Ce billet a paru en version expurgée dans l'Action Française 2000 du 15 septembre en page 2 sous le titre "Indice de confiance : zéro". Depuis la rédaction de ce billet, les choses se sont aggravées. Le défaut partiel grec (>21%) est quasi certain à fin octobre pour tous les acteurs de marché, et les gouvernements font leurs calculs pour recapitaliser leurs banques chargées de bons "latins", mais les fonds de renationalisation n'existent pas dans les caisses des Etats et les emprunter sur le marché plomberait encore plus la Dette publique. Malgré les cessions d'actifs décidées cette semaine pour atteindre les ratio prudentiels de Bâle III, toute baisse des cours pèsera sur la capitalisation des établissements, devenus proies faciles pour les émirs et les Chinois. Que feront les nouveaux maîtres de ces banques reste une énigme, mais il est peu probable qu'ils désavantagent l'économie de leurs pays d'origine, au détriment peut-être de la nôtre. Malgré leur ton assuré à défaut d'être rassurant, les dirigeants européens, des Etats comme de l'Union, ont montré leur insuffisance. Les nations leur en tiendront compte. Ce billet passe à la trappe à piges que constituent les archives de Royal-Artillerie.
G7 : l'enjeu des appels du FMI et de la BCE n'est pas mince. Il ne s'agit que de recapitaliser de 200 milliards les banques d'Europe afin qu'elles puissent supporter l'affichage des bons douteux dans leurs comptes. A défaut de quoi, elles resteront suspectées d'infection et quand le vent de panique se lèvera, tout le secteur se protègera des métastases de la faillite en bloquant ses transferts. Sans liquidités, le moteur bancaire calera, et nous ferons la queue aux guichets comme à Tripoli !
Le FMI par la voix de son Administrateur-gérant Lagarde appelle à recapitaliser les principales banques d'Europe occidentale parce qu'elle sait (ou a appris à son arrivée à Washington) qu'en cas de turbulences, elles ne tiendront pas le choc, malgré les tests de résilience signalés presque partout positifs. Les fonctionnaires de l'Agence bancaire européenne (EBA) s'en tiennent au succès de leurs simulations et récusent cette demande avec dédain. La présidente du Medef dit ne pas comprendre, c'est inquiétant mais elle n'a fait que SciencesPo. Le président Jouyet de l'Autorité des marchés financiers (AMF) ne demande lui que la recapitalisation des plus petites, et les professionnels du secteur, non impliqués dans les affaires politiques, avouent que les banques européennes sont au fond du trou (dixit Chahine Capital) après avoir perdu 900 milliards de capitalisation en cinq ans ! On n'y comprend rien, sauf si l’on sait que les tests de résilience étaient biaisés par des provisions bien insuffisantes pour palier la restructuration de la dette grecque, pire un défaut. Or de défaut on ne parlait que de ça à Marseille, et de la liquidation de l'Etat grec mis sous tutelle. De ces nouveaux bons russes, la BCE de M. Trichet en a pris pour 45 milliards : Jürgen Stark, son chef économiste, vient de démissionner.
Le bon sens commande donc que les banques détentrices de bons GiPSI¹ se recapitalisent à hauteur des encours douteux dans des délais assez rapides si l'on estime, comme les acteurs de marché, que l'orage va éclater soudainement, ou plus longs, si l'on est optimiste comme un dirigeant politique. Christine Lagarde est passée d'une condition à l'autre et a changé d'opinion, avec un creux à l’estomac car ses experts, rentrés d'Athènes, ont la conviction que la Grèce ne peut pas faire face. L'Etat grec à la merci de ses fonctionnaires rechigne à faire de l'argent par les privatisations (50 milliards attendus) puisque ce serait autant de niches, postes, fromages et prébendes qui disparaîtraient ; et la nation hellène rechigne à contribuer au redressement des comptes publics en cessant de frauder le Fisc car ce serait germaniser sa culture inimitable. Le Pib recule, les déficits croissent, la dette enfle, la phlébite ! Les marchés paniquaient déjà la semaine dernière en rehaussant les taux des obligations grecques à moins d'un an à 72%, et à 47% pour celles à deux ans ! Les latins malades n’en sont qu’à 15%.
Avant de continuer il faut comprendre la notion d’ « évènement de crédit » : c'est une dégradation des termes d’exécution d’une obligation entraînant automatiquement celle du niveau de confiance. Le rééchelonnement des obligations grecques, accepté finalement par Merkel, participe de ces évènements. L'agence internationale de garanties MiGA² et les banques ayant vendu des polices assurant les obligations nationales contre le risque souverain (CDS) craignent d’être appelées en garantie par l’ « évènement », avant même la déclaration de défaut. Les plus chargées en CDS vont plonger car elles n'ont pas le cash pour tout payer. Inutile d’expliquer que tous ceux qui détiennent beaucoup d'obligations grecques, garanties ou pas, vont également plonger. Les mauvaises langues des salles de marché n'appellent-elles pas la Société Générale "le mort qui marche"³ ? Le mauvais scénario prend forme puisque, faute de confiance en leurs consoeurs, les banques européennes parquent de plus en plus de liquidités au jour le jour chez la Banque Centrale Européenne qui les rémunère à 0,75%, liquidités qu'elles commencent à retirer du marché. L'huile du moteur épaissit dangereusement même si avec 170 milliards garés ces jours-ci on reste en dessous des 400 milliards gelés à Francfort en 2008 après la faillite de Lehman Brothers.
L'implication sur les clients est directe. Les entreprises verront s'assécher leurs découverts. Elles devront à leur tour raccourcir ou cesser le crédit client et n'accepter de commandes que payées comptant, si l'on trouve du liquide ! Les investissements seront refusés par les banques. Les retraits des particuliers seront rationnés.
Pendant ce temps, dans des hémicycles déconnectés du monde, il est des gens bizarres qui approuvent le surendettement de leur pays, déjà criblé de dettes, pour quinze milliards d’euros à « prêter » à l’Etat grec qui va disparaitre ; et qui au même moment surtaxent la société française de onze milliards pour entamer un reflux des déficits. Bien sûr, ce ne sont pas les mêmes postes comptables et l’emprunt grec de l’Agence France-Trésor (AFT), inscrit en trésorerie, n’aggravera pas les comptes budgétaires, mais en fin d’exercice dans le compte global "France" il n'y aura aucune contrepartie à ces quinze milliards donnés et perdus. Les Agences noteront l’aggravation de nos finances : le AAA deviendra AA, voire BBB ou pire, et le prix du refinancement de la dette courante sur les marchés s’accroîtra dans des proportions que l’Etat français ne pourra pas supporter.
Le pouvoir noie le poisson dans la réelle complexité de la situation, mais au résultat, c’est assez simple. La dette gérée par l’AFT est de 1320 milliards et sa durée de vie moyenne était de 7 ans et 38 jours au 30 juin. Le taux moyen courant à 7ans est aujourd’hui de 3,25%. Passer seulement à 4% hausserait le montant des nouveaux intérêts de 23%, et de 54% si on passait à 5. Or pour le service de cette dette, nous levons 220 milliards cette année (dont 120 pour les coupons d’obligations). Rapporter ces valeurs au budget annuel de la Justice par exemple (7 milliards) mesure le danger. Devra-t-on confisquer l’épargne ? Mais non, nous emprunterons !
Notes
(1) GiPSI (acronyme de tzigane ) : Grèce, Irlande, Portugal, Spain-Espagne et Italie
(2) MiGA appartient au Groupe Banque Mondiale. Ce groupe puissant associe trois banques internationales spécialisées (BIRD, SFI et BM), l’agence de garanties MiGA et une cour d’arbitrage, la Cirdi
(3) L'action SocGen a perdu 84% de sa valeur en 5 ans, devant le Crédit Agricole qui n'a perdu que 83% et largement devant la BNP qui en est à moins 63%!
(1) GiPSI (acronyme de tzigane ) : Grèce, Irlande, Portugal, Spain-Espagne et Italie
(2) MiGA appartient au Groupe Banque Mondiale. Ce groupe puissant associe trois banques internationales spécialisées (BIRD, SFI et BM), l’agence de garanties MiGA et une cour d’arbitrage, la Cirdi
(3) L'action SocGen a perdu 84% de sa valeur en 5 ans, devant le Crédit Agricole qui n'a perdu que 83% et largement devant la BNP qui en est à moins 63%!
BNParibas a assigné un site qui prétendait qu'elle avait des difficultés à acheter des dollars chez ses consoeurs américaines. Hier jeudi, La BCE, la Fed, la Banque d'Angleterre, celle du Japon et son homologue suisse ont annoncé conduire des opérations de liquidité en dollar américain et soulager la pression sur le financement en dollar du système bancaire européen. Les opérations de liquidité portent sur une maturité d'environ 3 mois couvrant la fin de l'année. Je ne pense pas que les banques centrales mentent à l'unisson. Les banques les plus exposées à la crise (SG et CA) ont choisi de se taire sur la question du refinancement en dollars aux Etats-Unis. La BNP a moins de sang-froid. (à suivre)
RépondreSupprimer68% des Français refusent l'emprunt de 15 milliards destiné à la Grèce. Sarkozy va-t-il passer ,outre ?
RépondreSupprimerC'est pas son argent.
"Je persiste et je signe", assène le directeur Playmobil de la Banque de France, Christian Noyer, dans une interview à Challenges. "Il faut le répéter avec force, les obligations souveraines ne sont pas des actifs toxiques. Les États ont tout à fait les moyens de régler leur problème d'endettement."
RépondreSupprimerTu parles. Les sociétés civiles ne leur en laisseront pas le temps. Les Banques ont passé les stress-tests sur un défaut grec de 21% des encours, alors qu'il est question maintenant de 75% et que le rééchelonnement des dettes italiennes et espagnoles se profile, alors qu'il en était exclu. Le FMI a raison d'appeler à recapitaliser dare dare. Mais avec quoi ?
En vendant les bijoux de famille des banques pour commencer.
Dexia, simple grossiste en sous, s'effondre pour des motifs triviaux dans le commerce général : trop de clients douteux, des valeurs en caisse sans valeur, des fournisseurs craintifs qui coupent les vivres. Et pourtant ces messieurs avaient passé haut la main les stress-tests de Mme Lagarde et M. Baroin !
RépondreSupprimerQu'à cela ne tienne, la marquise paiera !
La marquise c'est nous.