On ne conforme pas des bédouins à la démocratie représentative par décret, surtout après quarante ans de dictature élémentaire comme celle du regretté colonel Kadhafi. C'est pourquoi l'organisation et le déroulement des élections lybiennes mouchent les détracteurs du renversement de la famille régnante au nom de la liberté de chacun d'en prendre à son aise à l'intérieur de frontières sûres et reconnues. Les mêmes défendent Bachar et Asma el-Assad au motif qu'ils contiennent les sunnites sanguinaires, par des moyens certes criticables mais on ne fait pas d'omelette et caetera. Des pleutres !
Contrairement à l'avis des pythies, le Conseil national de transition, ami de la France et de Bernard-Henri Lévy (c'est dur à accepter, mais bon !), est en tête, ce que reconnaissent les partis islamiques. La route est longue vers la paix civile mais rien ne permet de dire que les étapes à suivre, rédaction d'une constitution et son vote par l'assemblée nouvellement élue, ne seront pas franchies, avec quelques cahots sans doute, mais franchies.
Les problèmes ethniques mêlés à l'effervescence intégriste encombreront encore longtemps le terrain, à la réserve près que la Libye utile fonctionnera de plus en plus normalement en convertissant sa rente pétrolière en développement. L'érection mentale des primitifs du désert sera traitée après - le sud libyen est un sas de décompression de la grande criminalité nomade - à moins que la pacification en préparation au Sahara ne s'enclenche plus tôt que prévu, réduisant en charbon de bois les colonnes alqaïdistes et leurs affidés (cf. Le Mamouth).
Il faudra d'ici là que l'armée libyenne ait été remise en capacité de combattre afin de tenir le front du sud-ouest jusqu'ici très poreux, à moins que le gouvernement de Tripoli ne sous-traite une partie de ce travail d'endiguement aux tribus touboues qui se sont installées comme autant d'octrois en frontière.
On passe à la question de Seif al-islam. Otage d'une tribu qui veut bien le vendre aux autorités légales, il est le bâton merdeux de l'ère post-dictatoriale. Plus belle serait la vie sans le procès qui se profile, réveillant toutes les rancoeurs et le non-dit glissé sous le tapis de haute laine. Que va-t-on lui reprocher ? Des déclarations ? D'avoir défendu les intérêts de sa famille les armes à la main ? En pays bédouin c'est plutôt rémunérateur en terme d'estime et de virilité. Le clan Kadhafi avait pris l'habitude de régner et la Libye était devenue sa chose. La résistance de la famille attaquée est donc "explicable" et le déferrement du prévenu à La Haye pour un jugement sur critères occidentaux n'emporte pas l'unanimité.
Les "infidèles" devraient faire profil bas et encaisser les bénéfices de l'exploitation pétrolière sans chercher à contrôler l'évolution politique libyenne qui de toute façon les déroutera.
Reste l'attitude du prince héritier qui a montré le bout de l'oreille quand sont sortis les premiers drapeaux de l'ancienne monarchie frappés de l'étoile et du croissant des sénoussis (primitivement les emblèmes de la Cyrénaïque). Le dernier message diffusé du prince Mohammed el-Senoussi date du 16 août 2011, mais rien ne dit que ses fidèles ne participent pas à la rédaction de la future constitution. Quoiqu'il advienne dans la nouvelle arhitecture institutionnelle, le prince sera toujours en position d'infériorité par rapport à ceux qui se sont battus dans le pays même. Tout le monde n'est pas De Gaulle !
Apostille de midi :
Les Libyens sont le troisième peuple arabe à aller aux urnes, après les Tunisiens et les Egyptiens, leurs deux voisins. Ils ont eu le temps d'observer comment se faire voler une révolution par un parti islamique modéré, qui s'allie à un autre parti moins modéré, pour finalement agréger un parti intégriste afin de conforter une majorité, et lâcher ensuite la police islamique dans les rues. Pas fous les Libyens. Les Syriens en prendront de la graine.
Les Libyens sont le troisième peuple arabe à aller aux urnes, après les Tunisiens et les Egyptiens, leurs deux voisins. Ils ont eu le temps d'observer comment se faire voler une révolution par un parti islamique modéré, qui s'allie à un autre parti moins modéré, pour finalement agréger un parti intégriste afin de conforter une majorité, et lâcher ensuite la police islamique dans les rues. Pas fous les Libyens. Les Syriens en prendront de la graine.
Ce qui est intéressant, c'est que le pays d'Afrique du nord où l'islamisme est traditionnellement le plus fort et est historiquement très bien implanté, à savoir la Lybie, est le seul à avoir vu l'échec des mouvements islamistes, type Frères musulmans.
RépondreSupprimerIl est toutefois assez difficile de savoir ce que recouvre le terme "libéral" en Lybie...
Je crois qu'ils se découvrent eux-mêmes.
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