lundi 18 décembre 2006

Sortir de la querelle dynastique

Sur son blogue de campagne, qui commence d'ailleurs à ameuter la contradiction, ce qui prouve une certaine audience en progrès, Yves Marie Adeline esquive la question qui tue, la querelle dynastique, en motivant sa position :

"A propos de mon silence sur ce sujet, l’un de vous m’écrit: ” Est ce une position délibérément neutre entre cette guéguerre de prétendants, pour permettre de relever la fonction royale dans l’esprit des gens ?” Ma réponse est clairement: “oui”. Je m’explique. La dernière fois que les royalistes ont été majoritaires dans une élection législative, c’était en 1873. 400 députés royalistes! Mais divisés en deux camps exactement pareils: 200 pour le prince de Bourbon, 200 pour le prince d’Orléans. Une exactitude diabolique, tant il est vrai que “le diable” signifie “le diviseur”. A cause de cela, la royauté ne put être instaurée."

Royal-Artillerie avait en son temps relaté ce désastre sous le titre Nuncamas.

Je n'ai pu voir l'émission de Stéphane Bern sur les Orléans, mais un "valet de coeur" en a rendu compte sur un forum de plein vent. Bern marche à l'affect, mais il est généralement pointu même complaisant. Le premier mérite de ce rendez-vous a-t-il été de renouer un dialogue à connotation politique entre le père et le fils ? J'attends de voir l'enregistrement. Le serrement de mains de St Germain l'Auxerrois au début de cette année avait été bref. Querelle de famille ? Les grandes maisons n'ont pas de vie privée, on y danse au vu et su de tous, c'est Louis XIV qui a réglé cette chorégraphie, et soi dit en passant, on peut la tenir pour une grave erreur, alors que le secret de la Sublime Porte avait su préserver le "principe" ... presque jusqu'au bout de l'agonie.

Pour l'instant on peut retenir des déclarations diverses de la famille de France qu'elle privilégierait éventuellement une monarchie de type parlementaire et "socio-libérale" plus proche de la démocratie exercée par la République actuelle, à la limite, une monarchie de type norvégien, même si tout prétendant capétien déteste aucune autre référence que française. Peut-on résumer en disant que la Monarchie de Juillet ne serait pas si décalée que cela comme futur avatar de notre république oligarchique ?

J'ignore si Stéphane Bern a l'intention de convoquer le Bourbon sur son divan, et je ne l'y attends d'ailleurs pas. Il y a matière à scandale aussi de ce bord-là, c'est bon pour l'audience. Le prince Louis ne se pose (apparemment) aucune question, pour ne l'avoir peut-être pas étudiée. Il se réclame du "Je suis" sans prétendre à rien comme on le lui a conseillé. Sa légitimité est clairement assise sur les Lois fondamentales du royaume de France et renoue le fil avec l'Ancien régime dans la continuité du comte de Chambord. On n'en sait pas vraiment plus.
Aucun des thèmes sensibles de la politique française n’a donné lieu à analyse ou commentaires de sa part, non plus que de la part de son secrétariat. Se suffit-il pour le moment des déclarations plus politiques de feu monseigneur son père le duc de Cadix ? L’essentiel de son action est commémoratif. Il en faut ! En attendant peut-être une période de plus intense réflexion.

Personne d'autre que les précités ne revendique quoi que ce soit, depuis que le Bourbon-Naundorff a ravalé ses prétentions, l'os de Hollande n'ayant pas parlé. Pour aller au tréfonds des choses on pourrait examiner les droits carlistes et ceux de Bourbon-Busset, et pour le fun ceux du Bourbon-Bhopal, le seul dont la famille a tenu de très hautes fonctions militaires et de gouvernement de manière ininterrompue, des origines jusqu'à la fin assez récente des maharadjahs. Mais à quoi bon ; le prince que la France attend, d'où qu'il vienne est celui qui aura la vision juste de notre destin, et s'il nous est bénéfique, de l'accomplir ; à l'inverse, de nous en arracher.

Quel est-il donc notre beau prince extralucide ?
"Celui que LA LOI désigne" répondent en coeur les chapelains de la Contre-révolution, sûrs d'eux. La monarchie étant successible par l'hérédité, il suffit de remonter l'état civil ! Pour le reste, le principe primant le prince, les problèmes seront résolus en temps et en heure. Easy !
Si le principe de dévolution automatique du trône qui vise à couper court à toutes manoeuvres d'alternance ou d'usurpation, a trouvé son accomplissement dans le système d'héritage familial, en quoi est-il interdit de redémarrer le principe à zéro, puisqu'il y a eu un début à tout ?
Parce que remonter les états civils légitimes est assez scabreux dans les deux lignées avec des ruptures en tous genres, et même un péché originel inexpiable en droit canon.
Comme on dirait en musique, la mélodie dynastique n’est pas raccord. Et à voir le ton employé par les maisons et leurs hérauts alors que nous ne sommes pas même en situation de ré-instaurer un roi, la dispute tournera vite en guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Les boulets rouges s’appellent Utrech, Egalité, Godoy, Chartres, Anjou, Lazare, et sont approvisionnés en quantité au droit des pièces de gros calibre.

Sinon et pourquoi pas, devra-t-on un jour caractériser et différencier l’offre monarchique de chacune des branches concurrentes en précisant les modèles à choisir, promus par chacune, pour que la question soit tranchée hors d'elles une bonne fois, au prétexte que « le droit du prince naît du besoin du peuple » ?
D’un côté une monarchie libérale et laïque.
De l’autre côté une monarchie de simple droit divin.
Votez ! On verra bien !

Après sa succession automatique, le second avantage de la monarchie capétienne est la formation spécifique prodiguée au prince du berceau à la tombe, nous assurant d'une grande pénétration dans sa fonction, par définition unique.
Les jeunes prétendants actuels répondent-ils à cette exigence de qualification poussée ? Les dauphins n'allaient-ils pas se former en Dauphiné ? Il n'y a plus de province de manoeuvre, mais on peut y suppléer par un parcours scolaire de haut vol, ensuite dans de hautes fonctions de l'administration ou en entreprise.

On peut objecter que le choix qui nous est proposé ne répond pas complètement à ce critère de formation longue et poussée. Et nous soutenons que dans une monarchie active au XXIè siècle, le prince doit être au niveau de ses conseillers, et exceptionnellement décisif. Le "principe" ne fera pas tout, du moins il ne faudrait pas qu’il prime de trop haut ! Le prince fera autant que le principe pour consolider la royauté.
A défaut, nous devrions nous contenter d'une royauté représentative du modèle scandinave. Mais peut-être est-ce dans ces limites plus faciles à cerner que nos jeunes princes préfèreraient s'épanouir.

La question suivante découle de tout cela.
Si un homme se levait qui démontrerait de fortes qualités intellectuelles et une aptitude certaine à faire souche dans de bonnes conditions physiologiques - ça fait un peu directeur de haras, me dit-on dans l'oreillette -, et qui, ce point est primordial, voudrait devenir roi, avec tous les avantages mais aussi tous les inconvénients de la charge par nos temps modernes, sur quel motif se fonderait-on pour lui barrer la route dès lors qu'il répondrait aux avantages du principe monarchique capétien ? Aucun !
Il n'y en a aucun, à peine d'embourber les espoirs de la France dans une querelle dynastique perdue d'avance.

Bien au-delà des Lois fondamentales, la question fondamentale à poser aux prétendants est la suivante : " S'il advenait qu'un homme paré de toutes les qualités de la charge, dans les principes capétiens, se présente devant les instances de décision de la Nation et revendique l'onction de Reims, les lignées survivantes actuelles se rangeraient-elles sous sa bannière pour le servir, et vous-mêmes, prétendants au trône, ferez-vous hommage ?

Laissons le mot de la fin au président de l'Alliance Royale :

"Ce sont 150 ans à peu près qui nous éloignent de la dernière application du principe royal, après bien des déboires. Peut-on imaginer que, après cette rupture de légitimité, un prince pourrait venir sans une rencontre véritable, un accord profond avec le peuple de France? C’est impensable. Autrement dit, on ne fera pas la France sans les Français. Le temps venu, cette rencontre se fera. En attendant, ne perdons pas notre énergie à courir après des querelles passées ou des ombres d’hier, faisons de la vraie politique, ici et maintenant."

Le temps venu, un prince descendra bien du vitrail !
Le roi de carreau !

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