Depuis soixante-quinze ans, on observe une indulgence certaine dans les instances universelles où s'exprime la conscience internationale à l'endroit du nouvel Etat hébreu établi en Palestine après-guerre, à la notable exception de la Ligue arabe, mais qui ne compte pas vraiment dans l'affaire. Les guerres régionales déclenchées par les menaces des voisins arabes se sont toujours finies au détriment des Arabes palestiniens, exilés pour partie, confinés pour le reste et déclarés sans avenir par tous, même et y compris leurs frères arabes qui troquent avec une certaine hardiesse intérêts et profits avec les Juifs d'Israël. Les seules réticences apparentes viennent du royaume séoudien, curieusement inquiet de la valeur morale de la posture mercantile des Accords d'Abraham. Le prince héritier vient d'élargir à la Cisjordanie l'espace d'intervention de son ambassade à Amman. Mais pour le reste, on n'y peut rien comprendre si on n'intègre pas le non-dit : depuis la constitution du nouveau gouvernement hébreu, largement renforcé des partis de la colonisation à outrance des territoires occupés (ou vacants c'est selon), il ne fait plus mystère que le pouvoir applique désormais un programme de "Grand Israël" si tant est qu'il n'ait un jour cessé de s'y atteler. Depuis la trêve israélo-arabe, cette revendication reçoit la sourde approbation de la conscience internationale précitée. Pour des raisons obscures, le peuple palestinien, ou n'importe comment qu'on le nomme autrement, est sacrifié sur l'autel de la stabilisation d'une région en effervescence continuelle, qui sert en plus de camp clos à l'affrontement des sunnites et des chiites. Bien malin celui qui peut prédire ce qu'il adviendra des relations entre ces pays quand Israël aura "purgé" toute la rive droite du Jourdain et asservi les attardés à sa machine économique, le temps d'achever l’alyah ; à moins que ne soit arrivée l'heure de la renverse. Mais pour mémoire, Eretz Israel est plus grand que ça. Voir ci-dessous la carte en pied d'article.
Tout irait bien dès lors que les adversaires d'hier s'entendent maintenant comme larrons en foire, sauf que l'histoire nous montre (mais pas en détail dans cet article déjà trop long) que les impasses démographiques mettent par terre les plus savantes constructions humaines, Grand Israêl compris. Les deux peuples confrontés sont à parité de nombre et le savent. Il est donc impossible d'éteindre par aucun moyen l'espérance de part et d'autre. C'est apparemment ce qu'ont ressenti quinze cents universitaires, pour la plupart juifs, qui dénoncent dans un manifeste l'apartheid. En voici le texte (traduction "RA belle infidèle") et les signataires :
L'élephant dans la pièce
Nous, universitaires et autres personnalités publiques d'Israël, de Palestine et de l'étranger, attirons l'attention sur le lien direct entre la récente attaque d'Israël contre le système judiciaire et son occupation illégale de millions de Palestiniens dans les Territoires palestiniens occupés. Les Palestiniens sont privés de presque tous les droits fondamentaux, y compris le droit de voter et de manifester. Ils sont confrontés à une violence constante : cette année seulement, les forces israéliennes ont tué plus de cent quatrevingt-dix Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza et ont démoli plus de cinq cent quatrevingt-dix structures. Les justiciers colons brûlent, pillent et tuent en toute impunité.
Sans droits égaux pour tous, que ce soit dans un État, deux États ou dans un autre cadre politique, il y a toujours un danger de dictature. Il ne peut y avoir de démocratie pour les Juifs en Israël tant que les Palestiniens vivent sous un régime d'apartheid, comme l'ont décrit les experts juridiques israéliens. En effet, le but ultime de la refonte judiciaire est de renforcer les restrictions sur Gaza, de priver les Palestiniens de droits égaux à la fois au-delà et à l'intérieur de la Ligne verte, d'annexer plus de terres et de nettoyer ethniquement tous les territoires sous domination israélienne de leur population palestinienne. Les problèmes n'ont pas commencé avec le gouvernement radical actuel : le suprémacisme juif se développe depuis des années et a été inscrit dans la loi par la loi sur l'État-nation de 2018.
Les Juifs américains ont longtemps été à l'avant-garde des causes de justice sociale, depuis l'égalité raciale jusqu'au droit à l'avortement, mais n'ont pas prêté une attention suffisante à l'éléphant dans la pièce : l'occupation de longue date d'Israël qui, nous le répétons, a produit un régime d'apartheid. Alors qu'Israël est devenu plus à droite pour tomber sous le charme du programme messianique, homophobe et misogyne du gouvernement actuel, les jeunes Juifs américains s'en sont de plus en plus éloignés ; pendant que des milliardaires juifs américains bailleurs de fonds aident à soutenir l'extrême droite israélienne. En ce moment d'urgence et de possibilité de changement, nous appelons les dirigeants de la communauté juive nord-américaine - dirigeants de fondations, universitaires, rabbins, éducateurs - à...
- Soutenir le mouvement de protestation israélien, l'appeler à adopter l'égalité pour les Juifs et les Palestiniens en deça de la Ligne verte et dans les Territoires palestiniens occupés ;
- Soutenir les organisations de défense des droits de l'homme qui défendent les Palestiniens et qui fournissent des informations en temps réel sur la réalité vécue de l'occupation et de l'apartheid ;
- S'engager à réviser les normes et les programmes éducatifs pour les enfants et les jeunes juifs afin de fournir une évaluation plus honnête du passé et du présent d'Israël ;
- Exiger des dirigeants élus aux États-Unis qu'ils aident à mettre fin à l'occupation, à restreindre l'utilisation de l'aide militaire américaine dans les territoires palestiniens occupés et à mettre fin à l'impunité israélienne à l'ONU et dans d'autres organisations internationales.
Terminé le silence. Il est temps d'agir maintenant !
Signé par ceux dont les noms suivent sur le lien ci-après (il y a du monde):Nous, universitaires et autres personnalités publiques d'Israël, de Palestine et de l'étranger, attirons l'attention sur le lien direct entre la récente attaque d'Israël contre le système judiciaire et son occupation illégale de millions de Palestiniens dans les Territoires palestiniens occupés. Les Palestiniens sont privés de presque tous les droits fondamentaux, y compris le droit de voter et de manifester. Ils sont confrontés à une violence constante : cette année seulement, les forces israéliennes ont tué plus de cent quatrevingt-dix Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza et ont démoli plus de cinq cent quatrevingt-dix structures. Les justiciers colons brûlent, pillent et tuent en toute impunité.
Sans droits égaux pour tous, que ce soit dans un État, deux États ou dans un autre cadre politique, il y a toujours un danger de dictature. Il ne peut y avoir de démocratie pour les Juifs en Israël tant que les Palestiniens vivent sous un régime d'apartheid, comme l'ont décrit les experts juridiques israéliens. En effet, le but ultime de la refonte judiciaire est de renforcer les restrictions sur Gaza, de priver les Palestiniens de droits égaux à la fois au-delà et à l'intérieur de la Ligne verte, d'annexer plus de terres et de nettoyer ethniquement tous les territoires sous domination israélienne de leur population palestinienne. Les problèmes n'ont pas commencé avec le gouvernement radical actuel : le suprémacisme juif se développe depuis des années et a été inscrit dans la loi par la loi sur l'État-nation de 2018.
Les Juifs américains ont longtemps été à l'avant-garde des causes de justice sociale, depuis l'égalité raciale jusqu'au droit à l'avortement, mais n'ont pas prêté une attention suffisante à l'éléphant dans la pièce : l'occupation de longue date d'Israël qui, nous le répétons, a produit un régime d'apartheid. Alors qu'Israël est devenu plus à droite pour tomber sous le charme du programme messianique, homophobe et misogyne du gouvernement actuel, les jeunes Juifs américains s'en sont de plus en plus éloignés ; pendant que des milliardaires juifs américains bailleurs de fonds aident à soutenir l'extrême droite israélienne. En ce moment d'urgence et de possibilité de changement, nous appelons les dirigeants de la communauté juive nord-américaine - dirigeants de fondations, universitaires, rabbins, éducateurs - à...
- Soutenir le mouvement de protestation israélien, l'appeler à adopter l'égalité pour les Juifs et les Palestiniens en deça de la Ligne verte et dans les Territoires palestiniens occupés ;
- Soutenir les organisations de défense des droits de l'homme qui défendent les Palestiniens et qui fournissent des informations en temps réel sur la réalité vécue de l'occupation et de l'apartheid ;
- S'engager à réviser les normes et les programmes éducatifs pour les enfants et les jeunes juifs afin de fournir une évaluation plus honnête du passé et du présent d'Israël ;
- Exiger des dirigeants élus aux États-Unis qu'ils aident à mettre fin à l'occupation, à restreindre l'utilisation de l'aide militaire américaine dans les territoires palestiniens occupés et à mettre fin à l'impunité israélienne à l'ONU et dans d'autres organisations internationales.
Terminé le silence. Il est temps d'agir maintenant !
The Israel elephant in the room (clic)
Pas sûr que cela suffise à interrompre la course folle de Benjamin Netanyahou vers la dictature romaine, peu faite pour le peuple instruit d'Israël, mais on peut sentir soi-même la boutique et apprécier les humeurs de sa clientèle. Faisant aujourd'hui sans les précautions d'usage le lit de la colonisation totale de la Cisjordanie, avant de résoudre le furoncle gazaoui d'une autre manière, il se pourrait que par son entêtement à "finir" le travail que lui avait assigné son père, il ne désarme moralement le peuple juif et l'offre affaibli à ses ennemis ; car "il n'est de richesse que d'hommes" et les victoires de l'Etat hébreu sont à mettre jusqu'ici au crédit d'abord de son intelligence opérant à bon droit plus qu'au tonnage de son armement. Mais le côté trumpien du premier ministre l'a peut-être converti aux bottes de fer de la Connerie "qui marche et va plus loin que l'intellectuel assis". Ce qu'ont compris les universitaires qui se sont mis debout !
En quoi ça nous concerne ?
La stabilité de la Méditerranée orientale qui est traditionnellement dans notre champ d'intérêts croisés, sans parler des surtensions inter-communautaires en Europe occidentale et en France tout particulièrement.
Ce billet est le 2200ème sur ce blogue.
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