mercredi 24 juillet 2019

Typhon politique à Hong Kong

Li Peng vient de mourir à 90 ans. Les bouchers font de vieux os. On attend le départ pour l'équarissage de Hu Jintao, le boucher de Lhassa. Il faut dire que le budget de Deng Xiaoping sur Tian An Men était de deux cent mille morts (texto!). C'était la valeur de l'avantage marxiste-léniniste que la Chine trimillénaire devait acquitter. Le vertige d'un développement accéléré par la génétique han qui se défonce pour faire fortune a prévalu et le vieux Yoda a commencé sa série d'aphorismes. Hélas, ses successeurs n'ont pas sa finesse de jugement. De commémorations en humiliations, les peuples chinois encore libres n'acceptent plus le joug communiste promis ou déjà subi.

Si à Taïwan, la défiance est traduite par l'élection de plus en plus sûre d'indépendantistes, à Hong Kong, l'expression bridée de la démocratie est convertie en une agitation qui, pour une raison inexpliquée, tourne à l'insurrection générale contre le modèle communiste continental. Notons qu'au début des manifestations contre le gouvernement, les banques avaient fermé pour que les employés puissent y participer ! Cinq parties sont prises dans ce tumulte :

Victoria Park le 21 juillet 2019 ©Chine Magazine


- le gouvernement de Carrie Lam qui a eu l'imprudence de vouloir plaire au Central par sa loi d'extradition dont les dispositions juridiques sont justifiés et doivent éviter les exfiltrations sauvages (comme celle des libraires) mais dont l'esprit d'application reste douteux. Il m'étonnerait que Xi Jinping laisse longtemps Carrie Lam à son poste, parce qu'en laissant lever la révolte, elle lui fait perdre la face après la parade militaire de 2017 qui signalait à tous que l'Armée rouge aurait libre pratique dans le territoire. Carrie Lam est anglaise, sa famille est en Grande Bretagne... etc. Elle va avoir le "mal du pays".

- Le gouvernement central affronte une guerre économique impitoyable et fait feu de tout bois pour rallier à lui des pays en délicatesse avec les Etats-Unis. Tout le gouvernement de Li Keqiang est absorbé par les problèmes créés en interne, qui vont du ralentissement industriel à l'explosion du chômage créant des poches de mécontentement parfois violent. Comme si ça n'était pas suffisant, Xi Jinping relance la dispute sino-taïwanaise et conforte les indépendantistes dans leur posture de défiance absolue. Le désordre à Hong Kong est mauvais dans tous les compartiments du jeu diplomatique, même si l'ex-colonie anglaise n'est qu'un pôle d'investisseurs pour Pékin. Mais au moment où la répression sauvage des Ouighours commence à faire surface dans la conscience internationale, une répression normale devient impossible, surtout au lendemain de la mort de Li Peng qui ravive un passé oublié par ordre supérieur.

- Le gouvernement indépendantiste de Taïwan saisit l'occasion pour dénoncer la supercherie du slogan "un pays, deux systèmes", renforcé par la coopération militaire de Donald Trump qui envoie du matériel pour tenir tête à la République populaire. Laquelle entame des manœuvres grandioses et puériles dans le Détroit, sans doute pour que le renseignement américain, formosan et japonais décode tout le combat d'escadre afin de juger du niveau atteint par la flotte communiste, jusqu'ici assez faible dans ce segment d'exploitation du tonnage.

- Quatrième partie prenante : les indépendantistes hongkongais qui veulent une application mot à mot des accords de rétrocession de 1997 et jugent toutes les dispositions du pouvoir continental comme sournoises. En particulier sa volonté affichée de transfuser démographiquement le territoire en injectant du sang continental par tous moyens y compris la discrimination positive et le forçage du mandarin dans les écoles comme au Guangdong. Ces indépendantistes représentent les trois-cinquièmes des Hongkongais.

- Les collaborateurs hongkongais qui estiment normal que Pékin gouverne à sa manière un pays qui lui appartient et qui sont à la fois impressionnés par le développement fulgurant de la Chine - il faut dire que le pont de la conurbation Shenzhen-HKSAR-Zuhaï fait réfléchir - et perméables à la propagande basique d'un pouvoir communiste, comme celle voyant la main de la CIA dans l'émeute. Cette population fait les deux-cinquièmes de l'effectif. Les tycoons hongkongais quant à eux, se partagent entre les deux groupes, les banques également. La solution du problème est dans la triangulation de ces cinq pôles.

On voit mal le Central tolérer un désordre qui nuit à son prestige, son économie, sa réputation modernisée et aux Routes de la Soie. Donc avant la langue au chat, nous donnons Carrie Lam partante... à l'insu de son plein gré !

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