jeudi 24 mai 2007

Trois bouquins plus un

Petit article bibliophilique sur des ouvrages que j'ai croisés et qui au moment me paraissent "indispensables". Commentaires de lecteurs appréciés ainsi que le signalement de certains livres peu communs qui vous ont plu.

L'OURS (Pastoureau)
De Berne à Berlin jusqu'à la baronnie d'Hierle, notre "laboratoire médiéval", l'ours est l'emblème de la force régalienne sur un territoire dédié. Un ouvrage s'attache à décortiquer cette "humanisation" d'un animal quasiment mythique, au point de soulever des passions extrêmes quand il s'agit de lui rendre son bien, dans les Pyrénées spécialement !

Ce qu'en dit la Librairie Histoire:

couverture de l'oursLongtemps en Europe le roi des animaux ne fut pas le lion mais l'ours, admiré, vénéré, pensé comme un parent ou un ancêtre de l'homme. Les cultes dont il a fait l'objet plusieurs dizaines de millénaires avant notre ère ont laissé des traces dans l'imaginaire et les mythologies jusqu'au cœur du Moyen Âge chrétien. De bonne heure l'Église chercha à les éradiquer. Prélats et théologiens étaient effrayés par la force brutale du fauve, par la fascination qu'il exerçait sur les rois et les chasseurs et surtout par une croyance, largement répandue, selon laquelle l'ours mâle était sexuellement attiré par les jeunes femmes. Il les enlevait et les violait. De ces unions naissaient des êtres mi-hommes mi-ours, tous guerriers invincibles, fondateurs de dynasties ou ancêtres totémiques.

Michel Pastoureau retrace les différents aspects de cette lutte de l'Église contre l'ours pendant près d'un millénaire : massacres de grande ampleur, diabolisation systématique, transformation du fauve redoutable en une bête de cirque, promotion du lion sur le trône animal. Mais l'auteur ne s'arrête pas à la fin du Moyen Âge. Inscrivant l'histoire culturelle de l'ours dans la longue durée, il tente de cerner ce qui, jusqu'à nos jours, a survécu de son ancienne dignité royale.

Le livre se termine ainsi par l'étonnante histoire de l'ours en peluche, dernier écho d'une relation passionnelle venue du fond des âges : de même que l'homme du Paléolithique partageait parfois ses peurs et ses cavernes avec l'ours, de même l'enfant du XXIe siècle partage encore ses frayeurs et son lit avec un ourson, son double, son ange gardien, peut-être son premier dieu.

23€, 419 p., le Seuil 2007


LA CRISE DU MONDE MODERNE (Guénon)
La confusion qui dérègle les esprits en Occident avait été traitée en son temps par l'orientaliste érudit René Guénon. La collection Folio n'est pas chère et c'est le moment de se replonger dans cet opuscule paru en 1994.

Ce qu'en dit le site René Guénon:

couverture de La CriseCet ouvrage est le plus important de tous ceux qui traitent de la crise de l'homme moderne.
L'auteur montre les causes profondes, qui ont amené le monde moderne dans les difficultés de toutes sortes dont il est incapable de sortir : individualisme intellectuel, matérialisme, subordination de la connaissance à l'action, suprématie du temporel sur le spirituel.

S'il dénonce le mal, René Guénon montre aussi la remède : avant toutes choses, il faut provoquer un redressement intellectuel qui aura ensuite sa répercussion dans tous les domaines de l'activité humaine. Ce redressement ne peut être obtenu que par un retour à l?esprit traditionnel qui, jusqu'aux temps modernes,a constitué la base et l'armature de toutes les civilisations.
Il est urgent qu'une «élite» véritable se reconstitue en Occident pour travailler à ce « Grand OEuvre » ; ce livre permet d'entrevoir comment on pourrait y parvenir.

6,60€, 208 p., Gallimard, collection Folio (250)

L'ESPRIT DE LA LETTRE (Thora van Male)
ou la vie secrète de l'alphabet

Ce qu'en dit l'éditeur:

couverture de l'espritL’alphabet exerce une fascination impérissable sur notre monde, et les jeux à base de lettres y foisonnent. "L’Esprit de la lettre" constitue un voyage à travers ce que Thora van Male appelle « la vie secrète » des lettres, et dévoile de multiples informations sur chacune de ces entités alphabétiques. En vingt-six chapitres, vous ferez connaissance avec les facéties, les aventures, mais aussi les zones d’ombre de chaque lettre. Par exemple : que signifiait le code « G » chez les notaires ? (J’ai : je prends pour moi) ; ou quelle est la lettre la plus jeune de l’alphabet français ? W : à peine 130 ans.

À la fin de chaque chapitre, un alphabet particulier
– poétique, prononcé, européen, corporel…
– ponctue cette découverte érudite et ludique de ces signes que nous pensions si familiers.

15€, 144 p., Editions Alternatives 2007, en librairie le 14 juin


Pour terminer un livre passionnant, rescapé d'un vide-grenier.

TRISTAN ET ISEUT renouvelé par Joseph Bédier (1864-1938)
(285 p. broché, Piazza éditeurs, Paris 1900)

Tristan et YseutMédiéviste d'excellence, l'auteur prit le parti de la langue courante pour restituer à l'oreille de l'homme moderne le souffle de ce fabuleux roman. Il a eu raison, ô combien, l'ouvrage recomposé à partir des fragments originaux existants aujourd'hui est un véritable thriller que finalement j'ai redécouvert après en avoir lu la version "érudite" et un peu rugueuse dans mon jeune temps !

Il est formé d'un base composite d'environ trois mille vers de Béroul, autant de Thomas et quinze cents vers anonymes, plus un travail archéologique dans l'indigeste fatras de la geste en prose, grossie par ses rédacteurs successifs, pour en extraire les débris précieux de vieux poèmes perdus. Les versions de Chrétien de Troyes et de La Chèvre ont péri en entier. Pour obtenir l'unité de ton, Bédier a privilégié les trois mille vers de Béroul et s'est attaché à traduire le reste dans ses couleurs.

C'est donc un poème du XIIè composé au XIXè qui se lit d'un trait, tant le scénario est inventif, rapide et libre de moeurs.

"On arrive à entrevoir ce qu'a pu être chez les Celtes ce poème sauvage, tout entier bercé par la mer et enveloppé dans la forêt, dont le héros, demi-dieu plutôt qu'homme, était présenté comme l'inventeur de tous les arts barbares, tueur de cerfs et de sangliers, savant dépeçeur de gibier, lutteur et sauteur incomparable, navigateur audacieux, habile entre tous à faire vibrer la harpe et la rote, sachant imiter jusqu'à l'illusion le chant de tous les oiseaux, et avec cela, naturellement, invicible dans les combats, dompteur de monstres, protecteur de ses fidèles, impitoyable à ses ennemis, vivant d'une vie presque surhumaine, objet constant d'admiration, de dévouement et d'envie. Ce type s'est formé à coup sûr très anciennement dans le monde celtique : il était tout indiqué qu'il se complétât par l'amour".
(extrait de la préface de Gaston Paris)

Dès que j'aurai un vrai scanner, je le mettrai en ligne.

1 commentaire:

  1. Bonsoir,
    Oui ça m'intéresserait d'obtenir une copie de cet ouvrage. Je vous passe mes coordonnées par e-mail.

    Merci d'avance.
    Michel

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