"Il y a quelque chose d'un peu impressionnant chez ces gens pour qui la religion est toute leur vie, imprègnant leur quotidien du matin au soir, du berceau à la tombe [...] On doit montrer une opposition à l'Islam, et on doit, de temps à autres, courir le risque d'avoir une étiquette moins flatteuse collée sur soi, car il y a certaines choses pour lesquelles on ne doit pas faire preuve de tolérance".
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En décembre de la même année paraissaient les fameuses caricatures du Prophète éditées par des dessinateurs à cornes, que tous les lapidateurs du Croissant vert s'empressèrent de vouer aux gémonies, en brûlant les ambassades danoises. Je ne sais pas s'il y a des gémonies dans l'univers musulman.
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Certains d'entre nous firent bloc derrière les Danois ; d'autres s'empressèrent de manifester leur soutien à la nation islamique insultée. L'incident est clos, sur Terre.
Mais c'est bien à la reine qu'on le doit, car elle impulsa, involontairement peut-être, un certain raidissement national. Qui a dit que les monarques du Nord ne servent à rien ? Le Danemark qui, de toute son histoire n'a jamais bradé sa fierté, a retiré de l'affaire l'image du pays occidental le plus couillu. C'est oublier quand même l'attitude courageuse et digne du roi Christian X qui, sous l'occupation nazi, traversait Copenhague chaque jour à cheval sans aucune escorte, le peuple étant sa Garde.
Au moment où la plupart des pays d'Europe se réveillent étonnés des foules exogènes qui ont envahi leurs rues, ou caillassent la police urbaine comme en France, c'est l'occasion de jeter un coup d'oeil sur le "nationalisme" danois ; en fait nous devons une bonne partie de l'étude à Justin Fox de Time Magazine (original full-size) qui ne prend pas cet angle, mais celui de la mondialisation. Certains vont être surpris.
Tout commence avec la société Lego qui délocalise sa production en Europe de l'Est et au Mexique, ne laissant au Danemark que 300 postes sur les 1200 de l'usine de Billund. Les syndicats sont d'accord : "Pour distribuer des salaires, l'entreprise doit gagner sa vie. Le management sait ce qu'il fait". La planète Mars pour un Français engraissé aux avantages acquis depuis trois générations !
Bien sûr ce n'est pas un lockout, les choses sont préparées bien à l'avance et la remise en formation des ouvriers précède la réduction d'effectifs. On est en Scandinavie et le Jütland occidental n'a que 2% de chômage !
Justin Fox débattit des localisations avec un responsable syndicaliste sur le chemin de l'aéroport et n'en crut pas ses oreilles ; le discours était celui qu'on entend à Davos, l'élévation du niveau de vie des pays émergents renvoie l'ascenseur vers les productions occidentales, dont les Lego ! Il mise ouvertement sur l'accroissement d'une classe moyenne dans le Tiers-monde capable de consommer. C'est une question de temps, une question d'orientation industrielle aussi.
En France les sondages donnent 61% aux adversaires de la mondialisation (29% pour) ; l'Eurobaromètre leur donne 43% dans toute l'Union (41% pour) ; les Danois sont pour à 76% ! Pour une raison assez simple : leur économie est saine, le peuple est naturellement courageux. Leur niveau de vie est élevé mais la répartition est meilleure qu'ailleurs. Ils ont un chômage moyen de 3% et leur balance commerciale est excédentaire, à partir d'une industrie de biens et services sans orgueil mais efficace. La plus grosse maison danoise dans le monde est la Cie de navigation Maersk. Par contre ils sont dans toutes les niches qui gagnent.
Avec tout ça ils occupent sans bruit - il n'ont pas besoin d'un président Sarkozy - la 3ème place du classement mondial de compétitivité à Davos. D'autres les classent premiers pour l'ambiance capitalistique locale. Sont-ils libéraux pour atteindre ces positions ? Pas du tout ! Les prélèvements fiscaux atteignent 50% du PIB et l'état-providence fait rage ! Beaucoup de monde est venu analyser les ressorts de cette réussite, pour continuer le voyage vers la Suède et la Finlande où, à peu de choses près, le succès est aussi au rendez-vous. Alors quoi ?
Les experts ont tout ramené à l'organisation du marché du travail sous un régime nouveau appelé "flexécurité" par les Hollandais. En deux mots la liberté de gestion des effectifs est totale du côté des entreprises mais l'Etat fait une soudure "interjobs" hyperactive qui remet le salarié rapidement en circuit. De plus la couverture sociale ne dépend pas du travail. Les pouvoirs français ont paraît-il étudié la question ; ils essaient de la vendre aux partenaires sociaux ; peut-être que dans quinze ans ...
Ne nous leurrons pas, pour réussir cela il faut une vraie solidarité des esprits plus que des textes, et un sentiment national fort. Sur 5,4 millions de "danois" 5 millions descendent de casques à cornes ; il y a forcément un "esprit d'équipe" et ceci explique aussi pourquoi les Danois acceptent de cotiser à des taux élevés à la caisse commune : ils le font pour d'autres casques à cornes ! L'histoire a bien montré cette solidarité finale à l'issue de disputes sévères. Mais ils avouent aussi que le climat pourri et leur langue imprononçable les ont bien aider à rester entre eux. En poussant l'analyse, l'explication serait dans le génie propre aux Danois.
Liberté de ton et de tenue, goût de la contradiction, irrespect, sont les traits du caractère danois, tempérés par une propension au compromis. C'est ainsi que vous ne pouvez robotiser un Danois dans le travail car il aura toujours son mot à dire ; ce qui produit deux effets, les travailleurs ont une véritable autonomie dans leur job, sont capables de comprendre leur environnement professionnel et sont jugés aux performances ; deusio, ne créant pas de postes "lobotomisés", l'industrie danoise n'a pas attiré autant d'immigration non qualifiée que la nôtre.
La dernière chose est que l'Etat n'est pas enfermé dans une idéologie, mais fait preuve d'un empirisme étonnant, avec une prescience de l'avenir du monde qui fait souvent défaut à ses voisins. Leur Etat est ainsi à géométrie variable selon l'environnement du moment. Plus ou moins d'état selon les prévisions. Les questions internationales et européennes sont jugées à l'aune de l'intérêt national sans pressions ni truculence, ils sont restés calmement en dehors de l'Euro ; mais ils peuvent y entrer demain si ça les avantage ; chez nous la question est portée devant les philosophes et les tribuns de préaux ! C'est vraiment la planète Mars !
Seule ombre au tableau : le bon esprit, les qualités d'autonomie et les compétences avérées, drainent une partie des cerveaux vers le reste du monde anglo-saxon qui leur fait des conditions d'accès très attrayantes. Le royaume de Danemark perd de la substance, ce qui entrouvre la porte à une immigration qualifiée de substitution. Seules les brumes tenaces du Jütland convaincront les impétrants de ne signer qu'en CDD.
Résumé et comparaisons :
- une conscience nationale homogène forgée par mille ans d'histoire contre l'agrégation forcée de nations par un Etat centralisateur qui se délite aujourd'hui.
- une économie saine contre le cadavre à la renverse d'une planification soviétisante.
- sans en faire un débat, les Danois sont des partenaires fiables de l'Alliance atlantique car ils se savent défendus et n'en ont jamais douté ; nous en faisons tout un fromage depuis 1966, et ne le sommes plus depuis lors, bien qu'on nous abreuve du contraire. Même une mini-guérilla urbaine nous désarçonne.
- leur espace politique est occupé par des partis politiques soucieux de l'intérêt général qui donc se rejoignent souvent, et le haut de la pyramide est fixe ; notre démocratie est un combat de tranchées d'antagonismes idéologiques qui s'arrêtent à la porte des intérêts particuliers de nos politiciens, la pointe de la pyramide est mise à l'encan médiatique pendant deux ans tous les cinq ans.
Finalement leur "nationalisme" aimable - ils sont surtout fiers de leurs coutumes - est ce que nous appelons ici du "patriotisme". Ce peuple cultive le bon sens !
Heureuses monarchies constitutionnelles du Nord.
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Oui, elles sont heureuses, ces monarchies du Nord. Oui, la reine eut raison de dénoncer l'Islam.
RépondreSupprimerMais je dénonce les caricatures, car on doit le respect aux grandes religions, un respect neutre. Il existe d'autres moyens de bouter hors ceux qui nous dérangent, des moyens heureux, sans moqueries pour un homme mort voici treize siècles.
Mais la remarque qu'avait faite le roi de Norvège, voici deux ou trois ans, alors que certains parlaient d'abolir la monarchie avant une décennie : "il est normal (ou sain, je ne sais plus) que les norvégiens s'interrogent sur la monarchie", semble assez peu conforme à ce qu'on attend d'un roi, même là-haut, toutes différences de culture gardées, entre nos pays de tradition équivalente, et les scandinaves.
Il y a de toutes façons comme vous le suggérez un modèle à prendre, dans leur système.
Quand la Norvège se sépara de la Suède en 1905, le Storting organisa un référendum pour le régime politique en recommandabnt la monarchie constitutionnelle au motif que c'était le modèle le meilleur marché.
RépondreSupprimerEt avec l'approbation du peuple, ils choisirent un prince danois.
Les connaissant un peu, je ne crois pas qu'ils aient changé d'idée, surtout en assistant aux ravages démocratiques dans d'autres pays.
Quand j'étais à Oslo, le roi promenait ses chiens sur le quai chaque matin au lever du jour avec un seul garde du corps. Ca en disait long ...