vendredi 10 mars 2023

Notre fatigue démocratique

Du tumulte entretenu par les centrales syndicales pour préserver la rente des travailleurs protégés et faire régler par les générations montantes les pensions non financées, jaillit parfois de ces foules le cri du "déni de démocratie" ! A constater l'autisme des pouvoirs publics qui ignorent ce fameux "mécontentement populaire" qui, comme "le peuple", ne fut jamais défini, les porte-parole de la contestation en voirie dénoncent un piétinement méprisant des valeurs démocratiques par le président de la République et sa clique de technocrates. Nous abordons ces temps-ci aux rivages de la révolution, non pas avec la veuve et son tragique dégoulinant de sang, mais dans une contestation étroite et précise de la démocratie représentative qui pourrait bien - 89 ans après la ruée des ligues sur le pont de la Concorde - renvoyer nos chers et coûteux parlementaires à leurs études provinciales. Car la réforme des retraites sera votée, d'un coup d'un seul, au calibre 49.3, laissant les masses laborieuses et démocratiques se demander à quoi servent ces assemblées élues à grand frais et traitées à la crème chantilly, pendant que le labeur sue comme un mineur polonais pour son caddie hebdomadaire inflaté.

Ce n'est pas vaine anticipation ; le niveau record d'abstention aux élections législatives doit être compris comme l'expression d'un doute total sur l'utilité des chambres par plus de la moitié du corps électoral de base. Il n'est nul besoin d'être antiparlementaire primaire pour comprendre qu'elles ne servent pas à grand chose, déjà par le ruissellement continu de normes et directives européennes en tous domaines, mais surtout par l'ingénierie gouvernementale des voies de contournement de toute décision ou non-décision de l'Assemblée nationale. Or, constitutionnellement, c'est l'Assemblée nationale qui détient le pouvoir souverain en France. Mais nos députés le croient-ils vraiment ? Le peuple, lui, n'y croit plus. D'autant que les tenants du parlementarisme augmenté en 6ème République, viennent de se vautrer comme jamais dans la bauge qu'est devenu l'hémicycle du palais Bourbon, démonétisant la valeur morale de leur mandat. M. Mélenchon est un braillard talentueux mais sans doute un piètre stratège. Il vient de s'enterrer politiquement ; les chefs syndicaux y veillent déjà.

René de Maupeou, ministre de Louis XV
Ce régime est en péril du seul fait de ses acteurs. Il peut crever sans que l'émotion populaire ne dure plus longtemps qu'il n'y a d'espace entre le journal de 20 heures l'annonçant et les pubs meublant l'intervalle jusqu'au film du soir. Notre démocratie parlementaire dut-elle disparaître qu'elle n'emporterait avec elle que les règles des jeux de pouvoir et aucunement les valeurs abusivement attachées à cette forme de gouvernement. Ni les libertés individuelles, ni les droits de l'homme et de l'animal, ni l'égalité des salaires homme-femme, ni le droit au savoir, ni rien de ce qui garantit une vie paisible au citoyen éveillé ne disparaitra ! Neuf cent vingt-cinq députés ou sénateurs seront licenciés sans indemnités. Pour dire vrai, hormis les jardiniers, les assistants et les huissiers à chaîne, personne ne s'en apercevra ! Nos indécrottables jacobins nous annonceront-ils le chaos indescriptible laissant le pays affronter les heures les plus sombres de notre histoire et la bête dont le ventre est fécond ? Que nenni. Resteront en place une centaine de préfets adossés aux conseils départementaux, qui pourront gouverner le pays au quotidien, et une quinzaine de régions administratives capables de plannification, soit au total cinq mille huit cents conseillers, tous élus au suffrage universel. Sera venu le moment d'augmenter par décret les compétences de ces instances régionales et locales pour palier la suppression des chambres de Paris. Monsieur de Maupeou* applaudit dans sa boîte.

Et puisqu'il faudra quand même une instance qui votera le budget de l'Etat régalien, on pourra réfléchir à un Sénat des Cent, élu par les collectivités locales, qui dialoguera avec le Conseil économique, social et environnemental, lequel fonctionnera comme usine à penser à côté des grands corps régulateurs. Profiter surtout de cette période de relatif désordre pour couper toutes les subventions à toutes les associations et à débander toutes les sinécures, agences, instituts, commissariats, autorités, syndicats extérieurs aux services de l'Etat. Le budget dira merci !

Par quoi remplacer les institutions nationales de pouvoir actuelles ?
Si possible par rien, du moins y tendre.
Et le président de la République ?
Vous voulez rire ? La Théorie des Trois Ridicules ne vous aura pas suffi ?
Du chaos faire naître l'ordre. Ça c'est une vraie création ! A vos crânes, sortez le jus !

* René de Maupeou, très au fait du pouvoir de nuisance extravagant des parlements, débande le parlement de Paris le 20 janvier 1771

4 commentaires:

  1. On avait pensé que le Sénat discuterait au fonds la réforme des retraites en oubliant que les partis socialiste et communiste choisiraient l'obstruction comme leur collègues de la chambre basse, par le dépôt d'amendements en nombre, poussant le gouvernement à demander le vote bloqué.
    Ces partis prétendus de gouvernement n'en sont pas. Ce sont des agitateurs de préaux, montés trop fin pour gouverner quoique ce soit.
    C.

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    1. Attendez-vous pourtant à pire car, bien que nous soyons déjà à l'os, eux n'ont pas encore touché le fond de l'imposture et de l'ignominie. JYP

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  2. La T3R doit être Zébulon, Flanby et Foutriquet la moumoute.
    J'ai bon ?
    Aymeric

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