Le Kosovo a déclaré son indépendance de la Serbie. Lafayette et Rochambeau sont américains, comme Vergennes, pianiste virtuose à la cravache de cuir noir. Le reste du monde observe !
Il n'y a que les Eurocrates qui s'excitent, encore que les ministres du Conseil européen affichent une assurance de façade, craignant quelque part le retour de flamme "orthodoxe" de la sainte Russie gazière ou des complications de revanches locales.
Dans un billet plus ancien, nous avions montré que le Kosovo indépendant n'était pas viable. Sans doute la sécession est-elle vue par tous comme la cicatrisation de la guerre de Yougoslavie, en attendant que toute la diversité balkanique ne vienne se noyer un jour prochain dans le magma européen. Si l'Union sert à éteindre les guerres européennes, c'est déjà ça. Mais qui peut parier sur les Balkans sauf les gnomes ?
J'ai assisté à la déclaration d'indépendance au parlement kosovar hier à 15 heures grâce à la chaîne I-Télé. Heureuse initiative privée !
La session était empreinte de dignité et gravité. On sentait que chacun mesurait l'audace nécessaire à l'accomplissement de cette rupture attendue depuis des lustres par les Albanais. Que le pays ne soit pas viable sans l'indulgence attentive de ses voisins et les subventions mensuelles des bailleurs de fonds publics internationaux, a dû limiter l'enthousiasme des députés à des applaudissements polis. La donne stratégique changera-t-elle que le château de cartes s'écroulera. Ce nouveau pays est "inéconomique".
Pour le moment, Vladimir Poutine n'a pas pris son avantage. Doute-t-il de la motivation profonde du peuple serbe qui, aux dires des élections présidentielles passées, semble refuser l'affrontement avec l'Occident qui lui promet la soupe chaude ? L'occasion était pourtant belle de pousser en Serbie une brigade russe "invitée" par le parlement serbe et de la faire camper sur la frontière intérieure marquant le territoire du Kosovo. Réponse du moujik à la bergère américaine Condoleezza Rice qui avance sans aucune retenue ses pions sur tout le glacis caucasien et le plateau de Bohème, jusqu'à installer ses rampes de missiles en Tchéquie ! Folie bushienne que de vexer à ce point la Russie qui se relève.
Finalement, l'indépendance proclamée sans grande difficulté présage-t-elle des reconnaissances étrangères acquises facilement ? Pas sûr. Le cas de la Suisse en pointe sur le dossier du Kosovo en 2006 est expliqué par les journalistes du Temps de Genève :
« La cote de la Suisse est actuellement au plus haut au Kosovo. En reconnaissant très vite l'indépendance, la Suisse n'aurait donc pas grand-chose à gagner à Pristina. Elle aurait par contre beaucoup à perdre à Belgrade, et c'est ce qui incite le Conseil fédéral à une certaine retenue. La Serbie est un pays ami et elle présente un intérêt tout particulier dans la mesure où elle fait partie de l'Helvètistan, le groupe de vote mené par la Suisse auprès des institutions de Bretton Woods, en compagnie de la Pologne, du Monténégro et de cinq anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale. La Suisse a intérêt à ménager chacun des Etats qui lui permet de siéger aux conseils du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. Le départ d'un seul membre du groupe pourrait en effet mettre en péril ses deux fauteuils. Elle a encore une autre raison de ménager la Serbie. Dès lors que les Balkans constituent un objectif prioritaire de sa politique extérieure, elle ne saurait fâcher inutilement le principal Etat de la région. »
La France en revanche n'a pas la grosse cote à Pristina depuis que la KFOR française protège le territoire serbo-kosovar contre les Albanais. Les Serbes n'en attendent plus rien, surtout depuis le réalignement de la politique française sur celle du Département d'Etat, mais ils conservent une certaine "affection" pour notre pays indépendamment de ses gouvernants. Inutile de les braquer par une précipitation gratuite.
Mais justement, le goût de l'éclat que montrent M. Sarkozy et le Dr Kouchner ne refroidira pas leur fièvre de l'estrade et les effusions publiques qu'ils s'y autorisent !
Toujours est-il que la question du Kosovo est réglée. Quelques soubresauts d'orgueil sont attendus, sans plus, dès lors que la Russie ne tempête qu'à L'ONU, son avantage n'étant pas sûr !
La Serbie a perdu formellement sa province du Kosovo qu'elle ne peuplait pas suffisamment, et qu'elle a attaqué ! Vae victis, il vaut mieux gagner les guerres qu'on déclenche.
En attendant ... soyons solidaires des Serbes du Kosovo avec l'association
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Comme prévu la France n'a pu se retenir d'être la première, pour la frime !
RépondreSupprimerAlexandre del Valle a étudié en profondeur la question yougoslave et y détecte des agenda cachés différents de ceux révélés par des analyses trop superficielles comme les vôtres.
RépondreSupprimerOn peut fouiller le pourquoi ou bien n'examiner que les conséquences de cela. La réalité est dans les faits.
RépondreSupprimerLa vraie origine de la sécession kosovare remonte au partage opéré par le Foreign Office en 1912 qui a divisé les Albanais. Mais si l'on remonte au Congrès de Berlin (1878) et si l'on suit les deux guerres balkaniques on s'aperçoit que le Kosovo était terre d'empire ...ottoman ... et pas exactement une terre serbe.
La dispute est permanente dans les Balkans. Autant s'en tenir aux résultats !
Le blogue de DeValle est néanmoins très intéressant.
... du moins je veux dire que le territoire n'était déjà plus serbe, quelles qu'aient été les vraies circonstances de la défaite de Kosovo Polje.
RépondreSupprimerC'est complexe, balkanique !
L'article de la Wikipedia consacré au Kosovo est instructif sur le va-et-vient de cette province sous diverses souverainetés.
RépondreSupprimerLe Kosovo médiéval était serbe. C'est l'expansion ottomane qui a fait cesser cette souveraineté. Mais les origines serbes sont bien au Kosovo.
RépondreSupprimerLe Kosovo va devenir leur terre promise. Et ça n'est pas du meilleur augure pour la suite.
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