L'ayant assuré que nous, Français, avions le même problème avec les Schpountz, il voulut me remercier de ma compassion en me félicitant de notre gastronomie du porc : « Vous les Français comme nous les Chinois ne laissez rien perdre de la bête, du sabot à l'oreille ». Voila un rare point commun que le Quai d'Orsay devrait exploiter pour le rabibochage en cours, n'est-ce pas Mister Raffarine ?
Mais revenons aux baiseurs. Zhongnanhai en plein désamour français, a prévenu la maison Christie's de Paris par le truchement d'un avocat (Me Liu Yang) que ces messieurs Pierre Bergé et feu Yves Saint-Laurent étaient des receleurs d'objets pillés¹ lors du sac du Palais d'Été perpétré par le corps expéditionnaire franco-anglais en 1860, lors de la Seconde Guerre de l'opium. Victor Hugo nous explique tout ça mieux que nous ne saurions le dire, plus loin que l'expression d'une barbarie occidentale moins rare chez les Anglais que chez nous, mais que nous avons exercée sans frein à l'endroit d'un peuple raffiné que nous ne comprenions pas.
*la lettre de Victor Hugo ici
A la fin de non-recevoir de Christie's au prétexte misérable que le vendeur - qui participe aussi à l'encan à titre professionnel - avait présenté la facture des pièces volées, et ne s'étonnant pas du silence diplomatique français, les officieux chinois - MM. Niu Xianfeng² du NFTC (Fonds national patrimonial chinois) et Cai Mingchao, propriétaire de la maison de vente aux enchères Xinheart à Xiamen (Fouxien) - ont répondu par la "folle enchère" qui bloque tout, le temps de chercher non pas les voies et moyens de la mise sous séquestre des objets - ils ne se font pas d'illusion - mais de saisir monsieur Pinault par les joyeuses en serrant fort jusqu'à ce qu'il crie "pouce!".
Quand on est propriétaire de Christie's Pékin, dans des circonstances aussi scabreuses qu'un recel impliquant le pays hôte, le mieux n'est-il pas de faire mille grâces à la cour impériale et d'organiser par exemple le rapatriement de l'objet du délire à des conditions financières avantageuses pour les trois parties, et plaçant éventuellement les pièces dans un musée de la capitale céleste avec une petite plaque gravée sous le socle valorisant ce geste magnanime.
Mais M. Pierre Bergé est l'ennemi intime du gouvernement chinois depuis un certain 4 juin 1989 et celui-ci n'en attend rien, qui mesure l'insulte du milliardaire rose quand il déclare offrir les bronzes de rat et de lapin contre l'indépendance du Thibet. Adulé de partout, il ne voit pas la partie qui se joue, même si Pékin a dépêché à Paris un bataillon d'avocats pour montrer le sérieux de sa volonté à récupérer "son" bien.
Je crains que la marque YSL ne soit coulée sur le marché chinois et que Paris n'en subisse le contrecoup par les provocations du tandem Delanoë-Bergé qui gère la "teuf" de l'Hôtel de Ville.
Ai-je l'air d'approuver les mesures chinoises de rétorsion ? Pas vraiment, car le négoce est fondé sur la confiance. Et les Chinois, coutumiers du fait³, viennent de se griller, du moins pour les enchères téléphoniques. Mais on peut craindre que cette guérilla ne participe du démontage de l'influence française dans le Monde auquel se sont attelés les officiels chinois depuis l'avènement de MM. Sarkozy-Kouchner, et qui devrait se terminer par la remise en cause du siège permanent au Conseil de Sécurité qui irait mieux à l'Inde par exemple.
On fait quoi maintenant ?
Le vendeur a un mois à dater de la folle enchère pour engager une procédure de mise en demeure par voie d'huissier pour obliger l'acheteur à payer son lot. Il n'a aucune chance en l'espèce de faire plier Cai Mingchao qui ne réside pas en France et ne dispose apparemment pas des 31,4 millions d'euros (plus les frais). Si le vendeur ne fait rien, la vente est annulée de facto et les bronzes retourneront sur la cheminée de Pierre Bergé de chaque côté du Picasso qui n'a pas atteint son prix de réserve, à moins qu'il ne s'en serve de serre-livres pour sa collection de "Têtu".
Note (1) : Présentation des pièces au ctalogue de Christie's et Pierre Bergé associés :
« Les pièces asiatiques de la collection traduisent leur goût pour les œuvres décoratives d'exception telles que la statue de Bouddha chinois en bois laqué du 16ème siècle ou l'imposant brûle-parfum tripode en bronze et émaux cloisonnés du 17ème siècle, qui garni d'orchidées, reflétait avec originalité leur raffinement.
Toutefois les deux pièces maîtresses sont sans conteste deux têtes d'animaux en bronze. Représentant un lapin et un rat, elles faisaient partie de l'horloge fontaine zodiacale qui décorait le Pavillon de la Mer Calme de l'Ancien Palais d'Eté (Yuan Ming Yuan) de l'Empereur Qianlong (1736-1795). Construit entre 1756 et 1759 sous la direction du fameux père jésuite Giuseppe Castiglione, les têtes se caractérisent par un style résolument occidental. L'horloge fontaine était composée des douze animaux du zodiaque chinois qui crachaient de l'eau chacun à leur tour pour marquer les différentes heures de la journée, à l'exception de midi où ce mécanisme hydraulique élaboré se déclenchait simultanément chez tous les animaux. »
- Tête de lapin en bronze provenant de la clepsydre zodiacale du palais d’été de l’empereur Qianlong
Chine Dynastie Qing, Epoque Qianlong (1736-1795)
Estimation : € 8.000.000-10.000.000
- Tête de rat en bronze provenant de la clepsydre zodiacale du palais d’été de l’empereur Qianlong
Chine Dynastie Qing, Epoque Qianlong (1736-1795)
Estimation : € 8.000.000-10.000.000
Note (2): interview de Niu Xiafeng sur Chinafrique
Note(3): folle enchère chinoise à l'encan des lignes de montage à l'usine Matra de Lanthenay fin 2003
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L'Express dévoile que "Depuis le 23 février, date du début de la vente de la collection qu'il avait constituée avec Yves Saint Laurent, Pierre Bergé ne se déplace plus sans une garde rapprochée. Il craint les sollicitations, pas forcément amicales".
RépondreSupprimerJe croyais qu'il était "redistributeur" puisque de gauche.
J'ai appris que le Palais d'Eté avait été brûlé par Lord James, Earl of Elgin and of Kincardine. Le "travail" dura 3 jours et mobilisa 3500 soldats de sa Gracieuse Majesté de Merde.
RépondreSupprimerLord James est enterré au cimetière de St. John in the Wilderness près de Dharamsala aux Indes. Routard, trekker, hippie et autre bouddhiste, ne manquez pas d'aller pisser sur sa tombe en passant.