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PESD et solidarité

Les tribulations européennes autour de la crise des dettes souveraines vont nous coûter cher, à nous contribuables, volontaires désignés par l'élite régnante. Les peuples en troupeaux se gèrent depuis la nuit des temps au bénéfice d'une classe supérieure que le Temps qui passe renouvelle en désignation et composition. Elle est aujourd'hui plus complexe puisque la connivence agrège des élites de plusieurs bords qui mettent la nation en culture dans plusieurs champs d'intervention, secteur bancaire, haute administration, mandataires politiques, industrie stratégique et parasélites médiatiques associées. Au niveau de leurs taux de pension nous pouvons les appeler ploutocrates. Seuls les pays régis par la démocratie directe peuvent échapper à cette mise en exploitation, mais ce n'est pas le sujet de ce jour.
Dimanche qui vient, sainte Rita deviendra sourde par le volume des imprécations, supplications, litanies et prières qui monteront des institutions européennes pour qu'on sauve le soldat hellène, et surtout les prébendes bruxelloises qui sont liées à son sort. Quatre cent quarante milliards, mille milliards, deux mille ? qui dit mieux ? Au FESF les jeux sont faits, nichts geht mehr ! Pas sûr qu'on en termine, car soigner la dette par la dette est peut-être de bon pronostic en homéopathie, mais sûrement pas dans une région sans croissance ni rentes.
Au minimum nous pourrions affirmer qu'il n'y a aucun consensus dans ces affaires de sous, parfois seulement des compromis, ce qui est bien différent. L'attitude du parlement slovaque a été montée en épingle parce qu'elle étalait au grand jour des divergences profondes, mais ces restrictions à la solidarité européenne existent partout, sauf chez les pays les plus malades qui y voient la dernière planche de salut avant l'ultime apnée.
L'avenir est écrit par les agences de notation. What next ?

Ce que le grand cirque bruxellois nous montre avec ce défaut de solidarité, c'est l'inanité d'une défense européenne en l'état. L'affaire de Libye a clairement partagé les pays de l'Union entre ceux qui intervenaient pour sauver les peuples étrangers d'une dictature vers la démocratie du modèle européen - et tous ses vices - et les autres, qui ne se sentaient pas attaqués et ne voulaient donc pas participer à l'expédition, même si les Etats-Unis les y appelaient. On notera en passant que l'Oncle Sam n'est pas obéi à première injonction dans le cadre OTAN comme le souhaiteraient nos souverainistes pour étayer la thèse impérialiste.


Si les traités européens engagent une politique européenne de sécurité et de défense¹ (PESD), ils sont aisément contournés par le défaut de moyens d'application. Bien des pays, et tous ceux arrachés à la sphère soviétique, ont l'impression de "payer" deux fois, l'une avec une certaine efficacité pour l'Alliance atlantique, l'autre pour une idée gaulliste dont on n'a jamais pu leur démontrer la pertinence polémologique autrement qu'en termes philosophiques. En période de disette budgétaire, c'est encore plus facile de trainer les pieds sans trop marquer sa mauvaise humeur.

De fait, il n'y a que quatre nations guerrières dans l'Union : l'Angleterre, la France de langue d'oïl, la Prusse et la Suède. Les autres sont des batailleurs ou des pacifistes. Des quatre précitées, seulement les deux premières ont des moyens à mettre en ligne, la troisième a fondu dans la fédération allemande et ne propose qu'une super-gendarmerie. La Suède se limite à la Baltique et aux meubles en kit. Quelle mouche a piqué les Français de vouloir construire pareille chimère ? Le goût de l'infaisable sans doute aucun. C'est notre truc !
Sur le papier, il semblait possible de cloner l'Alliance. Mais c'était oublier la force de tension des ressorts qui la font bander. Bien que l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord ne convoque pas le ban et l'arrière-ban à première demande, les faits ont montré une automaticité des réactions. Les pays européens convergent vers le front d'autant plus vite qu'ils attendent de réciprocité de la part de l'Amérique du Nord si leurs lignes sont enfoncées. C'est le cas des anciens du Pacte de Varsovie. Même la Géorgie qui n'en est pas, a cru déclencher les secours en 2008 ; c'est dire !
La réaction promise d'une défense intra-communautaire semble pour le moins discutable, je veux dire qu'il y faudra plus d'une réunion au sommet pour charger les tourelles en ogives.
La réactivité est une chose, la géostratégie atlantique en est une autre et l'on va voir qu'elle est bien différente de la PESD¹.


Le 4 avril 1949, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et leurs alliés perpétuaient les dispositions stratégiques qui les avaient conduits à la victoire sur le III° Reich, en captant au profit d'un état-major intégré toute l'Europe occidentale utile et la moitié nord de l'Océan atlantique, nouveau mare nostrum dont ils contrôlaient désormais absolument tous les accès. Cette stratégie ne permettait pas de trous dans le tissu, surtout dans l'espace aérien. Le retrait de la France en 1966 eut aux yeux des anglo-saxons pour motif caché d'ouvrir un grand trou dans le dispositif. Je persiste à penser que le général De Gaulle avait conclu in petto à la victoire finale de l'URSS et qu'une certaine tiédeur serait plus tard récompensée. A preuve s'il en fallait, l'accord d'engagement des troupes françaises en Allemagne qui interdisait à l'EM allié de faire monter nos unités sur le front tchèque en cas de guerre ouverte ². Et il y en a d'autres. Une dame de fer qui n'était pas la tour Eiffel et un acteur de cinéma de série B nous ont montré plus tard ce qu'on pouvait faire avec une vraie paire de couilles.

Sur ce tissu, il y avait des pays moins ardents au sacrifice que leurs voisins. Leurs préventions étaient annulées par la prise en charge de toutes les opérations par l'état-major commun sous commandement américain (SHAPE). Ils pouvaient donc cultiver leurs états d'âme sans affaiblir l'Alliance. C'est bien cette déconnexion entre l'action et la réflexion qui a usé les manifestations pacifistes fomentées par les services de l'Est et relayées par les partis communistes et prolétariens. A quoi servait-il pour affaiblir l'OTAN d'ameuter contre des gouvernements qui ne pouvaient rien changer ? La seule embellie pacifiste fut l'affaire des "Pershing II vs. SS20" (1977-1985) qui vit défiler les partisans de la défaite au cri de "plutôt rouge que mort". Les Russes avaient avancé des armes de théâtre capables d'atteindre les villes allemandes et la contrepartie alliée n'était pas en place ; il fallait l'importer. C'est le président Mitterrand qui en ralliant la position dure du chancelier Schmidt a brisé le consensus de tiédeur hérité du général De Gaulle et a remis la France dans les clous de l'offensive en demandant le déploiement des Pershing II. En fait, c'est à lui que l'on doit les grignotages successifs d'une souveraineté illusoire et le retour in fine au commandement intégré. Le seul "affaiblissement" de l'OTAN est intervenu par la disparition de son ennemi du moment.

Ce changement de braquet à l'entraînement - les différences d'enthousiasme - n'est pas possible dans une stratégie de défense européenne car les trous vont se multiplier dès que la tension montera. Chaque pays est jaloux de son influence dans les instances fédérales et tous utilisent Bruxelles comme bouc émissaire de leurs problèmes intérieurs. Si des manifestations semblables à celles de la crise des euromissiles advenaient, les gouvernements plieraient sous la pression de la rue, à défaut, ce serait l'émeute universelle.

La troisième différence est de taille pour l'art de la guerre. A l'extérieur, l'OTAN fait peur et les critiques pleuvent sur sa brutalité. Spéciale dernière : le convoi de Kadhafi sortant de Syrte. A l'inverse, les forces européennes engagées comme telles, sur le théâtre yougoslave par exemple, passent pour une police armée, prompte à la négociation. Ce n'est pas exactement l'image que doit rechercher une armée ni le schéma de Lyautey qui préconise de "montrer la force pour n'avoir pas à s'en servir".
Les nouveaux pays européens sont tout à fait conscients que la PESD est une force de négociation et pas d'intimidation, et que lorsque les parlottes seront terminées, ils devront téléphoner au SACEUR³ pour avoir de l'aide. Et contre cette conviction, les meilleures démonstrations sont inutiles.
Faisons donc des économies et démobilisons ces petits état-majors et microsructures multi ou binationales qui en cas de pépin ne serviront à rien, sauf à peut-être ralentir les procédures si les politiques leur assignent un rôle.


Note (1): la PESD pour les Nuls c'est par ici
Note (2): accords Lemnitzer-Ailleret de 1967
Note (3): commandant suprême des forces alliées en Europe, actuellement l'amiral James G. Stavridis

Commentaires

  1. Merci pour la photo ! Grâce à elle, le haut commandement militaire étranger sous le contrôle duquel la France se trouve désormais placée m'est devenu moins inconnu !
    Un Français de langue d'oc.
    ====

    Lybie : victoire de l’OTAN et naufrage du droit international ! … La France sous un haut commandement militaire étranger et inconnu !

    http://cril17.info/

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  2. Si le droit international vise à protéger les tyrans de la colère de leur peuple, il serait temps de le mettre à jour, à voir l'enthousiasme des dirigeants de la planète à l'abattage mérité du raïs libyen !

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  3. Excusez-moi, mais j'avais crû lire que la résolution de l'ONU ne prévoyait pas tout à fait le synopsis de l'action qui a été mise en
    oeuvre ! ...
    J'ai dû faire une erreur de lecture quelque part tout comme j'ai dû faire une erreur de lecture de l'article du Figaro de ce jour ...

    Le Figaro vient-il de livrer la raison de l’intervention de Sarkozy sous le haut commandement militaire de l’OTAN ?

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  4. Les résolutions de l'ONU sont pour les "croyants", c'est bien connu. Notre intérêt était-il dans la guerre, facile au demeurant ? Je le crois. Et pour une fois que nous en gagnons une, même petite, ne boudons pas notre plaisir.

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  5. Figaro ? Euuuh..., je ne lis pas la Pravda de l'UMP :)

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  7. RC, le commentaire est totalement hors-sujet. Désolé.

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  8. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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  9. Le tyran crevé, l'OTAN en emporte le vent. C'est un nouveau job ?

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