La France aura 70 millions d'habitants en 2050. Lozère et Corrèze refleuriront, et le Zambèze nous en donnera presque 5 millions, d'après une savante étude du solde des migrants publiée par l'institut national de démographie. Nous aurons 22 millions de vieux, 15 millions de jeunes et 32 millions d'actifs (+/-) pour payer tout ça : 22+15+32 = 70 selon l'Ined ; on ne va pas chipoter sur le million manquant, des clandestins sans doute ou des refuzniks du fisc car les redistributions seront sévères. Combien d'effectif aura le "camp des saints" de Raspail n'est pas la vraie question. La question qui nous préoccupe dans ce blogue de calibre est d'appréhender le futur pays réel, puisqu'il prime tout dans le choix des institutions. Et laissons le pays rêvé aux poètes.
Il n'est besoin d'aucun groupe de travail pour envisager à l'observation de la situation présente que la France de 2050, sauf désintégration du noyau atomique comme le prévoit les polices d'assurances en petits caractères, sera devenu un empire hexagonal décoré de quelques îles françaises jusqu'au plus loin de son ancienne influence, mais un petit empire tout de même, plus proche de ce que fut l'Autriche-Hongrie que de la France napoléonienne. Tout l'y pousse.
Et en premier lieu, la régionalisation et la communautarisation.
La régionalisation est une tendance lourde. Elle est activée par deux facteurs apparemment contradictoires mais qui ont le même axe d'effort. L'administration jacobine appartient à un Etat ruiné et ne peut donc plus être maintenue longtemps dans ses effectifs, ses arrogances et suffisances. C'est une question d'argent. Qui peut payer encore longtemps ses effectifs pléthoriques, et moins efficaces comparativement à ce que l'on observe chez nos voisins européens ? L'Etat va continuer à se défausser sur les régions parce qu'il n'en peut plus. Cet essor budgétaire des régions conforte dans leur course au pouvoir les satrapes locaux qui entendent se constituer des fiefs dans un pays en déliquescence. Cette quête de différenciation utile pour les acteurs politiques de division II, s'alimente d'une résurgence des "valeurs" régionales, voire des langues minoritaires, même si dans ce domaine pseudo-culturel, les générations montantes préfèrent parler couramment l'anglais ou le chinois plutôt que le patois de leurs trisaïeux.
Ce faïençage de la Nation est encouragé par la possibilité d'accès direct des régions au pouvoir central, c'est-à-dire à la nouvelle Rome telle qu'est devenue Bruxelles. Lorsque les subsides européens seront discutés et contrôlés par la Commission et les assemblées ou préfectures régionales, on pourra considérer que l'état jacobin a vécu.
La communautarisation est également une tendance lourde. Elle procède moins de l'échec de l'utopie intégrationniste que du besoin intime des étrangers de ressentir au fond d'eux-mêmes les tressaillements de leurs origines parfois même lointaines. D'ailleurs les amicales de solidarité régionale de souche française n'ont jamais été montrées du doigt, alors qu'elles oeuvraient à communautariser les provinciaux expatriés à Paris. L'amicale aveyronnaise d'Ile de France a eu ses heures de gloire et une certaine puissance. Aujourd'hui un peu moins dès lors que leurs enfants à l'ADN bosseur partent plutôt en Angleterre ou aux Etats-Unis.
On ne peut manquer de relever dans le même temps une communautarisation transversale des cultures ou moeurs minoritaires, fortement encouragée par ceux qui de ces communautés ont accédé à des fonctions de pouvoir. La dérive gay de la marie de Paris est assez démonstrative de cette discrimination positive volontaire, jusqu'au confins du ridicule parfois. Mais il est bien d'autres communautés d'importance qui veulent exister en tant que telles.
Le dernier volet communautaire est celui de la manifestation publique des croyances religieuses. Même si les émeutes de novembre 2005 ont freiné l'érection de minarets, on ne pourra pas longtemps refuser à la communauté musulmane la construction de mosquées de toutes tailles pour abriter dignement ses fidèles.
Tous les membres de ces communautés en tous ordres ont bien assimilé une chose à défaut pour certains de vouloir s'assimiler aux premiers occupants, c'est la nécessité de s'inscrire sur les listes électorales et de voter pour protéger leurs différences. Et en démocratie la dé&marche est intelligente et imparable. Voir le racolage exprès des homosexuels par les deux candidats pour le second tour des présidentielles.
L'identité nationale que l'on assimile faussement à l'uniformité, va succomber à l'assaut inéluctable de la diversité. Et le roi dans tout ça ?
Ses prétentions devraient s'en trouver confortées au moins pour deux motifs.
L'Etat central, sans attendre sa déclaration de banqueroute, sera dégonflé et ramassé plus ou moins vite sur ses pouvoirs essentiels. Le dispositif de pouvoir compact sied tout à fait à l'exercice de la charge de roi, ce secrétaire perpétuel de la Nation, des nations, ou des peuples de France et de plus loin. Une certaine permanence dans les fonctions de justice, sécurité intérieure et extérieure, intelligence du renseignement, conservation des sceaux, mise en oeuvre des lois, éventuellement diplomatie, serait assurée par un système à clef de voûte immanente donnant leur cohérence aux pouvoirs régaliens. Le roi et ses conseils seraient parfaits dans ce schéma inéluctable.
L'activisme politique, le débat démocratique, les combinaisons d'appareils, seraient reportés aux étages "vivants": régions, communautés de pays, agglomérations ...
Que deviennent les "Français" dans tout ça ?
Ils continuent à fondre du moment qu'ils persistent à avoir l'aiguillette improductive.
Sauf à incanter en pure perte ou chercher le destin de la Corée du Nord, l'évolution semble inéluctable ; autant faire avec. La France de 2050 aurait 3,5 fois plus de population que celle de Louis XIV, le bond étant effectué en seulement 3,5 siècles. Ce n'est pas neutre.
La monarchie capétienne eut longtemps le dessein d'agréger des nations très diverses en leur conservant leurs spécificités, avant que de verser dans le centralisme étatique et l'assimilation juridique forcée qui, uniformisant les (mauvaises)conditions dans l'espace, permirent le succès de la Révolution. Finalement ce serait un retour aux sources, à l'objection près que ces nations proviendraient de plus loin. Il faudra attendre les élans libertaires conjugués au chômage de masse pour apercevoir une coagulation des intérêts particuliers des provinces et la marche en avant d'une Nation. Jusque là le Languedocien ne partageait pas plus d'intérêts avec son voisin rouergat qu'il n'en avait pour le Catalan, sauf à acheter les vaches à l'un et les chevaux à l'autre. Et la liste est sans fin surtout si on convoque au débat les sensibilités religieuses divergentes dans le royaume et à sa périphérie.
Finalement la Nation au sens où certains veulent la défendre aujourd'hui, est une parenthèse de deux cents ans dans l'histoire de France. Celle-ci défendra une identité pérenne si le pouvoir de Paris, dense et intègre, défend la cohésion des nations françaises auxquelles il présidera, et suscite le rayonnement, le foisonnement de toutes nos valeurs, déchargeant les provinces du souci de cohésion extérieure à elles. Un roi est idéal dans ce rôle.
Encore faudrait-il que la France survive au fédéralisme européen.
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