dimanche 5 juin 2022

D-day 2022

Avec le jubilé de platine et le débarquement de Normandie c'est la "semaine anglaise". Soixante-dix-huit ans plus tard, nous comptons plus que jamais sur la prise en compte de nos intérêts par le condominium anglo-américain qui définit et gère la stratégie européenne malgré les rodomontades françaises. La faute à qui ?
A nous ! 100% !

paras américains avant largage sur le Cotentin
- Le stick 77 de la 101st Airborne prêt à décoller la nuit du 5 juin 1944 pour un largage sur Carentan -

La question Europe-USA. Le raisonnement américain nous concernant est simple : "Vous, Européens, avez choisi de privilégier des régimes de protection sociale avancée pour ne pas dire extravagants, en réduisant vos moyens de défense à un niveau ridicule, défense que vous remettez entre nos mains. Ne nous prenez pas trop longtemps pour des cons, celui qui paie gouverne ses intérêts propres".

Nous sommes donc le jouet de la politique américaine qui, ne l'oublions pas, suit un cycle de huit ans haché en quatre périodes de deux ans. Il peut donc y avoir des ruptures de tendance et le "complot américain" n'est pas si sûr qu'il continue dans la durée depuis la victoire de la Guerre froide, mais nous n'avons aucune influence sur la tendance du moment. M. Macron en a fait l'amère expérience, deux fois ! Dès l'effondrement de l'Union soviétique, dans lequel notre contribution était nulle, nous nous sommes autorisés à basculer les ressources fiscales attribuées à nos armées vers les caisses sans fond de la protection sociale. En 1991 nous avions 1200 chars de combat, en 2022 nous en avons 222 (c'est facile à retenir). Comme nous l'avons déjà dit, sans appeler les renforts américains nous sommes dans l'incapacité de nous défendre si d'aventure un pouvoir plus belliqueux encore que celui de M. Poutine avançait sur le territoire de l'Europe orientale. Et tous les pays de l'Est savent que tant la France que l'Allemagne d'aujourd'hui sont des nains militaires en combat intensif. Nous avons une belle armée expéditionnaire capable de gérer des hostilités du fort au faible quand celui-ci n'a ni chars ni avions ni canons. Sortis de ce genre d'opérations de gendarmerie coloniale, nous avons des unités de démonstration (qui font vendre) mais jamais la masse critique pour un engagement à parité de capacités. Alors à vouloir troquer l'OTAN contre la Politique de sécurité et de défense commune européenne (Lisbonne 2007) pilotée par la France, nous serons toujours seuls de cet avis ! Dans cette situation de dépendance assumée, nous ne pouvons nous en prendre qu'à nous-mêmes et c'est le seul message sensé qu'avait passé Donald Trump à l'Europe occidentale : "Sortez-vous les doigts et défendez-vous, merde !" ; ce qu'Angela Merkel avait compris comme l'annonce d'un désengagement prochain des Etats-Unis, et c'est tout ! alors qu'elle aurait dû réagir et lancer le plan de réarmement à cent milliards de Scholz !

Si l'Europe est un embarras, qui somme toute leur coûte cher, c'est la Chine le vrai souci des Etats-Unis. La Russie (PIB de l'Espagne avant la guerre qui va passer sous la barre fatidique des mille milliards de dollars l'an prochain) a le destin d'un Katanga avec des ogives nucléaires, mais ça reste gérable pour Washington, surtout si on ruine son économie en la ramenant au statut de fournisseur de matières premières non transformées dont les prix sont fixés à Londres et à Chicago. La Chine par contre, est le premier souci parce qu'elle menace tout le Pacifique nord, et plus bas jusqu'aux Salomons, et parce qu'elle a les moyens humains, industriels et scientifiques de défier les Etats-Unis dans le compartiment de l'innovation, ce dont les Russes sont incapables (et plus encore maintenant que les talents ont calté). Poutine de surcroît, seul dans son château, n'a pas la carrure d'un empereur, et que dire de ses affidés tous tombés du même vieux moule.

Voilà ! Donc en 2022 nous comptons encore sur le déstockage des armes américaines, sur la puissance industrielle des usines d'armement américaines et sur la mobilisation des GI's pour nous défendre ! L'affaire d'Ukraine se règlera à temps et contretemps entre Moscou et Washington, et quoi qu'il arrive si Dieu lui prête vie, Vladimir Poutine aura obtenu un avantage important pour lui et le pouvoir qui lui succèdera, celui de n'avoir que deux interlocuteurs décisifs au monde, Washington et Pékin. L'Europe-providence, trop hétérogène pour précipiter en puissance, fera où on lui dira de faire ! Avec nos régimes sociaux dispendieux et notre culture des loisirs, nous nous sommes rendus sans combattre et sommes à la merci pour longtemps des empires autocratiques revenus, défendus par un autre empire, démocratique certes, mais qui ne nous écoute pas. Commémorons le 6 juin notre abaissement, sans oublier que c'est le 17 juin 1940 que nous avons capitulé définitivement.


4 commentaires:

  1. Il faudrait vraiment que la perception que les français ont de leur pays change. L'immense majorité des gens que je côtoie s'imaginent encore vivre dans un pays militairement "puissant" ou tout du moins en tête de peloton. Le fait de disposer d'un porte avion, de bases outre mer et de l'arme nucléaire maintient nos compatriotes dans l'illusion que nous sommes toujours parmi ceux qui comptent. Personne ne veut entendre qu'entre dépenses sociales à tout va et sécurité militaire il faut choisir. Les guignols qui gouvernent ou prétendent le faire, en maintenant toujours les références ultra usées au " gaullisme" maintiennent l'illusion d'un peuple auto-aveuglé. Jusqu'à quand?

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  2. l faut souhaiter que le peuple mesure enfin le vrai danger d'un pouvoir irrationnel hostile doté de l'arme nucléaire et se convainque de réarmer pour commencer, afin d'élever le niveau de risques d'une attaque conventionnelle sur nos partenaires européens de l'Est.
    De toute façon, le mirage du "majorat" français dans une défense européenne vient de disparaître dans le sable des réalités. Nous sommes un hologramme de défense mais cette supercherie a la vie dure en France alors que nos voisins ont depuis longtemps fait la part des choses nous concernant.
    Les velléités de Macron à faire le paon dans une démarche de médiation nous couvrent de ridicule car il est démuni de tout moyen de pression. Il continue à croire qu'il lui suffit de paraître pour que s'ouvre la Mer Rouge !

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    1. Puis-je dire que si la puissance industrielle allemande est remilitarisée par le plan Scholz, ce que vous appelez le "majorat français" aura disparu à la fin de la décennie. Parlera-t-on encore de défense européenne ?
      Les cartes seront rebattues en remettant la France à sa place parce que ses comptes publics lui interdisent pour longtemps un réarmement massif. C'est la fable de la cigale et de la fourmi.

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  3. Philippe Grasset signale un article de Jacques Attali paru sur son site perso dans lequel le vieux mage anticipe l'échec de Biden aux Mid-Terms et le retour de Trump en 2025, ce qui pourrait conduire au retrait américain de l'OTAN. Et J. Attali de déclarer :
    « Nous devrions alors nous débrouiller seuls face à toute menace extérieure. Et nous n’en avons absolument pas les moyens.»
    C'est le "absolument" dans la bouche d'un homme pour le moins informé qui fait peur.

    On attend le prochain article qui nous dévoilera comment nous pourrions recouvrer les moyens nécessaires à notre protection en l'absence des Etats-Unis.

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