Il y a cinq ans, c'était "In Alan We Trust" qui avait porté la Bourse aux faîtes vertigineux dont elle chute aujourd'hui !
Mais si l'on sait que Lehman Bros était géré comme un casino et que des dizaines d'autres banques par le monde, ne voulant pas passer pour pauvres rats des champs, en faisaient autant pour se croire affutées, le reflux fait découvrir aussi de grosses entreprises abonnées à la cavalerie, qui rémunéraient leurs actionnaires par la marge de cession/acquisition d'actifs, et non pas sur leurs bénéfices d'exploitation comme c'est la règle. Le groupe d'investissement australien Macquarie qui a des autoroutes en France, des parcs d'éoliennes en Espagne, des ponts à péage au Portugal, des tunnels payants, des aéroports, des highways aux Etats-Unis, s'avère être géré par escamotages d'illusionniste, à la limite du principe pyramidal particulièrement meurtrier lors d'un retournement de conjoncture. Haro sur les banquiers certes, mais ils ne sont pas les seuls. C'est l'âme humaine qui court au fric !
La crise met en lumière aussi les limites de compétence et tempérament des dirigeants du grand monde. A la surprise générale, le chancelier allemand Merkel a franchi son seuil de Peter et depuis la déclaration de crise est en remorque du quadrille Brown-Sarkozy-Trichet-Juncker. On la dit en campagne contre ses alliés sociaux-démocrates de la coalition, mais la toise n'a pas de réglage en fonction des circonstances, vous la faites ou pas. Elle n'a aucune vista et ne peut sortir de l'ornière conservatrice tracée par la Deutschand AG qui lui dicte sa politique.
A ce moment, on doit reconnaître au président Sarkozy une vraie pugnacité à l'international sur un champ technique complexe où peu l'attendaient. C'était pour tous l'ancien chef de la police, un avocat d'affaires rompu à la transaction fiscale, un chef d'Etat rolexisé. Et bien non ! Il rend à la France surendettée par ses prédécesseurs un peu de lustre. Barroso lui même en campagne pour son renouvellement ne le lâche plus d'une semelle dans l'espoir de partager l'aspersion d'eau bénite.
Hélas à Washington, le monde entier s'aperçoit que le directeur français du Fonds monétaire international n'est pas au niveau requis en temps d'orage, puisqu'il est capable de ruiner sa carrière pour une bluette hongroise. Le French lover s'est-il fait relifté avant de prendre l'avion, qu'il était un peu tôt pour se noircir à la liqueur de jouvence de l'abbé Souyri ? Quand on a la plus riche épouse du PAF, qui vous offre la meilleure bouée pour nager dans the Washingtonian Pond, c'est impardonnable de connerie. "De la renommée, il ne lui manquait que la disgrâce" écrivait son biographe quand il fut viré de Bercy en 1999 pour "affaires" (CGE, MNEF, ELF) ; mais le prof libertin effaça l'ardoise médiatique grâce à sa besogne d'économie politique au sein du parti socialiste et servit de repère de saine gouvernance, jusqu'à devenir "présidentiable" et tout de suite après, un "éléphant" de trompe basse.
Au moment où la France a besoin d'une convergence sur ses thèses au FMI, le levier que l'on disait le meilleur de la nomenklatura française, vient de flamber sur l'axe de commande. Limite de l'ouverture à gauche, les compétences n'y sont pas inépuisables ! Si ce n'était lui, nous proposions Montebourg ? D'ailleurs n'est-ce pas un député socialiste qui a regretté le manque d'hommes d'Etat au parti socialiste ?
Outre sa vertu de dévoiler les nageurs à poil, la crise a aussi le mérite, quand elle supprime la croissance, de stigmatiser la bureaucratie. Cette magie de la croissance est nécessaire à la dissimulation de fautes de gestion des Etats. Par l'augmentation régulière des rentrées fiscales à proportion du taux de croissance de l'économie, elle masque l'inflation naturelle des aides en tout genre et l'élargissement systémique des périmètres du fonctionnement administratif.
Dès qu'elle cesse ou si elle s'inverse, apparaissent les privilèges exorbitants du nouvel ancien régime, la gabegie démagogique au bénéfice des clientèles électorales, les pertes en ligne de l'impôt et tous ces ponts construits vers nulle part. C'est un grand jour pour Philippe Séguin que celui où l'on déclare la croissance à zéro ! A l'émission des Quatre Vérités (FR2) de ce matin, Jean-François Copé, chefs des députés UMP, annonçaient la constitution de groupes de traque du gaspillage à tous niveaux ; la journaliste n'a pu se retenir de rire ... et son invité pas moins !
Sur le plan des idées politiques, on assiste à un aggiornamento profond de la droite libérale qui d'une certaine façon exemplifie la plasticité rapide du capitalisme, bien plus pragmatique que dogmatique. La gauche qui ne sait plus où elle est ne sait plus quoi dire. Elle prépare le sacre de Reims sous de vieilles lunes comme si de rien n'était. Enterré sous la coupole du colonel Fabien, le parti communiste se vautre dans le populisme le plus racoleur comme ses ennemis intimes de trotskiland, sans voir que les gens du commun ne sont pas aussi stupides pour ne pouvoir accéder à l'étage de l'économie politique. D'ailleurs passés les premiers jours de stupeur, les zincs résonnent de cycles, d'inter-bancaire, dérivés et leviers, et autres "explications" produites par la vanité de l'Ecclésiaste mais parfois pertinentes.
Les royalistes sont-ils si "beaux" ?
J'ai couru aux chapelles me mettre à jour. Si l'inversion des pôles fut annoncée il y a longtemps par Henri d'Orléans, c'est bien un phénomène de cette ampleur qui nous arrive dessus. Or les chapelles sont quasiment muettes sauf à commenter comme je le fais ici, et restent abonnées aux pieuses litanies. Le (ou les) dogme(s) sont intangibles et fournissent l'explication du vaste monde jusqu'à la fin des temps. Pourquoi se fatiguer puisque tout finira au Jugement Dernier et que par construction "nous" serons parmi les Justes !
La seule chapelle ayant développé une plateforme politique est l'Alliance royale ; les autres "réfléchissent". Que nous dit la plateforme d'actuel ? rien ! Sa cohérence pourrait souffrir sans doute d'une mise à jour précipitée - ce n'est pas facile de bâtir une plateforme politique qui tienne la route - mais la seule innovation est un éditorial (n°727) sur le plan Paulson du mois dernier.
L'analyse est intéressante et fouillée, le libéralisme échevelé dénoncé avec de vrais arguments, mais la conclusion n'en est pas une : on fait quoi ?
La voici :
« La responsabilité individuelle ne peut exister qu’avec la pleine maîtrise de son destin. Lorsque les finalités sont correctement alignées, les responsabilités individuelle et sociale se complètent et trouvent à s’exprimer dans la liberté d’agir et d’entreprendre pour la prospérité de tous. Les Etudes politiques de l’Alliance Royale ont engagé une réflexion de fond sur ces questions. Quel modèle de société ? Quelles institutions politiques ? L’économie n’est pas la finalité de la politique mais elle en constitue un des piliers essentiels. On ne peut pas aborder la question politique sans s’interroger de la façon la plus profonde sur ce système économique qui domine le monde d’aujourd’hui : l’Ordo Liberalis ».
Si le parti de l'Alliance jette sa gourme pour bifurquer vers l'école de pensée, il quitte le champ politique pour entrer dans celui de la physique sociale. Il y a pléthore de laboratoires d'idées et parmi eux de volumineux think-tanks qui occupent l'espace de l'intelligence politique, économique et sociale. Dans la mouvance royaliste, les "penseurs" sont l'effectif le plus nombreux. Bonne chance quand même, mais il va falloir fournir.
Note (2) :"It's only when the tide goes out that you learn who's been swimming naked."
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