On parle beaucoup ces temps-ci d'instiller la proportionnelle sur les bancs de l'Assemblée Nationale. L'hémicycle est un reliquaire de la souveraineté non dévolue à Bruxelles, qui a été transformé en boîte à claque au bénéfice de l'Exécutif. Pour y parvenir, les fondateurs de la V° République avaient tordu le système électoral de la démocratie représentative en tous sens afin de forcer une majorité confortable au Premier ministre quoiqu'il advienne, et quand bien même la moitié du corps électoral, voire plus, n'y serait pas représentée. La Maison des Citoyens n'est pas la maison de tous les citoyens. Qui a dit : « La France est une République, pas une démocratie. Tous les pouvoirs sont concentrés » ? L’actuel ministre de la Défense !
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On sent aujourd'hui un blème, car il y a trop de monde en dehors de la république, qui finiront bien par un jour la miner. Alors on pense à se racheter moralement avec l'annonce de la Proportionnelle, sans toutefois mettre à mal les avantages acquis des titulaires. Or 30 sièges sur (ou en sus de) 577 est une moquerie.
Il n'est de représentation populaire honnête qu'à la proportionnelle intégrale. Ses adversaires, qui sont tous des "sortants", propulsent contre elle le missile de l'indispensable maîtrise budgétaire du gouvernement dans son volet législatif. Il est vrai que l'instabilité de la Quatrième créa une vraie légende anti-parlementaire, sans qu'on ne se demande vraiment pourquoi cette maîtrise ne fut pas assurée sous ce régime. Parce que les députés y étaient "rois", la fameuse souveraineté, et animés d'un esprit partisan ancré dans les prébendes et la carrière ! L'expérience de la liquéfaction de la Troisième ne fut apparemment pas transmise, du moins l'envie, ressort de la démocratie selon Proudhon, fut la plus forte.
Avant tout développement (modeste quand même) disons que les démocraties sincères sont à la proportionnelle, parce que les députés y sentent le poids de leurs responsabilités sur leurs épaules. On y voit moins souvent que chez nous de grandes séances de chahut avec claquement général de pupitres dans l'hémicycle. Nos députés sont indignes et grassement défrayés pour ces enfantillages. Incapables en plus de coalitions, l'idéologie étant première servie, après la poche quand même, ainsi que nous le montre le Nouveau Centre* des fuyards, qui veut faire altérer la loi de capitation d’1€63 et ignorer ses maigres résultats.
Pour prévenir l'instabilité ministérielle, il y a des mesures simples que connaissent nos voisins ou d'autres démocraties plus exotiques. On pourrait les adapter chez nous.
Première mesure coercitive : La censure parlementaire ne pourrait être par exemple déposée que par un pseudo-cabinet ministériel de substitution ; ce qui veut dire que si un ou plusieurs groupes parlementaires veulent censurer le gouvernement, ils doivent former un "shadow cabinet" capable de prendre les affaires en charge immédiatement si la censure est votée. Très bon exercice pédagogique pour ces grands enfants un peu retardés (comme aurait dit Villepin).
Seconde mesure coercitive : Pour la formation des coalitions nécessaires à la constitution d'un gouvernement viable en régime proportionnel, on pourrait aussi édicter qu'à la troisième tentative infructueuse la Chambre serait dissoute de plein droit ET les députés sortants inéligibles pour cinq ans, au juste motif d'avoir fait passer l'intérêt partisan avant l'intérêt général.
Reste à rédiger le code électoral de la proportionnelle. Listes nationale ou listes de circonscription, loi des restes, etc., mais je vois plus d'avenir à ce système qu'à celui de la représentation équitable par collèges de l'Alliance Royale, car il a l'avantage de conserver le vieux principe d'un homme une voix, de même valeur; alors que la constitution des collèges démultiplie le parlementarisme jusqu'au niveau de la circonscription départementale avec cette fois des ambitions hégémoniques possibles par la double représentation. Quid aussi du cumul néfaste des mandats ?
Dernière remarque pour la proportionnelle : Dans la mesure où le domaine régalien serait retiré aux joutes parlementaires, est-il si grave que la recherche de consensus prenne plus de temps que dans le système majoritaire actuel ?
Nous arrivons maintenant au collège Balladur de censure présidentielle des cent mille. Cette fantaisie gaullienne d'élire le chef d'Etat au suffrage universel direct pour court-circuiter les appareils politiques professionnels, a conduit à remettre dans les mains de la nomenklatura médiatique la formation de l'Opinion. Tout est bon pour la tirer dans un sens ou l'autre. A tel point que pour trier les pitres candidats qui se bousculaient sur les lucarnes, on a inventé les parrains, puis la délation, et maintenant le premier tour "censitaire" avant le premier tour populaire.
Si l'on veut garder au citoyen son mot à dire - il en est si fier le pauvre - ne serait-il pas astucieux de revenir au système antérieur d'élection présidentielle par le Congrès, suivi dans la foulée par un référendum de confirmation. Cela ne ferait jamais que deux tours. Et si le Congrès ne parvenait pas à "sortir" un président, il suffirait de le dissoudre avec la clause d'inéligibilité précitée.
*En sortant du Palais ce matin, un peu distrait par le déhanché d'une apparitrice qui me précédait, j'ai glissé sur un morin. Mais du pied gauche ça porte bonheur.
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Porte ouverte aux communautarismes, ainsi qu'aux disputes si des partis réputés indésirables reviennent en force dans l'hémicycle...
RépondreSupprimerTout le système doit être revu, chaque voie expérimentée ayant échoué.