lundi 1 octobre 2018

Au comptoir de l'Improbable

L'adresse au Congrès des familles de Chișinău par le prince Louis de Bourbon délivrée le vendredi 14 septembre 2018 (en anglais) restera dans les annales de la Légitimité pour trois raisons : il s'y présente dans un style direct comme le successeur des rois de France ; il évacue toutes dérives de la famille traditionnelle ; le texte est long (qui l'a écrit ?).

Je vous propose d'en reprendre la chair politique en laissant de côté les politesses et les accessoires rhétoriques, mais le texte peut être lu in extenso en français en cliquant ici. Nous ferons aussi l'économie de la revendication dynastique habituelle.

Nous y voyons trois chapitres, (1) la monarchie héréditaire de projet ; (2) la famille, cellule essentielle des sociétés humaines ; (3) le chaînage des générations. Le verbatim du prince est en caractères gras, les intertitres sont de mon cru.

I.- Le projet capétien est celui d'une famille


Je me trouve héritier d’une famille qui a régné durant plus de huit cents ans en France et qui, surtout, comme tous les historiens le reconnaissent, a fait d’un petit domaine un état puissant et rayonnant en Europe et au-delà. Cette œuvre a été possible parce qu’elle fut celle d’une famille, la famille royale, Ainsi, les lois fondamentales du royaume, la Constitution de l’époque, qui ont permis son développement, étaient à l’origine une loi de famille. Pour le plus grand bien collectif, ces lois organisaient la transmission du pouvoir royal de mâle en mâle par ordre de primogéniture. Elles garantissaient ainsi la stabilité du pouvoir et assuraient une dynastie nationale. Tel est le « miracle capétien ». Loi de famille mais tout autant loi sociale puisqu’elle était basée sur un ordre et qu’il en résultait des hiérarchies naturelles entre les personnes.

C'est l'exact fondement du régime de monarchie héréditaire dans le continuum d'un projet. Tous les royaumes n'en ont pas bénéficié, principalement ceux régis par des monarchies électives dont les intérêts pouvaient être distraits par des contingences extérieures. Deux monarchies européennes au moins sont l'archétype des monarchies de projet, la française et la prussienne. L'anglaise, une thalassocratie s'établissant sur un archipel ramassé est à part. La première fut mise en défaut pour n'avoir pas veillé suffisamment à la condition des peuples alors qu'elle agissait puissamment sur les théâtres extérieurs, la seconde est exactement l'inverse, soucieuse du bien commun à l'intérieur, c'est sa démarche d'hégémonie extérieure qui l'a tuée ; les deux ont disparu. L'exemple de monarchie de déconstruction par l'élection est celui de la Pologne. Nul royaume n'a connu pareils malheurs dans son histoire.
Concernant le modèle, nous rappellerons juste un paragraphe (le 6ème) de l'A-propos de ce blogue publié en 2008 auquel nous ne changeons rien :
Le roi est la clef de voûte idéale puisqu'il pérennise l'idée de Nation, l'incarne toute et la domine. Il sert de repère fixe dans les périodes de tumultes, apaise les contentieux, recherche le bien de chacun et de tous, et par éducation, est au fait de la chose publique très tôt dans sa vie. La charge de roi accumule l'expérience nécessaire à l'exercice de sa fonction pendant une période plus longue que la seule vie du titulaire au moment. Le roi dont le souci premier est le legs d'un héritage toujours mieux consolidé n'est prisonnier d'aucun dogme, d'aucune idéologie, d'aucune loi supérieure à celle qui le sacre. Le roi est enfin la garantie d'un rajeunissement périodique de la clef de voûte nationale quand s'ouvre sa succession. Le modèle est naturellement évolutif.


II.- La cellule essentielle


Nous sommes responsables de cette cellule sociale, lieu de la vraie solidarité et rempart contre la précarité et l’isolement. Cette défense de la famille passe par celle de la vie, de sa conception à la mort naturelle et, au-delà, par le respect dû aux morts qui ne doivent pas devenir des enjeux de pouvoir ; elle passe par la transmission des valeurs et notamment par l’éducation qui ne peut se limiter à l’instruction. Voilà ce qu’il convient d’affirmer et surtout d’assumer malgré les embûches de législations souvent hostiles. Ceux qui attaquent la famille naturelle savent ce qu’ils font. Par la famille ils cherchent à atteindre la société toute entière et ses fondements. C’est ainsi que naissent les totalitarismes. Ce danger est actuel.

Si la cellule familiale a fait ses preuves à outrance - neuf milliards d'êtres humains sont en train de ruiner la seule planète habitable de notre système solaire - la régulation des naissances devrait interpeler l'intelligence dans la procréation au lieu de convoquer la boucherie en dernier ressort. Si Louis de Bourbon ne s'en prend pas explicitement à l'avortement-pour-tous qui est devenu l'étalonnage du progrès d'une civilisation dans l'opinion fabriquée par les médiats, on a compris qu'il est pro-vie comme d'ailleurs son cousin d'Orléans, devenu cette année un administrateur de l’Institut Jérôme Lejeune.

Cette question de la régulation par la mort est en train de monter dans tous les pays, à entendre les cris d'orfraie du camp progressiste qui anticipe une réduction de ses "droits". Il ne m'étonnerait pas que dans dix ans , nous revenions en France à la loi Veil d'origine, celle qui préservait la femme de décisions cruelles en s'arrêtant au seuil du meurtre gratuit. Les réserves de plus en plus ouvertes du corps médical vont y aider, surtout si l'Etat veut le contraindre. Le sujet mérite un article séparé, mais il n'échappe à personne qu'ici, sur ce site, l'embryon est un homme en devenir et rien de moins.

Les positions du prince recoupent celles de La Manif Pour Tous, mais il est quelqu'un de plus médiatisé que Ludovine de la Rochère, qui défend la famille traditionnelle en jetant dans la balance l'alternative qui cerne complètement la question, c'est Marion Maréchal ex-Le Pen. Déjà, à l'époque du projet de "loi famille" du gouvernement Ayrault, elle dénonçait sur les bancs de l'Assemblée nationale, la substitution d'une famille sociale à la famille biologique en des termes non équivoques, contre les promoteurs du mariage des paires stériles, de l'insémination des lesbiennes et de la grossesse commerciale, au seul motif de l'égalité des désirs. Extraits :
« On passe simplement du statut de la famille biologique à la famille sociale (...) où le tiers est au même niveau que les parents, ce que je condamne »;
« Au-delà des temps, des générations, des idéologies, papa-maman reste papa-maman et restera toujours papa-maman, c’est peut-être malheureux mais c’est comme ça »;
« Le beau-père ou la belle-mère n’ont pas le même rôle éducatif et affectif que le père ou la mère »;
« Il faut faire des enfants qui sont élevés dans la culture française, qui aiment cette nation et cette patrie, ... faire des générations qui sont les récepteurs, les héritiers de cette belle culture qui est la nôtre et qui vont pouvoir à leur tour la transférer pour l’avenir ».
(ndlr : lors d'une interview, elle a balayé à une question insidieuse de JJ Bourdin sur la couleur préférable de ces enfants : "français veut dire français !")

Sur le sujet de la famille, Louis de Bourbon et Marion Maréchal sont sur la même longueur d'onde. L'avenir de l'un et de l'autre est à écrire, mais si la bienpensance ne s'intéresse pas encore au prince, il vient juste de se déclarer franquiste et il faut un certain temps aux pornocrates pour trouver un créneau de dénigrement entre deux punchlines, par contre celui de la belle blonde qui louche est au stade de l'alarme si on en croit des gens comme Manuel Vicuña (Arrêt Sur Images) qui dénonce la presse mainstream en train de construire "le monstre" (sic) dont elle se repentira quand seront revenues les HLPSDNH ! Dans ce délai, Louis peut travailler son aisance au pupitre.

L'attelage qui nous plairait peut néanmoins se désunir dans l'amalgame "Franco-Le Pen". Même si les choses pourraient être facilitées par le départ prochain du Menhir et plus encore si Marine Le Pen se retirait sur ses terres pour réfléchir à ses impossibilités, on peut deviner que le combat sera rude face au quatrième pouvoir confisqué par les progressistes. Reste à savoir si l'Opinion y croit encore à ces heures sombres brandies à tort et à travers. Il semblerait qu'ailleurs ce ne soit plus le cas. Les élections des pays de Visegrád, celles d'Autriche, celles d'Italie et même de Suède sont un rejet du bien-penser réglementaire. Les esprits s'affranchissent des chaînes de l'esprit posées après la guerre à l'ouest et après la chute du Mur à l'est. Tout dès lors peut arriver aux prochaines élections européennes.

Entretemps Marion Maréchal promeut son nouvel institut de science politique en direction de l'Espagne dans les colonnes d'El Confidencial (clic). Une rencontre eut-elle été possible ? A refaire !


III.- Le chaînage des générations


Par deux fois le discours de Chișinău s'intéresse au "maillon" de la chaîne généalogique et à la mémoire qu'elle transporte.

Cette famille ce sont ceux qui m’ont précédé et à qui je dois d’être ce que je suis. Voyez-vous, il n’y a pas un jour où je ne pense à mes aïeux qui m’ont légué une histoire qui parfois me dépasse ; où je ne pense à mon frère trop tôt perdu, à mon Père, mort alors que j’étais trop jeune, à mes grands-parents, à ma chère grand-mère décédée il y a quelques mois. D’eux tous, je suis redevable de ce que je suis, petit maillon d’une chaîne immense. Il est absurde de vouloir croire que l’on serait des individus orphelins qui auraient tout à redécouvrir ou à attendre de l’État. Bien évidemment si cela s’applique à ceux qui nous ont précédés, cela est encore plus vrai pour ceux qui sont actuellement à mes côtés, chaque jour, chaque instant.

Le rôle social de chacun d’entre nous. Il repose sur l’expérience de l’histoire et sur l’actualité récente. Lorsque certains cherchent à rompre le pacte social, s’ils combattent dans un premier temps ceux qui s’y opposent par les idées ou par les armes, très vite et toujours ils cherchent à briser les familles. Pensons à la Vendée où femmes et enfants étaient tués encore plus que les combattants eux-mêmes et de façons atroces ; souvenons-nous des Arméniens et des politiques génocidaires qui ont suivi et qui, sur bien des points du globe continuent ; comme nous l’avons vu il y a encore peu, pour les chrétiens d’Orient. Chaque fois, sous le règne des totalitarismes rouge, brun et maintenant vert, les familles sont inquiétées pour ce qu’elles représentent, chaque fois il y a des séparations forcées, l’emprise sur les enfants pour en faire des enfant-soldats, et des mises en esclavages pour les filles et les femmes.

Bien sûr les apprentis-sorciers de la refonte sociale sont gênés par cette mémoire qui vient de loin et transmet les "tares" du monde ancien, le genre, l'altérité, l'éthique, une morale dépassée. C'est pourquoi la famille leur est suspecte. N'a-t-on pas entendu des ministres de l'Education nationale s'arroger la mission de former les consciences au-delà de la simple instruction ? En privé, on nous assure qu'il ne s'agit en fait que d'exfiltrer mentalement les enfants des familles salafistes pour leur apprendre à appliquer les droits de l'homme de notre civilisation des Lumières. Mais ce sont quand même toutes les familles de France qui sont concernées par la captation, si elles ne sont pas spécifiquement visées. Il s'avère néanmoins que les "familles" se défendent assez bien jusqu'ici puisque leurs adversaires se considèrent toujours au milieu d'un combat.



Le discours de Chișinău s'ouvre sur un appel à militer pour défendre et pérenniser la famille traditionnelle, nous en faisons notre conclusion :
Il faut connaître les manières de résister face aux attaques auxquelles la famille traditionnelle est confrontée. Elles sont multiples : accueil d’une famille nombreuse, prière, action politique, sociale ou juridique, et toujours attention et vigilance permanentes.


XII World Congress Of Families 2018 Chisinau Moldavie



Relevé des compteurs de notoriété Facebook France au jour de ce billet :

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Louis de Bourbon.....93353 followers

Jean d'Orléans........5928 followers



Postscriptum du 4 octobre 2018 : On fera son profit de l'article de Jean-Yves PONS sur le frottement d'idées entre le Rassemblement national et le parti des Républicains en cliquant ici.


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