* "Crèvent les Russes !" (nouveau slogan ukrainien) -
Les analystes en polémologie sont partout interdits devant l'insondable mystère du cerveau de Vladimir Poutine. Au cours d’une entrevue avec le premier ministre de l'époque en Russie en 2011, Joe Biden, vice-président de Barack Obama, lui avait dit : « Je vous regarde dans les yeux et je ne pense pas que vous ayez une âme ». Lequel lui avait répondu en souriant : « Nous nous comprenons », ce qui trahissait un certain décontenancement. C'était à l'époque du reset USA-Russie post-Clinton. Depuis lors le lieutenant-colonel du KGB disparu est entré dans un rêve de tsar : réunir les peuples russes éclatés dans des entités hostiles à la Fédération, que sont l'Ukraine, la Transnistrie, l'Abkhasie, l'Ossétie du Sud, la Biélorussie, la Lettonie et l'Estonie. Ces Etats ne sont pas des nations, il n'y a qu'une nation, la russe. Que l'Ukraine et la Biélorussie ait disposé chacune d'un siège à l'ONU dès le début comme membre-fondateur au sein de l'Union soviétique ne l'impressionne pas. Que les peuples de ces pays, quand ils sont consultés, n'aient d'autre envie que leur liberté, non plus ! Qu'ils soient plutôt fascinés par la civilisation occidentale dont on dit jusqu'ici tant de mal, n'intéresse pas le gouvernement russe qui est devenu une énorme agence de renseignement, déstabilisation, flicage et basse police tout à la fois, tournant sur elle-même sans influences extérieures. Les Ukrainiens de 2022 ne sont plus ceux de 2014. Ils ont fait leur choix, c'est Niet ! Et les malfaisants du Kremlin n'en veulent rien savoir puisque ça ne correspond pas à l'axiome poutinien de la nation éparse. La réalité doit correspondre à l'image mentale que s'en fait le tsar. D'où le danger !
Enivré par la destruction de Grozny, par la capture sanglante du Donbass ukrainien et celle de la Crimée, Vladimir Poutine cherche à théoriser ses pulsions pour les inscrire dans l'histoire : faire renaître l'empire éternel, bien qu'il se soit effondré sous son propre poids en 1991. Le danger est qu'il n'est entouré que de courtisans, sinon d'anciens Tchékistes sélectionnés pour leur fidélité à toute épreuve, qui le confortent dans sa "mission". Prendra-t-il le risque d'entrer en guerre contre l'Etat ukrainien pour prouver à ses affidés qu'il tient fermement la barre de l'empire, est le souci des chancelleries. Le défi est carrément psychiatrique. Poutine et tout le Kremlin se sont construit un mode irréel, un jeu de rôles, où ils naviguent de niveau en niveau, gagnants des points à mesure qu'ils avancent. Le défi de l'Occident est de les sortir de l'écran vidéo pour les faire atterrir. Il est possible que des oligarques hors les murs suggèrent au petit tsar que le prix à payer sera tel pour l'économie, que le peuple russe finira par refuser le rêve non essentiel du retour de l'Union soviétique et se soulèvera. Cette économie de rentes minières captées par les familles mafieuses est sous-développée et peu performante (12ème PIB mondial), drainée en plus par des dépenses militaires difficiles à soutenir, qui brident tout développement sérieux au-delà des deux grandes métropoles. Il faut souhaiter qu'ils soient convaincants avec tous ceux qui, au pouvoir, ont amassé des fortunes exterritorialisées, lesquelles seront sequestrées en cas de guerre.
Jusqu'où le bluff ira-t-il ? Parce qu'il faut se persuader que le Kremlin est engagé dans un grand bluff pour trouver le sommeil. Jusqu'où les alliés dictatoriaux - on pense à la Chine populaire - laisseront-ils délirer Vladimir Poutine sachant bien qu'une confrontation Est-Ouest mettra à mal toutes les économies du monde, jusqu'à fragiliser partout les régimes basés sur la coercition des peuples ? Je ne voudrais pas être à la place du conseiller à la Maison Blanche qui sera chargé d'influencer la décision de Joe Biden en cas d'invasion de l'Ukraine. Au résultat (comme on dit au champ de tir), la pression inconsidérée de Vladimir Poutine sur les anciennes républiques de l'Union soviétique a paradoxalement renforcé leur attachement à l'OTAN, a reconstitué des forces armées occidentales sur la frontière, a fait entrer des escadres atlantiques en Baltique orientale et en Mer noire, a retourné les pays neutres de proximité comme la Suède et la Finlande, et a refait l'unité des PECOs contre l'ours russe. Quand ils ont intégré les deux structures (OTAN et CE) tous ces pays ont dit à l'Ouest la même chose : l'Ours est rentré dans sa caverne mais il va fatalement en sortir un jour, affamé. En attendant, le parlage continue.
Ring the bells that still can ring
Forget your perfect offering
There is a crack in everything
That's how the light gets in !
(clic)
D'autres le disent mieux que nous et développent l'hybris impérial de Poutine comme Richard Robert aujourd'hui dans Telos (clic).
RépondreSupprimerDivers reportages faits en Russie indiquent que le public est pratiquement convaincu que leurs frères ukrainiens sont prisonniers des fascistes de Kiev et que des troupes de l'OTAN occupent le pays. Il convient donc de les libérer. Trop fort !
RépondreSupprimerSans doute, René, la propagande est-elle indispensable à la préparation d'une guerre. Elle se brise ensuite sur le mur des réalités quand rentrent les soldats dans des sacs noirs à destination des familles.
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