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Du délire du droit d'auteur à la mort


Aaron Swartz (1986-2013)
C'est un combat qui ne finira jamais, celui des droits intellectuels d'auteur. Pour avoir pillé à visage découvert des travaux scientifiques universitaires de la base JSTOR en passant par le portail du MIT de Cambridge (Ma), Aaron Swartz¹ a été poursuivi par les services fédéraux du Procureur des Etats-Unis au Massachusetts, qui se sont acharnés à ses basques lui promettant 35 ans de prison et un million de dollars d'amende, alors que JSTOR, conscient de la disproportion de la réaction judiciaire, avait retiré sa plainte. Stupéfait du suicide de ce génie informatique, JSTOR vient d'ouvrir ses archives à qui en veut. Beaucoup de chercheurs dans le monde en font autant des leurs, ce qui n'ôtera jamais chez les fonctionnaires de la justice américaine qui semblent parfois chercher la caméra du regard, la certitude d'avoir agi à bon droit. Ils allaient "se payer" Internet et l'hacktiviste emblématique, de quoi faire la Une ! C'est raté, il ne leur reste que la honte tant l'émoi est grand sur le Web. Une pétition pour révoquer le procureur Carmen Ortiz a été ouverte par les internautes sur le site de la Maison Blanche. Le Massachusetts Intitute of Technology, penaud, lance une enquête interne sur cette affaire vécue comme une grosse tache sur sa réputation.

Protéger toute création de l'esprit comme en dispose le Code de la propriété intellectuelle m'a toujours paru un péché d'orgueil, sinon la criminalisation d'un accaparement normal des idées circulantes par tout homme vivant en société. L'esprit se nourrit des données qui l'environnent en permanence, s'imprègne de toute interactivité qu'il provoque, en construit des thèses et synthèses, concepts, et parfois en matérialise une création sous forme d'un objet ou d'un procédé nouveau. Avant que cette matérialisation n'intervienne, il est a priori très discutable de vouloir "breveter" des idées ou une chaîne d'idées comme une oeuvre littéraire ! Or c'est bien ce domaine intellectuel qui est protégé par les lois au motif simple que l'on doit pouvoir vivre de son cerveau, même en l'absence de matérialisation d'une idée ! Les intellectuels purs revendiquent un niveau de vie bien supérieur à celui du manuel quelle que soit l'utilité de leurs travaux, réputés souvent "progrès de la connaissance" alors que leur jus de crâne n'est jamais mis à l'épreuve de la Vie.
Matérialiser une idée devient dans ce système moins que jamais nécessaire si le marché existe pour acheter du concept stérile encore. Combien d'inventeurs ont voulu breveter des dessins techniques ? Combien d'informaticiens, des bribes de code ? Combien d'universitaires, de laborieuses compilations ? Cela nous paraît normal puisque nous baignons dès l'enfance dans le "copyright", le ®, le © ! Mais à la fin quelle vanité, si l'on pense que tout préexiste !

Aaron Swartz, infatigable chevalier du Libre, n'avait malgré ses gènes et son intelligence qu'un seul et sympathique défaut : peu doué en affaires ! Il s'est battu pour la diffusion gratuite (ou presque) des connaissances à tous. Dans sa croisade il heurtait beaucoup d'intérêts mercantiles et la suffisance des auteurs installés. Il n'a pu supporter leur énorme pression, 35 ans c'était le minimum, le tarif étant à 50 ! RIP.

« Aaron a combattu pour un système politique plus démocratique, ouvert et rendant des comptes ; et il a aidé à créer, bâtir et préserver une variété étourdissante de projets scientifiques qui ont étendu la portée et l'accessibilité de la connaissance humaine » a dit sa compagne à la presse.

L'eulogie d'Aaron Swartz, au hasard, sur PCImpact en cliquant ici.





En attendant la destruction de ce droit bourgeois, sont entrés dans le domaine public au premier janvier 2013 ceux dont les noms suivent et bien d'autres encore : Léon Daudet, Stefan Zweig, Victor Margueritte, Apollinaire...



(1) Swartz c'est de lui-même ou en collaboration :
- la licence Creative Commons
- le fil RSS (version 1.0)
- le site d'actualités partagées Reddit
- le collectif Demand Progress (anti PIPA/SOPA)
- ...

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