noire chasseraient la France qui a pris le visage d'un prédateur honteux, et imprévisible quand il s'agit de tenir sa parole. On ne peut fonder une relation africaine uniquement sur le fric, il y a toujours quelqu'un qui dans la pièce à côté en a plus que vous. Désolé, Monsieur Chauvin, on ne peut continuer la Françafrique en l'état.

Cne MarchandAu-delà de la motivation première qui était d'accompagner les colonies vers l'émergence en contrevaleur de leurs voix à l'Assemblée générale des Nations-Unies, le système d'accords bilatéraux prévoyaient de bon sens la concentration des crédits français vers les infrastructures administratives, scolaires et sanitaires en réduisant les budgets de défense nationale à leur plus simple expression par la conclusion d'accords militaires de coopération, en cas d'agression extérieure ou de mouvements de déstabilisation. Toutes les illustrations de ce billet sont militaires car ce domaine est le fonds de la question.

L'Etat RPR ne tint pas compte du projet gaullien, se créa une clientèle et utilisa l'Afrique comme une machine à salir l'argent par le système des rétro-commissions. Il corrompit la nomenklatura africaine dans des investissements immobiliers en France - une sorte de laisse - et pour finir, à chaque occasion de troubles dans ses ex-colonies, prit le temps de juger quel serait son meilleur cheval pour demain. Tout devenait personnalisé. Les accords ne valaient que ce que valaient les sympathies réciproques. On alla même jusqu'à déborder de l'épure et "annexer" le Congo belge et plus tard ses appendices prussiens du Rwanda-Burundi parce qu'on pensait du bien du maréchal Mobutu. Kolwezi 1978.

Ainsi quand le président Gbagbo, socialiste, chrétien par sa femme et ami de Lionel Jospin, subit une révolte armée par le Burkina Faso et renforcée des bandes libériennes chassées par les Anglais, au lieu d'envoyer les Jaguar incinérer la rébellion en invoquant les accords de défense, la France de M. Chirac jugea que le vainqueur n'était pas sûr. Elle s'interposa au motif de sécuriser les Blancs qui n'étaient pas encore menacés, protégeant ainsi la rébellion. Nous y sommes encore, après y avoir perdu beaucoup de prestige dans des opérations de gendarmerie bizarres et 9 marsouins, décimés le 4 novembre 2004 par la "chasse biélorusse" à l'heure de l'anisette.
Que faisions-nous Rwanda ? Je me pose encore la question, même si le comportement des unités françaises n'est pas du tout en cause.
Quelle est cette danse du ventre au Tchad ?
Et ce mini opéra-bouffe de l'Arche de Zoé ?
La rébellion au gouvernement légal tchadien provient du territoire soudanais et est équipée par Karthoum. A la première manifestation d'hostilité, il suffisait d'intervenir pour que toute la parade burlesque des technicals cesse dans l'heure. Au lieu de quoi, nos ténors ont jaugé, puis "parlé" au Conseil de sécurité, à Bruxelles, et in fine envoyé M. Morin faire des photos en gilet pare-balles ; on décrédibilise nos unités aux yeux des dirigeants africains et de leurs populations.

REPDepuis combien de temps nos armées n'ont-elles affronté un vrai combat ? C'est un cri que poussait le médecin chef Clervoy lors d'un colloque fin 2007 organisé par la revue militaire Inflexions(1) : « L'idéal de secourir a remplacé l'idéal de combattre" par la conversion des armées à l'Humanitaire, ce qui entame gravement la combativité des troupes au sol. Dès le contact par publicité interposée souvent, "l'engagement est présenté comme avant tout humanitaire, qui exclut la notion d'usage agressif des armes. Voici des verbes puisés dans le discours humanitaire: défendre, servir, secourir, aider, assister, soulager, protéger, approvisionner, transporter, bâtir, restaurer". Le médecin-chef Clervoy a noté "l'absence de verbes relatifs à une action spécifiquement martiale, c'est-à-dire concernant un ennemi désigné qu'il faudrait combattre, détruire, anéantir, percer, écraser, vaincre ». Une rupture se produit lorsque le soldat qui a adopté une posture humanitaire se trouve projeté dans une action de combat. Leur engagement n'est pas soutenu par un discours de combat". Assez préoccupant maintenant que nous avons une armée professionnelle. C'est peut-être cette baisse de vigilance qui a coûté la vie au sergent Polin la semaine dernière à la frontière soudano-tchadienne, mais plus sûrement le défaut d'agressivité de la chaîne de commandement qui est manipulée par les rigolos du cabinet Morin obsédés par le calme plat.

Imitons nos voisins britanniques qui, s'ils ne sont pas parfaits, savent jouer leur partition. Ils n'engagent leur infanterie que pour se battre, et elle est redoutée car réputée brutale, sans complaisance ni complications. C'est comme cela que la Sierra Leone(2) a pu renaître, et par ricochet le Liberia. A leur place nous aurions multiplié les conférences et compté nos dommages collatéraux.

Les OPS en surveillance
La France n'a plus les moyens de développer l'Afrique francophone par elle-même. Mais elle peut être le chef de file d'un syndicat européen de paix(3) et développement parce qu'elle est la dernière puissance autrefois coloniale à être imbibée par l'Afrique, à disposer de connaissances profondes de ses territoires et peuples, à reconnaître en métropole d'importantes communautés noires, et aussi à aimer l'Afrique pour ce qu'elle est. Mais afin de rassurer les pays africains comme nos partenaires aussi, il faut une démarche claire, non assujettie aux indications des girouettes plantées sur les tours du pouvoir parisien, et qui parfois ne donnent pas le même vent au même instant. Nous gagnerions beaucoup d'estime à nous abonner à la limpidité.
Sans doute notre franchise, si elle n'exclut pas la vigilance et le renseignement continu, convaincrait-elle nos amis africains d'y regarder à deux fois avant de céder aux sirènes chinoises, qui ne les protègeront jamais de rien. Une limpidité diplomatique exige une permanence de l'axe d'effort, ce que le système républicain ne garantit nullement. C'est là le hic. On reconstruit l'oeuvre à chaque mandat présidentiel.

Nota 1.: Le premier numéro de cette revue est présenté ici.
Nota 2.: Opération Pallister de mai 2000 où la Royal Navy vint au secours de la Sierra Leone avec 8 navires de guerre et une infanterie de 2000 hommes.
Nota 3.: On peut lire le Rapport A/1880 de l'Union de l'Europe Occidentale de 2004 sur la perception européenne du maintien de la paix en Afrique.



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samedi 8 mars 2008

Municipales

Royaliste et Français toujours, j'irai voter dimanche à l'élection municipale de ma commune. La démocratie de proximité est le mode de choix politique le plus adapté au monde gaulois, même si elle lève aussitôt un pavois pratiquement inaccessible. Au moins, les choix sont-ils exprimés en connaissance de causes.

Comment voter ?
Je n'ai aucun regard pour l'idéologie portée en bandouillère par telle ou telle liste sauf si elle composée à l'évidence de branquignoles, pour une raison simple : Les conseils municipaux ont aujourd'hui les mains liées par la dette communale, les lois et règlements qui pullulent et dictent la gestion municipale, les difficultés de refinancement auprès d'organismes soupçonneux et pour finir, des dotations d'équilibre en peau de chagrin, le pays étant au seuil de la banqueroute.
Ainsi passée la première réunion tonitruante du nouveau conseil municipal, on se calme et on sort la calculatrice ...

Critère n°1. Le réalisme.
Je fais plus attention au programme, y cherchant de traces de sérieux sans verser dans la compoction tout de même, comme certaines listes de droite diverse s'y complaisent. Il faut souvent creuser un peu plus loin que la profession de foi qui de niaiseries en banalités vous tombe des mains. Elle est écrite pour aguicher le gogo, c'est normal, basique en démocratie. Et ce n'est pas si difficile, si vous vivez depuis quelques années sur la commune et ne faites pas qu'y revenir coucher le soir.
Gardez à l'esprit par exemple que des aménagements ronflants sous-entendent souvent des créations ou détournements de substructures ou réseaux existants qui exploseront le budget. De même posez-vous la question de savoir si certains projets de développement rencontreront un besoin réel ou s'ils sont un simple affichage politicien ? Tout est question de bon sens, c'est vous qui payez la taxe d'habitation et la taxe foncière, plus les parcmètres.

Critère n°2. La gestion de la dette.
Une question très importante est l'état des finances municipales. Les "bilans" publiés dans le mensuel du maire sont en général expurgés de détails intéressants et édités à travers le crible de rubriques inodores ; il faut en ce cas faire confiance à un conseiller municipal qui dispose lui du vrai bilan en clair.
Dans ma commune, un candidat à la mairie, conseiller d'opposition sortant, a détecté que les garanties que la ville a données à des organismes publics de logement social intervenant sur la commune, dépassaient son niveau d'endettement constaté au même moment, niveau déjà préoccupant. Ce qui veut dire - parce que si on ne l'explique pas, personne ne comprend - qu'en cas de faillite d'un organisme immobilier, comme à Mantes la Ville par exemple, c'est la commune qui se substitue à lui pour éponger ses dettes, ainsi qu'en dispose la loi.
Or la dette de ma commune - accumulée à l'époque de l'Union de la Gauche sur des infrastructures démesurées du modèle soviétique - est aujourd'hui servie (paiement de ses intérêts) par l'emprunt, comme le fait chaque semaine le gouvernement de la République qui donne à tous le mauvais exemple. Ainsi puis-je comprendre que la résorption de la dette soit une priorité et que des aménagements lourds ne seront possibles que plus tard. Tous les programmes électoraux qui lancent de "grands projets" ne sont ici que de l'affichage. Je trie ainsi facilement parmi les professions de foi.

Critère n°3. La disponibilité intellectuelle.
C'est la question du cumul des mandats. Est-il préférable que le maire soit député ou sénateur ? La députation ou son lot de consolation gérontologique, le Sénat, n'est pas une promesse de simplicité, ni d'accessibilité de l'édile. Certains installent en mairie un vrai "cabinet politique" qui sert de paravent chinois et de lampe à mouches tout à la fois, et passent la gestion "locale" au premier adjoint. On ne peut savoir si la confrontation des intérêts communaux et nationaux aboutit à sauvegarder les premiers. Des exemples précis m'indiquent que non. A la rigueur, que le maire soit conseiller général, voire conseiller régional, peut être utile. Dans les étages supérieurs il y a doute.

Critère n°4. La prise de risque personnel
Mon dernier critère est ultra-simple. Principalement pour le risque financier couru par les habitants d'une commune endettée, je demande à "mon" candidat, non seulement d'habiter sur ma commune mais aussi d'y être propriétaire. Or on s'aperçoit vite en posant quelques questions que la plupart des têtes de liste ne vivent pas ici, sauf à disposer d'une modeste garçonnière en location pour la boîte à lettres et plus si le démon de midi ... Sans doute se prévoient-ils des destins nationaux. Je soutiens donc un candidat foncièrement attaché à sa propre gouvernance.

Ainsi ma sélection sur quatre critères laisse-t-elle devant moi la liste conduite par un conseiller régional FN. J'aurai pu tomber sur un PCF, un centriste ou un Vert ou tout autre animal de la ménagerie politique. Dont acte !

En, attendant lisez l'Action Française ...



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vendredi 7 mars 2008

Union méditerranéenne

2000
L'appel de Rome du 20 décembre 2007, lancé par l'Italie, l'Espagne et la France, invite l'ensemble des chefs d'états et de gouvernements des pays riverains de la Méditerranée et des pays de l'Union européenne, à se réunir les 13 et 14 juillet 2008 à Paris. Il vient d'être approuvé par l'Allemagne à Hanovre. Ce sommet permettra de définir leur vision commune et les contours des projets qui seront mis en œuvre dans l'espace méditerranéen sous l'égide de l'Union Pour la Méditerranée.

M. Sarkozy, présidentAu départ, le "candidat" Sarkozy évoquait une "Union méditerranéenne" sur le modèle de l'Union européenne, dont la vocation subliminale était de désamorcer l'amertume de la Turquie repoussée derrière le Bosphore. L'UM aurait eu un conseil décisionnel, le "Conseil de la Méditerranée" et un système de sécurité collective qui, selon le ministre-candidat, "lui permettrait de garantir la paix autrement que par la course aux armements et l'intimidation", sans oublier une "Banque méditerranéenne d'investissement" à l’image de la BCE, qui financerait les projets communs à tous les pays membres de cette nouvelle Union. Elle serait basée sur trois piliers politiques : une politique commune d'immigration choisie, une stratégie écologique avec une gestion commune de l'eau et enfin une politique commune de co-développement. Et pour bien cerner l'épure, il était convenu que seuls les pays mouillés par Mare Nostrum participeraient.
Et le ministre-candidat, qui devait dormir pendant les cours d'histoire-géo au collège, de nous enfoncer cette porte ouverte : "L'avenir de l'Europe est au Sud. Nous avons trop longtemps tourné le dos à la Méditerranée".
Hors de son parrainage tout avait échoué, tout était à refaire. Nicolas Schuman Sarkozy sonne de l'olifant, ce qui les gonfle beaucoup à nos cousins germains qui y voient une de ces grandes lubies gaulliennes ressurgie du tombeau de notre banqueroute ! Ils n'ont pas fini de s'agacer car il ne reste que ces vessies à souffler pour la présidence française de l'UE qui approche, avec celles de la défense européenne dans laquelle nul ne veut mettre un cent.

Cette Union méditerranéenne entamait le périmètre de l'Union européenne (et de l'Allemagne), sans l'implication du Conseil européen (dont l'Allemagne) mais était subventionnée bien sûr par l'UE (l'Allemagne). Autant dire que le coq impécunieux avait levé son regard vers l'Aigle noir, et qu'il était urgent de se raccomoder avant le 14 juillet 2008. On le fit à Hanovre le 3 mars dernier. Après la rencontre entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, la présidence française a publié un communiqué du style faux-cul masquant son triomphe tout en le brandissant. La chancellerie s'est contentée du service minimum de bon voisinage, l'UPM ne l'intéresse pas, mais elle ne le dit pas. D'autant qu'elle a compris qu'elle devrait assurer l'ordinaire du projet.
MerkelMerkel est fille du Brandebourg et ses idées de vacances seraient plutôt Gothenburg, Kristiansand, Bergen, Copenhague ou Amsterdam plutôt que Bénidorm, Marrakech ou Louxor, à cause des mouches. Que veut-dire maintenant cette convocation au projet de l'ensemble des pays de l'UE et d'autres pays excentrés s'il ne s'agit pas de délayer l'influence française ? Foin des soupçons, Il est content.
Que le Processus de Barcelone ait avorté ne freine aucun enthousiasme à Paris. Nos deux partenaires latins gardent le sourire, l'air convenu, pour ne pas être débarqués du projet si d'aventure il s'amorçait favorablement pour les appels d'offres à leur industrie. Voyons de plus près.

L'Espagne est très présente en Algérie et au Maroc. Bien que les problèmes s'agravent avec le royaume chérifien, celui-ci se débat dans un sous-développement chronique sans reconnaître sa qualité de mendiant pour accepter les réformes de structure indispensables au moins à sa fierté. L'Espagne reçoit le premier choc provoqué par l'incurie. Elle perçoit, comme en Algérie d'ailleurs, les besoins à satisfaire et les trouvent énormes rapportés aux prévisions démographiques et au niveau de pression migratoire. Au-delà des mots, comment faire face, sans maîtriser la gabegie, la corruption et sans affronter aussi l'islamisme ? Placée au front, elle redoute qu'on n'exige d'elle des contributions importantes qui lui feront défaut ailleurs, quand le miracle espagnol s'évanouira ; c'est pour très bientôt. L'intérêt de toute l'Union européenne à financer le projet sarkozien ne semblant pas déclaré pour le moment, l'Espagne attend et repêche les pauvres hères.

CavourL'Italie est un partenaire important de la Tunisie, de la Libye et de l'Egypte. Elle écoute sourdre en elle une vocation mercantile sur tout le bassin oriental de la Méditerranée où elle n'a pour concurrent que la Turquie. Lors de la dernière affaire libanaise, elle a su placer ses billes pour la fournitture de troupes onusiennes en tampon - jusqu'à vexer Chirac qui lui refusa l'armée - laissant comprendre à tous que, disposant déjà sur zone des facilités de la VI° flotte de l'US Navy et du commandement OTAN associé, le bassin oriental devenait sa zone naturelle d'influence. C'est du pur Mussolini. La France - qui se proclame l'ami du Liban et se conduit comme son tuteur cacochyme - a pris le visage de Kouchner le ludion et ne fait pas "sérieux". On pouffe ! Nous ne pourrons donc pas entamer les positions acquises par l'Italie qui laisse croire habilement qu'elle dispose de la Force. Elle attendra pour voir, comme le fait l'Espagne, mais considérera l'UPM favorable à l'affirmation de son influence, car elle sera soumissionnaire sur tous les projets de développement du Sud.

Sautons les Balkans et la Grèce qui ont d'autres soucis au moment, et arrivons à la Turquie : sépia AtaturkSi les Turcs ne sont pas des Européens, ils n'aspirent qu'à le devenir ; et bien plus qu'en entrant seulement dans les institutions de l'Union. Leur marche vers le couchant commença au VIè siècle dans la poussière de la grande steppe, elle s'interrompit devant Vienne en 1683, mais le moteur ne s'est jamais éteint, il pousse encore. L'Europe occidentale est leur Terre Promise ; peut-être atteindront-ils un jour la mer en remontant le Rhin. La partie bronzée de l'Empire ottoman fut le résultat de circonstances mais jamais un axe d'expansion. L'Afrique du Nord ne fut jamais une obsession turque ; ils la colonisèrent pour le tribut non pour la développer, pour la mépriser aussi.
Leurs "impatiences" furent toujours tournées vers «l'Europe au-delà des Balkans» qu'ils avaient phagocytées.
Quand la Communauté européenne prit forme, ils furent parmi les tout premiers à venir à Bruxelles poser leur candidature. Pour faire court, les Turcs ne se sentent aucune attache morale et même religieuse avec le Moyen-Orient arabe, ni avec la Méditerranée arabe, c'est un peuple d'origine steppique, une cavalerie et une infanterie, pas une marine phénicienne. Pour cette raison, l'UPM ne les intéresse pas, surtout si elle leur est présentée comme un lot de consolation, français qui pis est. Vivre avec les Arabiaques, non merci ! Il est sûr maintenant que M. Sarkozy dormait aux cours d'histoire-géo.

al AtassiEn dessous de la Turquie, dans son ombre, à portée de ses armées, viennent les Echelles du Levant. Il faut une foi de Titan pour penser une seconde agréger dans des projets communs l'orgueilleuse Syrie baathiste, les Libans qui se consument à feu doux, l'intrus historique juif et ses anticorps palestiniens, en cherchant en plus le renfort de la Jordanie qui se méfie de tous car multi-ethnique et enclavée. Mais rien ne semble dissuader M. Sarkozy d'avancer sur cette route désertée par tous les gouvernements sensés de la planète. Vous allez voir ce que vous allez voir ! Posture gaullienne sans la stature ni le képi. Je doute que beaucoup de pays européens viennent sur le coup et qu'Israël en veuille autant que lui. L'UPM ne sera pas non plus "la" solution à ce conflit local qui tourne à la guerre de cent ans et auquel nous nous sommes complètement habitués, comme la Rue arabe d'ailleurs.

ZaghloulL'Egypte par contre sera intéressée, parce qu'elle a vocation, grâce au canal de Suez, à faire le lien entre l'Asie du Sud et Sud-est et le bassin méditerranéen, et qu'elle dispose d'une industrie qui tournerait mieux sur un marché solvable plus large. Elle est d'ailleurs dans la même attente douanière que la Turquie.
A l'ouest de l'Egypte, quatre pays forment le grand Maghreb, un désert pétrolifère (Libye) et les trois pays de l'ex-AFN dont le plus intéressant est la Tunisie, car le moins complexé et le mieux administré. Ces quatre pays, avec le renfort de la Mauritanie ferrugineuse, ont déjà formé l'UMA en 1989, Union du Maghreb Arabe. C'est une coquille vide qui a le mérite d'exemplifier le déni de toute coopération volontaire entre ces pays arabes (et maures).

Croit-on à Paris pouvoir les forcer dans une structure plus grande ? Ils n'attendent du projet UPM que le débondage de crédits sur lesquels ils grefferont leur nomenklatura comme du lierre. Tout le monde sera bien sûr plus riche dans quinze ans avec de l'immobilier à Dubaï, Macao ou Brisbane ; et vive donc ce projet gigantesque de l'excellent monsieur Sarkozy.

L'intention, comme chaque fois, est louable mais se berce d'illusions. Réveille-toi Guaino ! L'avenir de l'Europe n'est pas au Sud plus qu'ailleurs, mais le danger vient du Sud. Est-il avisé de vouloir fédérer la rive sud de la Méditerranée ? A me lire, sans crainte aucune, puisque les antagonismes ruineront le volet politique du projet. Mais qui commande au futur ? Pourquoi ne se lèverait pas un jour un Abd-el-Kader capable de précipiter une partie du monde arabe dans une structure de pouvoir cohérent ?
Si je ne crois pas à la pérennité de la conquête islamique que certains agitent comme un épouvantail jusqu'à chercher des mosquées dans les placards à balais, je ne peux faire l'impasse sur une conjugaison religieuse d'un hypothétique pouvoir émergeant. Le despotisme chérifien, la clique mafieuse algérienne, le cabinet prussien de Tunisie, les campeurs de Libye, ne sont pas prêts à s'entendre, pas même sur notre dos. Abdel KaderMais leurs enfants, s'ils ne sont pas gâtés par les loukoums et les Rolex, risquent peut-être de converger. C'est ça aussi la Globalisation. Ne précipitons rien, laissons-leur le temps, fournissons-leur des équipements pour se développer contre des matières premières , mais ne poussons pas les feux, au motif de non-ingérence tout simplement.
Et dans la préparation d'une confrontation que nous ne souhaitons pas, mettons de l'ordre chez nous afin de retrouver les forces nécessaires à une figuration honorable dans le conflit que l'on dit ramper vers le "Nord". Sauf à téléphoner une fois de plus à Washington ! Trois fois en 100 ans ça peut faire beaucoup.


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