mardi 10 juillet 2012

Eurobreak®


La rupture de l'Union européenne est-elle si loin ? C'est compliqué nous dit-on mais nécessité fait loi et la nécessité se chiffre en trillions ! Mazette, on a passé les milliards d'euros, chère médème (c'est combien en anciens francs? 600 fois pire). Les dettes souveraines ne sont plus seules en cause, on y agglomère les passifs bancaires de bilans opaques. Aucun ne sait jusqu'à combien de profondeur il peut lui-même couler. La Finlande crie qu'elle va couper le filin du corps mort, les Pays-Bas émergent du coma où les a plongés le dernier Conseil européen et ne veulent plus mourir pour les rastacouères prodigues quand ils sont eux si économes. Mais c'est d'Allemagne que monte la bronca contre le "Sud". Lui soutenir que la prospérité revenue de ses clients latins fera du bien à la Deutschland AG ne la déride pas, rien n'y fait ! Les montagnes d'euros dus que constitue le risque latin-grec annihilent tout raisonnement. Est-ce si grave, docteur ?
Que la CSU menace de briser la coalition à Berlin tient de l'ordinaire bavarois, que les libéraux s'y mettent, juste pour ne pas disparaître des colonnes de la presse teutonne, passe inaperçu, mais que les écologistes s'en inquiètent autant laisse accroire que l'opinion allemande est terriblement remontée contre nous. Contre nous, parce que chacun sait désormais que la rupture de la digue italo-espagnole va submerger la France, un pays qui n'a pas avancé d'un pouce dans la résolution de son désordre depuis l'entrée en campagne des partis il y a un an. Cette campagne politique ne semble toujours pas finie, à preuve la grand messe sociale du palais d'Iéna, tenue dans l'enceinte de l'assemblée la plus inutile de la République, le Conseil économique et social. Si l'idée n'est pas critiquable en soi, elle laisse percer une tendance à l'embobinage que les syndicats ont déjà détectée. Regretteront-ils un jour le hussard Sarkozy qui ne les mouillait pas dans les décisions impopulaires ? On verra ça plus tard.

Les symptômes de l'eurobreak® ? Ils sont visibles et déniés. L'argent commence à sortir des caisses des banques du Sud et quitte la zone euro ; les banques sont fragilisées par un recours excessif au leverage ; les contreparties opérationnelles sont plus difficiles à tel point que la BCE repousse les dépôts vers le marché pour tenter une fois encore de le fluidifier ; le mismatch est la règle ; le service de la dette mange partout le disponible que ne laisse même plus la récession généralisée ; la France s'enorgueillit d'acheter (jusqu'ici) des fonds à 2.5% d'intérêts mais l'Allemagne le fait entre zéro et 1,4% et les latins dépassent 6%.

Les gesticulations du Conseil européenn affairé à brosser son image vis à vis des opinions nationales plus qu'à prendre des décisions exécutables au moment, la stérilité de la bureaucratie européenne qui découvre le vide sous ses pieds, l'opposition ouverte des deux poids lourds continentaux que sont la France et l'Allemagne, tout ceci laisse augurer d'une rupture de la zone euro.
Comment s'y préparer ? Savoir. Allons à Whitehall écouter le scénario diffusé par les autorités monétaires britanniques :
Les pays rejetés de l'Eurozone convertiront instantanément tous les dépôts bancaires sur leur sol en devises nationales, même les dépôts en devises étrangères, même les dépôts non-résidents. Un contrôle des changes très strict sera appliqué dès la première minute, quitte à être assoupli par la suite. A midi (façon de parler) les cambistes fixeront les valeurs respectives des monnaies et le soir, les bilans des sociétés exposées seront considérés comme infectés et leurs actions, toxiques, dévaluées en vue de la séance en bourse du lendemain. A partir de ce moment tous les investisseurs internationaux gèleront leurs décisions sur l'Eurozone et reporteront leurs disponibilités hors d'Europe, si ce n'est pas hors marché des capitaux tant la contagion mondiale est redoutée. On achètera des bananes.
Que faire alors ?
Tout dépend de votre exposition au danger. Réfléchissez-y déjà, ce blogue est gratuit et n'a pas la prétention de lancer des bouées de sauvetage. Mais vous pouvez téléphoner à Nanterre (c'est une taquinerie).

Notre handicap est que les socialistes sont des hommes de réunions, de motions, de congrès, incapables de prendre la vraie décision dans le secret de leur cabinet. Ils ne sont en plus pas taillés pour. Des fonctionnaristes, des apparatchiks, pas vraiment des guerriers !

Pour ceux qui aiment les cartes, voici celle de la fragmentation de la banquise UE :
Si on observe la ligne de fracture, elle laisse hors de l'épure l'Irlande, la Grèce et Chypre. La Grèce qui demande un moratoire de deux ans pour payer sortira la première. Le Royaume-Uni a réussi son coup, mais en ruinant son marché de proximité. Les trois pays scandinaves libres maintiendront leur couronne nationale (sur lesquelles il n'y a pas d'échanges significatifs) et les PECO ne s'agrègeront pas à l'euromark pour ne pas perdre le peu de compétitivité qu'il leur reste. La Finlande décidera du sort de l'Estonie cousine, mais il n'est pas dit qu'elle reste dans la zone euromark. La comptabilité lui dira quoi faire. Les deux pays baltes observeront la Pologne qui a aussi un problème de compétitivité avec les productions hors-union.



Autant dire que l'Union européenne dans son ensemble redeviendra un simple marché commun, une zone de libre-échange. Combien de temps la bureaucratie bruxelloise s'agrippera-telle à ses directives européennes d'acharnement thérapeutique est un pari qui tire des larmes... de joie. Que fera l'Allemagne ? On peut raisonnablement penser qu'elle partira vers l'Est où tout reste à faire et où gisent les matières premières.

Une réunion de l'Eurogroupe est prévue le 20 juillet. Sauvés !
En fait.... nous ne nous en relèverons pas.
Un gouvernement de coiffeurs.


Note ® : la locution eurobreak est une registered mark déposée en application de la loi européenne ACTA qui protège l'élucubritude et la néologitude


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