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Parrainages, exercice de piste


Le Sphinx constitutionnel a confirmé les règles en vigueur de la présidentielle, déboutant Mme Marine Le Pen de sa demande de rétablir l'anonymat des cinq cents parrainages d'élus nécessaires pour s'inscrire. La publicité des parrainages que les élus accordent aux candidats à la présidentielle n'est pas contraire au « principe du pluralisme des courants d'idées et d'opinions » d'une démocratie. Dont acte ? M. Patrick de Villenoisy, candidat de l'Alliance royale, regrette dans un communiqué officiel qu'on lira ici, la décision du Conseil « ne permettant pas le libre choix des élus de la République de donner leur parrainage au candidat de leur choix afin de laisser aux électeurs la souveraineté de leur vote dans l’isoloir mais aussi l’existence de tout parti politique et de leur permettre de s’exprimer ». Il annonce malgré cela sa présence au premier tour.

La France est une république territoriale. A la différence des pays choisissant leurs représentants politiques sur des listes de parti à la proportionnelle nationale, tous les élus décisifs sont ancrés, ceux qui ne le sont pas (conseillers régionaux et députés européens) participent de la décoration démocratique.
L'ancrage foncier de la politique est une des conditions de la pérennité d'une nation. Pour ne l'avoir pas compris, le royaume de France a disparu et celui d'Angleterre en revanche a perduré. Comment donc ? Quand les décideurs politiques restent comptables de l'avenir de leur terroir dans quelque ensemble qu'il s'inscrive, ils sont plus près d'anticiper les effets des causes que s'ils font dépendre leurs décisions d'une idéologie hors-sol. Le royaume anglais fut et demeure celui d'une aristocratie foncière très pragmatique. Des gens certes tout à fait inintéressants dans les dîners en ville -  ils vous tiennent un heure à regretter la chasse à courre - mais littéralement "indécrottables".
En France, que d'esprit ! Nous nous parfumons aux vapeurs idéologiques, énivrantes à tel point que nous voudrions les faire respirer par le monde entier tant elles nous paraissent transposables partout.

Jusqu'en 1962, la territorialité politique s'exprimait jusqu'au niveau suprême par l'élection du président en réunion du Congrès à Versailles. Nous aurions mieux fait d'en rester là, avec un vrai premier ministre et un président au-dessus de la mêlée, gérant son domaine réservé, et moins tenté par la démagogie du mode de scrutin ultérieur ! Au lieu de quoi, les chefs d'Etat successifs, drapés par le suffrage universel dans une légitimité hors de proportion avec leur légalité propre, se sont affranchis de toute prudence et ont fait, qui pharaon, qui le bigame de Toscane, qui le roi-fainéant et aujourd'hui le comble, zébulon de Salonique ! Dieu qui veille nous a évité Sardanapale, mais va nous punir par Flanby !

Alors ces parrainages ? A dessein ou par hasard, ils territorialisent les candidatures. Il faut avoir couché sur le terrain pour y parvenir, non pas l'impétrant lui-même, mais tous ceux qui le portent au choix des suffrageants. Manque de pot, faire de la politique hors-sol est la démarche du Front national qui a trop négligé les élections municipales et cantonales. Si les électeurs n'ont pratiquement jamais élu un frontiste au scrutin uninominal, c'est qu'il y a un problème à résoudre... chez le Front, et surtout : chez son ancien président, grand spécialiste de l'acte manqué, ne pouvant se priver du plaisir de casser toute amorce de dynamique par des propos stupides hors-sujet, sur des affaires étrangères en plus ! Se faire une réputation de "con borgne" avec des fours allemands perdus en Pologne il y a un demi-siècle est quand même fort de café, surtout quand on fonde toute sa dialectique sur les affaires franco-françaises !

Très peu d'élus directs donc au Front. Les quatre seuls ayant accédé sur leur bonne mine à des fonctions d'édiles territoriaux (les maires¹ d'Orange, Vitrolles et Toulon, et Stirbois coalisé à Dreux) furent mis sous surveillance avec implication négative par l'état-major de Montretout qui craignait déjà la concurrence "déloyale" d'élus ayant franchi le mur de la nomenklatura. Toute la stratégie de Jean-Marie Le Pen sera de viser les élections à scrutin de liste (régionales, européennes) donnant au parti des sièges et des subsides publics sans enraciner ses concurrents internes.
(1) Dans l'ordre, Bompard, Mégret et Le Chevallier

Pourquoi se plaindre de n'être point aujourd'hui reconnu par la classe politique de terrain ? Cela fait 25 ans que l'état-major est suspendu à une idéologie assez démagogique, paradoxalement centrée sur les inquiétudes populaires de proximité, sans parvenir à les transformer en postes de responsabilités.
Pourquoi un maire de village irait-il aujourd'hui compromettre sa réputation au café du commerce pour présenter un OVNI à la présidentielle ? Cinq cents signatures sur 42000 possibilités, ce n'est pas énorme non plus ! L'équation présidentielle du Front national n'est pas constitutionnelle, et Marine Le Pen le sait, mais il est trop tard pour la résoudre.

Le parrainage des candidats, parce qu'il convoque les terroirs, est finalement compatible avec le royalisme, régime obligatoirement "ancré au sol" dans sa version durable. L'Alliance royale convoque le pays réel à l'ouvrage à l'occasion de différents scrutins, souhaitons-lui d'y créer le socle de ses légitimes ambitions.





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