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Chimère du royal-socialisme

lys en marteau et faucillesCela fait bien des mois que je retiens mon stylet à la lecture du blogue de Monsieur Renouvin qui sert de faire-valoir au sinistrissime¹ professeur Sapir, éminent soviétologue du Front De Gauche Buffet-Mélenchon, et chaviste à ses heures, pour résumer. Ce n'est pas bien d'interpeler la personne avant d'en présenter ses idées, mais c'est l'été et je n'ai pas encore pris de vacances ! La Wikipedia livre un article aussi copieux qu'élogieux de cet océan de sagesse putéolienne, à se demander s'il n'a pas été écrit par lui-même. Vous devez faire l'effort d'y aller avant de continuer ce billet. Désolé.

Dans le grand attelage de la nouvelle révolution hétérodoxale qui va briser l'ultralibéralisme à l'agonie, le patron de la Nouvelle Action Royaliste enfourche le cheval du gaullisme de gauche et appelle au ralliement les immenses cohortes des orphelins de l'Histoire (le H est intentionnel) qu'il identifie nommément en ces termes : Nous ? La masse militante importante, peut-être considérable, formée par les orphelins du gaullisme, les socialistes patriotes, les anciens du Parti communiste, les syndicalistes déçus par leurs chefs, les libéraux qui ont pris la mesure, grâce à Maurice Allais et Jean-Luc Gréau, de la catastrophe libre-échangiste.
Son billet de consensus révolutionnaire se clique ici.

Que déplore-t-on ? L'accroissement des inégalités sociales, la vénalité des charges publiques, la friquisation² de la corporation politique, l'enfoncement de toutes nos lignes économiques par la globalisation, mais pas un mot sur le Grand Remplacement qui n'est pas un sujet consensuel dans une réunion de vieilles taupes.

Malgré le venin instillé dans le corps social par le socialisme castrateur et en dépit d'une longue expérience grandeur nature qui réussit à asservir près de quatre cent millions d'hommes à l'ouest de l'Himalaya, il est des idéologues qui reviennent nous expliquer que de toute l'histoire contemporaine nous n'avons jamais connu le "vrai socialisme", celui des lendemains qui chantent forcément, ou par force ! Que vient faire un royaliste dans la galère bolchevique reste pour moi un mystère. Un concours de circonstances, doux euphémisme pour masquer une démarche de ralliement démocratique et dévoiler le vice conceptuel de base. Les ânes sont gris, voire bruns mais pas rouge vif !

L'autre jour, Régis Debray qui en connaît un rayon de ce bord, nous disait que l'âme de la France était morte le 17 juin 1940 ! Je converge sur cette "hypothèse" après en avoir compris les causes. Très raccourci, une guerre d'épouvante décidée par des régimes démocratique et monarchique méprisant l'homme, une guerre atroce nourrie du sang de la fine fleur des pays affrontés par la "levée en masse", une revanche qui a décompressé dans le sas socialiste avant de reprendre des tours jusqu'à l'holocauste mondial que nous savons. Sur ce parcours, la France a disparu, vaincue comme jamais elle ne le fut de son histoire depuis Alésia ! C'est la sclérose en plaque du socialisme associé à un pacifisme béat qui la priva des moyens de contenir l'ogre national-socialiste qu'elle avait suscité à ses frontières par un traité de haine en 1919, en oubliant de débander l'Etat d'un adversaire dangereux. Le cartésien aime les grands ensembles faciles à modéliser. Il fut servi !

Au sortir de la nuit d'une Occupation quelque part méritée, le vainqueur radiophonique du jour - au commencement était le verbe, dit le Livre - ramena à la surface tous les poissons politiquement crevés qui avaient présidé au désastre et les réinstalla aux manettes comme si de rien n'était ; le plus ahurissant ne fut-il pas de confier la rédaction du code du travail à un certain Thorez, déserteur notoire. Le nouveau maître appliqua un programme socialiste fondé sur les nationalisations les plus larges et sur l'implication de l'Etat dans tous les rouages économiques. Et comme Dieu se reposa au septième jour content de lui-même, Charles De Gaulle, déçu quand même un peu que le culte de sa personnalité ait été enrayé par la dureté des temps, partit à la retraite, besogne achevée.

Nous savons que la situation actuelle de ce pays dans sa composante morale et civique est une des pires du monde libre parce que nul n'a pu défaire depuis la Libération le filet de la soviétisation. On la rebadge sans cesse. Ça va mal ? On repart sur les vieilles lunes égalitaristes en voulant punir la réussite, la fortune ! Le réflexe autarcique revient au goût du jour bien qu'il soit impraticable, même en Corée du Nord ; l'idéologie d'une "organisation démocratique"³ qui redistribue la pénurie et encadre étroitement la production individuelle afin d'en répartir le plus vite possible les fruits sur le plus grand nombre, oisifs compris, fait flores, et la débureaucratisation du pays enfin lancée doit être stoppée. Il faut du monde pour surveiller le saupoudrage à tous, hors peines ou mérites.
Les propositions de Jacques Sapir sont reprises ici. Tout ce que nous n'avons pas su saisir d'opportunités stratégiques depuis la constitution du Marché Commun était fondamentalement mauvais, et c'est l'Allemagne qui nous a coulé. Ben voyons, il faut se rapprocher de la Russie et du Vénézuela, et la marmotte ... se pince jusqu'au sang, croyant rêver.

Le chef d'état que nous avons aujourd'hui est le premier à avoir voulu rompre carrément avec la soviétisation, mais il n'a pas les épaules pour le faire et compense ses insuffisances par la propagande d'idées simples qui n'aboutissent pas. Faut-il pour autant retourner aux vomissements antérieurs, à la frime grandiose gaulliste dont il ne reste rien d'utilisable, à la liquidation giscardienne du patrimoine industriel, à la fonctionnarisation mitterrandienne de toute la société, à l'européisation constitutionnelle de tous nos droits telle que la fit Chirac ?
Ne peut-on avoir une seule fois l'humilité d'aller regarder ailleurs comment sont organisés ou inorganisés les peuples qui fonctionnent, quels principes suivent-ils, ont-ils d'ailleurs besoin de principes, de guides ?
Non ! La solution est dans nos hautes écoles, nous savons tout, pour tout le Monde, et si ce pays ne marche plus depuis la fin du Second Empire, c'est la faute à pas de chance ! Nos principes sont excellents, dans leur pureté conceptuelle. Circulez, place à la Théorie !

Monsieur Renouvin termine (et nous aussi) par une révélation qui montre quand même la queue de la chimère. Cette masse pourrait s’organiser au sein d’un Parti républicain (royalistes compris, car nous avons tous le même souci de la chose publique) ou si l’on veut être plus précis d’un Parti patriote révolutionnaire. Mais Dominique de Villepin, enfermé dans la droite gaulliste et Jean-Luc Mélenchon, qui se voit seulement en héros de la gauche radicale, refusent d’accomplir leur propre révolution afin de devenir des hommes de rassemblement. Ils nous déçoivent mais surtout ils font courir un risque très grave au pays : la percée fulgurante d’un tribun de la plèbe qui reprendra le thème nationaliste et l’adaptera à la crise économique et sociale.
Le bellâtre permanenté et l'hurluberlu stalinien déçoivent. Nous sommes rassurés.

chimère éléphant-chimpanzé-iguane

Note (1): à gauche de la Gauche.
Note (2): toujours l'immortalité de la Coupole dans le viseur. On oublie que l'enrichissement politique est vieux comme Jacques Coeur et qu'il a bordé tous les gouvernements de Mazarin à Chirac.
Note (3): Maurras criait à la contradiction.

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Commentaires

  1. "Nous" ? Je ne fais point partie de ce nous-là.

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  2. Un article sur le Venezuela un peu trop lucide pour Renouvin est publié sur le Ring.
    http://www.surlering.com/article/article.php/article/le-corps-detruit-du-venezuela

    Cela ne le fera pas changer d'idée, pas plus que son mentor Sapir.
    C'est qui les putéoliens, des outres à vent ?

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  3. Je n'insulte jamais quiconque ne m'a pas d'abord payé un coup à boire. Le "putéolien" est natif de Puteaux (Hauts de Seine).

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  4. Chine, Russie, Venezuela, Cuba peut-être, tout sauf l'Occident, donc. Il fait quoi dans la vie ce monsieur Renouvin. Penseur ?

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  5. Bonsoir,
    Je pense qu'une troisième voie est possible entre l'économie d'État et le libéralisme tel qu'on le connait et qui a suscité cette crise dont on a bien du mal à sortir.
    En tant que catholique, je pense que la doctrine sociale de l'Église a des choses à nous dire, sur la place de l'homme au sein de l'économie.

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  6. Ce n'est pas exactement vrai. Le libéralisme en soi n'a pas créé la Crise. C'est l'implication croissante des Etats dans le fonctionnement des économies qui a vicié les mécanismes de régulation naturelle.
    Prendre en pension les prêts hypothécaires insolvables dans des structures officielles de refinancement allumait un signal de mutualisation d'éventuelles pertes futures.
    Sauver les banques sur fonds des budgets publics pare le choc de court terme mais ne règle rien au fond. Il fallait laisser crever un bon nombre de banques et embastiller leurs dirigeants. Ca aurait marqué le coup pour un siècle. Au lieu de quoi, c'est reparti et les fonds publics sont convoqués dès le moindre pet de travers. Dans le même ordre d'idée, crève la Grèce, et tous les autres pays se réformeront dans le délai d'un mois.
    Un jour, j'aimerais bien qu'on m'expose la DSE en termes d'économie politique.

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  7. Cher Catonéo. Il est vrai que je ne suis pas un grand économiste, mais c'est quand même bien la spéculation financière, qui a remplacé le capitalisme basé sur le travail, qui nous a entrainé dans cette galère ?
    En ce qui concerne la DSE, il y a beaucoup de sites qui en font mention.Disons que pour faire simple, elle s'articule autour de quatre grands pôles : la liberté, la responsabilité, la solidarité et la subsidiarité.
    Elle est pour une économie de marché, laissant une grande place aux "corps intermédiaires" pour réguler le marché. Si ces derniers n'arrivent pas à s'entendre, en dernier recours, c'est l'État qui intervient.
    La DSE est l'héritière des catholiques sociaux du XIXe siècle, tous royalistes et particulièrement légitimistes dans leur version "ultra".
    Le prince Jean en parle dans son livre, au chapitre "économie".
    Elle pourrait servir de base à une économie, centrée sur l'homme et le Bien-Commun.

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  8. Merci pour votre commentaire.
    Sans entrer dans la mécanique de la spéculation, on doit remarquer qu'elle devient échevelée dès lors qu'on lui supprime le risque de tout perdre. Les spéculateurs ne sont pas suicidaires. C'est exactement ce qui s'est passé quand les gouvernements Clinton puis Bush ont forcé les caisses hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac à prendre du papier pourri gagé sur l'infation immobilière. Là où est le péché, c'est la titrisation inventée par la City que l'on peut résumer à un travail de saurisserie.
    Si les "subprimes" n'avaient pas été garantis par les caisses sponsorisées par l'Etat américain, personne n'en aurait mis dans les saucissons !

    Je connais (un peu) les théories économiques du XIX° siècle parce que j'ai fait trois ans d'éco po (mais il y a très longtemps) et je ne doute pas de leur valeur. Mais ce qui serait intéressant, c'est qu'on parte de notre économie actuelle (au niveau de l'OCDE bien sûr car nous sommes trop petits pour faire quoi que ce soit) et que l'on explique aux gens la construction des étapes vers une économie privilégiant la justice et le bien commun, en tenant compte de la nature humaine qui n'est pas à proprement parler un cadeau pour réussir.

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  9. "que l'on explique aux gens la construction des étapes vers une économie privilégiant la justice et le bien commun, en tenant compte de la nature humaine qui n'est pas à proprement parler un cadeau pour réussir."

    La "nature humaine" a bon dos. L'homme, en tant que personne, refusera toujours d'être traité comme un simple facteur de production (consommé dans la machine au même titre que le charbon, l'huile ou le suif). D'où le mouvement ouvrier du XIXe. Il y a de très belles pages de Bernanos là-dessus. Le problème est que cette juste et inévitable révolte (la "nature humaine" aussi) contre l'exploitation avait été dévoyée par un certain nombre de penseurs socialistes. L'encyclique Rerum Novarum remettait les choses à leur place. Elle était très libérale (rien de plus protéiforme que le libéralisme !) d'ailleurs dans sa défense de la propriété, dans des termes qui étaient déjà ceux de John Locke.

    Pour aujourd'hui, c'est autre chose. Je ne croie pas que la doctrine sociale de l'Eglise conduisait nécessairement à cet État tutélaire et omniprésent dont parlait déjà Tocqueville. Et puis il y a cette énorme ironie de l'histoire : un Occident fatigué, déculturé, mais "gentil", qui ne se veut plus d'ennemis, oubliant que nul n'a le choix de ses ennemis (c'est l'ennemi qui décide), concurrencé par une Chine qui allie la brutalité communiste à l'avidité capitaliste !

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  10. Cher Anonyme, je n'osais stigmatiser que la nature humaine de notre pays en ce début de siècle, celle dont l'avachissement annonce un prochain asservissement. L'homme actuel en tant que personne a tout à fait accepté d'être traité comme un simple facteur de consommation, pour détourner votre formule.
    La fière nature humaine du XIX° siècle a été "régulée" par deux guerres mondiales qui en ont fauché la fine fleur. Reste l'ivraie.

    Personnellement je ne crois ni en l'état tutélaire ni au "bon sauvage" mais au moteur primaire de l'ambition personnelle qu'est l'enrichissement de soi-même et des siens dans la liberté d'entreprendre. Cette incitation ne saurait priver l'individu d'accroître en même temps son capital culturel.
    Favoriser l'effort soutenu de chacun, récompenser le succès au lieu de punir, sont des attitudes révolutionnaires en France, surtout dans les mentalités complètement rongées par l'égalitarisme et la prédation collective des surplus. Le moindre mieux est une cagnotte à se partager tout de suite.
    Au bout du chemin, on trouve un pays rabougri, plein de vieux, qui passe des écrans de pub pour les plans retraite, qui lorsqu'il sort la tête du trou de sable, regarde la tragédie grecque, immobile comme la souris devant le serpent.
    Le champ d'expérimentation le plus probant de ce moteur primaire est la Chine qui par son surgissement sur la scène mondiale, a donné la voie. Mais comme sans notre suffisance nous détestons prendre exemple, nous allons verser dans le destin du Portugal, comme le redoutait De Gaulle.

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