lundi 12 janvier 2009

Bye bye Mister Bush

Kinsley du TimeDans huit jours s'achèvera l'une des présidences les plus calamiteuses des Etats-Unis si ce n'est la pire après celle de James Buchanan peut-être (1857-1861). Le bilan est lourd et plutôt que de le tirer depuis Paris, j'ai préféré m'en remettre à à un observateur privilégié de Washington, Michael Kinsley, dont je traduis ci-dessous l'article commis dans le Time daté d'aujourd'hui, par le procédé de la belle infidèle.
Beaucoup excusent les ratages et désillusions de l'Administration Bush par le Onze Septembre. Il fonde aussi un des plus grands éloges faits de Georges Bush : au moins a-t-il protégé du terrorisme les Etats-Unis. Dans les sept années qui ont suivi, il n'y a eu auccune autre attaque terroriste de source étrangère sur le sol américain. Le problème est qu'il n'y eut non plus aucune attaque terroriste pendant les sept années qui ont précédé le Onze Septembre. Ce n'est pas le risque d'une nouvelle attaque qui s'est accru le 11/9 mais la perception de ce risque par les Américains. L'Administration Bush qui prit ses fonctions en se moquant de l'inquiétude (de son prédécesseur, ndlr) que quelqu'un puisse faire sauter la Maison Blanche, la fit sienne assez vite¹...

La plateforme sur laquelle Bush gagna la présidence il y a 8 ans vient d'un monde perdu, dans lequel même le parti débouté voyait une Amérique de prospérité et sécurité intouchables. "Les rêves les plus fous d'hier deviennent les réalités d'aujourd'hui, sans limites posées aux promesses de demain" claironnait le Parti Républican. Le même parti écrivait en 2000 que le plus grand défi de l'Amérique en politique étrangère était d'éviter d'abuser de son énorme puissance. La plateforme déclarait que "les générations précédentes avait défendu l'Amérique à travers de grandes épreuves", pour citer ensuite le candidat républicain, Bush, sur l'importance de montrer "la modestie propre à la force véritable, l'humilité de la vraie grandeur". Même les thuriféraires de la politique étrangère de Bush ne pourrait maintenant la décrire comme diffusant l'humilité de la vraie grandeur, mais plutôt le bellicisme propre à la grandeur perdue. Tout ce discours sur une seule superpuissance - les Etats Unis - dominant un monde "unipolaire", semble aussi daté que les rediffusions de la série Seinfeld.

Bush et Cheney
La faillite de Bush comme président n'est pas dans le manquement à ses promesses ou dans ses buts inatteints. Tous les hommes politiques manquent à leurs promesses et aucun n'atteint tous les buts visés par sa rhétorique incantatoire. Mais Bush ressort du lot pour avoir abandonné celles des promesses et buts qui l'ont fait élire, avoir repris leur contraire, pour ensuite faillir à tenir ou atteindre celles-là.

En 2000 Bush dénonçait son prédécesseur pour avoir lancé des guerres sans issue stratégique. En 2008 il laisse à son successeur une guerre qui a déjà duré plus longtemps que l'engagement américain dans la Seconde guerre mondiale, avec aucune sortie en vue. Bush fut élu en mettant en garde contre l'utilisation des troupes US dans le nationbuilding² - à savoir tout but dépassant la nécessite militaire immédiate. Une fois installé, il promit d'apporter la démocratie à tout le Moyen-Orient pour finir par la destruction de l'Irak au prétexte de le sauver.
Bush quitte la scène en justifiant encore le désastre irakien sur la base de rapports d'espionnage montrant que Saddam Hussein disposait d'armes de destruction massive. Il reconnaît que ses rapports étaient erronés mais maintient qu'il s'y est fié de bonne foi. Qu'est-ce que ça peut bien faire ? Ce qui compte n'est donc pas de savoir s'il y avait des ADM, mais s'il était sincère en y croyant. Ces ADM furent la justification de la guerre. Comment expliquer aux familles des victimes de la guerre que celle-ci puisse continuer des années après que celui qui l'a déclenchée pense que ce déclenchement part d'une erreur ?

Les calamités économiques actuelles ont été un coup de tonnerre pour beaucoup ce ceux qui auraient dû mieux réfléchir, mais un seul d'entre eux a été en poste pendant les huit années précédentes. Un seul passa le meilleur de son temps à se vanter que tout était formidable, grâce à lui. Beaucoup partageait l'imprudente hypothèse qu'il n'y avait plus de limite à ce que le gouvernement ou les particuliers pouvaient emprunter, mais un seul transforma les records de surplus en records de déficits. Et un seul nous fit la leçon, dans le style de Reagan, sur le gouvernement pachydermique pour étendre ensuite avec désinvolture le rôle de l'Etat dans l'économie plus qu'aucun président ne le fit jamais depuis Franklin Delanoe Roosevelt : rachetant les banques et cautionnant les constructeurs automobiles.

rumsfeld, wolfowitz et casey
OK, mais n'a-t-il jamais rien fait de bien ? Si ! Il a trouvé du vrai argent pour traiter le SIDA et la malaria en Afrique. Il a utilisé la position présidentielle pour serrer dans ses bras tous les musulmans lors de la grande étreinte nationale post-11/9, quand il sentit le danger d'une réaction exactement inverse. Et l'on peut dire que la présidence désastreuse de Bush justifie la démocratie : n'oublions pas qu'en l'an 2000, plus de gens votèrent pour l'autre gars. (Michael Kinsley, 8 years later)


J'ajouterai aux "louanges" de Kinsley une seule chose : l'imprévisibilité bushienne renforcée du bellicisme naturel de Dick Cheney a foutu les jetons à tous les ennemis de l'Amérique, surtout quand fuita du Pentagone l'abandon réel ou supposé de la clause tacite de non-vitrification d'une puissance non nucléaire. Ne cherchez pas ailleurs le "ralliement" en catastrophe du colonel Kadhafi qui jeta ostensiblement par dessus les moulins ses préférences atomiques. La terreur imbécile a parfois du bon. Il suffit d'avoir de quoi !



Note (1) : "We will reopen Pensylvania Avenue in front of the White House" déclarait la plateforme républicaine de 2000. Bill Clinton avait dû fermer la voie sur insistance du Secret Service, les études montrant que l'explosion (à la saoudienne) d'un véhicule sur l'avenue, raserait la Maison Blanche. Dick Cheney expliqua la même chose et la barricade fut maintenue jusqu'à aujourd'hui. Il leur reste 8 jours pour l'enlever :)
Note (2): dérivé du bodybuiding, pourrait se traduire par "gonflette nationaliste".



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1 commentaire:

  1. Il est juste de dire que la dérégulation de l'économie et l'anarchie voulue du secteur financier n'ont pas été agravées par l'Administration Bush mais procèdent de décisions antérieures remontant pour les premières à l'Administration Reagan. Clinton a aussi ses responsabilités dans le fiasco.
    A chacun son bonnet d'âne !

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