mercredi 31 octobre 2012

Google vs. Kane

Citizen Kane sur le bouillon
Les journaux que pille le géant de Mountain View - je vais être sympa, c'est ma logeuse - exploitent des schémas économiques corne-cul et s'en plaignent. Subventionnés à mort en France (car il en meurt, comme le journal russe France Soir), soutenus par la publicité des corporations commerciales et publiques comme la corde tient le pendu, ils cherchent de l'argent comme un Hébreu la manne au désert, au lieu de réinventer la fabrique de l'information adaptée, la fabrique pas l'information, adaptée non pas aux temps - le temps ne lit pas - mais aux clients. Couverts d'experts comme un chien de puces, ils se sont fait bourrer le mou sur la e-économie, un pied dedans, un pied dehors, changeant un peu mais pas trop, gardant les plumes d'antan pour afficher des signatures, faisant jeune, gratuit ! Que dalles ! Les quotidiens sont devenus "horaires", rafraîchissant leur production en continu ; ils travaillent 24/7 et saignent des frais. Les hebdomadaires s'y sont mis aussi, qui cannibalisent le créneau du quotidien et sont aux pièces pareillement. C'est le grand foutoir de l'information en continu, avec beaucoup de recopies, même entre grands titres. Et à la fin, le bénéfice est ce que laisse la publicité, s'il en reste !

Chacun des grands journaux de la planète a choisi sa voie et aucun n'en est content : le New York Times est en kiosque et en ligne, le South China Morning Post de Honk Kong est en ligne mais limite votre IP à deux articles avant de vous abonner, le Times de Londres est en kiosque et met en ligne une version d'accroche avec juste le début des articles, le Asahi Shinbun de Tokyo double ses éditions papier d'éditions digitales libres (dont une en anglais).


La plupart des internautes, n'ayant pas d'agrégateur maison qui monte à l'écran la sélection de sites d'information choisis, s'en remettent à des compilateurs automatiques comme Google News ou Yahoo News. L'article qui dans le tas les intéresse, ils vont l'appeler au site du journal pour le faire monter dans leur navigateur. Ceci suppose une édition digitale du journal, mais d'abord un kiosque de présentation, ce que fait Google puisque c'est de lui qu'il s'agit. Les journaux d'Europe occidentale se sont mis en tête de vendre au kiosque Google. Pas con ! Sauf que le tératosaure californien les envoie ch... en menaçant de les jeter du présentoir, car Internet cool c'est gratuit sous toutes apparences, l'argent pour l'affichage étant sur un second écran qu'on ne voit pas.

Qu'à cela ne tienne ont dit les journaux brésiliens, déréférencés à 90%, si t'en veux pas, j'le remets dans ma culotte, et de s'en trouver bien au plan économique. Pourquoi ? Parce que les internautes brésiliens ne sont pas des benêts et que s'ils veulent lire O Globo à l'écran, ils appellent le site http://oglobo.globo.com/ dans leur barre de navigation ou en favoris, et c'est parti ! Mais la raison du succès dans l'alternative n'est pas là.

Les journaux du Brésil, des Etats-Unis, d'Angleterre, du Japon, de Hong Kong, et nous pourrions continuer avec tous les grands journaux d'Amérique et d'Asie, ont un lectorat étendu. Les journaux français en comparaison n'en ont pas vraiment. Très mal gérés, leurs tirages sont ridiculement bas et les chiffres OJD sont forcés pour gratter sur les courses aux guichets publics, puisque les invendus sont énormes, dit-on ! C'est leur cancer depuis les années 70 quand ils sont entrés dans la spirale baisse des tirages/hausse du prix/diminution de la pagination. Quand je passe Le Monde ou La Croix à un ami d'Asie, il croit tenir en main une feuille confidentielle qui vit de scoops destructeurs tant le numéro est mince !
Sans subventions de tous ordres, il n'y en aurait plus aucun. Les prix sont du double de ceux des journaux étrangers, toujours plus épais. Par contre la qualité rédactionnelle des quotidiens français est infiniment supérieure à la moyenne mondiale, il faut le dire aussi.

Une expérience perso :
Je me suis abonné à bon prix au Figaro six mois par porteur cinq jours par semaine (OFUP à 68cts/j). Levé à 7:00:00, je descendais à la grille prendre le journal dans ma boîte à lettres verte à 7:30. Il y fut toujours ! J'ai déjeuné le coude sur mon journal tous les matins comme au Claridge ! J'ai dû interrompre cette livraison par suite de plusieurs absences. Je vais renouer le contrat pour six autres mois dès que je serai stabilisé. C'est vraiment l'usage le plus intéressant d'un journal, rien ne surpassant son édition papier de par la plasticité du support et la vitesse de consultation (voir la vidéo ci-dessous pour le "support"). Ce service pourrait-il "sauver" la presse quotidienne ? Les anglo-saxons ont inventé il y a longtemps le portage aux aurores. Essayons donc d'importer des idées ! Des fois qu'on ait trouvé quelque chose de bien ailleurs !


Et d'ici là, embauchons de vrais gestionnaires puisque nous avons déjà de bons rédacteurs. Les tristes capitalistes allemands qui se sont mis aux rotatives ont décidé de se passer de Google. Et les Belges, une fois ? Décidément, nous serons toujours en second.



Deux sites peuvent être consultés en enrichissement :
- l'article de la Wikipedia sur la crise de la PQN
- le compteur Mediatico qui recense des titres en ligne du monde entier.

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