lundi 1 décembre 2008

A chacun son fuseau

pendule à 9 cadransLa crise économique et financière remet les pendules à l'heure. Les pouvoirs réels ne pointaient que rarement l'oreille pour ne fâcher personne en offensant le dogme multilatéraliste disposant que que le moucheron soit écouté comme la mouche, et celle-là comme le cocher piqué ou la grenouille à vent ... jusqu'au boeuf. Les pouvoirs réels reviennent et tendent la main vers le manche. Cinq grands pays sont à la manœuvre chacun de son côté, pas un de plus : Etats-Unis, Japon, Allemagne, Chine et Royaume-Uni...

A tout seigneur ...
Timothy GeithnerLa transition américaine ne handicape pas réellement le gouvernement du pays dès lors que le président sortant est déjà sorti de la vie politique dans l'indifférence générale : au sommet de l'APEC à Lima, il n'a trouvé personne venir lui faire la conversation lors du coffee break. Dur, dur ! Les officiers de pont, Bernanke et Paulson, sans aller jusqu'à prendre leurs ordres de la nouvelle équipe (du moins publiquement), veillent à mettre leurs décisions en ligne avec le plan Obama, parfaitement clair et négocié avec le Congrès majoritairement démocrate qui en publiera les textes exécutoires la veille de l'investiture pour validation présidentielle le 20 janvier prochain.
La dérive keynésienne peut se discuter, mais pas la volonté d'agir massivement et apparemment sans cooordination publique avec les quatre autres économies globalisées (Japon, Allemagne, Chine et dans une moindre mesure le RU). Pourquoi d'ailleurs en faudrait-il parler ?

Le ministre NakagawaLe Japon s'il observe avec crainte l'évolution des deux marchés extérieurs les plus importants pour lui que sont les Etats-Unis et la Chine, sait qu'il est entré en récession pour plusieurs trimestres. Il fait le gros dos, ayant déjà purgé son système de bancassurance de beaucoup d'actifs pourris à la fin de dix ans de stagflation et encore récemment par la faillite de Yamato Life. La Banque du Japon a un taux directeur à 0,30% et n'a plus de marge de manipulation pour aider le Nikkei. Le Japon qui est un exportateur mondial subit la crise économique plutôt que la crise financière et décide d'attendre l'embellie en profitant de la baisse du pétrole. Sur des bases assainies, il surveille la chute des cours des matières et denrées qui va le sauver, et finalement adopte la même position d'attente que l'Allemagne.

le ministre fédéral SteinbrückL'Allemagne joue "sa" partie en solo, excédée par les plans populistes et inefficaces (Steinbrück au Spiegel hier) de qui vous savez. Elle n'écoute pas non plus les appels à concourir de la Commission Barroso qui fait plus figure de pièce rapportée à l'édifice que de pierre d'angle ou de voûte. Berlin montre à chaque occasion que la Chancellerie du R... n'a aucune considération pour le président euro-portugais qui tirait jusqu'ici son autorité du pouvoir de remontrance de ses commissaires et du pouvoir de nuisance de la Cour de Justice. L'heure n'est plus à la bureaucratisation de la crise, mais à l'action !

barrosoRien ne dit que le coeur de métier de la Commission européenne - application des textes, discipline communautaire - ne résiste à une récession de longue durée. L'Angleterre et l'Allemagne ont coupé l'amarre sans proclamation. la France dit vouloir en faire autant, mais elle parle plus qu'elle n'agit, car elle est l'inventeur de Babel. Et non, ce n'est pas Saddam Hussein ! La Commission risque de devenir quelque sorte de grand Bureau de Coordination Réglementaire, dépossédé de l'initiative des lois et règles communes. C'est-à-dire que tout le train d'engrenages serait maintenu mais le moteur primaire serait éteint.
De toute façon la présidence tchèque qui va libérer la réflexion des quatre grands pays, est l'occasion de remettre les choses à plat dans l'imbrication des institutions européennes et nationales. Les royalistes ont-ils construit des propositions applicables à la réforme de l'Union ? Non, les royalistes ont la politique en bloc, tout ou rien. Tellement plus facile de tout rejeter que de réparer ce qui doit l'être ! Cela économise les neurones et évite le piège du dépucelage doctrinal.

le ministre chinois JinOn n'a pas encore parlé de la Chine ce matin. Je ne sais si ce sont ses réserves en devises monstrueuses qui provoque les poussées d'adrénaline mais en quelques jours elle a marqué son périmètre à l'urine de tigre : après avoir sèchement annulé le sommet euro-sarkozien de Lyon prévu pour aujourd'hui, elle vient d'abattre l'espion-pour-rire Wo Weihan, le jour où s'ouvrait la 26° session sino-européenne des droits de l'homme. Manifesterait-elle peu d'empressement à entrer dans l'Union européenne pour oser ainsi bafouer le dogme d'ingérence de M. Kouchner ? Elle refuse les Tables de la loi judéo-chrétiennes, absolument toute complaisance envers le 14° dalaï lama, et se vante de gouverner le moins mal possible un milliard trois cent millions de gens. On peut contester ces attitudes mais, sauf à lui déclarer la guerre (t'écoutes Morin ?), je ne vois pas comment faire dévier la pratique chinoise dans l'exercice sur son propre sol de ses pouvoirs régaliens.

Le concert de klaxons ministériels pour le Tibet avant les Jeux olympiques, la menace de boycott de la cérémonie d'ouverture du président français qui a fait long feu, les compliments du pouvoir au chef tibétain en visite en France transmis oralement par madame Première de France et son ministre des cultes diplomatiques, et pour finir, l'intrépidité du petit reître à rencontrer ces jours-ci le "Diable de Dharamasala" dans la salle à manger de Lech Walesa à Gdank, tout cumulé, ont convaincu les Chinois d'abattre leur jeu d'insultes à peu de frais.
En face d'eux il n'y a plus rien !

le 14° Dalaï Lama avec Mme Bruni-Sarkozy
Cette arrogance chauvine ne m'émeut pas vraiment car elle est contenue au savoir jusqu'où aller trop loin. Par contre, dans les circonstances de crise actuelles et compte tenu de la restriction mentale des Russes à coopérer avec l'Occident, il serait très dangereux pour nous que le pouvoir iranien, allié millénaire de l'empire céleste, s'y mette aussi comme l'âne de la fable.
Quand nous serinons sur ce blogue que la priorité des priorités françaises est de retrouver de la puissance par tous moyens, quelle que soit l'enceinte décisionnelle qui nous la procure, sans préjugé moral, politique ou social, nous croyons être dans l'essentiel ; et nous sommes alarmés.


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