Depuis quinze jours (mardi 30 mars 17h) le moteur de recherche Google renvoie une erreur 404 à toute demande effectuée en Chine. Il est probable que ce blocage confirme les instructions récentes du Département Central de La Propagande de Pékin de n'utiliser dans la presse aucune autre source qu'officielle sur le sujet de plus en plus délicat, au regard des réactions très négatives des secteurs économique et universitaire. C'est la liberté de faire tout et n'importe quoi en Chine qui est bridée par le pouvoir un peu grippé par le vent du grand large.
Voici un article paru dans le n°2791 de l'Action Française 2000 datée du premier avril 2010, qui passe en archives Royal-Artillerie.
Voici un article paru dans le n°2791 de l'Action Française 2000 datée du premier avril 2010, qui passe en archives Royal-Artillerie.
L'hydre capitaliste est-elle sans âme ? La firme de Mountain View avait accédé en 2006 au premier marché mondial en passant sous les fourches caudines de la Censure chinoise lui demandant de filtrer les requêtes adressées à ses serveurs. Après quelques piques de mauvaise humeur, la communauté internétique l'avait alors absoute au motif premier que le développement du moteur global sur l'immense marché chinois était imparable. De simples questions d'éthique – améliorables dans le futur - ne pouvaient brider Google Inc., tous les acteurs majeurs étant passés par là (Microsoft, Yahoo, Amazon...). Il faudra qu'en janvier dernier les services chinois de basse police fassent pirater les serveurs afin d'accéder aux données personnelles des dissidents ciblés, pour que les Américains se fâchent et, comme toujours à la fin de l'envoi, tombent du bon côté. Sacré scouts !
Mais la morale de l'affaire est tout autre et les chevaliers ni si noirs ni si blancs. Le succès phénoménal des intuitions techniques de Google (Pagerank, Googlemap, Adsense, G-mail, Chrome...) a indiqué la voie de monstrueux profits aux acteurs chinois d'un marché presque comparable en taille bientôt à celui du reste du monde. La capitalisation boursière de la société avoisine actuellement les cent soixante-quinze milliards de dollars et la firme a fait un chiffre d'affaires (cf. http://investor.google.com/fin_data.html) de plus de vingt-trois milliards de dollars en 2009, laissant un bénéfice de vingt-huit pour cent !
La monétisation du « mot-clé » serait-elle réservée au jeune lion ? En apparence, tout est tellement si simple quand c'est fait, que les moteurs nationaux comme Baidu ou Sinacorp se sont sentis capables de prospérer pour peu que l'expansion du géant américain en Chine soit découragée. En Chine, c'est l'Etat qui « décourage » ! Il le fait sans émotion aucune. Par exemple, il a carrément fermé Internet au Xinkiang après les émeutes d'Urumqi de 2009, n'ouvrant certaines lignes professionnelles que sur demande expresse et justifications au grand dam des usines locales.
Au delà de la fonction « moteur », l'enjeu le plus important est de nourrir les plateformes mobiles de moult applications dont tous les internautes ont entendu parler, même si tous ne les utilisent pas encore. Or China Mobile, première compagnie de téléphone du monde avec cinq cents millions d'abonnés, doit décider ces jours-ci d'une alternative à Google avec lequel elle est sous contrat. Ce sera le signal qui dictera la posture de tous les autres, attendu qu'il est très dangereux de braver l'Etat central dans un domaine aussi sensible que les télécommunications nomades. TOM Online, la téléphonie mobile de Li Ka-shing¹ sur le continent, a déjà succombé à la peur et se proclame depuis mardi dernier débranché de la pieuvre américaine. Pacific Century Cyberworks (Hong Kong) de son fils Li Tzar-kai devrait suivre.
Les moteurs chinois sont-ils capables de surpasser Google, est la grande question « nationaliste ». S'ils y parviennent – et les développeurs chinois ne sont pas des manches – l'Etat chinois aura le contrôle parfait de l'information étrangère destinée à l'empire. S'ils échouent, en ce sens que de nombreux internautes particuliers et professionnels rouspèteront, noieront les services officiels de réclamations véhémentes ou enverront leurs recherches à l'extérieur du pays faisant perdre la face aux dirigeants, alors les têtes de la Censure tomberont tant le pays est obsédé par le comblement de l'écart entre lui et l'Occident. A noter que cet écart est de notre faute, ancienne certes mais toujours vivace (Merci à la reine naine d'avoir passé ses nerfs sur la Guerre de l'Opium).
S'il y a matière a s'émouvoir des restrictions imposées par la Chine à ses ressortissants résidents au pays, on peut aussi prendre un joker et ne pas se joindre au concert de protestations. Non parce que la bataille au fond est terriblement capitalistique – on oublie trop souvent le paramètre « fric » dans la gestion de l'Etat chinois – mais surtout parce que de mémoire d'homme, nul n'a vu quiconque gouverner un empire de mille trois cent cinquante millions de citoyens, égaux en droit² qui pis est, et qu'à ce niveau de défi, les vieilles recettes libérales sont peut-être dépassées.
Note (1): la HKSAR est divisée entre différents magnats spécialisés qui ne s'affrontent pas. Les plus connus sont Li Ka-shing, les frères Kwok, Lee Shau-kee, Cheng Yu-tung, Stanley Ho, Yeung Sau-shing et Jimmy Lai. Le classement Forbes compte quarante millardaires chinois à Hong Kong !
Note (2): sauf les 55 minorités ethniques régies par leurs coutumes et qui forment 9% du total.
Note (2): sauf les 55 minorités ethniques régies par leurs coutumes et qui forment 9% du total.
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