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Quatorze Juillet

médaillon du roi constitutionnel Louis XVI
Ce soir aux bals des pompiers et demain, les Français commémoreront la Fête de la Fédération instituée Fête Nationale par la III° République en sa loi du 6 juillet 1880. Les parlementaires avaient hésité entre deux autres journées, le 30 juin et le 4 août, pour une nocturne sans doute. Les festivités qui avaient été rodées l'année précédente à Longchamp dans une sorte de Bastille Day avant l'heure, démarreront très fort le 14 juillet 1880 ... pour chaque année ne jamais cesser depuis...

Sans retranscrire tous les débats à la Chambre sur le projet de loi, il est intéressant d'extraire le motif d'Henri Martin (de l'Institut), rapporteur au Sénat :

« [...] Cette journée-là (14.07.90), vous ne lui reprocherez pas d’avoir versé une goutte de sang, d’avoir jeté la division à un degré quelconque dans le pays, Elle a été la consécration de l’unité de la France. Oui, elle a consacré ce que l’ancienne royauté avait préparé.
sénateur Henri MartinL’ancienne royauté avait fait pour ainsi dire le corps de la France, et nous ne l’avons pas oublié ; la Révolution, ce jour-là, le 14 juillet 1790, a fait, je ne veux pas dire l’âme de la France, - personne que Dieu n’a fait l’âme de la France, - mais la Révolution a donné à la France conscience d’elle-même; elle a révélé elle-même l’âme de la France. Rappelez-vous donc que ce jour-là, le plus beau et le plus pur de notre histoire, que d’un bout à l’autre du pays, les Pyrénées aux Alpes et au Rhin, tous les Français se donnèrent la main. Rappelez-vous que, de toutes les parties du territoire national, arrivèrent à Paris des députations des gardes nationales et de l’armée qui venaient sanctionner l’œuvre de 89. Rappelez-vous ce qu’elles trouvaient dans ce Paris : tout un peuple, sans distinction d’âge ni de sexe, de rang ni de fortune, s’était associé de cœur, avait participé de ses mains aux prodigieux préparatifs de la fête de la Fédération ; Paris avait travaillé à ériger autour du Champ de Mars cet amphithéâtre vraiment sacré qui a été rasé par le Second empire. Nous ne pouvons plus aujourd’hui convier Paris et les départements sur ces talus du Champ de Mars où tant de milliers d’hommes se pressaient pour assister aux solennités&s nationales.
La fayetteNous trouverons moyen de remplacer le Champ de Mars. Un peuple trouve toujours moyen d’exprimer ce qu’il a dans le cœur et dans la pensée ! Oui, cette journée a été la plus belle de notre histoire. C’est alors qu’a été consacrée cette unité nationale qui ne consiste pas dans les rapports matériels des hommes, qui est bien loin d’être uniquement une question de territoire, de langue et d’habitudes, comme on l’a trop souvent prétendu. Cette question de nationalité, qui a soulevé tant de débats, elle est plus simple qu’on ne l’a faite.
Elle se résume dans la libre volonté humaine, dans le droit des peuples à disposer de leur propre sort, quelles que soient leur origine, leur langue ou leurs moeurs. Si des hommes associés de sentiments et d'idées veulent être frères, ils sont frères. Contre cette volonté, la violence ne peut rien, la fatalité ne peut rien, la volonté humaine y peut tout. Ce qu’une force fatale a fait, la libre volonté le défait. Je crois être plus religieux que personne en proclamant cette puissance et ce droit de la volonté humaine contre la prétendue force des choses qui n’est que la faiblesse des hommes.
Si quelques-uns d’entre vous ont des scrupules contre le premier 14 juillet, ils n’en ont certainement pas quant au second. [...] » (M. Henri Martin - 29 juin 80 au Sénat)


la Fédération par Thevenin
Y aller ou pas ?
Il serait ridicule pour quiconque de fêter la prise de la Bastille par des ivrognes, même si le sang de France est rougi de celui du ceps. Mais la Fête de la Fédération sacrait la monarchie constitutionnelle par la réconciliation ; et les Français de bonne foi pensaient en ce jour que la Révolution était à bon compte, finie. Nous savons que la tragédie n'était pas même jouée, et avec le recul confortable de l'observateur, éclairé de textes et d'analyses, nous jugeons sévèrement ce que d'aucuns prirent ensuite pour un carnaval géant. Les images crées pour l'occasion en attestent certes, mais ce fut la plus grande fête de la Nation, jamais organisée de mémoire de Français (cf. note en bas de page).

Deux cent dix-huit ans ont passé. On se souvient de Talleyrand, évêque athée d'Autun, disant l'une des messes entouré de 300 officiants, de l'attitude théâtrale de Lafayette venu sur son cheval blanc prêter serment à la Constitution au nom de la Garde Nationale de Paris, et du serment de Louis XVI, acclamé :
« Moi, roi des Français, je jure d'employer le pouvoir qui m'est délégué par la loi constitutionnelle de l'État, à maintenir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par moi et à faire exécuter les lois. »

Demain, 14 juillet 2008, un corps de troupe onusien défilera sur les Champs Elysées. En 1790, la délégation américaine était nombreuse, et défila, bannière déployée, sous les ovations des patriotes.

La journée se termina sous la pluie, mais la météo l'avait prévu :
bulletin météo d'époque


Note : La relation de cette journée historique par Diagnopsy est bien construite.


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Commentaires

  1. Déjà la météo, à l'époque ! Et aux ordres discrets du pouvoir !

    Le parallèle est inquiétant ! Entre la joie de cette fête, et ce qui se préparait en réalité, et la journée de demain qui n'est par définition qu'une simple manifestation de routine, et le sort du monde déjà noué par des traîtres !

    Pour ramener cela à l'échelon des préoccupations royalistes, on aura eu la même chose : ceux qui dorment, sauf pour soutenir le régime, et continuent d'être aveugles, au lieu d'être des acteurs présents et actifs des transformations à opérer... Ceux qui sont toujours satisfaits, quoi qu'il arrive, ou quoi qu'il n'arrive pas...

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  2. Petite précision rectificative: c'est un décret et non pas une loi qui est venu instaurer le 14 juillet comme journée nationale.

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  3. Le site du Sénat (mais est-ce un faux site ?) nous dit, parlant du projet de loi défendu par Henri Martin, rapporteur :

    Séances des 21 mai et 8 juin ; le Sénat l’approuve dans ses séances des 27 et 29 juin 1880 à la majorité de 173 contre 64, après qu’une proposition en faveur du 4 août eut été refusée.

    La loi est promulguée le 6 juillet 1880. Le ministre de l’intérieur prescrit aux préfets de veiller à ce que cette journée " soit célébrée avec autant d’éclat que le comportent les ressources locales ".

    Peut-être voulez-vous signifier le décret d'application ?

    Je signale en passant un article du Telegraph sur le 14 juillet français, écrit avec un stylo à grosse mine : Cliquer ici éventuellement.

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  4. J'avais des scrupules à déconsidérer ce que je méconnaissais, cette Fête de la Fédération qu'on dit n'avoir rien à voir avec la Prise de la Bastille qu'elle commémorait pourtant un an plus tard. Or, ces deux textes me montrent comme rien n'est plus faux, et qu'il n'y a pas plus de raison en fait de célébrer l'une que l'autre.

    D'abord, le discours d'Henri Martin, qui fait reposer la nationalité sur la seule volonté de ses membres est mensonger et porteur de grandes illusions, puisque c'est cette conception de l'être Français qui conduit au délitement de la France, les Français ne s'aimant plus après ce que la république a fait d'eux par ailleurs; et comme pour compenser, nous nous retrouvons "frères" de tous les peuples du monde, qui viennent nous dire chez nous comme ils nous aiment... Ensuite, affligeantes sont les paroles de Louis XVI, qui pour rester roi renonce à être souverain. On a vu que dans l'esprit de ceux qui veulent bailloner le roi, cette hérésie et dénaturation du pouvoir ne serait pas même suffisante.

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  5. J'apprends sur le forum ViveLeRoi que la fête nationale a disparu.
    Cette loi du 6 juillet 1880 commémorant la Fête de la Fédération de 1790, a été abrogée par la loi du 2 janvier 1973, publiée au J.O. le 3 janvier 1973, Pompidou régnant.
    Cette loi 73-4 recodifie le Code du Travail et abroge un certain nombre de dispositions antérieures dans son article 2 : Sont abrogées les dispositions de nature législative contenues dans les textes figurant en annexe à la présente loi (annexe II).
    L'annexe II, page 134 du J.O., comporte bien la loi du 6 juillet 1880, et donc l'abroge.
    En revanche les articles L3133-1 et L3134-13 du Code du travail citent encore le 14 juillet parmi les jours chômés, sans plus de raison donc.

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