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Convergeons !

...pour le roi !Il circule ces jours-ci une proposition de convergence d'efforts aux fins d'organisation d'un référendum d'initiative populaire sur le régime politique du pays, sous-tendu par un slogan : Pour vraiment changer, changeons d’institutions politiques ! La lettre ouverte est consultable sur le forum Vive Le Roy en cliquant ici.

L'organisation d'une campagne visant à forcer un référendum comme la campagne référendaire elle-même, qui devrait la suivre si tout se passe bien, exigent l'une et l'autre des moyens. Selon M. Dejouy et ses amis, les moyens nécessaires peuvent être obtenus du système de financement des partis politiques ayant concouru honorablement aux élections législatives et répondant aux règles de notoriété établies. Le taux de base serait de 1,66 euro par voix.
Une charte du parti est en cours d'élaboration. Son article premier pourrait ressembler à ce qui suit :

« 1.1. L’élection présidentielle est un quiproquo qui semble instituer le mensonge en règle d’or de la vie politique nationale. Les Français très attachés à l’élection présidentielle expriment implicitement leur désir d’un chef d’état indépendant, garant de la sécurité, représentant à l’étranger, arbitre du droit et recours en justice, mais ils ne sont pas dupes sur la réalité d’un Président élu au premier tour sur des promesses et au second tour pour éviter le pire par une minorité.
"Je suis désigné par une minorité sur des engagements forts pour gagner le premier tour, je suis élu par une faible majorité sur des objectifs flous pour rassembler au second tour, je me prétends le Président de tous les français le soir de l’élection et je relance ma campagne électorale le lendemain pour assurer ma réélection… suis-je le garant et le référent nécessaire au principe de l’unité nationale" ».

L'instauration d'un régime monarchique garant des intérêts supérieurs de la nation et soucieux du bien commun n'est pas à vanter dans cette note ; ce blogue est celui de convaincus. La démarche consistant à en appeler au peuple est dans le droit fil de l'évolution juridique du principe de souveraineté. Il n'y aura donc pas rupture du concept d'attelage Peuple & Nation, et c'est heureux, sinon l'affaire serait mort-née. Revenons un peu sur la "souveraineté" avec le professeur Olivier Camy.

Si l'Ancien régime reconnaissait que la souveraineté était d'essence divine, le "souverain" n'était réellement que le dépositaire précaire de cette autorité souveraine qui le transcendait. Les réflexions de Bodin (relire avec profit ses Six livres de la République de 1576) fixent les attributs de la souveraineté dans son indivisibilité, son absolu et sa perpétuité ; elle ne se partage pas, préside aux lois puisqu'elle les fait, n'a pas de terme. Il créera dès ce moment le concept qui ouvre la boîte de pandore afin de désennuyer les générations futures de constitutionalistes : la dévolution de puissance que fait la souveraineté immanente à l'Etat, à l'exécutif. Les excès inévitables que provoquera la confusion de puissance (ou pouvoir) et de souveraineté seront relevés par les philosophes du XVIIIè siècle qui allumeront le contre-feu de la souveraineté populaire, retravaillée en souveraineté nationale recueillie dans les mains du corps législatif.
Nous en sommes là.

N'ayant aucune autorité au-dessus de lui, le souverain est complètement libre ou indépendant. La souveraineté se concentre en une seule fonction essentielle, la fonction normative : celle de « faire les lois ». Si le roi de l'Ancien régime n'obéissait qu'à lui-même selon les théories de Bodin, il est en de même du peuple français aujourd'hui. Cette liberté ou indépendance se manifestent en droit constitutionnel : le peuple français est ainsi libre de se donner la législation qu'il souhaite, et par là-même de réviser sa Constitution. Pourquoi attendre ?

Parce que le peuple n'en sait plus rien.
Il ne détecte dans "sa" souveraineté que l'autorisation individuelle et portative d'exercer son droit légitime à manifester sur la voie publique à l'appel de tribuns divers qui vivent de l'émoi populaire. Il faut déjà lui réapprendre qu'il détient un pouvoir suprême que ne peut lui disputer nulle autorité au-dessus de lui puisqu'il n'y en a pas. Et d'embrayer sur la confiscation de cette souveraineté par la caste politique et sa domesticité administrative, ou l'inverse - le domestique étant en ce sens le député.

M. Dejouy, prédisant que les affaires de la République au ruisseau ne risquent pas d'améliorations sensibles d'ici trois ou quatre ans - c'est un euphémisme en plein complot Clearstream - il ne sera pas si grande aventure de sa part que de vouloir oeuvrer à l'organisation d'une consultation populaire fondamentale, dès lors que le "souverain" aura été convaincu de sa propre suprématie.

Il faut déjà former le parti nécessaire au combat, peaufiner son offre politique accessible au plus grand nombre, car c'est bien de faire du chiffre dont il s'agit (Ah, l'horreur démocratique ! diront certains), et surtout forger l'argumentaire référendaire afin de gagner ce futur référendum.

Nota bene : 5 pour cent de votants représentent plus ou moins 1,5 millions de voix selon le taux d'abstention. Il semble présomptueux de programmer un succès référendaire au royalisme si le socle du parti qui le portera est inférieur à 4 pour cent.

Qu'en pensent les royalistes de la palette monarchique ?

Les Providentialistes se gaussent à juste titre puisqu'ils attendent le bon vouloir du seul roi souverain, Jésus le Messie. Ne peut-on les convaincre que la Providence puisse faire une rare exception en mandatant M. Dejouy à l'effet de bouter Satan hors du royaume. Dur mais faisable !

Les Survivantistes vont hésiter. Est-ce paver la voie sous les sabots du destrier royal qui galope depuis la nuit des temps que de rétablir constitutionnellement une monarchie pour l'accueillir ? Grave question, d'autant que le parti survivantiste se divise en deux branches, branche bourbonienne de plein rameau évadé du Temple, et branche mérovingienne, mâtinée de magdalisme. L'avenir donnera la réponse. En attendant faisons place nette en travaillant au référendum.

Les Monarchistes intégraux qui refusent l'évolution du principe de souveraineté, eux sont carrément contre. C'est souiller le sceptre que de le faire monter du peuple alors qu'il descend naturellement de Dieu. Pis encore ne serait-ce quelque part diviniser le peuple ? Sans appel ! On leur demandera qu'à défaut d'aider à constituer le parti, qu'ils se lèvent dans trois ou quatre ans pour aller voter OUI au référendum royaliste qui aura été lancé sans eux.

Les Monarchistes constitutionnels, les plus nombreux en fait, douteront de la faisabilité des scores évoqués plus haut; mais ils se feront violence au motif éternel de leur résilience qui, au-delà de la vertu metallurgique du meilleur acier, est aussi la capacité d'un groupe à continuer à se projeter dans l'avenir, en présence d'événements déstabilisants ou de conditions de vie difficiles, sinon de traumatismes sévères. La résilience est la vertu exprimée par la fière devise de Guillaume d'Orange : "Il n'est pas besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer" ... avec du courage et de la confiance dans le triomphe final de la raison, les justes causes finissent toujours par l'emporter, etc... et les constitionnels marcheront dans le projet.

Restent les Monarchistes conjurés qui ne croient pas à la voie démocratique, mais seulement à l'accession d'aubaine, sorte d'assaut décidé au gré de circonstances favorables. Les mêmes qui débinent la démarche d'Yves Marie Adeline pour cause d'inefficacité a priori, n'en feront pas moins du parti de M. Dejouy, a priori, mais se rallieront a posteriori s'il fait beau, les mauvaises langues disant qu'ils voleront au secours de la victoire.
C'est tout le mal que l'on puisse souhaiter au projet de M. Dejouy.

Et la "question in cauda" est maintenant de savoir ce que devient l'Alliance Royale dans cette démarche.

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