mardi 18 septembre 2012

La Chine communiste a du mal à grandir

Il n'y a rien d'intéressant à commenter en France, ni au Roycoland d'ailleurs, nous continuons l'examen de la dispute sino-nippone.

Il y a quatre-vingt-un ans pile aujourd'hui, des terroristes à la solde du Kantōgun¹ faisaient sauter une voie ferrée nippone à Moukden (Shenyang), comme dans Le Lotus Bleu. L'infanterie impériale envahit immédiatement la Mandchourie pour protéger les biens japonais. L'anniversaire de cette rouerie tombe mal cette année.


Les émeutes généralisées en Chine continentale où quatre-vingt-cinq villes ont été le théâtre de destructions de biens et signes nippons, pose de graves questions, juste au moment où se déploie par tout le Croissant vert le chahut ridicule des fidèles du Prophète, convoqués par les cellules radicales islamistes à venger la liquidation d'al-Libi, commandant en second d'al-Qaïda, au prétexte vaseux d'un blasphème de série Z. La comparaison des deux hystéries va de soi. Il est difficile de croire que les réseaux sociaux aient ameuté en Chine tant de gens à manifester leur haine du Japon, sans que les cellules communistes de proximité ne soient pas au courant. D'ailleurs la mobilisation par endroit de la gendarmerie mobile par escadrons complets prouve que le volume à traiter avait été très bien anticipé. Le renseignement remonte donc.

On sait depuis longtemps que derrière le gouvernement officiel à Zhongnanhai - celui qui fait courir président et ministres par le monde entier - opère un bureau politique restreint tirant des fils vers toutes les provinces et qui se charge de la pureté idéologique au bénéfice exclusif de la pérénisation du régime politique. S'il a jugé que les Japonais devaient être intimidés par le bruit et la fureur, les objurgations du premier ministre Wen Jiabao n'ont pas pesé lourd. Les deux pays sont des frères ennemis mais des frères quand même, l'imbrication de leurs économies est profonde même si leurs intérêts géopolitiques sont antagonistes. Mais même le rachat des Senkaku à leurs propriétaires particuliers, ne peut justifier d'entamer gravement le volume des échanges (175Mds$), ce dont les Chinois menacent les Japonais en leur promettant 10 ans de stagflation et l'embargo sur les terres rares. Est-on au bord de la crise de nerfs ?
Tokyo a mis le doigt sur le dogme irréfragable chinois de capture de toute la mer de Chine (orientale et méridionale), au prétexte de prolonger jusqu'au bord des failles océaniques sa souveraineté complète sur "son" plateau continental. Tous les riverains des mers du monde se sont accordés sur une délimitation des zones de souveraineté à partir du tracé des lignes de côte des continents. On part de la ligne de base déterminée selon la Convention des Nations unies sur le droit de la mer². Les îles en haute mer ont leurs propres eaux de souveraineté. Mais la Chine déroge à la Convention de par le droit immémorial de l'Empire céleste dont la République populaire est le légataire universel.

Céder au Japon la moitié de l'archipel (facilement divisible) des Diaoyu/Senkaku reviendrait à sonner l'alarme diplomatique aux Philippines, au Vietnam, à Brunei, en Malaisie, voire même à Taïwan, qu'il est désormais possible de négocier avec Pékin, ce que le gouvernement chinois refuse absolument de laisser croire.
A preuve s'il en faut encore, Pékin, voulant jouer chaque fois l'avantage de son poids stratégique et économique, refuse tout arbitrage tiers, que ce soit celui de l'ASEAN pour la mer de Chine méridionale ou celui des Etats-Unis pour la mer orientale. D'où le blocage absolu sur les Senkaku.
S'ajoutent au dossier des revers économiques qui ont fait chuter la croissance au-dessous de 8%, seuil critique pour l'emploi des masses déracinées de la terre. La dispute spectaculaire est un bon dérivatif mais qui peut dégénérer.

En tout cela, la Chine démontre que si elle est un géant économique et financier, voire même une puissance spatiale en devenir, son maniement des foules dans la grande tradition stalinienne l'exclue encore du club des Grands où l'on échange en connivence. Parvenue, nouveau-riche, bling-bling, elle reste un pays du tiers-monde, et beaucoup de réactions piquées ci et là sur le Net chinois s'en désolent. Le pouvoir en costard croisé trois-pièces porte le col-mao sous la chemise empesée, et "ça ne va pas le faire" dans un monde globalisé et à Davos, surtout en période électorale américaine. Que font les Japonais ?



Ils pèsent le pour et le contre. Ils ont reçu la confirmation des Etats-Unis qu'en cas de pépin le pacte de défense (Traité de coopération mutuelle et de sécurité entre les États-Unis et le Japon de 1960) opèrerait automatiquement. La plus grande base de Marines américains du Pacifique est à... Okinawa, la 7ème Flotte qui à elle-seule surclasse les trois flottes chinoises, est à Yokosuka. Contrairement à ce que racontent les froussards verts, les Japonais terminent trois nouveaux réacteurs nucléaires qu'ils pensent coupler au réseau en 2014-2015 (no comments).

(1) armée japonaise résidant à Changchun depuis sa victoire sur les armées russes en 1905 ; elle sera écrasée par les Soviétiques en 1945
(2) La Convention dispose en Partie VIII, art. 121- Les rochers qui ne se prêtent pas à l’habitation humaine ou à une vie économique propre, n’ont pas de zone économique exclusive, ni de plateau continental. Les Senkaku sont dans ce cas et leur souverain doit se contenter de 12 milles nautiques d'eaux territoriales

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