jeudi 14 février 2013

Le lion édenté dans un pays à zéro


« Il y a de l'argent pour financer le maintien de l'emploi à Aulnay-sous-Bois et à Rennes. La CGT ne serait pas opposée à une entrée de l'État dans le capital du constructeur, mais à condition qu'il n'y ait aucune suppression d'emploi, aucun licenciement, ni aucune fermeture d'usine.» (Monsieur Mercier, délégué CGT PSA Aulnay-sous-Bois, le 13 février).  Si la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois répond aussi à l'extinction d'un bastion syndical stalinien usant de violence sans vergogne à l'intérieur du site, il n'en demeure pas moins que Peugeot perd cinq milliards sur l'exercice clos. Dénoncer le jeu d'écritures comptables sur la dépréciation d'actifs industriels dans un pays où l'industrie reflue est assez scabreux mais de bonne guerre. Exiger le maintien de l'emploi à Aulnay ne dit pas pour y faire quoi. Faut-il réserver des crédits pour des tables et tapis de belote, car jusqu'à plus ample informé, les voitures françaises, formatées au marché européen, ne se vendent plus autant qu'avant. La faute à la crise de liquidités qui frappent les pays latins... et nous bientôt. Les modèles fabriqués sont moins en cause puisque ces gammes moyenne et basse continuent à se vendre dès qu'elles sont badgées made in Germany. Il est difficile aussi de faire des reproches de qualité puisque les dernières enquêtes de fiabilité ont élu Renault. Alors quoi ? L'image ? les réseaux ? Difficile à comprendre, mais à chaque heure passée à réfléchir la situation empire. Le marché français au seuil de la saturation avec 32 millions de plaques d'immatriculation s'est retourné. On immatricule moins de voitures et on fait tourner le stock d'occasion, sachant en plus que le choix de marques étrangères est retenu une fois sur deux ! Pour la première fois de l'histoire, le commerce extérieur automobiles français est devenu négatif en 2008. Primes à la casse, écotaxe et rabais constructeurs sont une drogue perverse, ils désorganisent le marché et profitent à tous les acteurs d'où qu'ils produisent, même en Corée.

Le marché à zéro !
Les lois normales d'un marché libéré des attentions gouvernementales dictent la fermeture d'unités de production surnuméraires en Europe, étant exclus de servir des marchés extérieurs plus brillants à partir des réseaux de production européens trop chers. Toyota Valenciennes qui exportent chez Toyota USA est l'exception qui confirme la règle. Des capacités inutilisées trop importantes nuisent au retour sur investissement et désintéressent les investisseurs s'il s'en trouve. Nous n'avons pas de "marques mondiales" à forte image valorisante, comme en ont encore les Anglais que l'on moque tant : Bentley, Jaguar, Land Rover, Rolls Royce, qui que soient leurs propriétaires, sont connues favorablement de toute la planète et se permettent une politique de tarif qui encaisse du prestige. Nos marques mondiales sont mortes avec nos armées en 40¹. Qui aujourd'hui rachèterait une usine automobile généraliste en France ? Même pas le Qatar. C'est pourquoi l'alliance d'Opel et Peugeot reste une énigme. Qu'a voulu faire la General Motors en prenant des actions PSA ? Stériliser une transaction préparée ailleurs chez un concurrent ? Les deux gammes sont concurrentes et Opel est limitée par GM au marché européen, sur lequel il pousse avec succès des Chevrolet sud-coréennes concurrentes directes des modèles Opel ! Sachant le marché européen congestionné pour un moment... ma langue au chat !

(1) Les grandes marques françaises ont des clubs d'anciennes dans le monde entier ; dans l'ordre alphabétique : Bugatti (renaissance en supercar chez VW), Delage, Delahaye, Hispano-Suiza, Hotchkiss, Talbot Lago, devant une douzaine d'autres qui n'ont pas démérité, comme Salmson (moteurs DACT), Avions-Voisin, Panhard & Levassor (qui fournissent les Sagaïe-canon au Mali), Chenard & Walker...


Il apparaît plus plausible que Peugeot fasse et limite l'effort sur les pays émergents où il est en retard, en y produisant localement les modèles prisés par les consommateurs du cru. Ayant annoncé qu'il entendait porter sa production expatriée à 50% de son chiffre d'affaires automobile, il indique son axe de développement et signale aux autorités que ses priorités ne rencontrent plus les leurs. L'inertie de cette industrie complexe fait que l'impulsion met en mouvement une désindustrialisation de la métropole sur un marché mondialisé. Restent les emplois !

Le pays à zéro !
Il serait moins grave de perdre des emplois s'il s'en créait à côté. Or le contexte politique hostile à l'entreprenariat dès qu'il réussit, bride l'innovation libre et les créations d'unité de production qu'elle génère. N'est-ce rien demander au régime que de lui dire d'ôter sa patte de l'économie où il n'a jamais vraiment réussi ? Un taux d'imposition personnelle de 75% est carrément grotesque ! L'Etat, dégage ! Surtout dans un pays stoppé sur place.
La Cour des Comptes s'alarme depuis plusieurs années du gaspillage éhonté de l'Etat qu'il contrôle. Au coeur même de l'Etat, elle demande de dégraisser l'Etat ; des milliards d'économies gisent sous la gabegie, la sur-administration, l'empilage des décisionnaires, la complexité des codes. Elle n'en vient pas encore à s'intéresser au régime lui-même, extrêmement coûteux dans ses assemblées redondantes, dans son train de vie de nababs, mais y sera forcée bientôt, c'est trop énorme. L'on doit dégraisser ce régime politique construit sur la multiplication des prébendes et le clientélisme latin, qui a l'illusion de commander à l'Etat. Cela libérerait beaucoup d'argent et de talents vers l'industrie de demain, industrie au sens large d'occupation des humains. Au lieu de quoi, par nos réclamations, nous confortons un Etat pléthorique qui gouverne au plus mince détail et un régime, inqualifiable prédateur de richesses qu'il ne sait pas produire, conduit par des hommes à jeun d'aucune valeur ajoutée offerte au pays par soi-même. Au lieu de quoi, la caste politique, ne s'appliquant aucune austérité sérieuse à elle-même, dirige la hache budgétaire sur la société au-dessous d'elle. Certes les comptes sociaux doivent être ramenés à l'équilibre ; des pays y sont parvenus sans détruire leur tissu social. Mais les réformes de l'Etat-providence du XX°siècle, douloureuses pour les faibles, seraient mieux acceptées si le régime et l'Etat avaient d'abord montré l'exemple ; sans se moquer des gens par des petites réductions de traitements déjà abusifs ou en empruntant le train. Rien n'indique qu'on en prenne le chemin. L'aveu d'impuissance des ministres en charge de la croissance (est-ce vrai qu'elle leur soit confiée ?) ne déclenche aucune réaction structurelle ; conjoncturelle un jour bientôt ? Quand les savants auront fini de comprendre comment ils ont bien pu se tromper.
Est-il encore temps ? Pour l'automobile, les jeux semblent faits.


- grande table à l'Elysée attendant l'appétit des faillis -





1 commentaire:

  1. Sommes-nous entrés dans une époque de stagnation (comme le Japon), se demande Dominique Seux dans les Echos. Croissance zéro pour vingt ans ?
    son article ici.

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