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Crise et décentralisation


Le fédéralisme démocratique à la mode connaît aujourd'hui ses limites. Si les Etats méditerranéens sont en cours de réparation - pendant les travaux la vente continue, nous disent les agences de tourisme -, retirer leur couverture nationale laisse découvrir des abîmes de dette et gabegie à l'étage des régions. Et comme le noyé gonflé de ses gaz, elles remontent en surface. Dans la nouvelle famille des baleines crevées, je demande la Sicile gazeuse.

Avec plus de cinq milliards d'euros de dettes bancaires, la région la plus télégénique de Méditerranée a attiré l'oeil des agences. Prochain titre : Le Krach sicilien. Avec pour seule industrie le tourisme et les grands reporters de la rubrique judiciaire, la région du Sr Raffaele Lombardo compte 17.995 salariés contre 3200 au Piémont turinois et 24.880 gardes forestiers, plus qu'en Colombie britannique, l'état canadien le plus couvert de forêts. Les 1382 fonctionnaires du «Palais des Normands», siège de la région, sont plus nombreux que ceux attachés au 10-Downing-Street à Londres. Son administration très encadrée salarie un chef de service à plus de 120000 euros par an pour chaque demi-douzaine d'agents publics (source).
Ne rions pas, chez nous, le Languedoc-Roussillon de Georges Ier de Septimanie était dans ce domaine à la pointe du progrès. Paix à son âme de grand satrape.

Sur la plage d'en-face, les régions autonomes auront-elles la peau de l'Espagne ? La Communauté de Valence appelle à l'aide après avoir sabré dans sa communication. La radio-télévision valentinoise est le fleuron de sa gabegie. Sous la direction du parti populaire (PP), El Pais rappelle que la dette a été multipliée par 40 après 1995 et que le nombre d'employés publics a presque triplé, permettant de placer tous les "amis" du PP. Mais le pompon, c'est la politique de grands événements du gouvernement local : contrats de retransmission du Grand prix d'Europe de Formule 1, après construction d'un circuit urbain qui devait ringardiser Monte-Carlo, achats de droits de diffusion de l'America's cup après reconstruction du port de la ville pour accueillir la célèbre régate - Marseille a échappé à cette tentation -, sans parler du scandale de corruption Gurtel lors de la visite du pape en 2006.
Murcie vient à son tour de se déclarer incapable de sortir les 300 millions dont elle a besoin pour faire ses échéances. D'autres régions espagnoles attendent de voir les effets de la sincérité pour baisser le froc.
Deux-tiers de l'erreur de prévision dans la correction du déficit public national espagnol viennent des provinces. D'aucuns avouent que le pays part en vrille et que l'Europe du Nord n'aura pas les moyens de le sortir de la spirale. Espérons que si.

Nous sommes en zone Sud. Le clientélisme est dans l'ADN de tous les hommes politiques méridionaux, surtout dans un système où les exonérés majoritaires votent les dépenses qu'assume une minorité, et sans mettre en équation une corruption endémique partout. La démocratie de proximité n'est jouable que dans la transparence et si tout le monde contribue à proportion de ses capacités qui ne peuvent être nulles. Ne serait-ce que de cent euros, chacun doit être au rôle, du plus misérable au plus privilégié ; sauf les idiots.

Le peuple en ses Etats n'est sage que s'il paie !


Mais faut-il encore comprendre qui paie quoi. L'imbrication des responsabilités dans le mille-feuille administratif français obscurcit le jugement du citoyen. Et il sera toujours des tâches essentielles à mettre en valeur pour faire taire les critiques. Comme les infirmières et les policiers mis en avant quand on signale la pléthore de fonctionnaires. En région ou au département, on parlera de la mise aux normes-incendie des lycées, de l'aide aux personnes âgées, du RSA, mais jamais des budgets extravagants de communication, des "études" achetées à des amis, des opérations de promotion mirobolantes.


Séparer les étages

Il serait utile que l'on tranche carrément entre les responsabilités détenues par l'Etat central (à moins de n'en plus vouloir) et de celles détenues en province. Le contribuable saurait ainsi plus que ce qu'il paie, ce qu'il approuve. La meilleure et la plus simple des frontières est de séparer les pouvoirs régaliens en haut, des pouvoirs publics en bas. Pour le lecteur passant, nous rappelons les cinq pouvoirs régaliens : justice, police, monnaie, guerre et diplomatie. Tout le reste descend !

Ainsi verrons-nous enfin naître ces républiques chères à Charles Maurras, où l'on appellera un chat... par son prénom !




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