Au hasard du surf, j'ai rencontré les filles du roi ... sur Internet. Descendantes des génitrices exportées en Nouvelle France par la commandite du roi Soleil, elles ont formé une association américaine dans l'état de Virginie, et pour ne pas rester entre filles, ont agrégé les descendants du régiment de Carignan-Salières au bon motif. Il est temps de présenter ces deux corps d'armée à l'origine du Canada français.
Le Carignan-Salières, soldé à 1200 hommes, est embarqué à la Rochelle pour Québec en 1665. C'est un régiment de prestige ayant appartenu au prince Pierre de Savoie-Carignan. Désargenté, le prince l'offrit à Louis XIV à la Paix des Pyrénées. Réuni au régiment d'Henri Chastelard de Salières dès 1659, il acquéra son nouveau nom pour entrer dans les armées régulières du royaume.
Normalement de huit compagnies à 50, il sera porté à vingt compagnies pour former le corps expéditionnaire de la Nouvelle France. Ces renforts provenant d'autres régiments enrôlaient des soldats et sous-officers ayant été engagés avec succès contre les Turcs dans la campagne de Hongrie de 1664, et cela créera la légende des "Croisés du Carignan". Sur le théâtre d'opérations canadien, il sera renforcé de quatre compagnies prélevées sur les régiments stationnés aux Antilles, et dès le mois de juin 1665, les colons français disposeront enfin de quoi tenir la dragée haute aux Iroquois qui ravagent leurs possessions. L'intendant Jean Talon, choisi spécialement par Colbert pour ses capacités de résilience, et huit compagnies supplémentaires seront débarquées en août et septembre de la même année pour attaquer les Indiens dans leurs fiefs et finir le travail commencé par le Carignan. La paix indienne sera signée en 1667.
Les compagnies rembarqueront aussitôt à l'exception de 4 compagnies à 75 qui resteront pour la sûreté de la Province. En 1671 lors du démontage des garnisons, 446 officiers, sergents et soldats se laisseront tenter par la colonisation proposée par la Couronne et subsides divers attachés à leur choix par un intendant avisé.
On dispose des rôles d'enracinement des soldats par seigneurie : cliquez ici.
Quand le "Carignan" est arrivé à Québec, les colons étaient environ 3200. Ce qui laisse comprendre que les 32 compagnies qui vinrent pacifier le pays étaient au total très importantes par rapport aux résidents, et donc que beaucoup de Canadiens français descendent du Carignan et des filles du roi. Qui sont-elles ces délicieuses ?
A l'inverse de la colonisation anglaise qui débarquait des familles entières, la colonisation française fut le fait d'individus plutôt intrépides qui s'adonnèrent à la trappe et au commerce des fourrures. Enrichis et bientôt sédentarisés, les trappeurs eurent vite le désir de s'établir pour de bon, avec femme, enfants et cheminée fumante. Le roi conçut le projet de pupilles royales issues de milieux modestes ou très défavorisés, qu'il prendrait en charge jusqu'à leur mariage auquel il contribuerait par un dot de cinquante livres. L'expression "Filles du Roy" n'est pas en ce temps péjorative et ce sont de vraies demoiselles qui à partir de 1663 débarquent à Montréal ou Québec au dispatching des bonnes soeurs.
Marguerite Bourgeoys, supérieure de la Congrégation de ND de Montréal, fut canonisée en 1982. S'y glissèrent aussi quelques filles de famille en rupture de bans. Contrairement à une idée reçue, les 800 pupilles ne sont pas des paysannes mais plutôt de pauvres citadines ou des enfants trouvées, donc peu adaptées aux travaux de la ferme. Elles n'en ont que plus de mérite d'avoir triplé la population de la colonie en presque 10 ans, démarrant ainsi une vraie colonisation de la Belle Province. Le recensement de 1692 décomptera 11075 habitants, sacré coup de rein.
La Société des Filles du roi et soldats du Carignan est une belle initiative de généalogistes amateurs qui recherchent leurs racines françaises. Elle a été fondée en 1994 et l'accès en semble sévèrement gardé. Vous saurez tout en cliquant sur leur site :
www.fillesduroi.org
*Etude complète du Carignan-Salières et de la guerre indienne sur ce site canadien : www.laferreire.us
**Un accès Google-books à Marguerite Bourgeoys et les Filles du roi en cliquant ici.
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