lundi 23 février 2015

Valeurs et humanités


Pour aujourd'hui lundi j'avais prévu de faire ça - les fameuses valeurs - mais lisant le pamphlet de Denis Tillinac dans Valeurs Actuelles, j'ai mis mon travail au panier ; c'est tellement mieux dit par lui qu'il serait vain d'insister : le moulin à prière des valeurs républicaines ! Exactement !
Extrait et lien hypertext s'ensuivant :

« L’honneur, la liberté, l’altruisme, le courage, la probité, la pudeur, l’équité, le respect de soi et d’autrui, la bonté, le discernement, la générosité sont des valeurs, et il serait opportun qu’on les inculquât à l’école. À la fois universelles et modulées par la culture de chaque peuple, elles ne sauraient être l’apanage d’un régime politique déterminé.
Elles sont aussi enracinées dans les monarchies européennes que dans notre République. Les sujets de Sa Majesté la reine d’Angleterre jouissent de la même liberté que les citoyens français. Ceux des républiques d’Iran, du Soudan, du Pakistan ou de l’ancien empire soviétique en sont privés. Bref, le mot “république” ne recèle en soi aucune “valeur”, et en conséquence il n’a pas la moindre vertu morale...»
La totale dans le VA n°4082


L'architecte Valeurs & Principes quitte la piste de cirque

Par contre nous allons boucler l'article sur un autre emprunt qui nous a été suggéré par la crasse intellectuelle et morale de la Gauche en Cour, dont les brillants rejetons à tête creuse saccagent un cimetière israélite pour se passer les nerfs avant d'aller voler quelques diplômes dans les universités à papa. Un des plus beaux esprits français, dans une langue qui passe l'éloge, nous demande de monter notre niveau d'éducation. Et ceci s'adresse à tous les éducateurs, même à ceux qui opèrent dans les zones réputées difficiles, car l'expérience est faite¹ qu'on peut s'arracher à la fange réglementaire par les humanités.




« Les humanités ont une valeur permanente, mais jamais elles n'ont été plus recommandables qu'aujourd'hui, car aux poisons les plus dangereux qui corrompent ou qui menacent l'âme moderne, elles seules peuvent fournir l'antidote. Les occupations humaines deviennent tous les jours plus étroites et plus spéciales, le joug de chaque emploi se fait plus gênant et plus lourd, tant qu'enfin l'on peut se demander si, tandis que le monde antique a fini par la suppression de l'esclavage, le monde moderne n'est pas en train de le rétablir pour tous. Il n'en est que plus pressant et plus nécessaire de mettre au début d'une vie ainsi assujettie une formation libérale.

Horace
Si la profession est spéciale, qu'au moins l'éducation soit humaine. Ceux qui ont eu le bénéfice de cette discipline ne l'oublient jamais. Les hommes les plus pratiques, les plus adonnés aux occupations matérielles, rappellent toujours avec quelque orgueil qu'ils ont fait leurs humanités, non point tant parce que c'est là le signe d'une certaine condition sociale que parce qu'ils veulent nous faire savoir qu'ils ont, eux aussi, touché la rose et qu'ils en gardent le parfum. Il restera toujours inférieur celui dont l'esprit n'a pas d'abord été élevé jusqu'à l'inutile. Mais ce mot même ne doit pas tromper. Les connaissances littéraires sont souvent en nous les plus fécondes ; elles ressemblent à ces montagnes aperçues au fond des paysages, qui paraissent seulement élever dans le ciel une gloire oisive de neiges et de glaciers, et d'où viennent cependant toutes les eaux qui rendent fertile la plaine.

Le suprême bienfait de l'éducation classique consiste à nous donner quelques points de vue d'où nous puissions toujours dominer notre existence. C'est par là que l'instruction diffère de la culture. Un homme instruit n'a fait qu'augmenter le nombre de ses moyens ; un homme cultivé a accru son humanité. L'un se distingue de ce qu'il sait ; l'autre ne se sépare pas de ce qu'il a acquis. La culture, en effet, résulte surtout des connaissances qui ont une valeur générale, qui touchent au destin et à la nature de l'homme. Elle marque le passage du savoir à la sagesse, elle nous associe à l'élite de l'espèce humaine, et nous donne la plus précieuse leçon de respect et de modestie, en nous apprenant qu'on a pensé avant nous, et que le monde ne date pas de notre naissance.» (A.B² mars 1923)

Sophocle
(1) Ainsi des professeurs de langues mortes ont-ils décidé un jour l'Inspection académique de leur laisser offrir à leurs élèves de ZEP l'accès au latin et au grec. Le succès fut si grand qu'il contredisait tout ce vers quoi les pédagogistes de la Rue de Grenelle conduisaient la foule des élèves, en démontrant que l'abêtissement n'était pas une fatalité. Le genre enfanté d'un bouc et d'une truie soviétiques ne pouvait s'y reconnaître à ces altitudes, qu'il fut proclamé par un des représentants de l'espèce monstrueuse que l'on forcerait le passage pour la morale officielle du régime (comme on l'a connu sous des cieux rouge-sang) jusqu'à édicter la tabula rasa des consciences en ces termes choisis : le but de la morale laïque est de permettre à chaque élève de s'émanciper, car le point de départ de la laïcité c'est le respect absolu de la liberté de conscience. Pour donner la liberté du choix, il faut être capable d'arracher l'élève à tous les déterminismes, familial, ethnique, social, intellectuel, pour après faire un choix (Vincent Peillon, ministre).

Effectivement, les satires d'Horace, une pièce de Sophocle, la vie des grands hommes de Plutarque, une comédie d'Aristophane, les maximes de La Rochefoucauld, les caractères de La Bruyère, remuer le trésor immense du fonds français jusqu'au substrat gréco-romain, ne peut que distraire les jeunes âmes de la saine dictature du prolétariat. Quelle honte que d'être gouverné par cette m... médiocrité !

Ah, j'oubliais.
Nous devons cette promotion des humanités à Abel Bonnard (1883-1932_1945-1968). Les dates intermédiaires sont ses années d'immortalité.

(2) Aphorismes et fragments recueillis sous le titre Ce monde et moi par Luc Gendrillon pour les Editions Dismas, Haut-le-Wastia (Belgique) 1991

jeudi 19 février 2015

La Chèvre de Monsieur Xi

Nous sommes entrés dans l'année chinoise de la Chèvre, sans doute mais plus sûrement dans celle du prince rouge Xi Jinping. Le nouvel empereur du Cathay attire sur lui le respect de tous les dirigeants étrangers, non tant par son entregent naturel et son intelligence des situations que par la force de son gouvernement. Il est vrai que l'ancien gouverneur de la province industrielle du Zhejiang ne peut se comparer en rien à notre Bonhomme de Tulle. Les historiens nous diront plus tard que c'est par le choix de médiocrité que la France a définitivement décroché du Top-10 au XXI° siècle.

Qu'on ne se rassure pas, Xi Jinping n'est pas le haut dirigeant occidentalisé dans ses moeurs et ses réflexions que d'aucuns attendaient après l'épuisement du concept "playmobil" sous le règne de Hu Jintao. C'est un marxiste-léniniste "mis-à-jour" et qui fait attention à la couleur du chat de Deng Xiaoping. La course effrénée à l'argent déclenchée en 1980 peut précipiter un empire d'un milliard et trois cent millions de gens dans le chaos, autant dire que c'est la planète entière qui y verserait. L'État revient donc, partout, et son outil d'analyse échappe à Berkeley ou Princeton, c'est le "matérialisme dialectique".

Ceux qui des groupuscules croupions du capitalisme parlementaire se réjouiraient de voir revenir sur scène les vieilles lunes communistes seront déçus. Xi Jinping n'est pas Chavez conseillé par Sapir mais un vrai empereur, nous allons voir comment.

Pour cerner le personnage, il faut savoir déjà que son apparition sur la scène nationale comme Secrétaire du parti du Zhejiang en 2002 ne s'est pas acompagnée de libations et turpitudes mais de la production d'un corpus doctrinal ramassé à la fin en deux livres :
- S'appliquer au réel, aller au premier rang en décembre 2006 [Gan Zai Shichu Zou Zai Qianli]
- Nouvelles idées du Yantsé en août 2007 [Zhijiang Xinyu]
Non content de publier ces ouvrages politiques, il s'est investi à fond dans leur défense par moult débats et conférences au sein du Parti. L'apothéose fut l'endossement officiel du livre américain The Chinese Dream de Helen Wang qui devint la feuille de route du pouvoir dès l'accession de Xi et que l'on résumerait à surmonter les affres de la modernisation par l'exaltations des valeurs traditionnelles impériales. En quelque sorte une version sinisée du fameux "Rêve américain".

En quoi tout ceci va-t-il se traduire ?

(A) Par le retour de l'État en économie, imagé dans la théorie des deux mains - les Chinois raffolent de slogans - la main visible publique et la main invisible des marchés. L'effroyable anarchie économique qui conduit les fils du Ciel à ne le plus voir que gris ne sera réparée que par l'action réciproque de ces deux mains comme l'explique Adam Smith dans La Richesse des Nations. Xi Jinping est un fervent partisan de l'économie mixte.

(B) Dans un autre domaine, interne au Parti celui-là, il a revigoré le concept maoïste de la Mass Line créatrice et détentrice de la Vérité, avec un seul outil d'analyse : l'autocritique. Le premier objectif est de reconnecter cadres du Parti et population active. Le premier effet est d'extirper avec une efficacité sans frein la corruption endémique à l'État communiste chinois, à un point tel qu'on tremble de voir se contracter le PIB du pays.

(C) Ayant développé le Zhejiang jadis sur une ligne d'intérêts délibérément priorisés sur le peuple, il s'applique à étendre ce choix dans toutes les autres provinces jusqu'à évidemment heurter des intérêts particuliers ou catégoriels qui sont réduits par tout moyen détourné s'ils ne rompent pas immédiatement. La théorie d'enrichir un peu tout le monde au lieu de ne jouer que sur l'effet d'entraînement des super-riches est une rupture avec la doctrine Deng. Mais il n'est pas exagéré de dire que le pari n'est pas gagné, l'ADN du peuple chinois inlassablement laborieux, inventif, intelligent, est dédié au fric. Peut-il obtenir une conversion des âmes ? Pour ma part, j'en doute.

(D) Xi Jinping n'est pas un homme de cabinets, un dialecticien en chambre. C'est un homme de Pow-Wow ou de Loya Jirga, un rassembleur. Attaché à convaincre le plus largement possible, il maîtrise complètement son sujet et suscite l'admiration des jeunes et vieux caciques du Parti qui le trouvent "génial". Enfin quelqu'un qui a du fonds et qui en articule tous les paramètres de manière compréhensible. Cela n'a pas de prix quand il s'agit de mouvoir une machine aussi énorme que la Parti communiste chinois. Il suffit ensuite de réussir les premiers pas, puis les seconds, pour emporter l'appui d'indécis maintenant convaincus. C'est ce qu'il fait.



Finalement, et ce sera notre conclusion ; le Rêve de Xi Jinping est de revenir aux frontières mentales et physiques de l'ancient empire des Grands Tsings en usant de l'apport du marxisme dialectique. Il sera difficile à son premier contempteur de le confiner dans des limites plus étroites ou d'appeler à la libéralisation des marchés et des moeurs politiques comme s'y emploie le Sénat républicain. Cina farà da sè !

mardi 17 février 2015

Il faut aimer les Pays-Bas

Le gouvernement français fait une crise d'urticaire médiatique pour combattre les monstres qu'il a enfantés (lui et tous les autres avant lui). On sent une énergie incommensurable dans l'agitation que redouble encore le vacarme des radio-télévisions qui bouffent littéralement sur les morts. Les ministres courent partout comme des canards sans tête. Des voix, peu nombreuses, détonnent qui réclament que l'on distraie un peu de cette énergie pour combattre le chômage qui atteint des proportions sud-américaines chez nous ! En pure perte et pour deux raisons :

La seule mesure efficace n'est pas de faire mais de défaire. C'est la totale libération de l'esprit d'entreprise qui créera de l'emploi. Ce n'est pas une incantation, il suffit de regarder où les emplois se multiplient. Défaire commence pas l'incinération de centaines de lois, codes, décrets et ordonnances qui sont un carcan de plus en plus insupportable à tous, sauf bien sûr aux "normateurs" qui vivent de ce carcan. Inutile de faire la liste. Le sémillant Macron a porté le fer dans un millième des contraintes stupides françaises. Il n'ira pas plus loin, sauf se proclamer dictateur à la romaine le temps de la purge. Je voterai pour lui au plébiscite qui suivra.

La seconde : A l'exclusion du précité, les gens de gouvernement sont des puceaux économiques qui n'ont aucune vibration entrepreneuriale et ne savent donc pas ce que veut dire "libérer l'esprit". Il est donc exclu qu'ils ressentent en eux cette vérité économique qui, avouons-le, croise à 90 degrés toute leur idéologie socialiste de prédation d'une classe pour nourrir l'autre ! En plus, ils sont tous nourris par la Cantine socialiste depuis la maternelle. Mais ne l'avons-nous pas méritée cette clique dépassée ? ils ne sont pas venus au pouvoir par un coup d'Etat mais par les suffrages de la majorité imbécile qui se dit être le peuple français. Belle démocratie que celle où règnent les cons.

Je termine par un exemple personnel, ce qui n'arrive pas souvent ici.
A la moitié du troisième âge, j'aurais l'envie de renouer avec une activité exercée précédemment pour meubler mes jours et pimenter aussi ma retraite. J'ai des connaissances, des relations, de bonnes références bancaires. A l'idée de l'avalanche de formulaires, déclarations, avances sur cotisations, avis des explicateurs de la jongle (experts comptables, conseillers fiscaux...), mon prurit entrepreneurial se calme vite. Nous sommes des milliers dans ce cas à préférer finalement bricoler dans notre garage ou relire Montaigne.

Et pourtant, les contrats que j'obtiendrais seraient pure valeur ajoutée pour l'économie de mon pays et fourniraient des heures de travail à des manufacturiers français par exemple et à quelques prestataires de services. J'ai appris que c'était facile aux Pays-Bas. D'accord, il y a moins de têtes ahuries dans les allées du pouvoir que chez nous et c'est tout un peuple qui a la fibre bizness, mais il faut aimer les Pays-Bas.

Ils ont des rois en plus ! C'est moins tarte !




lundi 16 février 2015

L'argent de la Conquête

Ce billet a été publié dans le numéro 2902 de L'Action française 2000 daté du 5 février 2015 (p.10) qui faisait un dossier "Islam". Il entre en archives RA avec quelques liens supplémentaires pour qui veut creuser le sujet de la finance islamique.

La capture des âmes se fait plus souvent par le chemin de la charité, celui emprunté par les Frères musulmans d'Egypte après avoir observé nos Pères blancs, et que suivent toujours le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien. Pourvoir à l'essentiel, l'oreille en devient attentive. Mais il est des limites à la culture des pauvres et finalement pour progresser, il s'agit d'attaquer le marché de ce qu'on nomme par convention les classes moyennes. Le rendement est moindre mais la qualité monte, on ne peut plus se contenter de textes primitifs et du chant des sourates. Aussi la pédagogie doit-elle être rehaussée. Il faut convoquer à sa définition des esprits déliés comme Tariq Ramadan, voire des experts incontournables en leur domaine. Dans le catalogue de propagande il y a le rapport du Croyant à l'argent. C'est le chantier qui fut confié à la City de Londres, Vatican de la finance, cerveau-moteur de toute l'ingénierie financière du monde. Il en est sorti la finance charia-compatible.
Nous n'avons pas l'intention d'éplucher la charia financière ici¹, mais on devine déjà que sont interdits le prêt à intérêt ou la négociation des dettes et forcément, l'agrandissement des porcheries bretonnes.

C'est parti comme un marché de niche il y a dix ans. La masse brassée aujourd'hui dans le monde dépasse deux trillions de dollars américains pour 40 millions de clients en accroissement constant (source FMI). Quatre-vingt pour cent de cette masse sont sur des comptes bancaires, 15% en bons obligataires (sukuks), 4% en fonds d'investissement et 1% en assurances islamiques (takafuls). Le Dubai International Financial Centre estimait l'an dernier à 270 milliards de dollars la masse des seuls sukuks en circulation. Tous les taux d'accroissement sont à deux chiffres. Si au plan mondial la finance islamique reste encore noyée dans les énormes quantités d'argent en circulation chaque jour, elle est sur une trajectoire d'émergence par la concurrence acharnée des places financières mondiales à en capter les flux.

L'évolution est sensible. A la fin du XXè siècle, les pétro-monarchies investissaient leurs surplus financiers dans de l'immobilier ou dans l'industrie stratégique à côté de placements boursiers à fort levier comme le London Metal Exchange ou plus trivialement en bons du Trésor. La finance typée islamique a attendu longtemps de s'immerger dans l'économie générale. Elle a poussé ses pions partout. Une fois le nihil obstat accordé, elle entre dans des entreprises sur le modèle des banques rhénanes. Son intérêt est marqué pour les firmes intelligentes sous-capitalisées auxquelles elle apporte le tour de table. Les fonds chinois font pareil. Son action étant fondée sur la charia, elle sélectionne des domaines d'activité « hallal » et s'exclut de l'armement ou des casinos par exemple. Mais il est des accommodements avec le Ciel. A côté de ces investissements "purs", grossissent aussi les participations laïques quand l'intérêt d'un pays exige du fonds souverain spécifique qu'il absorbe des activités "entre-deux". C'est le cas des CMN à Cherbourg² qui construisent aussi des corvettes de guerre et qui sont dans l'orbite d'Abu Dhabi. Il y en a beaucoup d'autres partout³ où le savoir-faire est primordial, jusqu'aux moteurs de chars (MTU, Deutz).

Reste à faire le pronostic des priorités islamiques entre la Conquête et la gestion patrimoniale d'excédents colossaux. Dans Le Choc, Samuel Huntington notait que « la résurgence religieuse à travers le monde est une réaction à la laïcisation, au relativisme moral et à la tolérance individuelle, et une réaffirmation des valeurs d’ordre, de discipline, de travail, d’entraide et de solidarité humaine ». La clef d'analyse pour un pronostic crédible est peut-être dans la démographie. Explosera-t-elle que la finance islamique devra être détournée de la gestion de fortune pour accompagner le Charity Bizness de conversion des foules. Sera-t-elle contenue que la finance islamique se capitalisera jusqu'à rejoindre les cercles à gros cigares. Dans les deux cas, la paix chez les économies d'accueil sera recherchée. Un Croyant n'en est pas moins homme, avisé parfois.

Notes :
(1) cf. Aldo Levy «Finance islamique - Opérations financières autorisées et prohibées» chez Gualino-Lextenso Editions, Paris 2012
(2) voir le billet Sinbad de la Hanse sur RA et dans l'AF2000 datée du 16.09.2010 sous le titre "Abu Dhabi conquiert l'Europe"
Additions sur le blogue :
(3) Liste des banques islamiques du monde
(4) Institute Of Islamic Banking
(5) the Economist - Islamic Finance



lundi 9 février 2015

L'élixir du service civique


Le grand désordre de notre nation et la sécession d'une partie de la jeunesse résidant dans ce pays ont remis à la mode le service militaire. Ultime remède à l'incohésion, l'embrigadement assorti d'un savonnage des cerveaux semble être le dernier recours de la bourgeoisie régnante pour... sauver les meubles et la virginité capitalistique des héritières. On friserait la caporalisation si tout cela était pris au sérieux. Rassurons-nous, le canada dry du service aux armées est le service civique dans les MJC et autres associations de notre modèle social, utiles du berceau à la tombe. Le service civique fonctionne sur la base du volontariat, ce qui veut dire qu'il ne s'appliquera pas à ceux qui en auraient le plus besoin. Énième coup d'épée dans l'eau pour la "politique de la ville". Il ne pouvait quand même pas être question, comme le demandaient les pizzaïolos de l'UMP, de militariser l'esprit de jeunes gens réputés défavorisés, mais qui - moins empruntés que la moyenne - se prennent en charge en substituant aux tracasseries de Pôle Emploi le commerce d'hyper-proximité en pied d'immeuble.

Il est bien sûr exclu de former des combattants comme on le faisait jadis dans les compagnies de combat d'appelés, compagnies destinées à recevoir le choc des régiments du Pacte de Varsovie déferlant sur l'Europe occidentale. Jean-Dominique Merchet fait un sort au service militaire qu'il n'est pas besoin d'expliquer dès lors que plus de la moitié de la classe d'âge masculine y échappait à la fin par maints subterfuges ; se rendre sur sa page, c'est définitif. On serait très mal barrés à l'époque actuelle du Djihad si on faisait faire un stage commando aux djeunes des cités. Mais laissons cette foutaise de la conscription* aux vibrations des préaux politiques et intéressons-nous aux causes de l'effondrement de la morale sociale sur zone.

Élevons le débat et reprenons ce qu'écrivait André Bridoux (1893-1982) qui était LE prof de philo du Lycée Saint-Louis avant guerre, à propos de l'armature sociale indispensable à la morale :

« Quand les liens sociaux n'existent pas ou sont trop faibles, l'homme reste sans moralité, au niveau du Cyclope d'Homère qui n'a ni le respect, ni même la notion des droits d'autrui. S'il est une idée fausse, c'est celle de Rousseau que l'homme est né bon et que la société l'a perverti. En réalité, pour qu'un homme puisse avoir une conduite morale, surtout constamment morale, il lui faut l'encadrement des institutions et des mœurs, la conscience du contrôle permanent d'autrui, la représentation des sanctions et des organismes judiciaires [ndlr : en résumé... un État], et le secours constant de ce potentiel de civilisation qui est immanent à toute société et qui reste incorporé aux moelles de chacun par l'éducation.
Quand ces points d'appui viennent à manquer ou à fléchir, la vie morale s'altère aussitôt. On le voit bien dans les pays neufs, dans les villes où plusieurs civilisations s'usent les unes contre les autres ; en temps de révolution, de guerre, d'après-guerre ; quand les hommes sont transplantés, en séjour à l'étranger, ou seulement en voyage ».
(Que pourrait-on aujourd'hui retrancher de ce texte publié en 1945 ? Rien !)

Les bataillons de cyclopes à taille humaine qui patrouillent nos banlieues sont les produits de la carence d'État. Ils sont les marqueurs de l'impéritie des pouvoirs qui se sont succédé aux affaires depuis quarante ans, accroissant les privilèges et l'établissement des vainqueurs du jour dans la fenêtre d'opportunité de leur mandat au lieu de gouverner un monde bien trop compliqué pour leurs esprits formatés par "Jean-Jacques" et l'Ecole nationale d'administration. Que croit-on obtenir par le lancement d'un service civique comme une marque de lessive, si ce n'est l'agrandissement des fractures sociales entre ceux dont la fibre civique a besoin de confirmation et tous les autres pour qui le civisme est pure agression de leur bulle personnelle à petit rayon ! Une fois encore, le pouvoir se défausse de ses responsabilités sur un plan de communication et un arrosage budgétaire qui suffiront bien à atteindre les prochaines élections. C'est une honte !

Mais compter, même sans trop y croire, sur pareille classe politique pour réformer et durcir l'État dans son domaine exclusif est une forme de fuite, une lâcheté puisqu'il est maintenant reconnu par la plus grande majorité de ce peuple qu'ils sont en totale incapacité d'agir efficacement. Alors, le peuple qui ne dit mot contre cette absurdité est-il pourri ? Intoxiqué à la défausse ? Bovin ? Il faut le croire et remplacer le coq gaulois de nos emblèmes par la fière autruche républicaine.

Que faut-il faire, me demande-t-on dans l'oreillette. Easy ! Repartir de zéro et recoudre la chaîne (des valeurs civilisationnelles) et la trame (des lois de la république) de l'État régalien sur tout le territoire en supprimant les leurres diversitoïdes qui ne font que distraire de l'essentiel. Appliquer totalement les lois qui gouvernent nos mœurs... comme en Chine et dans cent pays qui n'imaginent même pas qu'on puisse les prendre pour des paillassons. Définir la réforme est simple, il n'y faut qu'une volonté d'application. Faudra-t-il d'autres morts pour y parvenir ? Répondre à cette question met le blogueur en péril. Ceux qui s'en chargeront devront être crédibles, dans le sens où aucun de ceux qui appartiennent aujourd'hui à la classe politique à l'embouche ne pourra être retenu dans cet emploi.

Il est malgré tout possible et certainement utile pour son éducation que la jeunesse donne un peu de son temps aux autres habitants de ce pays avant d'entrer dans sa vie professionnelle, à la manière des Peace Corps américains, mais de là à en faire un outil socio-politique... c'est n'importe quoi, et se moquer de nous surtout.

Même pas peur !


(*) on sait mon aversion de la levée en masse qui n'est qu'un budget de morts accordé au pouvoir.

lundi 2 février 2015

Héritage impossible ? En avant !


La rumeur et Royauté-News nous apprennent que le prince héritier d'Orléans a conféré l'Ordre de l'Etoile, décoration tombée en désuétude au XVè siècle, qui dépendait personnellement du roi ! Il l'aurait agrégé à l'Ordre de Notre-Dame du Mont Carmel renaissant, qui fut jusqu'à la fin de la Restauration un ordre pontifical, lié d'ailleurs à l'Ordre de Saint Lazare, autre résurrection tardive du même prince au bénéfice cette fois de son neveu Charles-Philippe d'Orléans qui s'en est retiré depuis. On aime bien les "ordres de chevalerie" donc. Cette association étoilée s'intéresse au patrimoine. Très bien, il en manquait¹. Ce qui coince est que ces re-créations, discutables en République, puisent dans un héritage duquel la maison d'Orléans est retranchée pour ne pas dire "tranchée". La succession dynastique fut coupée, et comment, un certain 17 janvier 1793 et l'épissure du Milliard des émigrés n'a pas tenu au-delà du 9 août 1830. N'y revenons pas².

Le droit dynastique n'obéit pas au code civil bourgeois, la maison d'Orléans est pleinement qualifiée pour se réclamer de la Monarchie de Juillet, qui ne fut pas un régime blâmable, mais elle ne l'est pas pour se réclamer de l'Ancien régime qu'elle a contribué à détruire au lieu de l'aider à se réformer !
L'invocation aux Quarante rois est donc une captation d'héritage, finalement bénigne, la recréation des ordres de chevalerie anciens une distraction royale pour agréger à la Cour en attente des arrivistes pressés d'entrer dans le tout Paris. Futilité des vanités, quoique les quatre mannequins en armure sur le parvis de St Germain l'Auxerrois ce 21 janvier nous aient signalé une insistance rare à ridiculiser une cause royaliste qui n'en a pas besoin.

La politique considérée comme souci
Comme le dit très bien Roman Ungern dans un éditorial de Vexilla Galliae qui détonne - ça, pour détonner ! - « Il est temps d'abaisser le pont levis, de remiser la perruque poudrée et de concevoir que les Royalistes ne mesurent plus leur engagement ni au nombre de quartiers de noblesse, puisque nous sommes bien nombreux à en être dépourvus, ni à leur détachement des choses de ce monde.»

Puis il développe avec bonheur d'un magistral élan mon vieux slogan rouillé : savoir se salir les idées : «Nous n'allons pas céder, nous n'allons pas abandonner le débat politique et la grande bataille de l'information au prétexte que ceux-ci seraient souillés par l'ignominie républicaine et feraient de ceux qui l'approchent de piètres royalistes.»
Mais comme Royal-Artillerie sert rarement la soupe, je vous invite à lire ce billet exceptionnel en version originale en cliquant ici.

Plutôt que d'acquérir à grand frais les oripeaux d'une monarchie disparue, nos prétendants et leurs conseils seraient mieux avisés de conceptualiser de nouvelles institutions monarchiques capables de remédier à notre terrible déclin et - ce n'est pas rien - dans lesquelles ils se couleraient plus facilement que dans les Lois fondamentales du royaume qui les écrasent, d'aucun bord qu'on regarde. Conceptualiser avec qui ! C'est la bonne question que soulève Roman Ungern. Où sont les Maistre, Bonald, les Maurras, Boutang du siècle nouveau ? On s'en passerait peut-être si nous pouvions construire ex nihilo, sur la tabula rasa. Et pourquoi pas ? Mais avec qui ?

Un forumeur que j'estime m'avouait tantôt que la sève de Bourbon ou celle d'Orléans, si elle n'est pas tarie, n'avait plus de force. A eux de nous prouver que non ! A défaut de les croiser au prochain changement de paradigme, attendrait-on quelque gentilhomme dressé au milieu des ruines annoncées, qui prouvera, lui, quelque chose ? Il n'y a pas d'alternative au principe de réalité ; ce n'est pas le premier à Reims qui régnera mais le dernier debout à Paris. Être prime, et le paraître et le prétendre. Le "Je ne Prétends pas, Je Suis" du Bourbon sonne bien mais exige plus de lui que des autres, sauf à ne servir qu'à meubler l'héraldique. Vu la taille du défi, il est condamné à donner beaucoup plus, s'il veut recevoir un peu plus. Se revendiquer l'héritier historique est accepter une lourde charge qui appelle à la fois des qualités personnelles spécifiques³ et le renfort de soutiens compétents, résilients et désintéressés.

In cauda, titres, ordres et décorations sont, en l'état de catalepsie du mouvement, des pitreries indignes de ceux qui les décernent. Il y a mieux à faire que ce carnaval, et déjà, promouvoir un schéma institutionnel de rechange plus précis ; communiquer professionnellement aussi, ce qui semblerait être une gageure tant on est mauvais.

Ce sera tout pour aujourd'hui bien que j'en aie encore sous la pédale.

(1) s'il n'y en a pas déjà vingt de notre bord, il n'y en pas une
(2) pour les digressions, passer par la Wikipedia, ce sera plus rapide :)
(3) à paraître sur Royal-Artillerie le 16 février prochain De l'âme des princes


Bal masqué à St Germain l'Auxerrois pour la mort du Roi 

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