vendredi 15 juillet 2022

"Je n'ai pas changé..."

la grille du Coq

L'entretien que M. Macron a accordé dans les jardins de l'Elysée à Anne-Claire Coudray et à Caroline Roux nous a fait souvenir de la scie de Julio Iglezias : Je n'ai pas changé (No vengo ni voy) ! En rien, ni d'un pouce, ni d'un pied ; et plus sûrement encore, il n'accepte pas l'humiliation des élections législatives envoyant au Palais Bourbon la diversité politique française. L'Assemblée nationale, ce mal constitutionnellement nécessaire sera contournée par tous moyens même légaux, dirait le Martégal, par les conventions ad hoc ou de refondation, mais extérieures à elle, voire par des référendums ! Faites « d'attelages baroques » de groupes non miscibles, les majorités de circonstances ne sont rien moins que des « coups de chaud nocturnes ». C'est montrer bien du mépris pour l'assemblée représentant le peuple souverain ! Mais ce mépris est déjà dans les tuyaux de l'Exécutif à voir avec quelle outrecuidance, Mme Borne répond à la présidente du groupe RN, l'assurant qu'en nulle occasion elle n'attendra ses voix. C'est au tour du ministricule Véran de gloser sur le vote des députés quant au pass sanitaire en frontière, se moquant ouvertement de la ligne politique de certains. Pour qui se prend ce petit con ? La séparation des pouvoirs ça lui parle ? Je hais ce type (c'est pas bien). C'est vrai qu'une fois, excédé par la résistance de certains bancs contre ses mesures prophylactiques, il avait tout simplement prié les opposants de quitter l'hémicycle. C'est là que les godillots macroniens auraient dû réagir pour sauver l'honneur de l'institution.
François Bayrou a bien raison de dire qu'avec une majorité relative à la chambre basse, le poste de Matignon doit être occupé par un politique, capable tel Edgar Faure, de susciter des majorités d'idées en appelant les contributions des groupes d'opposition. Mais pour que ça marche, il faut du talent et personne encore dans ce nouveau gouvernement n'en a vraiment montré.

De cet entretien, on ne retiendra... rien ! Le président nous fait part de son ressenti, et promeut le raisonnable contre le disruptif. Or, la situation risque de dégénérer gravement avant que les groupes de travail préposés au sursaut n'aient rendu leur copie. La rupture de l'approvisionnement en gaz de la République fédérale nous concerne au premier chef, parce qu'elle impacte l'industrie allemande livrée pieds et poings liés au chantage russe par la chancellerie précédente. Une forte récession outre-Rhin aura des conséquences instantanées sur l'économie française totalement impréparée et fragile.
L'autre souci est la solidité du barrage occidental contre les effets de la paranoïa de Poutine. Va-t-il se cantonner à l'Ukraine stricto sensu en y jetant toute la production de ses arsenaux jusqu'au dernier lingot de fonte ou forcera-t-il le corridor de Suwalki pour accéder à sa convenance et sans préavis à l'enclave russe de Kaliningrad ? Il traverserait deux pays de l'OTAN. La France est-elle prête à rejoindre le front balte avec armes et munitions en quantités suffisantes pour participer au sérieux de la réaction atlantique ? Je ne le pense pas, et si une pareille affaire devait arriver, le dévoilement de nos limites matérielles signerait l'enterrement de notre lubie de défense européenne, amoindrissant notre influence au Conseil, au moment où tous les clignotants hurleront au rouge avant que nous appelions nos partenaires de l'eurozone au secours. Souhaitons que Poutine se contente d'humer le sang des purges ukrainiennes et qu'il continue à craindre l'OTAN.

Laissons de côté les affaires intérieures sans intérêt - il va progresser en crabe dans la réforme nécessaire des retraites car le système nous coûte un bras chaque année - mais si nous avons entendu que la France ne lâcherait pas l'Afrique (qu'est-ce à dire ?), rien sur les menaces pesant sur notre domaine ultramarin n'a retenu son attention pour un 14-Juillet. La diplomatie chinoise est très entreprenante sur tout le Pacifique en réponse au pacte AUKUS et pour contrer les manœuvres navales du QUAD. Après les dominions historiques du Pacifique, nous allons être confrontés à notre tour aux essais de déstabilisation de la Chine populaire qui va pousser sur le ventre mou français en Nouvelle Calédonie et aux Iles de la Société, en profitant des émois de souveraineté qui parcourent les populations autochtones habilement travaillées. On a détecté à Nouméa une activité peu commune des Chinois avant le troisième référendum (ils avaient remplacé les Australiens). A tout prétexte utile, pêche, stups, ZEE, les stations de la Marine nationale doivent être renforcées et dotées de bâtiments aptes à la confrontation. Peut-être ces sujets sont-ils trop importants pour être débattus avec le vulgum pecus ?

A l'écouter aujourd'hui on retrouve le Macron du marathon cantonal des gilets jaunes, disert sur tout, ayant les réponses, mais à nul effet à la fin, et se méfiant des corps constitués et du parlement dont il voulait réduire l'influence en le diminuant par la réforme constitutionnelle, réforme enterrée comme les autres. Qu'importe ! Frais comme le gardon de 2017, il n'a pas changé. Il n'a pas intégré la mutation d'une forte proportion de l'électorat vers une forme plus européenne de démocratie. Coalition, compromis, des entraves, que des entraves ! Macron croit en sa légitimité latino-américaine d'un président élu directement par le peuple une fois pour toutes. Taisez-vous, Vulcain forge notre destin !
Entretemps, les derniers sondages (clic) dévoilent que les Français ne croient pas au cabinet Borne II.

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