Sans reprendre ces raides certitudes, on conviendra avec les calculateurs payés au mois qui se répandent sur les ondes, que le programme glissant de notre valeureux Premier ministre n'est sévère que dans sa communication dominicaine, austère nulle part et surtout pas pour le train de vie de l'Etat qui est annoncé "bloqué", de plus parfaitement inexact puisque les conditions environnementales de son exécution en 2012 sont imprévisibles, et qu'il ne fait preuve d'aucune fermeté avec les gaspilleurs dénoncés annuellement par la Cour des Comptes, puisqu'il est souvent ordonnateur lui-même du somptuaire et de l'inutile à travers les mille tentacules de la pieuvre étatique qui devrait n'en avoir que huit dans la classification raciste de Linné !
Parlons vrai.
Le déficit budgétaire affiché le 12 octobre par l'Assemblée Nationale comme base de travail était de 82 milliards d'euros. Ce qui donnait le bilan financier ci-dessous (rapport 3805 Tome II de l'Assemblée Nationale) :
Besoins de financement
€ 56,1 Mds = Amortissement de la dette à long terme
€ 42,8 = Amortissement de la dette à moyen terme
€ 1,3 = Amortissement de dettes reprises par l’État
€ 81,8 = Déficit budgétaire
Total des besoins = 182,0 Mds€
Ressources de financement
€ 179,0 Mds = Émissions à moyen et long termes (obligations assimilables du Trésor et bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel), nettes des rachats effectués par l’État et par la Caisse de la dette publique
€ 4,0 = Annulation de titres de l’État par la Caisse de la dette publique
moins 1,1 = Variation nette des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés
moins 4,4 = Variation des dépôts des correspondants
moins 1,0 = Variation du compte de Trésor
€ 3,5 = Autres ressources de trésorerie
Total des ressources = 182,0 Mds€
Observons que l'amortissement de la dette en 2012 dépasse le déficit courant, 100 milliards contre 82. Cet amortissement est pour moitié (49Mds) le paiement d'intérêts sur bons et obligations¹, le reste, remboursement de principal échu. La moitié du refinancement sur les marchés partira donc en fumée. Et compte tenu des évolutions redoutées autant qu'elles sont attendues, cette fumée n'est pas limitée à 49 milliards si les taux obtenus par France-Trésor montent beaucoup. Ils montent déjà². Nos taux à dix ans sont maintenant du double des taux allemands (source BFMBiz 11/11/11), et les taux italiens sont de 85% plus chers que les nôtres. On mesure la marge de progression !
La perte du AAA dont se moque le sénateur Mélenchon signifierait un accroissement mécanique de ces taux et donc du prix du refinancement, puisqu'au delà de la prime de risque exigée par les prêteurs, certaines institutions financières ont l'interdiction statutaire de prendre librement des bons émis par des débiteurs déclassés. Le couac de Standard & Poor's nous déclassant à "AA" annonce simplement la tendance puisque quelqu'un dans l'agence a pris la peine de rédiger ce communiqué. Seule sa parution nous a semblé prématurée, pas sa pertinence.
Les marchés avertis qui commencent à vendre de la dette française ne sont pas les gnomes de Zurich ou le troll tropical de Grand Cayman mais tous les acteurs qui investissent de l'argent en produits financiers ou qui placent leurs excédents de trésorerie sur les places boursières. De grandes entreprises françaises en sont, votre banque, votre companie d'assurances certainement et les fonds souverains, ou de pensions, ou tous autres schémas de prévoyance aussi.
Il n'y a qu'une manière sûre d'être sérieux et de le faire savoir aux prêteurs, c'est de réduire et annuler ce monstrueux déficit primaire : c'est une affaire de 80 milliards au bas mot. Messrs Sakozy & Fillon Limited cherchent huit milliards, ils sont loin du compte, et qui pis est, ils sont bien trop lents. Si le "double A" est déjà dans les tuyaux comme le pensent les marchés, les acteurs vont passer au pronostic auto-réalisateur, ce qui s'avérera très destructeur. A ceux qui dénient toute influence aux marchés et sont près de les combattre on répondra qu'il ne fallait pas s'y risquer et gérer nos affaires en père peinard. C'est trop tard.
Le hic est bien sûr de réduire ce déficit primaire sans "crever" l'économie, et d'être donc rigoureux. Par hasard, ce déficit est du même montant cette année que le total des remboursements et dégrèvements fiscaux (85 Mds), mais ce n'est qu'un signalement bien perçu par Bercy qui chasse la niche.
Quelles sont les dépenses budgétaires dont la diminution voire la suppression n'impacte pas l'économie du pays ? Easy ! Toutes les dépenses politiques. Juste pour le fun, quel serait sur l'économie l'impact de la suppression du Sénat, de l'Assemblée nationale, du Conseil économique et social, des dépenses de sondages et communication de l'Exécutif ? Nul ! Quel serait l'impact de ces suppressions sur la gouvernance du pays ? Nul ! Que subirions-nous par la suppression des Chambres de Commerce ? Rien ! Et nous pourrions continuer par toutes les subventions, conseils, hautes autorités, commissariats et fromages de placement des créanciers des pouvoirs en place. Impact économique nul !
Quant au trou de la Sécurité Sociale, les caisses primaires et les caisses d'allocations familiales savent où porter le fer ; il suffit de les autoriser à manier la hache les yeux bandés comme la Justice au fléau penché.
A la Closerie des Lilas, M. de Closets disait que "nous vivons sur un échaffaudage dont tous les boulons ont été dévissés" et M. Séguéla de lui répondre que "réparer l'échaffaudage nous coûtera une fortune car tous les boulons sont en or". La destruction de l'Etat prébendier ne serait donc pas impossible. On l'a vu en temps de guerre, et pour la première fois de son histoire millénaire la France s'est ruinée en temps de paix. Trop forts !
Mais cela ne suffira pas à terme pour faire 82 milliards, et aucun plan sérieux ne peut laisser de côté la réforme fiscale, une réforme de fond en comble, pratiquement à tabula rasa. A la réserve près que l'impôt doit être pris sur le fruit pas sur la vigne, et que la fiscalité reconstruite doit garder en perspective de ne pas entraver l'innovation, la créativité, l'investissement productif, et de ne pas saper non plus le moral de ceux qui réussissent dans leurs entreprises, même si la République a éduqué le peuple à l'envie et à la punition des gagnants.
Au-delà, on ne fera pas l'économie d'un prélèvement général sur l'assiette fiscale la plus grande afin d'améliorer le rendement de l'impôt. Dans la grande assiette doivent tomber tous les fruits y compris ceux du capital, mais pas le capital lui-même, ce qui est proprement stupide.
Paradoxalement si l'assiette est universelle, le contrôle des contributions est plus facile. Si nous ne voulons pas peser sur la consommation DE PRODUITS FRANCAIS, il suffit de "favoriser" les produits exclusifs d'importation. Ô combien facile malheureusement est devenu ce choix depuis notre désindustrialisation !
Pour rester crédibles et ne pas connaître le sort de l'Italie, nous devrions donc nous atteler à diminuer notre déficit primaire au moins d'un premier quart en 2012, d'un second quart en 2013, d'un troisième en 2014 et l'annuler en 2015, puis chercher de l'excédent sur quinze ans. Mais le faire en trois tiers risque bien d'être obligatoire si les marchés paniquent. Dans ce schéma des quatre quarts, c'est vingt milliards "nouveaux" qu'il faut trouver chaque année. Vingt milliards pour 2012, on se rapproche du plan Fillon qui sera peut-être complété par une troisième tranche après la présidentielle si la majorité est reconduite. A défaut, la typologie dépensière du programme Hollande et son charisme de sous-préfecture nous jetteront à la banqueroute.
Reste la question cruciale du déficit commercial³ que nous ne réduirons que par l'innovation et le travail, et par un coup de pouce du taux de change pour donner l'élan de départ. N'est-ce pas quand même un problème de culture ? L'exaltation de la société de loisirs pourrait passer dans des pays rentiers comme les pétromonarchies, mais pas en France. Il faut retrouver la pugnacité de nos grands-pères en cet anniversaire de la Grande Guerre, et se passionner pour la production industrielle qui ne représente plus que 13% de la valeur ajoutée totale de notre pays, sachant que seule l'industrie exporte en vraie valeur. Feuilleter les catalogues des expositions universelles d'avant-quatorze est un émerveillement ! La France fut et demeure en certains domaines une nation d'ingénieurs. Que ça se voit donc, morbleu !
Mais il y a plus grave.
Jusqu'à la fin des trente glorieuses, l'amélioration continue des conditions de vie annonçait aux générations montantes qu'elles dépasseraient le niveau de vie de leurs parents. La générosité du modèle n'était pas contestée. Ce n'est plus le cas. Les vieux ont de meilleures conditions de vie que les générations suivantes et rien ne dit que le décalage s'inverse à vingt ou trente ans de vue. Or le modèle social failli appelle encore les classes actives à garantir le bien-être supérieur des classes âgées. Ca ne durera pas. Vaffanculo Nonno* sera le titre d'un prochain billet générationnel.
* Va te faire voir chez les Grecs, Pépé !
D'ici là, dites à votre député d'abandonner la moitié de ses émoluments au Trésor, il en aura de reste et largement. Si tu savais, Français, combien se moquent de toi les élites proclamées, tu retournerais la faux.
Note (1): Voir le rapport 3805 Tome I de l'Assemblée nationale
Note (2) On suit très bien tout cela sur www.gecodia.fr.
Note (3): Les Douanes partent sur une hypothèse de travail de 73 milliards d'euros pour 2012.
Note (2) On suit très bien tout cela sur www.gecodia.fr.
Note (3): Les Douanes partent sur une hypothèse de travail de 73 milliards d'euros pour 2012.
Les plans durent quinze jours avant d'être périmés ! C'est de l'enfantillage.
RépondreSupprimerEt pendant de temps-là M. Hollande passe des accords de désindustrialisation avec les Khmers verts : 24 sièges de députés contre la fermeture de 24 réacteurs nucléaires.
RépondreSupprimerDemain il attaque quoi ? la filière automobile ou le TGV ?
C'est cher payé le désistement de la Norvégienne aux 3 pour cent.
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