mercredi 19 juin 2019

Trump sur le divan

Quelle mouche a piqué Trump de se mettre "in bed" avec Netanyahou ? Parce que son gendre coiffe des anglaises pour dormir ? Son octennat s'annonçait radieux par l'amorce d'une réindustrialisation des Etats-Unis, la reprise de l'emploi, le retour des bénéfices dans les entreprises, le blocage des latinos et la joie simple et sincère du red neck. Il a fallu qu'il coure patauger dans la fange du conflit israélo-palestinien jusqu'à embrasser en aveugle les vues les plus offensives du Likoud. Sa fille s'étant convertie, on ne lui fera pas l'injure de prétendre qu'il ignore tout du projet sioniste d'Eretz Israël et de la guerre permanente qu'il induit au Proche Orient. Mais avant que de condamner Donald Trump, interjetons appel de sa psychologie.


Il s'est prêté à un long entretien pour Playboy magazine en 1990, bien avant qu'il ne pense à foutre dehors les playmobils du camp de l'éléphant. Cela a le mérite de la neutralité et on y apprend tout ce que vous vouliez savoir sans jamais oser le demander, soit en lisant la recension de Liberty Blitzkrieg écrite en janvier 2016 par Michael Krieger, donc juste avant les Primaires présidentielles du Parti républicain qu'il emporta (clic), soit par le résumé succinct de Royal-Artillerie ci-dessous.

L'animal est un joueur invétéré et plus complexe que ne le montre le chien de prairie mort qu'il porte sur son crâne. Le grossier personnage qu'il cultive est celui de l'éternel gagnant qui a tous les droits, même celui de pousser la balle du pied au quatrième trou. Perdre n'est pas dans son logiciel, même s'il reconnaît qu'au bout du bout, le capital des gains va se liquéfier dans la tombe. Trump est un showman avec un ego démesuré qui s'assoit sur tout principe non approuvé par lui, à l'exception notable du principe de bon sens élémentaire. Toute sa politique est explicable par tweets, il ne s'en prive pas, et son public le comprend au premier mot sans passer par le filtre de l'université ou des média professoraux. On comprend que son activité présidentielle soit terrifiante pour l'establishment de Washington car il est imprévisible et joue plus facilement l'instant que le simple court-terme. Et le monde véritable n'est pas pour lui au fond des rapports des services gouvernementaux mais sur l'écran plat du Bureau Ovale, le portable à la main.

Le show prime tout et lui-même est le show, le Donald Trump Show. On comprend dès lors qu'ayant accédé à la scène du monde devant des milliards de téléspectateurs médusés, il ne puisse cesser d'en jouir, d'où sa candidature pour le second mandat constitutionnel. Mais tout ceci n'explique pas son acharnement contre l'Iran.

Après tout, les accords nucléaires de Vienne (2015) avaient entrouvert la porte de la théocratie pour un pourrissement des mœurs sociales comme cela fut le cas dans les pays de l'Est sous la botte communiste. C'est le Levi's 501, Radio-Luxemburg-the-Radio-of-the-Stars et le PepsiCola qui ont ruiné le communisme, autant que la guerre des étoiles de Ronald Reagan. Il en allait de même pour la société iranienne, étouffée par le clergé le plus rétrograde et misogyne du monde, après les sorciers du Sud-Kivu. Le poison occidental qui infusait déjà à travers le Bazar, allait se répandre plus vite sur les classes défavorisées que sont les femmes, les jeunes, les minorités, les travailleurs modestes et sur la bourgeoisie d'affaires en rupture de foi. Les investisseurs relançaient des projets importants, dans l'automobile ou la recherche pétrolière, tout se mettait en place pour des lendemains supportables et une remise en question d'une république islamique obsolète. Mais non !

Comme tout paysan de l'Indiana, Donald Trump déteste la République islamique d'Iran depuis la prise d'otages des fonctionnaires de l'ambassade américaine à Téhéran en 1979. L'outrage est inexpiable. L'accord de 2015, outre le fait de redévelopper l'Iran, débloquait aussi des fonds séquestrés à l'étranger qui, dans l'esprit de Trump, allaient être versés dans les aventures extérieures des mollahs plus que dans les nécessités sociales. S'y ajoutent les soupçons étayés des services israéliens d'une poursuite en sous-main de la recherche nucléaire à Téhéran. Il faut dire que l'Iran n'a jamais cherché à faire mentir ces allégations, en respectant la lettre des accords de Vienne plus que leur esprit et en s'immisçant dans les conflits voisins jusqu'à déclencher une guerre civile au Yémen, après avoir échoué au Bahrein. Ne parlons même pas de l'installation permanente des Gardiens de la Révolution en Syrie et du surarmement du Hezbollah, dans l'objectif évident de déstabiliser tout le nord de l'Etat hébreu à la première occasion.

Sur les conseils de Netanyahou, Trump a décidé de ne pas attendre le pourrissement annoncé de la société iranienne et de parer immédiatement les coups projetés contre ses deux plus fidèles alliés, Israël et l'Arabie séoudite. En fait, il n'y a pas de stratégie Trump. On est sur le court de tennis et il se bat dans un énième set, là, devant lui, pas demain ! Un seul but, la victoire par la mort de l'adversaire. Ce n'est pas politiquement correct du moment qu'il n'y a pas l'expression d'une philosophie de la diplomatie américaine sur zones et que les kilomètres d'analyses pointues sont délaissées au bénéfice de l'instinct primal ! Je plains ceux qui proposent des cours de prospective diplomatique américaine. Quant à ceux qui dénonçaient Donald Trump comme démagogue, stupide, menteur dans le sillage de la vieille chouette Sanders, ils en sont pour leur frais : le démagogue caresse, circonvient, subvertit. Rien de tout cela, l'horrible tycoon newyorkais fait ce qu'il dit, insulte, contourne les chevaux de frise de la nomenklatura et y réussit plutôt bien, même si ce n'est pas, voire jamais, dans notre intérêt d'allié fidèle. Damned ! The show must go on... à nos frais ! C'était hier un 18 juin, l'appel de Trump à achever le travail... en nous achevant aussi.




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