Une anecdote montée en graines de haine sur le parvis de la cathédrale de Palma de Majorque au sortir de la messe de Pâques m'a rappelé la réflexion d'un conférencier de la Restauration nationale dont j'ai perdu le nom, qui soutenait que les monarques constitutionnels d'aujourd'hui n'ont d'autorité que celle concédée par l'opinion. D'où la mise en scène soignée de leur vie publique et les précautions morales de leur vie privée, quoique il y ait des pertes en ligne à cet égard. Le job est plus difficile aujourd'hui que sous Louis XV...
La famille royale presque au complet (il manquait les infantes de la première génération) assista à la messe pontificale de la résurrection aux îles Baléares. Un peu d'énervement entre la belle-mère et sa bru pour un cliché imprévu a déclenché les hostilités sur les réseaux sociaux espagnols et jusque sur le site français Noblesse & Royautés de Régine Salens (clic). Depuis lors, image oblige, les choses se sont calmées puisque la famille tout sourire est allée avant-hier dimanche réconforter Juan-Carlos à l'hôpital Moraleja pour le remplacement de sa rotule droite.
Sans entrer dans le débat des classes sociales, se pose la question des abdications. Tout simplement. De mémoire, ce sont les souverains néerlandais qui ont inauguré la mise à la retraite d'un monarque vieux au bénéfice d'un jeune successeur, disposant de la santé et d'une meilleure télégénie... C'est peu dire l'embourgeoisement de la fonction qui dévoile surtout que le poste et le business y attaché relèvent plus du management à la Jacques Séguéla que de la transcendance, même si dans les deux cas la Rolex est règlementaire.
Il faut maintenant se mettre à la place des titulaires : plaire ou mourir est l'affaire de tous les instants dès que l'on sort des appartements privés. Autant dire que régner aujourd'hui est sans doute sur terre le dernier job à plein temps de douze ou quatorze heures par jour... sur 365 jours. Une lutte quotidienne contre l'humeur, les humeurs, la méforme, peines et joies contenues sans jamais parler du chagrin. Il faut être chaque jour impeccable, les souverains sont guettés, épiés, vilipendés, applaudis par une foule hystérisée qui a compris son pouvoir. On peut comprendre que les réglages de leur vie familiale soient très fins et que la mise en musique des relations publiques doivent s'apprendre tôt dans une famille royale.
C'est le handicap de Letizia Ortiz, reine consort d'Espagne, d'extraction modeste mais intelligente et courageuse (Wikipedia), à qui le peuple espagnol reproche plus qu'elle n'en doit ! Et ce désamour entretient la guerre à la roture jusque dans notre République. Nous citons ci-dessous l'ire de Charles, thuriféraire quotidien du "dauphin" d'Orléans, dans un commentaire donné chez Régine Salens à propos de l'incident de Palma de Majorque :
A lire ce texte, on comprend qu'un léger faux-pas (et encore !) va condamner la monarchie espagnole aux yeux des imbéciles, même si les Bourbons d'Espagne sont plus exposés que d'autres familles régnantes par l'histoire. Charles-Quint avait eu maille à partir avec les Espagnols qui le voyait comme un étranger et se soumirent avec beaucoup d'arrière-pensées. C'est depuis le triste règne de Carlos IV (1788-1808) qui prit sa position pour une rente, que les Bourbons d'Espagne rencontrèrent des difficultés similaires au sein de la nation espagnole. Ils proviennent du royaume centralisé de France et furent incités à répliquer le modèle d'origine quand c'était possible. Or, contrairement à la France, le royaume d'Espagne est une fusion de royaumes égaux dont les sujets restent fiers de leur diversité. León, Aragon, Castille, Navarre sont pairs et seules les nécessités les agrégèrent. Reste une zone méridionale apparentée à l'Afrique qui, n'ayant pas les antécédents du nord, finalement sera la plus espagnole de toutes, l'Andalousie. Pour résumer, la monarchie actuelle est fragile par construction, d'autant qu'elle a été donnée ou rendue (comme on veut) à l'Espagne par le dictateur Franco.
Si donc c'est si compliqué, la moindre des choses serait que le couple royal qui a abdiqué pour déficit du modèle moral convenu, laisse les jeunes s'organiser à leur manière et ne les encombre pas de leur participation, et caprices parfois. On ne reste pas sur scène quand la pièce est finie, surtout quand on ne peut pas applaudir le metteur en scène ni chanter Cara al Sol ! Quoique à défaut, El Novio de la Muerte fasse l'affaire. Pause :
Malaga 2016
La vraie question est de savoir si la fonction est entamée par le marketing. Les monarques constitutionnels incarnent la nationalité, conseillent le gouvernement, arbitrent les crises politiques et pour certains, promulguent les lois. L'effet d'un scandale (il n'y a pas eu de scandale à Palma de Majorque) se mesure à l'aune de l'indulgence dont bénéficie naturellement le titulaire. On a bien vu lors de l'accident mortel de Diana Spencer que le capital de sympathie des Anglais pour la reine Elizabeth II avait fondu parce qu'elle n'avait pas pris en compte l'émotion populaire en laissant flotter haut les couleurs britanniques sur ses palais. Elle dut rapidement amener l'oriflamme et organiser des obsèques royales comme si l'ex-princesse était toujours sur le payroll de la Firme.
En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle était devenue une reine hypocrite sans cœur, préservant les égarements extra-conjugaux du prince de Galles condamnés déjà par l'opinion, à un point tel qu'aujourd'hui encore il y a consensus au Royaume-Uni pour passer le sceptre à son petit-fils William au prétexte que Charles sera trop âgé à la mort de la reine, et que sa nouvelle épouse ne convient pas, ayant été la maîtresse du prince marié et co-responsable du désastre Diana Spencer. En fait, ses sujets reprochent à la Reine d'avoir provoqué par son indulgence filiale les frasques amoureuses de Diana qui, dans une famille de riches rastacouères qu'elle n'aurait jamais dû fréquenter, l'ont conduite à la tragédie du tunnel de l'Alma.
En Espagne, l'accident de chasse à l'éléphant du roi Juan-Carlos, ajouté à son vagabondage extra-conjugal (le roi aux 5000 maîtresses, a-t-on écrit), l'ont conduit à l'abdication par retournement de l'opinion. En Suède, Charles XVI Gustave fut un moment en difficulté à cause de sa vie de playboy - il accéda à vingt-sept ans ; il s'est rangé des voitures ensuite mais ses pouvoirs ont été diminués entretemps au Riksdag par manque de sérieux du titulaire !
Quand on milite pour le retour du roi en France, ce n'est pas pour installer le meilleur management possible de l'image royale sur papier glacé. Militer est une démarche rationnelle, construite patiemment, qui promeut les avantages explicites d'un autre régime politique. L'affect populaire qui sous-tend la conversation permanente du monarque et de ses sujets est souvent négligé à ce stade, même si le charisme du champion est mis en avant entre deux démonstrations définitives. Et pourtant c'est un élément essentiel de la restauration du roi parce que la conversion du pays ne pourra éviter le plébiscite, avant ou après. Le fameux sacre de Reims ne pourra se faire sans lui, et même à regret, le roi devra avoir la gueule de l'emploi.
Si nous laissons vieillir tranquillement notre "prince de Galles à nous" au milieu des aquarelles et des ordres de chevalerie recréés, observons que les jeunes prétendants en lice soignent leur image familiale jusqu'à parfois se mettre eux-mêmes en scène, comme le font à Dreux les Vendôme. A cet égard, Anjou est plus économe de relations publiques et protège de près ses trois enfants. Comme la reine Letizia le fait avec ses deux filles !
Ceci nous éloigne un peu de la lieutenance du Christ sur terre et ses écrouelles, mais sauf désintégration du noyau atomique, c'est un monarque constitutionnel du modèle boréal qui risque un jour de régner en France. Certains en seront dépités, d'autres penseront que c'est un bon début, plus nombreux seront ceux à y voir un achèvement. Alors attention, messires, au déficit d'image et gardez-vous de vos amis !
La famille royale presque au complet (il manquait les infantes de la première génération) assista à la messe pontificale de la résurrection aux îles Baléares. Un peu d'énervement entre la belle-mère et sa bru pour un cliché imprévu a déclenché les hostilités sur les réseaux sociaux espagnols et jusque sur le site français Noblesse & Royautés de Régine Salens (clic). Depuis lors, image oblige, les choses se sont calmées puisque la famille tout sourire est allée avant-hier dimanche réconforter Juan-Carlos à l'hôpital Moraleja pour le remplacement de sa rotule droite.
Sans entrer dans le débat des classes sociales, se pose la question des abdications. Tout simplement. De mémoire, ce sont les souverains néerlandais qui ont inauguré la mise à la retraite d'un monarque vieux au bénéfice d'un jeune successeur, disposant de la santé et d'une meilleure télégénie... C'est peu dire l'embourgeoisement de la fonction qui dévoile surtout que le poste et le business y attaché relèvent plus du management à la Jacques Séguéla que de la transcendance, même si dans les deux cas la Rolex est règlementaire.
Il faut maintenant se mettre à la place des titulaires : plaire ou mourir est l'affaire de tous les instants dès que l'on sort des appartements privés. Autant dire que régner aujourd'hui est sans doute sur terre le dernier job à plein temps de douze ou quatorze heures par jour... sur 365 jours. Une lutte quotidienne contre l'humeur, les humeurs, la méforme, peines et joies contenues sans jamais parler du chagrin. Il faut être chaque jour impeccable, les souverains sont guettés, épiés, vilipendés, applaudis par une foule hystérisée qui a compris son pouvoir. On peut comprendre que les réglages de leur vie familiale soient très fins et que la mise en musique des relations publiques doivent s'apprendre tôt dans une famille royale.
C'est le handicap de Letizia Ortiz, reine consort d'Espagne, d'extraction modeste mais intelligente et courageuse (Wikipedia), à qui le peuple espagnol reproche plus qu'elle n'en doit ! Et ce désamour entretient la guerre à la roture jusque dans notre République. Nous citons ci-dessous l'ire de Charles, thuriféraire quotidien du "dauphin" d'Orléans, dans un commentaire donné chez Régine Salens à propos de l'incident de Palma de Majorque :
Cette épisode navrant à l’intérieur même d’une église le jour de Pâques montre le vrai visage de Letizia, une femme autoritaire, arrogante et pas sympathique pour un sou.
Les gestes déplacés de la bimbo bombardée Reine d’Espagne envers la véritable Souveraine, celle qui incarne toujours la monarchie éternelle aux yeux des Espagnols, sont minables.
Je plains de toute mon cœur l’actuel Roi qui doit supporter au quotidien l’autoritarisme et les vilaines manières d’une épouse obsédée uniquement par sa personne et son image.
Letizia n’intéresse en Espagne que les fans de starlettes qui décortiquent à chacune de ses apparitions ses vêtements, ses chaussures, ses extensions et ses derniers délires chirurgicaux.
Ni les monarchistes ni les républicains n’ont de respect et d’affection pour cette femme auto-centrée sur elle alors que Sophie était respectée par le peuple.
Une monarchie où la Souveraine se comporte d’une si vilaine manière n’a plus lieu d’exister. En épousant Letizia, Felipe a fait une grave erreur, il le sait aujourd’hui mais le mal est fait. (Charles - 5 avril 2018 @ 8h42)
A lire ce texte, on comprend qu'un léger faux-pas (et encore !) va condamner la monarchie espagnole aux yeux des imbéciles, même si les Bourbons d'Espagne sont plus exposés que d'autres familles régnantes par l'histoire. Charles-Quint avait eu maille à partir avec les Espagnols qui le voyait comme un étranger et se soumirent avec beaucoup d'arrière-pensées. C'est depuis le triste règne de Carlos IV (1788-1808) qui prit sa position pour une rente, que les Bourbons d'Espagne rencontrèrent des difficultés similaires au sein de la nation espagnole. Ils proviennent du royaume centralisé de France et furent incités à répliquer le modèle d'origine quand c'était possible. Or, contrairement à la France, le royaume d'Espagne est une fusion de royaumes égaux dont les sujets restent fiers de leur diversité. León, Aragon, Castille, Navarre sont pairs et seules les nécessités les agrégèrent. Reste une zone méridionale apparentée à l'Afrique qui, n'ayant pas les antécédents du nord, finalement sera la plus espagnole de toutes, l'Andalousie. Pour résumer, la monarchie actuelle est fragile par construction, d'autant qu'elle a été donnée ou rendue (comme on veut) à l'Espagne par le dictateur Franco.
Si donc c'est si compliqué, la moindre des choses serait que le couple royal qui a abdiqué pour déficit du modèle moral convenu, laisse les jeunes s'organiser à leur manière et ne les encombre pas de leur participation, et caprices parfois. On ne reste pas sur scène quand la pièce est finie, surtout quand on ne peut pas applaudir le metteur en scène ni chanter Cara al Sol ! Quoique à défaut, El Novio de la Muerte fasse l'affaire. Pause :
Malaga 2016
La vraie question est de savoir si la fonction est entamée par le marketing. Les monarques constitutionnels incarnent la nationalité, conseillent le gouvernement, arbitrent les crises politiques et pour certains, promulguent les lois. L'effet d'un scandale (il n'y a pas eu de scandale à Palma de Majorque) se mesure à l'aune de l'indulgence dont bénéficie naturellement le titulaire. On a bien vu lors de l'accident mortel de Diana Spencer que le capital de sympathie des Anglais pour la reine Elizabeth II avait fondu parce qu'elle n'avait pas pris en compte l'émotion populaire en laissant flotter haut les couleurs britanniques sur ses palais. Elle dut rapidement amener l'oriflamme et organiser des obsèques royales comme si l'ex-princesse était toujours sur le payroll de la Firme.
En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle était devenue une reine hypocrite sans cœur, préservant les égarements extra-conjugaux du prince de Galles condamnés déjà par l'opinion, à un point tel qu'aujourd'hui encore il y a consensus au Royaume-Uni pour passer le sceptre à son petit-fils William au prétexte que Charles sera trop âgé à la mort de la reine, et que sa nouvelle épouse ne convient pas, ayant été la maîtresse du prince marié et co-responsable du désastre Diana Spencer. En fait, ses sujets reprochent à la Reine d'avoir provoqué par son indulgence filiale les frasques amoureuses de Diana qui, dans une famille de riches rastacouères qu'elle n'aurait jamais dû fréquenter, l'ont conduite à la tragédie du tunnel de l'Alma.
En Espagne, l'accident de chasse à l'éléphant du roi Juan-Carlos, ajouté à son vagabondage extra-conjugal (le roi aux 5000 maîtresses, a-t-on écrit), l'ont conduit à l'abdication par retournement de l'opinion. En Suède, Charles XVI Gustave fut un moment en difficulté à cause de sa vie de playboy - il accéda à vingt-sept ans ; il s'est rangé des voitures ensuite mais ses pouvoirs ont été diminués entretemps au Riksdag par manque de sérieux du titulaire !
Quand on milite pour le retour du roi en France, ce n'est pas pour installer le meilleur management possible de l'image royale sur papier glacé. Militer est une démarche rationnelle, construite patiemment, qui promeut les avantages explicites d'un autre régime politique. L'affect populaire qui sous-tend la conversation permanente du monarque et de ses sujets est souvent négligé à ce stade, même si le charisme du champion est mis en avant entre deux démonstrations définitives. Et pourtant c'est un élément essentiel de la restauration du roi parce que la conversion du pays ne pourra éviter le plébiscite, avant ou après. Le fameux sacre de Reims ne pourra se faire sans lui, et même à regret, le roi devra avoir la gueule de l'emploi.
Si nous laissons vieillir tranquillement notre "prince de Galles à nous" au milieu des aquarelles et des ordres de chevalerie recréés, observons que les jeunes prétendants en lice soignent leur image familiale jusqu'à parfois se mettre eux-mêmes en scène, comme le font à Dreux les Vendôme. A cet égard, Anjou est plus économe de relations publiques et protège de près ses trois enfants. Comme la reine Letizia le fait avec ses deux filles !
Ceci nous éloigne un peu de la lieutenance du Christ sur terre et ses écrouelles, mais sauf désintégration du noyau atomique, c'est un monarque constitutionnel du modèle boréal qui risque un jour de régner en France. Certains en seront dépités, d'autres penseront que c'est un bon début, plus nombreux seront ceux à y voir un achèvement. Alors attention, messires, au déficit d'image et gardez-vous de vos amis !
L'ainat et ses enfants à l'école |